« … Hé... T'es pas le fils de Magda toi ? »

C'est tombé, comme ça. Même pas lourd sur mes lèvres qui ne peuvent pas retenir la moindre info. Faut que ça sorte, dés que l'idée germe. Sans filtre, sans problème.
Un croisement dans le carrefour du centre-ville, Milady sur le dos. Je rentre de mon taf de crieuse de couloirs et la nuit est là depuis un bail. Ça m'a jamais effrayé de sortir quand tout le monde dormait, on adore mystifier les embruns nocturnes alors que le danger peut survenir tout aussi bien la journée. Les monstres attendent pas quand ils ont faim, qu'ils soient sanguinaires ou juste humains.

Ce monstre-là, il peut en effrayer plus d'un par les folklores. Possession, malédiction, destruction de vies jalousées. On en entend de belles et pourtant tout n'est pas vrai. Et moi je me contente de le regarder, longuement, ne grappillant que lui dans l'espace. Pour l'instant, il est le seul qui m'intéresse.
Car les mortels ont fui. C'est l'heure des fantômes.

J'approche, sans crainte, et me confirme mentalement l'information née dans ma bouche comme une épiphanie. Élément soudain, évidence frappante. Cette blondeur fillasse et cet air supérieur à croquer ne peuvent pas me tromper. Ça, et le fait que nous nous sommes déjà croisé une fois à la sortie de l'hôtel, quand sa mère et moi avions terminée une de nos entrevues spéciale. Maître Sarpe a du mordant. Elle a donné ses traits ciselés à son garçon. Enfin, du peu qu'il a vécu. Au moins on peut dire qu'il restera jeune et beau pour l'éternité... C'est déjà pas mal, vraiment.

« Salut mec, t'as l'air un peu paumé nan ? Besoin d'aide ? »

Je lance dans un sourire, la tête inclinée, m'adressant à lui comme je le ferais avec n'importe quel quidam de chair et de sang. J'ai jamais compris ce que ça pouvait bien changer, jusqu'à ce que je réalise que tout le monde n'était pas apte à converser avec les trépassés.

Sa condition ne change pas grand-chose, pour moi. Mais sans doute tout, pour lui. C'est même plus que probable. Alors c'est un peu le moment de prendre des gants, de tenter d'être compatissante même si c'est déjà trop tard pour sa condition. Autant être sympa. Allez, on avance, la main flanquée de gêne qui me grattouille la nuque, jamais trop à l'aise quand je connaissais, ne serait-ce que de vue, la bouille d'un esprit ambulant.

« … Faut dire que t'étais moins... translucide, la dernière fois que j't'ai vu. M'enfin tu m'remets sans doute pas. J'm'appelle Vesper, ou alors Whisper, c'mon blase de médium en fait. »

Prendre des gants, on a dit. Mouais, pas top... Mais bon au moins, j'essaie. Puis de toute façon y'a pas masses de psychics dans le coin alors s'il veut papoter, pas besoin de se vexer pour si peu, hein.
Temps de pause quand j'observe un peu son allure. Elle trahit parfois la cause de la mort mais là, impossible de n'avoir ne serait-ce qu'un soupçon d'indice. Mine froncée, j'arque un sourcil, continuant à le fixer de haut en bas comme s'il se baladait à poil en pleine rue.

« Qu'est-ce qui s'est passé ? »

Allez choupi, confie-toi à Tata Vespy. Ca va l'faire, crois-moi !