"La guerre, c'est comme la chasse,
sauf qu'à la guerre les lapins tirent."
[Charles de Gaulle]

La Guerre est à nos portes.
La prophétie qui a guidé les clans en Irlande est sur le point de se réaliser. Nous avons affûté nos armes, renforcé nos positions, créer des alliances. Nous avons nettoyé le terrain de toutes les menaces qui se sont présentées, gonflées par la voile du bien fondé de nos Visions. Pour autant, nous n'avons pas su décrypter à l'avance les premiers signes.

"Și ceața va mistui lumina..."
Et la Brume dévorera la Lumière...

Tout un quartier est désormais condamné par les effluves fétides d'une entité dont nous ne comprenons pas la provenance. Ni Diurne, ni noctambule, ni même infernale. Les Démons tremblent et s'interrogent sur cette chose qui innocule, corrompt et tue.

"Haosul se va rupe de abdomenul său opac.
Infecția se va răspândi fără a alege o tabără.
Moartea va fi mai dulce decât cea de incubație."
...Le Chaos rompra son abdomen opaque.
L'infection se propagera sans choisir de camp.
La Mort sera plus douce que l'éclosion.

Plusieurs cas ont été répertoriés, conduit manu militari à l'ICV. Les réfugiés d'Eastside font tous le même récit halluciné d'une paire d'yeux jaunes les fixant dans le brouillard, sans ciller. Ceux qui se risque à retourner chez eux, ne reviennent pas. Lorsqu'ils le font, c'est pour mourir empalés sur les barricades, la carcasse gorgée de larves de papillons.

Des Phalènes.

"Când molii zboară în lumina zilei, noaptea nu ne va mai proteja."
Quand les Phalènes voleront en plein jour, la Nuit ne nous protégera plus.

Nous avions toujours soutenu l'idée qu'une concentration anomale de créatures créerait la brèche, et pourtant,  nos purges pour endiguer la proliférations des Fils de la Bête n'ont pas empêché la progression des événements vers l’inéluctable.

La prophétie est sur le point de se réaliser.

"Fiara se va ascunde în dantelă întunecată ale soției sale.
Copiii nopții vor fi orfani.
Copiii zilei vor da naștere Coșmarului."
La Bête se cachera dans la dentelle sombre de son épouse.
Les Enfants de la Nuit seront orphelins.
Les Enfants du Jour accoucheront du Cauchemar...

Nous voilà tous réunis : Le Taureau protecteur, la rusée Renarde, le Serpent stratège et le devin Corbeau. Dernier rempart contre un ennemi inconnu. Le Concile des Premiers Sangs n'a pas eu lieu depuis notre transhumance vers l’Irlande.

Nous avons vu, nous avons su, nous n'avons pas fait ce qu'il fallait.


- Merci à tous d'être venu à cette réunion extraordinaire du Concile. L'heure est grave et nous sommes en état d'urgence. Nul n'ignore ce qu'il s’est passé au port de Tir Nà Nog, il y' a quelques heures. Nos actuels efforts pour enrayer la menace se sont avérés infructueux. Il est temps de changer notre fusil d'épaule, et vite. Ce que les Corb ont prophétisé il y a  quatre ans est en train de se réaliser en ce moment même ! Je vous écoute...

"...Atunci Haosul va fi rege și nimicnicie absolută."
...Alors le Chaos sera roi et le Néant absolu.

Ils sont là.
Nous sommes là.
Quatre animaux à la traque de la Bête, quatre voix réunies autour du même chemin.
Les hautes instances des Sang-Coureurs. Les chasseurs sont sur le pied de guerre, prêts à battre du poing et de la balle.
Les mots des stratèges font lois, il est l'heure de se soulever contre la défaite imposée.

Les yeux perdus dans ceux des siens, Selen arpente les visages ternes et graves de ses proches. Le poids est grand, la menace aussi. C'est sur leurs épaules que reposeront l'avenir, leurs prochaines actions seront cruciales. Et le corbeau ne s'en est jamais autant voulu d'avancer à vide. Censé être guide quand les autres avaient besoin d'éclairage, ses lumières sont tamisées dans du coton épais.

La pierre de lune vacille et sa lueur décroît.

L'oiseau demeure pensif, bras croisés, dos droit. Une posture pour combattre la voûte prématurée de son corps vieillissant. Un coup d'oeil à ses pairs de nouveau, quand Kaelig et Magdalena ont terminé d'exposer leur situation. Il s'attarde quelques secondes sur cette dernière. Ses traits ont encore la marque du deuil. Le vide se lit sur sa détresse palpable. Magdalena se bat à terre, terrassée par la perte récente de son fils Andrei.

L'enterrement est à peine terminé, et la revanche se profile à l'horizon.

Celle d'une mère brisée et d'un clan fragilisé. Mais toujours présents. Plus que jamais.

Le corbeau incline la tête, se pose près d'elle, flatte son épaule acérée d'un geste furtif. Tentative d'empathie sincère. Père lui aussi, il n'y a pas une seconde où il ne craint pas pour la vie de sa fille. Pas une seule.

« Nos devins ont fait leur maximum pour dissiper les brumes, mais il faut croire que depuis que nous sommes ici, nos visions sont aussi entachées par le brouillard. »

Adressé à ses trois comparses, cet aveu le blesse, profondément. Ses propres divinations lui coûtent davantage en énergie qu'à l'accoutumée. Presque forcées, pour tenter de s'imposer clairement. Là où leur relation était douce-amère parfois, il a désespérément besoin d'elles à ce moment-là.

Des doigts calleux frottent sa barbe clairsemée. Elle blanchit à vue d'oeil, à l'instar de ses nuits.

« Du peu que nous en savons... Cette force va continuer de croître. Elle finira par englober toute la ville. Et ne s'arrêtera pas là. Le pays y passera... et le reste suivra. »

La seule certitude qu'il peut annoncer. Rien de bien nouveau, il le craint. Mais ses propres interrogations jaillissent, quand il sait que la seule façon d'endiguer l'ennemi est de le connaître dans le moindre détail.

« … Qu'ont donné les résultats des recherches autour des barricades ?… Et comment l'Institut compte agir face à tout ça ? »

Chaque instant compte et tous ont leur rôle à jouer. Le moment propice aux étoiles pour s'aligner.

Elle les écoute parler, Paula Vulpe, elle les écoute donner les nouvelles qu’elle connait déjà. Elle lève les yeux au ciel à plusieurs reprises.

Ah lala, ces p’tits jeunes. Ils sont tout effarouchés par un peu de brouillard tueur et quelques papillons. Où va le monde… ca lui donnerait presque envie de rire.

Elle observe la jeunesse qui explique qu’elle n’arrive, pas qu’elle a raté, que bouh-hou-hou la vie est difficile. Mouvement de scie circulaire tracer à l’oeil.

-Eh beh, c’est pas brillant…

Paula renifle, Paula se redresse et regarde les gamins un par un.

-On dirait des poulets qui courent sans tête. Ah non! Me regarde pas comme ça, micul vițel. Est-ce que je n’ai pas suggérer d’arrêter les tueries systématiques? Si et que m’as-tu répondu? Hmm. Maintenant, nous en sommes là : un groupe de créatures menées soit disant par la bête, des papillons tueurs…

Elle s’accoude à la table et soupire d’un air déçu.

-De notre coté, les rumeurs vont bons trains en ville. On crie aux fées, au réchauffement climatiques. Clairement șarpe mică, ça ne sera pas si dure de cacher la vérité aux diurnes. Les marginaux, ceux qui viennent parler avec les miens, n’y croient pas. C’est sans compter rumeurs de la ville : apparitions enflammée, mouvements de masses, maisons hantés sans antécédent.

Elle s’écarte doucement de la table.

-Ca n’a rien de glorieux, comme vision,micul corb, il faudrait peut être dépoussiérer tes boules de cristales: il suffit de sortir en ville pour se rendre compte que ça ne fera que s’aggrandir. Cela étant dit ça ressemble beaucoup à quelque chose qui s’amuserait bien.