Quinze ans.. Combien de choses peuvent s'être passé entre temps ? Probablement beaucoup trop. Dans mon cas, il y a s'en est passé énormément. J'ai pris certaines décisions, mais jamais je ne les ai regretté. Sauf peut-être une. Ne pas avoir essayé de le contacter plus tôt. L'orgueil. J'ai laissé l'orgueil et la rancune avoir le meilleur de moi. J'ai refusé de le voir, refusé de ne serait-ce qu'entendre parler de lui et ça, c'était injuste. Il n'avait rien fait de mal, rien ne pouvant justifier une telle haine et pourtant.. Certains diront qu'être jeune a parfois cet effet sur les gens. Jeune et innocent comme qu'on dirait. J'étais jeune et très stupide, ça oui, car même quand la colère et la rancune s'étaient estompées, j'ai laissé l'orgueil m'empêcher de passer par-dessus cet événement. J'ai préféré garder mon égo intact plutôt que d'aller m'excuser de mes agissements et tenter de revenir à la normale. Le fait est que, si la vie avait décidé de suivre son cours normal, j'en serais encore à ce stade. Mais récemment, je me suis ouvert les yeux. La vie m'a forcé à le faire. J'ai réalisé qu'il n'y avait rien de bon à se laisser ronger par le passer. La vie est trop courte pour garder une rancœur envers celui qui était comme un frère pour moi. Je l'avais déjà réalisé un peu avant, la preuve, j'ai longtemps gardé un oeil sur lui, voir ce qu'il devenait.  

Quand j'ai appris qu'il ne me restait plus tant de temps à vivre, la première pensée qui m'est venu en tête était que je devais voir Selen. Je ne sais pas pourquoi, mais j'avais ce besoin et je devais aller lui rendre visite. C'est pour cette raison que je suis ici. J'avais toujours voulu vivre en Irlande, donc en sachant qu'il s'était installé à Tír na nÔg, ma décision s'était rapidement prise, c'est là que je devais aller. Bon, évidement, c'est pas tout de suite que je suis allé le voir. J'ai déménagé là il y a un petit moment, mais j'ai attendu d'être bien placé et mentalement prêt. Le moment venu, je me suis arrangé pour trouver la place qu'il fréquente le plus et puis, cet après midi, avant même que je puisse m'en rendre compte, j'étais en route vers le Moonlight Tattoos. Bien que j'aie eu des années pour y pensé, je n'ai aucune idée de ce que je vais lui dire. Je me suis dit que je trouverais bien quelle belle parole sortir en le voyant. Les paroles du coeur étant toujours priorisées au texte finement sélectionné après tout.

Stationné devant la boutique, je regarde la façade de celle-ci, cherchant à rassembler le peu de courage qui me manque. Ce ne me prend que quelques minutes et je suis enfin sorti de la voiture. Je fais mon chemin jusqu'à la boutique et y entre, laissant mon regard sur promener dans la pièce, captivé par l'environnement. Je m'avance vers le comptoir, interpellant l'employé actuellement derrière celui-ci.

Excusez moi, pourriez-vous demander à Selen de venir me voir quand il aura du temps? Dites lui que c'est Sarto qui le demande. Je serai dehors

Un okay de la part de l'employé et celui-ci disparaît derrière une porte. Je vais donc patienter à l'extérieur, prenant le temps de m'allumer une cigarette alors que je m'assie sur le trottoir. D'un côté, j'espère qu'il va sortir vite, d'un autre, je préfère qu'il prenne son temps. Ce n'est pas dans ma nature d'être aussi stressé pour un truc du genre, mais il semblerait qu'aujourd'hui je sors de mes habitudes. Après, bien des choses ont changé ces derniers temps..

Assis là, laissant la fumé faire son chemin jusqu’aux poumons avant de la souffler vers l’extérieur, il attend dans une patiente impatience. La demande est fait, il est trop tard pour changer d’idée. Bien que ce n’est pas nécessairement l’envie qui lui manque. Loin de lui d’être emplie de regrets et de doutes, mais là, maintenant, il fait abstraction des habitudes. Depuis tout ce temps éloigné à laisser l’orgueil mener la danse. Ce n’est qu’après le coup de la réalité que cet orgueil a été chassé pour laisser la vie le guider jusqu’ici. Il se doit de rattraper le temps qu’il a perdu, de passer au-delà des événements du passé et comprendre que tout n’est pas noir et blanc. Pour cette raison, il ne quittera pas les lieux comme un lâche. Il reste là et attend l’arrivé du corbeau.

Un son de clochette, indicatrice d’une nouvelle présence, Sarto redresse la tête sans pour autant regarder l’être en question. Non, il commence par analyser ce qu’il ressent, ce que l’homme dégage comme émotion. Sarto a besoin de s’en faire une idée avant de lui faire face. Puis probablement aussi d’entendre sa voix. Cette voix toujours aussi calme. Un léger sourire aux lèvres en entendant ce surnom, le brun se lève pour faire face à son interlocuteur.

J’peux pas en dire autant de toi. On dirait presque tu as commencé à refouler.

Étrangement, il ne lui est pas très difficile de se moquer de l’aîné. À croire qu’il est plus à l’aise avec sa présence qu’il ne l’aurait pensé. Surprenant, mais il ne se plaindra probablement pas de se fait. Mal aise et difficulté sont deux choses dont il peut bien se passer. Donc si c’est pour se passer aisément, alors il va accepter ça. Lorsqu’il est invité à rentrer, Laptar jette sa cigarette maintenant fini plus loin, dans la rue avant de rentrer.

J’espère que je ne te dérange pas, parce que si c’est un mauvais moment, je peux totalement repasser.