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 Météroïdes {Marisolgan-19 janv.2021}

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Marisol Laciudad
Marisol Laciudad
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You better run, run, run
'Cause you know I'm coming for you now
You better run, run, run
'Cause you know I'm gonna take you down
I am the nightmare from all of your dreams
You get no mercy, no mercy from me



"Fais rien pour le moment. On doit se parler."
"Ok."

Compte là dessus.
J'éteins mon portable et l'abandonne sur la table. Il ne me sera pas nécessaire. Je serais seule dans cette bataille.

J'ai attendu que Colgan s'endorme pour partir. Il est midi tapante lorsque je sors habillée de la tête aux pieds en noir. Pas une partie de ma peau n'est visible et en cet hiver nuageux, personne ne se se souci de me voir ainsi emmitouflée. Ma destination est simple : le restaurant français dans le centre où Yvain déjeune chaque jour à 12h30 tapante. C'est là qu'il reçoit en plein jour et c'est de là que je le filerais jusqu'à ce que la nuit tombe.
Je prie Mama Tuta de porter mon bras sans faiblir.
Je prie Quilla de me prêter main-forte en tant qu'Ainée.

Ce soir, je tue ou je serais tuée.

***

Tuta tombe enfin et je sens le pouvoir qui est mien crépiter dans mes veines. Landuc se promène en ville avec un nuage de papillons qui le courtisent et personne ne semble s'en effaroucher. A vrai dire, tous ceux qui croisent sa route agissent comme des automates et son passage passe parfaitement inaperçu. Je l'ai clairement vu partir sans régler l'addition ou avoir une conversation avec des militaires en patrouille sans la moindre conséquence. Déconcertant. Il semble évident que sa magie consiste à manipuler les esprits. Si ça n'est que cela, je peux lui faire face. Il n'a aucune prise sur une déesse. Ce qui explique son animosité à mon égard, en plus du mépris pour mon sexe.

Je poursuis ma filature jusqu'à une usine de conserverie qui a dû fermer à cause de la quarantaine. Qui compte-t-il rencontrer dans un endroit pareil ? A pas de velours, je me glisse dans les ombres et suit ses pas.
Une fois que j'aurais l'assurance qu'il est seul, je le bute.
Le voilà qui fait halte au coeur de l'usine, au centre de la chenille de tapis roulants en sommeil. Il sifflote un air guilleret qui me hérisse les nerfs. Ses foutus lépidoptères lui butinent dans la main comme pour le cajoler. Débéctant...Concentrée à l'extrême, je ne vois pas la chose qui me caresse la joue. Frisson d'horreur. Il s'agit d'une des phalènes qui agite ses longues ailes noires sur mon épaule. Je la chasse avec un sursaut de terreur irrationnelle. Lorsque je lève le nez pour voir où se trouve Yvain, je constate avec angoisse qu'il campe en face de moi avec son abominable sourire mielleux. Mon corps agit par reflexe : mes prunelles et mes paumes s'allument d'une radiance bleue et je tente d'attraper ce connard par le col.

Parfum de cendre.

Tout ce que je tiens dans mon poing c'est un papillon qui agonise, brulé vif. Ce que je croyais être Yvain se disperse en nuée de phalènes ténébreuses.

- Marisol, quelle plaisante surprise...fait une voix onctueuse aux inflexions françaises. Yvain, perché sur les hauteurs d'un épais assemblage de tuyaux qui lui sert autant d'écrin que de trône, me contemple avec un insupportable rictus de suffisance.... Bien que, ça n'en soit pas vraiment une, à vrai dire. Avez-vous apprécié la promenade ?
- Comment avez-vous su que je vous suivais ?!
- Ma chère amie, j'ai à disposition plus de paires d'yeux que je n'en saurais compter. J'apprécie la serviabilité des habitants de cette ville...
déclare-t-il en jouant tranquillement avec un de ses suivants ailé.
- Vous... vous les avez asservis ! Mais c'est fini Yvain... Je suis venue pour vous tuer.
- Cela non plus ne me surprend guère.
Il soupire en levant les yeux au ciel. J'espérais que vous seriez un peu moins prévisible. Enfin, ... vous me facilitez la tâche.
- Ah ouais ? Et je peux savoir en quoi ?!
- J'attendais le moment opportun pour vous séparer des vôtres, mais vous êtes toujours fourrée avec vos loups et voilà que vous vous offrez à moi sur un plateau. Sachez que j'apprécie!

Une sueur froide me dévale le dos. Il faut que j'en finisse et vite. Je me déplace à la vitesse de la lumière pour aller le frapper. A quatre pattes ployée sur son corps, je suis prête à l'incendier! "Je ne ferais pas cela si j'étais vous, ma chère." Sa Voix résonne sous mon crâne et me prend au dépourvu.
Comment ? Comment a-t-il fait pour entrer dans ma tête ?
L'air goguenard, il m'examine avec son regard désagréable de sale pervers.

- Regardez autour de vous et constatez vous même....

Je plisse les yeux et risque un coup d'oeil circulaire. Ca et là sortent des ombres, tels de petits rats de conte, une quinzaine d'enfants à l'air hagard. Ils sont en pyjama et leurs prunelles vides rappellent ceux des somnambules. Chacun d'eux tient une arme blanche dont la lame effilée presse sur sa carotide.

- Qu'est-ce que... ?!
- "Ne pas toucher aux enfant" est bien votre crédo, je crois ? Hé bien, je vous présente mes aclla-cuna personnels.
- Ne vous moquez pas de moi !
que je rugis d'une voix caverneuse en brillant comme une étoile en fusion.
- Je n'oserais, divine Ch'aska. Néanmoins, cela ne changera rien au sacrifice sanglant de ces enfants si jamais vous touchez à un seul de mes cheveux.
- Si je vous tue avant, votre influence cessera.
- En êtes vous réellement certaine ?
Il bat des cils et hausse les épaules. Tentons l'expérience, tuez-moi et tentons de voir combien de ces bambins vous parviendrez à empêcher de se trancher la gorge. Un, peut-être deux... Mais pas tous. Il baisse la voix et souffle, fielleusement. Rappelez-vous de Charlyne et d'Eliott, rappelez-vous de ces deux petites vies fauchées trop tôt... Elles pèsent toujours sur votre conscience, n'est-ce pas ? Etes vous prête à ajouter le nom d'une de ces petites têtes blonde à cette liste ?

Les gosses braquent leur regard sur nous. Certaines lames cisaillent déjà la chair tendre de leur cou et perle de sang. Effrayée, impuissante, mes lumières s'éteignent.
Je suis vaincue.
Mes actes auront été vains jusqu'au bout.

***

Allongée sur le sol, je contemple le plafond, incapable de bouger. Des larmes inopportunes me brouillent la vue. J'ai froid et chaud en même temps. Je ne dois plus en avoir pour bien longtemps. Voilà un moment que je me vide de mon sang dans la poussière.

"Nous allons jouer au jeu de la pelote d'épingles les enfants !"
Leurs petites mains potelées ont brandi chacun leur couteau, sous l'oeillade paternelle de leur marionnettiste. Un à un, ils ont planté leur lame dans ma carcasse offerte à leur jeu.
"Faites-moi une jolie ronde, mes agneaux, oui comme ça c'est parfait. Si jamais la pelotte bouge, si jamais elle se transforme en luciole bleue, vous devrez vous trancher la gorge, c'est bien compris ?"
"Oui, Monsieur Yvain" ont gazouillé en chœur les chérubins.


Debout, en cercle autour de mon futur cadavre, c'es pourtant encore moi qui tient leurs vies dans le creux de ma main.
Pardon Bertus, je pars plus tôt que prévu.
Je t'aime, Colgan, promets-moi... Promets-moi....

Mes pensées perdent en cohérence.
Mes yeux se ferment.
Tuta m'enveloppe de son obscurité rassurante.
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Colgan Murtagh
Colgan Murtagh
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What have you done?
What have you done?

The sun is gone
What have you done?

The universe shifted and all I loved is lost
All I loved is lost


Quelque chose ne va pas.
Il le sent.

Est-ce son baiser qui lui parait trop détaché ? Son regard qui semble trop vide ?

Quelque chose ne va pas.
Il le voit.

Alors il l’observe mais son corps ne suit pas sa tête et a besoin de repos.

Il accepte le bain qui dénoue ses muscles mais son cerveau tourne à plein régime, cherche une solution. La discussion de tout à l’heure n’est pas finie, il n’a rien décidé pour le plan de Bertus et s’il est tenté de dire oui, il sait aussi qu’il va falloir trouver autre chose pour les mettre tous à l’abri.
Mais la fatigue n’aide pas ses neurones fatigués.
Il se réveille en sursaut dans l’eau froide, le corps fripé, une sensation d’urgence au creux du ventre. Il sort rapidement et vérifie l’heure.

15h50

Il tend l’oreille mais seul le son de la télévision lui parvient. Des vêtements enfilés à la va-vite, il arpente les quelques mètres carrés de leur appartement en appelant Marisol. Rien…elle n’est plus là. En pleine journée…ce n’est que lors de son deuxième passage qu’il remarque un détail incongru.
Son téléphone éteint sur la table.
Cette fois, tous ses signaux d’alarme sont au rouge.
Jamais elle ne part sans son téléphone. Jamais elle ne l’aurait oublié alors qu’il trône en évidence sur le bois. Jamais elle ne serait partie sans lui dire où.

Il tente de le rallumer mais elle a changé son code. Il jure, fais les cent pas, réfléchi, tente de se raisonner. Mais aucun argument sensé ne fait le poids face à l’angoisse sourde qui grimpe et enfle.
Il sort son propre téléphone et compose le deuxième numéro dans sa liste de contact.
- Malone, j’ai besoin que t’active tous nos contacts. Je veux savoir où est Marisol. Non…oui… il passe une main dans ses cheveux humides…j’en sais rien encore. Mais je sens qu’y un truc. Merci Malone.
Il attrape sa veste, ses clés et ses papiers et ouvre la porte pour trouver un grand énergumène couvert de vêtements de la tête au pied et qui est équipé d’un parapluie noir replié. Colgan le reconnait avant même que l’inconnu ne retire la cagoule qui lui recouvre le visage. Il se crispe et lance d’une voix tendue.
- J’ai pas le temps pour ton blabla Suceur de …
- Dis moi que Marisol est là ! le coupe-t-il avec urgence.
Ce n’est qu’à cet instant que le Loup constate combien il semble angoissé, ce qui ne fait qu’ajouter à sa propre nervosité.
- Merde il se passe quoi ? Entre…
Il se décale et le vampire ne se fait pas prier. Ses grands pas l’amène directement vers le salon, cuisine et remarque le téléphone abandonné.
- Rahat ! Elle est où ?
Colgan le rejoint.
- C’est aussi ce que j’aimerais savoir… grince-t-il, poings et mâchoires serrés. Qu’est-ce que tu sais Bertus ? Qu’est ce que tu fous là ?
Sans un mot, il lui montre le dernier message de Marisol et le monde déjà fragile de Colgan s’effondre. Il recule, sonné et s’écroule sur le canapé, le portable toujours en main.
- Non…
- Tu sais qu’elle en est capable. Elle était désespérée ! Elle croyait qu'elle était en train de te perdre ! Maintenant, s’agit de se bouger les miches !
- Non…non…
Bertus s’agenouille devant le loup et le secoue rudement par les épaules.
- Putain de merde, Col’ ! T’as pas intérêt à lâcher maintenant ! On doit la retrouver !
La colère froide bouillonne, change, s’embrasse. Contre lui !
Quel foutu connard ! Il sait exactement pourquoi elle fait ça ! C’est de sa faute…ce matin, il a bien saisi, senti que quelque chose n’allait pas. A force de la repousser, elle a pris la décision la plus désespérée possible.  

Il va la perdre elle aussi…
Il refuse de la perdre elle aussi…
Plutôt crevé.


Il lâche le téléphone, regarde ses mains…
- Qu’est-ce que j’ai fait…
Un coup de poing d’une force prodigieuse le coupe dans ses pensées et le fait basculer sur le côté. Le visage déformé par la colère, Bertus s’est redressé de toute sa taille et le toise.
- J’ai dit…pas le temps pour ça…tu t’autoflagelleras plus tard, espèce d’abruti fini ! Faut AGIR ! Je te réglerai ton compte après !

Colgan se secoue et s’active soudain comme s’il venait d’être éjecté du canapé par un ressort. Son corps épuisé ne fonctionne plus qu’à l’adrénaline et l’angoisse.
Il a raison. Agir, il doit agir. Tout n’est pas perdu mais pour ça il va falloir qu’il se bouge !
Il attrape à nouveau son portable et le coince entre son épaule et sa joue pendant qu’il déplie une énorme carte de la ville.

- Malone c’est encore moi. Changement de cible. Je veux savoir où se trouvent Marisol et Yvain. Quadrille la ville. Retrouve-les-moi.

Pendant qu’il organise la mise en place de sa meute dans la ville et note les secteurs de chaque loup et leur position sur le papier, Bertus active ses propres contacts et prévient Simone. Colgan raccroche et enfile sa veste.

- J’ai dit à Malone que c’est toi qui gères le reste de l’organisation d’ici. Les gars d’appelleront toi aux moindres soucis ou info.
- Quoi ? Tu déconnes ! Je reste pas là à me ronger les sangs !
- Il fait encore jour, idiot. Tu nous serviras à rien pour le moment dehors. Reste là. C’est là que tu seras le plus utile pour le moment.
- Mais… fais chier…
Le vampire sait qu’il a raison. Les deux hommes échangent un regard ou ils peuvent chacun lire le pire des scénarios. Pourtant ils affichent tout deux une mine déterminée et concentrée.
- Retrouve-là, ordonne le roumain.
- C’est ça ou je reviendrais pas.
- Je sais. Tu vas y arriver, affirme-t-il avec une conviction qui fait vibrer sa voix.
Colgan hoche la tête et sort de l’appartement sans un regard en arrière.  

Le reste de la fin d’après-midi s’écoule bien trop rapidement à ses yeux. Il sait que Marisol attendra la nuit pour frapper et il sent qu’il laisse s’échapper le peu de temps qui lui reste avant l’issue inéluctable. Il aimerait croire qu’elle puisse faire face à Yvain mais la peur et le doute lui souffle le contraire. Il passe des heures à renifler la ville, le moindre centimètre carré en commençant par le centre-ville. Il sait qu’Yvain y a ses habitudes. Mais la pluie contrarie ses plans et il perd rapidement leurs pistes. Les trombes d’eau brouillent ses perceptions. Il finit par retrouver une trace à la tombée de la nuit au moment où Bertus l’appelle. Le vampire ne s’embarrasse pas de préambule.

- Shareen a eu une info. Marisol a été aperçue près de l’entrepôt Smithwick's…
Pas loin de là où il se trouve.
- J’y vais, je suis à cinq minutes. Préviens la meute qu’ils me rejoignent tous. Maintenant.
- N’y vas pas seul, couillon de… !
Colgan coupe la communication et se met à courir comme il n’a jamais couru de sa vie.

Si son étoile meurt ce soir, alors il aura vraiment tout perdu, alors il n’aura plus qu’aucune raison de continuer.

*****

Malgré la pluie, il la sent aussitôt.
L’odeur métallique et forte du sang assaille son odorat sensible et il se fige un instant sur le seuil, à peine essoufflé par sa course.
Il doit rentrer.
Il doit savoir.
Il doit l’aider.


Car il refuse d’envisager le pire.
Il sent plusieurs autres présences et se tend, prêt à se transformer à la moindre menace. Sa progression dans le hangar encombré est rapide et il se fige devant le spectacle qui l’attend.
Des enfants en cercle, couteaux sanglants à la main.
Un corps étendu et immobile en leur centre.
Un corps étendu…

Il se précipite sans plus réfléchir.
Si Yvain l’attend ?
Rien à foutre.
Si c’est un piège ?
Rien à foutre !

Il passe entre les enfants sans même leur prêter attention, il croit deviner ce qui s’est passé. Il tombe à genoux et regarde, impuissant, les nombreuses blessures qui ont perforé sa peau. Ses doigts tentent de faire pression sur les plus sanglantes, sachant pertinemment que tout cela est vain. Ses mains se tâchent de carmin et tremblent. Elles dégagent son visage des longues mèches empoissées, puis il la serre dans ses bras avec une grande délicatesse.

- Marisol… ?
Déjà l’appel est désespéré. Il répète son prénom, encore et encore, jusqu’à le hurler. Puis viennent les supplications chuchotées.
- Ne me laisse pas… s’il te plait ne m’abandonne pas mon étoile… s’il te plait… je ferrai tout ce que tu voudras !

Il pleure à chaudes larmes, mélangeant l’eau salé au sang sous les yeux impassibles des enfants qui ne bougent pas.
Les souvenirs de la mort de Charly et Eliott remontent, menacent de l’emporter. Un instant il envisage de récupérer un couteau et de partir avec elle. Mais il sent encore la vie pulser, son cœur battre faiblement, si faiblement.
Le visage ravagé par le chagrin de Colgan se crispe de détermination. Non cette fois, il refuse d’attendre la mort, impuissant. Il embrasse son visage déjà exsangue et aussi pâle que Bertus. Le vampire doit déjà être en route…

- Je te laisserai pas partir, Marisol ! T’entends ? murmure-t-il avec affection. Sans toi…je suis perdu…
Serrant toujours son corps contre le sien, il se redresse, prêt à la protéger d’une nouvelle attaque si les lames frémissent.

Il la sauvera.
Et s’il n’y arrive pas, il lui restera une dernière carte…
Bertus…
Le vampire…



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Marisol Laciudad
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L'après-midi est chaude, délicieuse. Une brise légère s'engouffre par la fenêtre de la chambre. Au dehors, les rires des enfant tintinnabulent comme des grelots. Une musique de paradis. Elle reste alanguie dans les draps froissés qui hument bon la lessive fraiche et le parfum de son homme. Elle reste les yeux fermés.

- Marisol...

Elle ronronne comme une chatte, en sentant sa présence caressante contre elle. Elle glousse au contact de ses mains rugueuses qui lui chatouillent la peau.

- Marisol ! T’entends ?

Un peu, juste encore un peu. Elle a tellement sommeil.

- Sans toi…je suis perdu…

Mais non, voyons, elle est là. Juste là.
Elle se pelotonne dans sa chaleur rassurante de loup pour lui signifier. Elle est si fatiguée.

***

Le van noir se gare à la diable sur le parking devant l'usine. La portière latérale s'ouvre déversant plusieurs silhouettes sombres. Simone donne ses directives à Eustache, Hippolyte et Ygerne. Un jeune homme au nez proéminent et au regard inquiet se dandine à ses côtés. Il ne semble pas comprendre où il est. La moto de Bertus déboule et fait crisser ses freins à peu près au même moment. Le groupe entre dans le bâtiment après sécurisation des entrées.

- Simone, fait le grand échalas au grand yeux bleus. Qu'est-ce qu'on fait là...?
- Je suis désolée Nathan, nous sommes un peu pressé par le t....


Madame ne finit pas sa phrase. Le spectacle qui s'offre sous leur yeux est d'un macabre abominable. Une farandole funèbre d'enfants tenant des couteaux ensanglantés entourent un couple d'adultes  que Nathan ne connait pas. La femme s'est vidée de son sang et il serait miraculeux qu'elle soit encore en vie. L'homme roux est la personnification même de la tragédie, le visage ruisselant de larmes, le regard brulant de colère et d'incompréhension.
Pendant un temps qui parait infini, le monde se fige. Le silence règne.
Brunelle est fortement ébranlée par cette vision d'horreur mais on oreille de maritin distingue, au delà de la pluie qui percute la verrière du toit, un son infime. Une musique presque inaudible.

- Elle... Elle en vie.... murmure-t-il.

Simone se tourne vivement vers lui.

- Tu es certain de ce que tu avances ?
- Je.. Je oui, ... j'ai entendu  son coeur....
- Nathan,
fait la vampire avec une gravité terrible. Tu vas la soigner.
- Quoi ?! Non! Je.. je ne suis pas capable, je... Il faut appeler Salomon ou Amon !
- NATHAN !
coupe-t-elle. Je n'ai que toi de disponible....S'il te plait...

Le jeune homme déglutit. Il n'a jamais vu Simone supplier. Il pose son sac en tremblant et avance vers le couple, dépassant Eustache et et Ygerne qui désarment doucement les enfants. Leurs prunelles fixes rappellent celles des poupées de porcelaine. Un grand blond essaie déjà de parler au pauvre homme qui s'accroche au corp de sa compagne. Nathan s'agenouille auprès de lui, tâchant son pantalon d'hémoglobine. Il ploie sa longiligne silhouette vers le malheureux.

- S'il vous plait... Je vais tenter de la ranimer. Vous... Vous voulez bien me laisser essayer ? demande-t-il d'une voix ténue mais très douce.

Nathan prendre une grande inspiration. Il n'a jamais encore réussi à soigner qui que ce soit avec son eau. Il n'arrive qu'influer sur le sang. Avec une infinie délicatesse, il appose ses mains sur le torse de la mourante. Il tâte son plexus, cherche la connexion. Là, c'est quasi imperceptible.

Tatouages qui dansent sur la peau.
Globes oculaires qui se gorgent d'eau.
Coeur qui bat, mollement.
Respiration éteinte ou presque.
Colmater les brèches,
D'un navire qui prend l'eau
De l'intérieur.
Iriguer les canaux,
Remettre à flots
Flux. Reflux.
Artificiel métronome,
d'une vie réintroduite petit à petit.


La flaque dans la quelle baignait Marisol frémit, puis, effectue le chemin inverse, remontant le courant vers les plaies  toujours ouvertes. De multiples écritures en langues diverses impriment le derme de Nathan d'une encre d'un bleu soutenu. Ses yeux, semblables à deux lac miniatures miroitent intensément. Il est évident qu'il fait un effort colossal pour maintenir à la fois le cœur en état de marche et la connexion avec tous les fluides de ce corps malmenée.
C'est là, qu'il le découvre.
La surprise manque de le faire vaciller, de ralentir le rythme cardiaque de la blessée, mais il se rattrape de justesse. Il n'a doublement plus le droit à l'erreur. Eustache c'est approché de lui. En tant qu'Effrit il n'est d'aucun secours pour Marisol, mais il encourage l'élève d'Amon.

- Bien.. Tu t'en sors très bien. Il faut cicatriser à présent.
- Je.. Je sais.


Le jeune homme se remémore les leçons d'Enyo, son approche mathématique du pouvoir, et il commence à marmonner des équations et des théorèmes sur tout ce qu'il sait sur la capacité de régénération du corps humain. Des élucubration insensées pour ceux qui écoutent, des marmonnements de chiffres indistincts. Pourtant, les résultats sont là. Au prix d'un lourd effort et d'une vingtaine de minutes d'exténuante application, Nathan Brunelle guérit sous tout premier sujet. Il s'affaisse sur lui même essoufflé et en nage, une fois le travail terminé.

- J'ai réussi..., murmure-t-il incrédule. J'ai réussi!

Il en pleurerait presque. Eustache lui sert les épaules avec effusions. Simone pousse un soupir de soulagement alors qu'elle n'a pourtant plus de poumons. La tension se relâche brutalement. Encore tout secoué de son exploit, Nathan se tourne vers l'homme roux.

- Elle est en vie et votre bébé aussi... Il a un sourire épuisé mais radieux.
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Colgan Murtagh
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Colgan perçoit du mouvement au-dehors et ses instincts primaires lui font retrousser les lèvres sur ses dents, près à attaquer si quelqu’un les menace. Il la serre plus fort, baise le haut de son crâne comme s’il avait le pouvoir de la retenir sur cette Terre par la simple force de ses bras, la volonté de son âme. En quelques minutes il sent la présence de Bertus à ses côtés
Celui-ci pose sa main sur l’épaule du loup qui a un brusque mouvement de recul, refusant qu’on lui arrache Marisol.

- Col’…il faut que tu la lâche.
Le vampire a la voix horriblement enrouée.  
- Bertus… tu dois m’aider.
- Je suis là pour ça. Mais pour le moment…
- Il faut que tu lui donnes ton sang ! ordonne-t-il désespéré.
Le vampire le contemple un instant avec une expression de pitié mêlée d’urgence. Son regard descend sur la jeune femme d’une pâleur mortelle.
- Elle vit encore Colgan. Laisse-nous t’aider à la sauver avant d’envisager quelque chose d’aussi extrême tu veux ?  
- S'il vous plait... Je vais tenter de la ranimer. Vous... Vous voulez bien me laisser essayer ?

Colgan lève le nez vers le tout jeune homme qui vient de s’adresser à lui à genoux dans le sang de Marisol. Il semble à peine être sortie de l’adolescence et avoir grandit bien trop vite. Il ne dégage aucune forme d’assurance mais une détermination certaine. Plus loin, il croise le regard de Simone et ses doigts se crispent sur le corps de Marisol qu’il serre toujours étroitement.

- Laisse-le t’aider. Si Simone lui fait confiance, je lui fais confiance.

Alors lentement Colgan desserre son étreinte, et s’éloigne suffisamment de Marisol pour que le jeune homme, Nathan a-t-il entendu, puisse poser ses mains sur son corps à peine vivant. Bertus a pris la main de la jeune femme dans la sienne pendant que Colgan caresse amoureusement son visage. Il lui murmure de s’accrocher, prêtant à peine attention à ce que fais le jeune homme. Ce n’est que lorsque que le sang de Marisol se met à couler vers ses blessures qu’il le regarde avec une attention redoublée. Petit à petit, le liquide reflue et réintègre son corps et aussi incroyable que cela puisse paraitre, ses plaies se referment doucement.

- J'ai réussi... J'ai réussi !

Bertus lui offre une grande claque dans le dos et un large sourire.
- Bien joué, gamin !
Le vampire baise la main de Marisol et revient vers Simone qu’il étreint avant d’embrasser son front.
Colgan, plus sobre, se contente de croise le regard de Nathan qui a l’air fatigué par l’effort mais heureux et fier.
- Merci. Ma meute et moi avons une dette envers toi.  
- Elle est en vie et votre bébé aussi...
Le silence qui suit touche au surnaturel. Même la pluie semble avoir cessé.
- Quoi ? Notre...quoi ? claque soudain la voix de Colgan. Qu’est-ce que tu as dit ?
C’est ce moment que choisit la meute pour infiltrer les lieux Malone en tête. Il semble prendre aussitôt la mesure de la situation comme les autres Loups et sont aussitôt sur la défensive.
- Tout va bien, leur assure Colgan qui laisse Bertus et Malone discuter.
Les yeux de l’Alpha reviennent vers la jeune femme qu’il tient toujours dans ses bras. Un bébé… c’est impossible ! Quoique…ils n’ont pas toujours été prudents…Sa main vient se poser sur le ventre de la jeune femme et ses doigts pressent la peau comme s’ils pouvaient sentir la vie qu’il abrite en son sein.

Un petit être.
Moitié lui, moitié elle.


La panique le saisit suivit une joie brute et féroce, de celle qui ne demande qu’à éclater et qui se manifeste par une fugace expression de bonheur visible sur ses traits tendus et fatigué. Puis vient la peur, une peur comme il n’en a jamais connu. Chaque chose en son temps.
- Pourquoi tu m’as rien dit… chuchote-t-il d’une voix éraillé.
Le savait-elle seulement ? Sans doute pas… sinon elle n’aurait sans doute pas fait ce qu’elle a fait ce soir. Il veut le croire en tout cas.
Doucement il se relève, soulevant Marisol dans ses bras et s’approche de la sortie. Il s’arrête toutefois devant Simone et lui adresse un bref mouvement du menton.
- Merci d’être venue.
- Col’…tu savais ?... pour… ? demande le vampire en faisant un geste vers le ventre de la jeune femme.
- Non, souffle le loup. Je vais la ramener chez nous…
- Ok. Prends soin d’elle cette fois, d’accord ? Elle devrait quand même voir un médecin.
- C’est prévu.

Colgan s’avance vers sa meute avec Marisol et comme un seul homme ils s’approchent tous et posent une main sur la jeune femme ou sur lui dans une sorte de communion étrange, s’assurant qu’aucun lien n’a été brisé ce soir, se rassurant de sentir leur étoile toujours en vie et leur Alpha toujours présent.
- On est tous là, murmure Colgan en croisant le regard de chacun de ses loups. Réunion demain matin. Yvain vient de nous déclarer la guerre. On va devoir réfléchir. Prenez soin de vous cette nuit.

Un jour…un jour il le tuera pour ce qu’il a fait.
Mais pas ce soir…
Ce soir, il va prendre soin d’elle.


La meute se disperse, Shareen et Malone les ramène en voiture. Colgan n’a toujours pas lâché Marisol. Sur la banquette arrière, il sort son portable et appelle le Doc’.
Il n’y a qu’à lui qu’il fasse confiance. Il lui explique brièvement la situation et pour une fois, bénit son manque d’émotivité.
Ce n’est qu’une fois qu’il a raccroché qu’il se permet de se relâcher un peu. Lentement, sa main caresse le visage rougi de Marisol avant de descendre sur son ventre encore bien plat.  
Plus jamais.

Il ne laisserait plus jamais quoique ce soit l’atteindre…les atteindre.
Il le jure devant Quilla.

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Marisol Laciudad
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Nathan est au comble du bonheur. Il a permis non pas à une vie, mais deux d'être sauvées aujourd'hui. Il a fait mentir les prédictions de son père et a hâte de raconter tout ça à Amon et Enyo. La claque de Bertus (Le petit ami de Simone ? Qu'est-ce que c'est que ce bordel ?!!!) le fait presque trébucher. Eustache le rattrape au vol avec un sourire.

- Elle est en vie et votre bébé aussi...
- Quoi ? Notre...quoi ? Qu’est-ce que tu as dit ?
- Vous... Vous ne le saviez pas ?
murmure-t-il étonné. Il a peut-être gaffé. L'embryon dans son liquide amniotique n'était pas bien grand, six semaines peut-être.

Les locaux de la Smithwick's sont investis par une vingtaine d'individus dont un petit brun musculeux à la tignasse longue et bouclée et un femme blonde et pulpeuse qui s'avancent immédiatement vers Colgan. Ygerne se tend, mâchoire serrée et Hippolyte lui retient le poignet discrètement. Une tension règne dans la vaste salle, vite dissipée par Colgan lui-même.

- Tout va bien.

Le moment de crispation passe et s'évapore. Hyppolite et Ygerne conduisent les enfants dans le van. Il n'est pas certain que leurs jeunes cervelles se réveillent un jour de la transe provoquée par Yvain. A travers son voile de fatigue, Nathan observe l'expression du nouveau père et découvre une explosions d'émotions puissantes, jusque là rentrées. Il se fait la réflexion que l'humanité dans son vaste ensemble est pleine de beautés.

- Pourquoi tu m’as rien dit…

Le jeune homme remet machinalement ses gants avant de toucher le bras du loup avec un sourire très doux.

- Le foetus a à peine un mois de ce que j'ai pu sentir. Elle ne le savais peut-être pas. Prenez soin d'elle.... et de vous, lui glisse-t-il avant qu'Eustache ne le relève et l'emmène à son tour.

Colgan emporte Marisol dans ses bras et s'arrête au niveau de Bertus et Simone.

- Merci d’être venue.
- Je vous en prie. C'est normal
, répond la vampire avec un sourire. Je serais là, si vous avez encore besoin de moi.
- Col’…tu savais ?... pour… ?
questionne Bertus.
- Non.
- Souhaitez-vous que nous vous conduisions à l'hôpital ?
propose Madame.
- Je vais la ramener chez nous…
- Entendu.
Simone n'oppose aucune objection. Tenez-moi au courant de son état, si cela ne vous fait rien, et prenez du repos.
- Ok. Prends soin d’elle cette fois, d’accord ? Elle devrait quand même voir un médecin.
- C’est prévu.
- A bientôt, Colgan
, fait Simone avec un sourire bienveillant, tout en prenant la main de Bertus.

Des mesures sont prises et une guerre est déclarée. Les agents de Malsheem rentrent chez eux. La meute se disperse. L'aube se lèvera bientôt.

***


Au seuil de leur appartement miteux du westside, le Docteur Maintenon fait le pied de grue. Le coup de téléphone de Murtagh l'a mis dans tous ses états (très intérieurement). Il a abandonné Theodora en pleine nuit, lui promettant de revenir aussi vite que possible. Il a juré plusieurs fois en ne retrouvant pas immédiatement dans son capharnaüm l'outil qu'il cherchait (Theo et son obsession du classement !). Pourtant, il se tient stoïque, devant la porte, l'échographe portable dans une main, sa mallette de médecin dans l'autre (son sac à dos "Hello Kitty", donc). Il a l'air encore plus hirsute et débraillé que d'ordinaire.
Ebène éprouve un marasme boueux de sentiments qui s'agitent dans les tréfond de son puits d'âme. Dans le trou béant, le goudron cloque et macère : colère, inquiétude, surprise, joie, ressentiment, incompréhension, peur....
Sa fille unique a frôlé la mort.
Sa fille unique est enceinte.
Sa fille unique va faire de lui un grand-père.


Lorsque Colgan parait en haut des escaliers, portant une Marisol toujours évanouie, il plonge son regard noir dans celui du loup-garou.

- Tu vas tout me dire et tu n'omettras rien. Le ton a beau être égal, le visage inexpressif, son "gendre" le connait suffisamment pour savoir qu'il tempête intérieurement.
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Colgan Murtagh
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Grimper les marches est une épreuve en soi.
Il n’a plus de jus, la barre d’énergie à zéro, balayée par le tourbillon d’émotions.
Colgan grimpe néanmoins les marches une à une, sans faiblir, à son rythme, Marisol calée dans ses bras. Evidemment le Doc est déjà là. S’est-il téléporté ? Il ne voit que cette solution pour expliquer qu’il soit déjà là.

- T’as fait vite, commente-t-il sobrement.
- Tu vas tout me dire et tu n'omettras rien.

Colgan devine qu’il est furieux, pourtant Ebène va devoir attendre. Il hoche simplement la tête sans dire un mot. Transvasant le poids de la jeune femme sur un bras, il arrive tant bien que mal à ouvrir le verrou et à pénétrer dans l’appartement. Il se dirige aussitôt vers leur chambre et dépose la jeune femme sur la couverture pour le moment. Se débarrassant simplement de sa veste, il va remplir une bassine d’eau chaude et récupère un gant.
Toujours sans un mot, il laisse le Doc’ faire les premières vérifications sur son état de santé pendant qu’il s’attèle à la tâche de retirer ses vêtements poisseux afin de lui faire une brève toilette pour retirer le maximum de sang. Ses gestes sont doux, emprunts d’une profonde délicatesse tandis que le gant et l’eau se tâchent de rouge.

- Elle est partie ce matin dans l’idée de tuer Yvain, commence-t-il tout en nettoyant son visage. A cause de moi. Tout ça...c'est de ma faute, juge-t-il sans appel sur un ton à l'émotion palpable. Elle…elle était assez désespérée pour se dire que c’était la seule chose à faire. Elle a envoyé un message à Bertus. Sans ça j’aurais même pas su ce qu’elle tramait. On l’a cherchée dès qu’on a su mais…la pluie nous a ralenti. Quand je l’ai retrouvée…elle était en train de mourir…y’avait du sang…beaucoup de sang. Trop… multiples coups de couteaux.
Il marque une pause, essore le gant.
- Yvain s’est servi de gamins, il leur a lavé le cerveau et c’est eux qui…c’est eux qui l’ont poignardée. Elle a pas pu se défendre j’imagine… Bertus a fait appel à Malsheem et il y avait un djinn maritin parmi eux. Il a ramené une partie de son sang dans son corps, a aidé son cœur à battre et a refermé les plaies, m’annonçant au passage qu’il a réussi à les sauver tous les deux…J'en savais rien...ajoute-t-il, le timbre vacillant. Je suis même pas certain qu'elle sait... Je voulais pas qu’elle se réveille à l’hôpital…alors je l’ai ramenée à la maison et je t’ai appelé.
Son nettoyage terminé, il lui enfile un grand tee-shirt à lui et s’assoit au bord du lit, inconscient de son propre état et du sang qui tâche ses propres vêtements. Il prend la main de la jeune femme dans la sienne et lève les yeux vers le Doc’.
- Est-ce qu’elle va vraiment bien ?
Dans un premier temps c’est le plus important, après…après il essayera d’assimiler qu’une autre petite vie se cache en elle.
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Marisol Laciudad
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Le bon docteur constate que le couple est couvert d'hémoglobine de la tête aux pieds. Marisol est toujours inconsciente, Colgan a des cernes a faire peur. Le loup-garou lui tient un discours incohérent et difficile à comprendre quand on a aucune clé quant à leurs magouilles. Cependant, Maintenon ne l'interrompt pas. Il enregistre les informations décousues qui pourraient lui permettre de mieux faire son diagnostic.

- Je ne sais pas qui sont Yvain et Bertus. Malsheem, en revanche, m'évoque une vieille légende urbaine. Quoi qu'il en soit, vu vos activités, je m'attendais à ce que ce genre d'éventualités arrive un jour.

Ebène pousse un soupir tout en effectuant les gestes d'un praticien chevronné. Il prend sa tension, écoute les battements de son coeur, sa respiration, ausculte les différentes traces roses et boursoufflées, témoins silencieux de son agression.

- Il y avait un djinn maritin parmi eux. Il a ramené une partie de son sang dans son corps, a aidé son cœur à battre et a refermé les plaies, m’annonçant au passage qu’il a réussi à les sauver tous les deux…J'en savais rien... Je suis même pas certain qu'elle sait... Je voulais pas qu’elle se réveille à l’hôpital…alors je l’ai ramenée à la maison et je t’ai appelé.
- Tu as bien fait
, déclare son beau-père toujours concentré sur sa fille. Je ne suis pas spécialiste de la médecine élémentaire maritine. C'est en général un savoir peu accessible au commun des mortels. Elle semble effectivement avoir cicatrisé, cependant, sa tension est extrêmement basse. De plus, elle a des symptômes de bradycardies. Son coeur bat trop lentement pour pomper correctement et irriguer le corps. Ce qui explique qu'elle ne se soit pas encore réveillée. Je pense aussi qu'elle a perdu beaucoup de sang et que celui qu'elle a récupéré n'a pas suffi à la ranimer.

Il se tourne lentement vers Colgan.

- Voilà ce que l'on va faire. Je vais lui faire une transfusion sanguine- par chance nous sommes du même groupe - et je vais rester auprès d'elle pour observer l'évolution de son rythme cardiaque. Toi, tu vas prendre une douche, un décontractant musculaire et tu vas me faire le plaisir de dormir.... et oui, tu peux dormir auprès d'elle. Demain, on avisera de la marche à suivre. Je préférerais que les deux parents soient conscients et en forme quand je pratiquerais l'échographie.

Se faisant, et comme si de rien n'était , il sort son matériel de transfusion de son sac hello Kitty et met en place la perfusion. Il s'interrompt pour contempler Colgan.

- Hé bien, t'attends quoi ?.... Ah, et si tu peux me trouver un fauteuil assez confortable pour que je puisse m'asseoir... Ce serait parfait. lâche-t-il avec un vague sourire en coin.
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Colgan Murtagh
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- Je ne sais pas qui sont Yvain et Bertus. Malsheem, en revanche, m'évoque une vieille légende urbaine.
- Pas la force de tout reprendre à zéro. T’as demandé des détails…pas de la clarté…assène-t-il avec un petit sourire.
- Quoi qu'il en soit, vu vos activités, je m'attendais à ce que ce genre d'éventualités arrive un jour.

Vraiment ? S’attendait-il à ce que Marisol se sacrifie pour le bien de la Meute ? Lui ne l’a jamais envisagé. Dans tous les scénarios imaginés, ils finissaient toujours côte à côte. Quoi qu’il advienne…
Il regarde intensément la jeune femme, enregistre chaque détail de son état.

« Regarde. Regarde bien. Tout ça c’est ton œuvre. Tout ça c’est ta faute. »

Son visage se chiffonne comme s’il allait éclater en sanglots mais des années de maitrise de ses émotions lui permet de ravaler son chagrin et de poursuivre son exposé.

- Tu as bien fait, conclue le Doc’.
S’en suit un résumé de l’état de Marisol qui ne semble pas alarmant mais tout de même préoccupant et Colgan agrippe sa main plus fermement.

- Voilà ce que l'on va faire. Je vais lui faire une transfusion sanguine- par chance nous sommes du même groupe - et je vais rester auprès d'elle pour observer l'évolution de son rythme cardiaque. Toi, tu vas prendre une douche, un décontractant musculaire et tu vas me faire le plaisir de dormir...
Colgan ouvre la bouche pour protester mais se fait aussitôt couper par son beau-père.
- Et oui, tu peux dormir auprès d'elle.
- Merci de faire les questions et les réponses. Ca m’évite le gaspillage de salive. Mais je t’aurais pas laisser me foutre en dehors du lit ce soir, Doc.
Il est donc si prévisible que cela… Ou Ebène commence à bien le connaitre. Il acquiesce toutefois à son plan. Il a effectivement besoin de repos. Et il ne pourra dormir que s’il sait Marisol entre de bonnes mains.
Elle le sera.
- Demain, on avisera de la marche à suivre. Je préférerais que les deux parents soient conscients et en forme quand je pratiquerais l'échographie.

L’échographie… Les yeux de Colgan se fixent sur le ventre de Marisol et encore une fois un flot d’émotions qu’il croyait morts à jamais le submerge. Faire naitre un enfant dans ce monde si proche de l’Apocalypse est profondément inconscient et égoïste et pourtant…il savoure quelques secondes cette possibilité. Jamais il n’aurait sciemment cherché à avoir un enfant aujourd’hui. Mais il est là. Petite vie fragile née…de quoi ?
Il est brusquement arraché de ses rêveries par le Doc’

- Hé bien, t'attends quoi ?....
- Euh oui… j’y vais.
Il se lève comme un robot rouillé de partout.
- Ah, et si tu peux me trouver un fauteuil assez confortable pour que je puisse m'asseoir... Ce serait parfait…
- Ouais un fauteuil…

Colgan se secoue et lui amène un siège confortable du salon, luttant un peu pour le faire passer par la porte. Après une douche brève mais revigorante, il revient vers la chambre ou la transfusion est déjà en cours. Le Loup cale un cousin dans le dos du Doc’ et dépose une bouteille d’eau devant lui.

- Tu vas y passer un moment, autant que ça soit confortable, non ? Il vrille ses yeux dans les siens. N’en fais pas trop d’accord. J’aime autant que tu clamses pas dans notre chambre et que Marisol ne se réveille pas devant ton cadavre. Préviens Theo…qu’elle t’attendes pas… et réveille moi si y’a le moindre soucis.

Il s’installe ensuite avec soulagement aux côtés de Marisol.
Comme il se doit.
Lentement, comme s’il n’est plus certain d’en avoir le droit, il s’approche au plus près et pose une main protectrice sur son ventre.
Demain ils devront discuter.
Demain peut-être qu’ils ne le garderont pas.
Mais ce soir il se prend à croire qu’il pourrait un jour être à nouveau un père, rassurant, protecteur et aimant.
Doux rêve.
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Marisol Laciudad
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We're lying face to face
You're frozen in your sleep
And I'm hardly breathing
Impress me with your silence
I'm hanging on your eyelids
As we softly stir the violence


Mon corps est lourd. La pesanteur m'écrase, me rappelant que je ne suis plus accrochée aux bras rassurant de Tuta. Je suis l'étoile déchue, une création punie comme les Premiers Hommes de Wira Qocha, changée en pierre pour mes fautes.
Pourtant, dans ces ténèbres absolues, sur cette terre qui ne veut de moi, je sens la chaleur d'une présence familière. Son musc fauve attise un sentiment de plénitude que l'on ne ressent que lorsque l'on est chez soi, dans le cocon familier du foyer. Je remue, imperceptiblement, tente de me rapprocher de cette source de bien être dans l'obscurité.
Mes paupières papillonnent, comme encroutée de sable. Au travers mes cils, je perçois confusément de la lumière et des couleurs aqueuses. Tout cet or rougeoyant...Est-ce le feu d'un campement de berger ? J'essaie de bouger. L'acte m'est extraordinairement difficile. J'ai perdu toute ma légèreté astrale et le sol ne cesse de me rappeler que je lui appartiens.

Ma vision se précise.
Une chevelure rousse.
Une peau pâle et mouchetée.
Une respiration régulière et paisible.


Colgan

Maladroitement, je caresse le visage de l'être aimé. Il est si beau, les traits relâchés dans l'abandon  du sommeil. Il me tient tout contre lui, avec une possessivité qui me réconforte. J'ai l'esprit brumeux et les idées ensuquées. Les images qui me traversent paraissent comme de lointains cauchemars. Ou bien suis-je en train de rêver...
Maladroitement, je viens caresser ce tendre visage assoupi. La pulpe de mes doigts rencontre le piquant de son poil. Il est réel. Tout ceci est réel. Je continue de frôler amoureusement l'arrête de son nez  tandis qu'un sourire s'esquisse à la commissure de mes lèvres.

Je suis en vie.
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Colgan Murtagh
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Les réveils furent nombreux durant la nuit. Il a été tiré du sommeil plusieurs fois en sursaut, le cœur battant, l’angoisse au ventre, des images de Marisol agonisante plein la tête. Ce n’est qu’en voyant son étoile en sécurité dans ses bras qu’il a pu à nouveau s’endormir.
Parfois le doc est encore là. Parfois non.
Il n’en aucune idée du temps qui passe, il reste simplement allongé à ses côtés, attendant son réveil, se laissant glisser vers un repos nécessaire de temps à autre.

Ce sont de tendres et légères caresses sur son visage qui le sortent de son énième sommeil. Ses paupières papillonnent puis s’ouvrent subitement en grand. Ses yeux croisent le regard de Marisol, contemple son sourire si doux après tout ce qu’il a vu cette nuit. Une boule d’épines coincée dans la gorge, il se demande un instant s’il n’est pas en train de rêver.

Elle est si belle.
Elle est si vivante.
Elle est sauvée.


Il n’y a plus rien d’autre qui compte à cet instant.
Colgan savoure ce moment simple, ce réveil tout en douceur. Il ne souhaite pas revenir pleinement à la réalité encore douloureuse et qui va amener des discussions plus ou moins agréables. Ses propres doigts viennent courir sur sa joue, y cherchent ce petit creux qu’il adore par-dessus tout et finit par l’englober dans sa paume.  
Son visage s’approche doucement de celui de Marisol et les yeux toujours dans les siens, il vient chercher ses lèvres avec une retenue presque timide, peu certain de sa réaction.
Il puise dans ce baiser un soulagement extrême qui brouille un instant sa vision.
- J’ai cru que je t’avais perdu, souffle-t-il, le timbre brisé. Refais plus jamais ça…
Cette fois l’étreinte est plus soutenue lorsqu’il vient se pencher sur elle, déposant une pluie de baisers fervents sur ses lèvres, ses joues et l’ensemble de son visage. Il recule finalement, les yeux toujours humides et l’observe avec attention.
- Comment tu te sens ?
Dressé sur un coude, il prend finalement une longue inspiration et pose la question qui le hante, quand bien même il est presque certain de la réponse.
- Marisol…pourquoi t’as fait ça ?
Il a besoin de l’entendre de sa bouche. Il a besoin qu’elle le mette face à ses erreurs.
Il ne veut pas y échapper, ne veut pas s’en détourner comme il le fait avec le deuil de ses enfants.
Cette fois les choses sont allées trop loin, et tourner le dos à ce qui s’est passé hier ne fera que renforcer la probabilité qu’elles se reproduisent.  

Or il le sait maintenant.
Sans elle, son monde s’effondre.

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Marisol Laciudad
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Pendant un instant, il n'y a que nous et un univers de douceur. Les prunelles vibrantes de tendresse, je contemple Colgan qui se laisse aller à des émotions sans filtre. Je me noie dans son regard sans penser à respirer. Il est mon oxygène et mes poumons. De sa bouche, je reçois la bénédiction : un baiser qui me rappelle ce que nous fûmes autrefois et qui m'ancre à l'instant présent.

- J’ai cru que je t’avais perdu.... Refais plus jamais ça…

Je déglutis, en hochant la tête, étreinte par une profonde émotion. Mes cils sont de nouveau humides. Ma gorge est si serrée que je ne parviens même pas à articuler une excuse. Colgan m'en dispense, ses lèvres me couvrant d'amour. J'ai juste la force de poser ma paume à l'angle de sa mâchoire et de souligner du pouce ses cernes usées.

- Comment tu te sens ?
- Comme une enclume... ? J'ai l'impression d'être lestée avec des parpaings.


Je suis en vie et c'est un miracle que je ne m'explique pas. Je ne sens aucun bandage sur ma poitrine, ni aucune suture me criblant la couenne.

- Marisol…pourquoi t’as fait ça ?

Le regard que me lance Colgan force sur les valves de mon palpitant. J'ai un moment de latence, avant de répondre, tentant de chasser les hérissons nichés dans ma gorge. C'est des larmes plein les yeux que j'y parviens.

- Je... Je ne savais plus quoi faire. J'avais la sensation de ne plus parvenir à t'atteindre de quelque manière que ce soit... Je chouine, stupidement, une fois encore. Je ne me souviens pas d'une journée sans chagrin. Quand ai-je ri la dernière fois ? Tu.. Tu ne m'écoutais plus, et lorsque tu prêtais attention à moi c'était pour m'abreuver de reproches ou de démonstration de colère. Je me suis sentie inutile et comme... une étrangère à toi, au sort de la meute.... Mon timbre fêlé rend cette confession encore plus pathétique. Je te savais frustré de ne rien pouvoir faire contre Yvain ou les Hurlants et j'étais impuissante. Chaque jour, tu t'enfonçais un peu plus dans les ténèbres en me tournant le dos... J'en suis venu à penser... que tu n'avais plus besoin de moi.

Un sanglot plus intense que les autres m'agrippe et il me faut le laisser passer avant de poursuivre.

- Il.. Il fallait que je fasse quelque chose, tu comprends ? C'était idiot, très certainement, mais.. j'étais deséspée. Je me suis dit... hoquet pluvieux. ... Je me suis dit que si je supprimais Yvain de l'équation, si j'y parvenais quitte à en mourir, au moins j'aurais contribué à t'aider, toi et les Abyssaux.

Je détourne le regard pour fixer le plafond. J'ai honte d'être une déesse faible et imbécile. Je n'ai été d'aucun secours, à personne.
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Colgan Murtagh
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Colgan écoute sa réponse sans l’interrompre, se contentant de tenir sa main serrée dans la sienne et de la fixer. Pour la première fois depuis bien longtemps, le bleu de ses yeux exprime une myriade de sentiments qui s’enchevêtrent. De temps à autre, son pouce efface les larmes qui dévalent ses joues sans discontinuer.
Les mots sont durs à entendre, la réalité difficile à encaisser.

« Ta faute, ta faute, ta faute… » chante sa culpabilité sur un vieux refrain qu’il connait sur le bout des doigts.

Sa faute si les enfants sont morts.
Sa faute s’il n’arrive pas à passer à autre chose depuis leur mort.
Sa faute si Marisol est si malheureuse.
Sa faute si la Meute se trouve sous la coupe d’un fou.



La liste est encore longue et il pourrait s’y noyer.
Mais dans ce cas, il risque de tout perdre comme ce qui a failli se passer hier soir.
Lentement il vient se glisser jusqu’à son giron contre lequel il se blottit.
- Pardon…pardonne-moi…souffle-t-il sur un ton à peine audible. C’est bien tout ce qu’il arrive à formuler. C’est bien tout ce qu’il est capable de dire pour le moment. Il reste là un long moment à se serrer contre elle, le regard dans le vide, la main inconsciemment calée contre son ventre.
Colgan réfléchit, assimile et comme toujours il prend son temps.
- C’est ensemble qu’on est le plus fort…toi, moi…la meute. Promets-moi que tu referas plus jamais ça…promets ! Sans toi, j’ai plus rien Marisol. Rien du tout.  
Il ne mérite pas son amour, encore moins son sacrifice. Que peut-il bien dire ? Que peut-il faire ?

Ils étaient si bien avant…si bien.
Est-ce qu’il pourrait le redevenir à nouveau ? Comment ?

Lentement, il se redresse sans se rendre compte qu’il a, lui aussi, laissé quelques larmes couler. Il caresse doucement son visage du bout des doigts sans pouvoir affronter son regard encore. Il aime la texture de sa peau, son grain, sa couleur chaude sans tâche, sans la moindre imperfection.

- Marisol je…sa voix est rauque, presque cassée et il s’assoit sur le matelas, fixant le mur en face de leur lit. Ses yeux glissent vers ses mains, il se rend compte qu’il a oublié du sang sous ses ongles. Ses épaules s’affaissent d’un coup et il se mord l’intérieur de la joue pour ne pas craquer.
- Je voulais pas tout ça…je veux pas que tu sois malheureuse… je veux pas te détruire…aujourd’hui encore moins qu’hier, je veux pas que tu finisses comme moi…
Incapable d’aimer ou de savoir prendre soin de l’amour qu’il reçoit.
Avant de lui annoncer la nouvelle complètement imprévue et inattendue, il se doit d’être le plus honnête possible.    
- Quand je t’ai vu dans ce hangar, baignant dans ton sang… t’étais si pâle… ton cœur battait à peine… A cet instant, j’ai su que… j’ai su que si tu mourrais…je m’en remettrais pas. Je veux pas te perdre…mais après tout ce que tu viens de me dire… il se tourne enfin vers elle, attrape sa main, embrasse ses phalanges. Je veux plus te faire du mal… mais je sais pas si je suis capable de…si je peux… sa voix déraille, dérape... être différent. Faut que tu te préserves… de moi. Je serre sa main avec force. Qu’est-ce que tu veux faire Marisol ? Est-ce que…est-ce que tu veux encore de moi ?

Pas pour être le père de l’enfant à venir.
Juste lui, comme compagnon. Avec ses forces et toutes ses faiblesses.
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Marisol Laciudad
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Pour la première fois depuis longtemps, les prunelles de Colgan ont perdu de leur froideur. Je retrouve le regard de l'homme que j'ai aimé, que j'aime toujours. L'entendre quémander mon pardon et mouiller ma peau me crève le coeur. Je l'enlace doucement, du moins j'essaie jusqu'à ce que je sente quelque chose tirer sur mon bras, comme un dard d'insecte fiché dans ma chair. Je suis reliée à une perfusion de je ne sais quoi qui pendouille en suspension sur le montant du lit. De dépit, je me contente juste de lui caresser la tête d'une main et d'embrasser le sommet de son crâne.

- Pardon…pardonne-moi…

Je ne peux pas le nier. Je ne souhaite pas l'accabler non plus. Mon acte mérite aussi d'être pardonné.

- C’est ensemble qu’on est le plus fort…toi, moi…la meute. Promets-moi que tu referas plus jamais ça…promets ! Sans toi, j’ai plus rien Marisol. Rien du tout.
- Je te le promet, Colgan... Mon amour.... C'est promis.

Mon loup m'abreuve de caresses, et j'étanche ses larmes du bout des doigts, comme il sèche les miennes.

- Marisol je…

Il se redresse, m'abandonne dans mon coin de lit et j'éprouve un froid presque immédiat.

- Je voulais pas tout ça…je veux pas que tu sois malheureuse… je veux pas te détruire… je veux pas que tu finisses comme moi…

Je déglutis. J'en ai mal à la gorge. J'ai un pressentiment insidieux sur ce qui va suivre.

- Quand je t’ai vu dans ce hangar, baignant dans ton sang… t’étais si pâle… ton cœur battait à peine… A cet instant, j’ai su que… j’ai su que si tu mourrais…je m’en remettrais pas. Je veux pas te perdre…mais après tout ce que tu viens de me dire…
- Tu veux me quitter ?
fais-je dans une plainte fêlée.
- Je veux plus te faire du mal… mais je sais pas si je suis capable de…si je peux… être différent. Faut que tu te préserves… de moi.

Il me sert la main comme si c'était la dernière fois. Je ne sais pas qu'elle expression crispe mon visage, mais je ne me suis jamais sentie à ce point en détresse. J'ai la sensation de suffoquer.

- Qu’est-ce que tu veux faire Marisol ? Est-ce que…est-ce que tu veux encore de moi ?
- Colgan Murtagh...

Je suis partagée entre la colère, l'incompréhension et l'envie de chialer de plus belle. J'en ai ma claque de pleurer. A la place, j'agrippe sa main à m'en blanchir les jointures.

- Tu prétends ne pas pouvoir vivre sans moi et la seconde qui suit, tu m'exhortes à t'abandonner. Je secoue la tête. Ce que tu dis n'a aucun sens. Soit tu manques de cohérence avec toi-même, soit tu souhaites réellement que je te tue.... Ne me dis pas qu'ensemble on est plus fort pour m'asséner qu'il est préférable qu'on se sépare. Tu ne comprends donc pas ?

Je me dandine piteusement jusqu'à lui, la carcasse toujours étrangement pesante, retenue en laisse par ma perfusion.

- Jamais je ne cesserais de t'aimer. Jamais. Je t'ai choisi en tant que femme, en tant que déesse. Je t'ai choisi toi pour toujours. Mon menton tremble comme ma lippe. Mon regard vibre d'une détermination farouche. Tu te trompes simplement sur une chose : je ne finirais pas comme toi, parce que tu ne vas pas "finir"! Je lui ordonne de tourner la tête vers moi. Regarde-moi ! Il est temps pour toi d'avancer. Accepter leur mort ne signifie pas les oublier. A aucun moment de ma vie ils ne me quittent, Colgan. Cette vengeance que nous accomplissons, si elle ne t'aide pas à franchir le cap du deuil, à quoi sert-elle ? Tu ne te crois pas capable de changer, mais tu n'essaies même pas. Tu as décidé de ton sort comme si il n'y avait pas d'après. Si tu ne fais pas cet effort, si tu n'acceptes pas de vivre malgré leur absence, nous coulerons tous ensemble. Toi, moi, la meute....

Je le couve d'une oeillade aimante et résignée, tout en redressant nos mains jointes.

- Moi, je ne lâche pas cette main, où qu'elle me mène.
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Colgan Murtagh
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- Colgan Murtagh...

Il tente de déchirer son expression mais n’arrive à rien. Sa poigne est terrible autour de ses doigts.

- Tu prétends ne pas pouvoir vivre sans moi et la seconde qui suit, tu m'exhortes à t'abandonner. Je secoue la tête. Ce que tu dis n'a aucun sens. Soit tu manques de cohérence avec toi-même, soit tu souhaites réellement que je te tue.... Ne me dis pas qu'ensemble on est plus fort pour m'asséner qu'il est préférable qu'on se sépare.
- J’ai pas dit que c’est ce que je voulais ! Mais…t’as failli mourir parce que je sais pas me comporter autrement que comme un connard avec toi !
- Tu ne comprends donc pas ?
Elle essaie de se rapprocher de moi mais il l’arrêter en voyant qu’elle tire sur sa perfusion.
- Bouge pas, Marisol ! Merde !
- Jamais je ne cesserais de t'aimer. Jamais. Je t'ai choisi en tant que femme, en tant que déesse. Je t'ai choisi toi pour toujours.

Ces mots le clouent sur place et sa main qui enserrait son bras glisse doucement. Il a la mine basse et respire vite, comme s’il venait de courir un marathon.

- Tu te trompes simplement sur une chose : je ne finirais pas comme toi, parce que tu ne vas pas "finir" ! Regarde-moi !

L’ordre claque comme un fouet et il y obéit sans réfléchir, tombant sur son regard déterminé, farouche…Magnifique…

- Il est temps pour toi d'avancer.
- Comment ? souffle-t-il piteusement.
- Accepter leur mort ne signifie pas les oublier.

Le visage de Colgan se crispe de douleur. Elle a touché là où ça fait mal. Terriblement mal. Ses yeux deviennent vitreux, presque translucides.

- Je peux pas… Je peux pas les laisser tomber une deuxième fois.
- A aucun moment de ma vie ils ne me quittent, Colgan. Cette vengeance que nous accomplissons, si elle ne t'aide pas à franchir le cap du deuil, à quoi sert-elle ?
- C’est pour eux … toujours pour eux…
- Tu ne te crois pas capable de changer, mais tu n'essaies même pas. Tu as décidé de ton sort comme si il n'y avait pas d'après. Si tu ne fais pas cet effort, si tu n'acceptes pas de vivre malgré leur absence, nous coulerons tous ensemble. Toi, moi, la meute... Moi, je ne lâche pas cette main, où qu'elle me mène.

Le front de Colgan chute contre l’épaule de Marisol, cachant les larmes presque timides qui s’écoulent de ses yeux.

- C’est trop dur… Chaque matin quand je me réveille je me souviens qu’ils ne sont plus là, chaque putain de jour ça me détruit comme au premier. J’ai cette…plaie à la poitrine qui refuse de se fermer et qui suppure, qui me grignote petit à petit. Tu dis que je fais pas d’effort… vivre sans eux me demande un effort, respirer sans eux me coûte. Je les vois tout le temps, partout…
Il passe ses bras autour de sa taille, les épaules tremblantes. Comment il peut envisager d’être père à nouveau dans ses conditions ? Il n’a même pas été fichu de protéger Charly et Eliott. Il redresse soudain la tête, les yeux comme habités.
- Ils me manquent tellement que j’ai réussi à me convaincre qu’être hantés par eux valait mieux que de me résoudre à les laisser partir. Et maintenant …il a un craquement qui ressemble de loin à un rire… je ne sais même plus comment vivre autrement, même si ça détruit tout ce qui reste autour de moi. Parfois j’ai l’impression de respirer à nouveau, que la douleur s’estompe quand t’es avec moi…et puis quelque chose, une parole, un évènement se produit et j’ai à nouveau mal à en crever, je suis à nouveau à l’hôpital à mon réveil… C’est pas que j’accepte pas de vivre sans eux…c’est juste que je sais pas comment… Je ne sais pas comment vivre sans eux ! Un long silence s'installe, amenant plus de larmes, sans un bruit. T’es certaine de toujours pas vouloir me lâcher maintenant, Marisol ?
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Marisol Laciudad
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Colgan pleure, devant moi.
Colgan s'épanche et se déverrouille, petit à petit.

J'écoute sans l'interrompre, mes phalanges investissant sa chevelure défaite, massant sa nuque ployée. Mon pauvre amour, fragile et épuisé. "Je suis là" murmure mon attitude toute entière. Je suis là, je recueille tout ce que tu dois faire déborder. Libère cette parole que tu as si longtemps muselée.
Il relève la tête, les prunelles fiévreuses de l'infection qui le ronge depuis si longtemps.

- Ils me manquent tellement que j’ai réussi à me convaincre qu’être hantés par eux valait mieux que de me résoudre à les laisser partir. Et maintenant …je ne sais même plus comment vivre autrement, même si ça détruit tout ce qui reste autour de moi. Parfois j’ai l’impression de respirer à nouveau, que la douleur s’estompe quand t’es avec moi…et puis quelque chose, une parole, un évènement se produit et j’ai à nouveau mal à en crever, je suis à nouveau à l’hôpital à mon réveil… C’est pas que j’accepte pas de vivre sans eux…c’est juste que je sais pas comment… Je ne sais pas comment vivre sans eux !

Je pose mon front contre le sien, tandis que  le silence s'installe. Je tiens ses pommettes trempées entre mes paumes. Je pose mes lèvres sur le sillon de ses larmes pour en aspirer le sel.

- T’es certaine de toujours pas vouloir me lâcher maintenant, Marisol ?
- Certaine. Plus que jamais tu as besoin qu'on te tienne la main, mon amour. Tu as besoin d'aide et je suis là.
Je repêche sa main et la presse contre ma poitrine. Je suis là

J'embrasse délicatement son front.

- Ton coeur et ton esprit se sont cassés. Tu as construit des consolidations tout autour, mais tu n'as jamais réparé. Il est temps... Il faudra réapprendre et ce sera douloureux parfois, difficile aussi, mais comme tout muscles qui n'a pas servi depuis longtemps la rééducation demandera de la volonté et de la patience. N'ai pas peur de faire au moins le premier pas, Colgan...

Je le contemple, tentant d'infuser en lui tout l'espoir qui m'habite.

- Et nous pourrons faire vivre les souvenirs heureux que nous avions avec nos enfants tout en ayant un avenir...Il suffit juste de faire le premier pas. Tu veux bien essayer ?
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Colgan Murtagh
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Ses lèvres sur sa peau agissent comme un baume apaisant et Colgan pousse un soupir à fendre l’âme, cette âme craquelée et fatiguée.
- T’es certaine de toujours pas vouloir me lâcher maintenant, Marisol ?
- Certaine. Plus que jamais tu as besoin qu'on te tienne la main, mon amour. Tu as besoin d'aide et je suis là.
Il vrille ses yeux aux siens, des yeux qui dégueulent d’un trop plein amour pour elle, longtemps refouler, renier, repousser mais qui a fini par déborder.
- Je suis là.
Très délicatement, il s’approche d’elle pour qu’elle puisse glisser sur ses genoux sans être entravée par sa perfusion. Sa tête se blottit dans son cou, son nez hume son parfum, présent malgré les relents d’hémoglobine.

- Ton coeur et ton esprit se sont cassés. Tu as construit des consolidations tout autour, mais tu n'as jamais réparé. Il est temps... Il faudra réapprendre et ce sera douloureux parfois, difficile aussi, mais comme tout muscles qui n'a pas servi depuis longtemps la rééducation demandera de la volonté et de la patience. N'ai pas peur de faire au moins le premier pas, Colgan...

La peur…cette maitresse de tous les instants depuis presque deux ans déjà. Est-ce qu’il saura lui faire face ? Est-ce qu’il arrivera à la surmonter ?

- Et nous pourrons faire vivre les souvenirs heureux que nous avions avec nos enfants tout en ayant un avenir...Il suffit juste de faire le premier pas. Tu veux bien essayer ?

Lentement il redresse la tête et retrouve ses yeux pétillants d’un espoir nouveau.
- J’étais pas si loin non ? Avant…avant la révélation de Bertus. J’avais l’impression… de toucher quelque chose du doigt pour la première fois. Mais oui… Pour pas te perdre… je ferais n’importe quoi…Il caresse doucement son visage, sentant que le moment est venu de lui dire tout ce qu’il a appris hier soir. Il commence par retirer les reliquats de ses larmes sur ses joues puis prend une nouvelle inspiration.  
- Tu y crois ? A un avenir ? … Il revient tout doucement chercher ses lèvres. Je dois t’avouer quelque chose. Il la regarde avec une intensité troublante. Hier soir, tu as été sauvée par un djinn maritin. Il a aidé ton cœur à continuer de battre et a fait refluer ton sang dans tes plaies, qu’il a refermées ensuite. Pendant ce processus, il a…il a découvert quelque chose. Les mots lui échappent. Il passe une main fébrile dans ses cheveux avant de caler sa paume contre la joue de la jeune femme. Il a découvert, qu’il y avait une autre vie à sauver…en toi. Il a un bien maigre sourire, qui ne reflète en rien le bonheur sauvage que cette idée lui procure. Tu es enceinte Marisol…
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Je sens Colgan reprendre confiance, je sens l'espoir animer à nouveau ses merveilleux yeux bleus. Mon coeur bat plus vite et je suis envahie d'une brusque bouffée d'amour et de félicité.

- J’étais pas si loin non ? Avant…avant la révélation de Bertus. J’avais l’impression… de toucher quelque chose du doigt pour la première fois.
- Oui !
j'ai drôle de rire ébahi, pétri d'affection. Oui, mon amour, nous avions fait des progrès, tous les deux... C'est possible, c'est vraiment possible...Il faut qu'on reprenne cette voie et qu'on ne rompe plus la communication.
- Mais oui… Pour pas te perdre… je ferais n’importe quoi…
- Pour ne pas te perdre, je fais déjà n'importe quoi...
Je glousse bêtement, creusant les fossettes qu'il aime tant, avant de l'embrasser.
- Tu y crois ? A un avenir ? me murmure-t-il entre deux baisers.
- Oui... Enfin, toutes proportions gardées , vue que l'Apocalypse semble nous guetter... Fais-je avec un humour de très mauvais gout, c'est le relâchement de mes nerfs qui s'exprime... mais je crois en nous. Tu as raison quand tu dis qu'à deux nous sommes plus fort. Nous sommes infiniment plus résiliants que ne le pense cette grosse mégère papillon et son brouillard !
- Je dois t’avouer quelque chose.
- Oui... ?


Sa gravité soudaine, fait fondre mon hilarité. J'ai un regain d'angoisse qui s'infiltre parmi mes entrailles.

- Hier soir, tu as été sauvée par un djinn maritin. Il a aidé ton cœur à continuer de battre et a fait refluer ton sang dans tes plaies, qu’il a refermées ensuite.
- C'était donc ça....
- Pendant ce processus, il a…il a découvert quelque chose.
- Qu'est qu'il y a ?
je fronce les sourcils, de plus en plus inquiète. Dis-moi...
- Il a découvert, qu’il y avait une autre vie à sauver…en toi.
Je ne comprends pas les mots qui sortent de sa bouche. Leur sens peine à m'impacter. Tu es enceinte Marisol…
- Quoi.... ?!


Ma voix est sans timbre, mes yeux s'écarquillent, mon cerveau est blanc. Et puis, lentement progressivement, l'information s'enracine et recouvre toute sa signification. Le regard dans le vide, j'essaie de me remémorer la date de nos derniers rapports, et celle des règles qui ont suivi. Ces derniers temps nous n'étions pas toujours précautionneux. J'étais tellement absorbée par les derniers évènements que je ne me suis pas appesantie sur le retard de mon cycle.

Je suis enceinte.
Je suis vraiment enceinte.

Je réalise l'ampleur l'ampleur colossale de cette révélation. Une puissante vague d'allégresse m'emporte et explose en bouillonnante écume. Je suis soudain transfigurée par la nouvelle et mes glandes lacrymales décident qu'il faut arroser ça. Je me touche le ventre d'un air béat, de l'eau plein les yeux.

- Je... je suis enceinte.... Colgan...On va avoir un bébé...

C'est à ce moment précis qu'on cogne à la porte de notre chambre. Je suis tellement dans notre bulle que je sursaute, effarouchée par ce bruit.

- Hum.. Hum... Maintenant que vous êtes réveillés et que vous avez pu discuter, je peux entrer faire cette échographie ? fait une voix derrière la porte que je reconnais aussitôt.
- Papa ?!


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Colgan Murtagh
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- Quoi.... ?!
- Je sais… c’est…une sacrée nouvelle…

Euphémisme du siècle.

Elle semble avoir du mal à assimiler la nouvelle et il ne peut pas franchement lui en vouloir. La nouvelle est…assez extraordinaire. Il la scrute toutefois avec attention, observe l’idée de se frayer un chemin petit à petit. Ses yeux se mettent à pétiller et le spectacle de sa joie amène ses lèvres à se retrousser doucement.

Elle est si belle quand elle est heureuse…

Les larmes coulent à nouveau mais accompagnées cette fois par un sourire merveilleux qu’il touche du bout des doigts.
Un sourire comme avant. Un sourire qui éclaire tout sur son passage. Comme il la fait quand il l’a appris hier soir, elle se touche le ventre et Colgan recouvre sa main de sa paume.

- Je... je suis enceinte...
- Apparemment…chuchote Colgan en posant son front contre le sien. Faut qu’on s’assure qu’il aille bien.
- Colgan...On va avoir un bébé...
Cette fois il émet un petit rire.
- On ? C’est pas celui de Bertus alors ? Ca me rassure… T’es sûre… t’es certaine que…c’est le bon moment ?
Il dégage doucement ses cheveux de son visage, le caresse du bout des doigts.
- Marisol…mon étoile, souffle-t-il. Je t…

On toque soudain à la porte et Colgan trésaille puis se redresse.

- Hum.. Hum... Maintenant que vous êtes réveillés et que vous avez pu discuter, je peux entrer faire cette échographie ? fait une voix derrière la porte que je reconnais aussitôt.
- Papa ?!
- Ah oui… le Doc’ est là. Je l’ai appelé hier soir. Pour vérifier que tu allais bien. Il t’a fait une transfusion sanguine, t’en avais besoin. Entre Doc’.

De toute façon, il vient de faire éclater leur petite bulle.
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Marisol Laciudad
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- Colgan...On va avoir un bébé...

Mon homme rit. J'avais oublié à quel point c'est un spectacle fabuleux, à quel point son visage change du tout au tout.

- On ? C’est pas celui de Bertus alors ? Ca me rassure…
- Sois pas con !
que je  lui balance en lui bourradant l'épaule. Le geste est faiblard et de toute manière peu convainquant.
- T’es sûre… t’es certaine que…c’est le bon moment ?
- Y'a jamais de bon moment. Si c'est celui là que ce petit bout d'existence a choisi, alors, ce sera maintenant.
fais-je en me touchant le ventre  tendrement.

Colgan me couve d'un regard intense, aussi ardent qu'autrefois. Je suis brusquement happée par ses prunelles limpides, subjuguée par ce j'y lis. Je suis pendue à ses lèvres et son sourire devenu si rare. Mon amour, mon loup, ma moitié...

- Marisol…mon étoile,....Je t…

Et brusquement l'instant s'évapore.
Colgan ne finira jamais sa phrase et je reste au bord de l'abîme, en suspension jusqu'à la prochaine fois. S'il y en a une. Mon père, ce casseur d'ambiance s'introduit dans notre chambre avec son habituel tronche blasée d'homme qui aimerait être ailleurs.

- Ah oui… le Doc’ est là.
- Ca fait  vingt minutes que j'attends que vous ayez fini, pour tout vous dire...
- Je l’ai appelé hier soir. Pour vérifier que tu allais bien. Il t’a fait une transfusion sanguine, t’en avais besoin. Entre Doc’.
- O.. ok.
Je  cherche la main de Colgan comme pour rattraper ce petit moment qui s'effiloche déjà. Papa, je...
- Non...
fait-il en levant sèchement une main. Tais-toi, je ne veux rien entendre. Il s'assoie au bord du lit et me prend maladroitement dans ses bras. Ne recommence jamais une telle bêtise.
- Oui, papa.
Je me sens penaude comme une gamine qui a fait une grosse frayeur à ses parents. J'ai promis.
- Bien...


Il recule et, malgré le marbre de son facies, je lis en lui son inquiétude et l'épuisement de sa veille. Il s'échine à mettre en place tout un matériel bizarre contenu en une seule valisette et je découvre à ma grande stupeur, qu'il existe des échographes portatifs.

- Doc, je peux enlever la perfusion ? Je me sens mieux maintenant
- Certainement pas. Il s'agit d'acide folique. Tu aurais du en prendre en amont de ta grossesse, mais mieux vaut tard que jamais.
- A.. à quoi ça sert ?
- Colgan, à quoi ça sert ?
questionne Ebène sur le ton d'un professeur interrogeant un de ses élèves. Tu as eu deux enfants, tu dois bien t'en souvenir.

Mon père enfile des gants chirurgicaux et après avoir désinfecté son matériel, enduit un drôle d'appendice relié à la machine d'une sorte de lubrifiant.

- Soulève ton t-shirt s'il te plait.

Je m'exécute docilement et il applique le même gel collant et froid sur mon bide. Avec appréhension, je le vois allumer le moniteur et approcher son instrument de mon ventre. Je m'efforce de rester allongée tout en serrant convulsivement la main de Colgan. J'ai la trouille comme jamais, alors que j'ai connu des situations bien plus inquiétantes et stressantes que celle-ci. J'échange avec mon loup des œillades inquiètes.

- Détends-toi.... m'intime mon père, avant de me coller son truc et d'appuyer sur mon abdomen sans grande délicatesse.

Une image apparait à l'écran, en noir et blanc, et je ne sais pas franchement ce qu'on est en train de fixer tous les trois, à part de vagues formes ovoïdes. Doc se tourne vers nous et poursuit sur un ton très professionnel.

- Ce que vous voyez là c'est ce qu'on appelle le sac intra-utérin. La petite masse grise qui ressemble à un minuscule haricot, c'est l'embryon. Il le mesure et déclare avec une nuance de satisfaction : 5mm, c'est tout à fait dans la norme pour six semaines d'existence.

Il monte le son de son appareil et soudain, une pulsation ultrarapide emplit nos tympans et me fait tressaillir. Instinctivement, je réalise que ce que j'entends, c'est le coeur de ce cette petite vie qui bat à tout rompre. Je me tourne vers Colgan émerveillée.

- C'est... C'est bien ce que je crois ?
- Oui c'est son coeur.
- Pourquoi est-ce qu'il est aussi rapide ? Il.. il va bien ?
- Oui, c'est parfaitement normal. Le rythme cardiaque d'un embryon peut aller de 120 à 160 battements par minute. Ce que je te préconise étant donné que tu as subi un traumatisme physique profond récemment, c'est de rester alitée quelques jours. Pas de sortie, pas de gymnastique, ni de mouvements brusques. Il faut vérifier si l'embryon est bien attaché et si ton col est bien fermé. Je peux pratiquer l'examen gynécologique mais quelque chose me dit que... cela pourrait être embarrassant pour toi.
- Sans déconner !
- Dans ce cas, prenez un rendez-vous au plus vite pour une consultation prénatale. Evidemment, pas de cigarette, pas d'alcool et pas d'anxiolytique.


Je me redresse brusquement et regarde Colgan. Une idée vient de me traverser l'esprit de part en part.

- Il.. Il va naitre loup-garou ?
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Colgan Murtagh
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Ebène, qui n’attendait manifestement que ça, commence à sortir son matériel que Colgan reconnait comme un échographe mais en bien plus petit que ce qu’il a déjà vu. Son cœur commence à battre la chamade à l’idée de bientôt apercevoir leur petit haricot de bébé et peut-être même de l’entendre. Il sert mécaniquement plus fort ses doigts sur ceux de la jeune femme.  

- Doc, je peux enlever la perfusion ? Je me sens mieux maintenant.
- Certainement pas. Il s'agit d'acide folique. Tu aurais du en prendre en amont de ta grossesse, mais mieux vaut tard que jamais.
- A.. à quoi ça sert ?
- Colgan, à quoi ça sert ? Tu as eu deux enfants, tu dois bien t'en souvenir.
Celui-ci sort brutalement de sa rêverie qui l’a transporté loin dans le temps. Il arque un sourcil, amusé par le ton de son beau-père.
- Ca fait près de dix ans tu sais… y’a des trucs que j’ai oublié… je crois que c’est une vitamine essentielle pour le bon développement du bébé. Vitamine B quelque chose, je crois ? J’ai bon Prof’ ? J’ai le droit de rester du coup ?

Il commence à poser le gel sur son matériel puis l’allume.  
- Soulève ton t-shirt s'il te plait.

Colgan sent bien la nervosité de la jeune femme et amène sa main jusqu’à ses lèvres pour la baiser.
- Tout va bien… tu vas voir, c’est le meilleur moment au monde. La première rencontre… Ca ne fera mal à personne.
Il croise simplement les doigts pour que tout aille aussi bien que l’a indiqué le djinn. S’il y a le moindre problème… eh bien ils allaient affronter ça ensemble…encore. L’essentiel c’est que Marisol guérisse.

- Détends-toi....

Le Doc’ presse sa sonde sur le ventre encore plat de Marisol et les premières images s’affichent sur le petit écran. Colgan se penche un peu plus, cherche le tout petit être qui ne ressemble pas encore à grand-chose mais se perd dans les nombreuses formes.  

- Ce que vous voyez là c'est ce qu'on appelle le sac intra-utérin. La petite masse grise qui ressemble à un minuscule haricot, c'est l'embryon. 5mm, c'est tout à fait dans la norme pour six semaines d'existence.

Une fois que ses yeux ont trouvé la toute petite crevette, ils ne la quittent plus du regard et tentent d’assimiler la réalité encore un peu difficile à appréhender complètement. Soudain un son qu’il reconnaitrait entre mille emplit leur chambre.
Un battement rapide, discontinu…
Un cœur en formation…
Leur bébé…

Comme pour Eliott et Charlyne avant lui, il a à nouveau les larmes aux yeux lors de cette toute première rencontre. Jamais il n’a pensé pouvoir être père à nouveau, il ne pensait pas en avoir ni envie ni la force. Mais ce petit haricot en a décidé autrement.
Colgan a toujours eu un cœur de papa et celui-ci s’épanouit, pulse à nouveau au rythme d’une émotion moins mortifère que ce qu’il a connu pendant tout ce temps. Il explose déjà d’amour pour ce petit être, un amour malgré tout teinté d’une peur extrême de le perdre.  

- C'est... C'est bien ce que je crois ?
Colgan ne peut qu’hocher la tête. Il vient à nouveau poser son front contre celui de Marisol et clôt ses paupières.
- Oui c'est son coeur.
Pendant un bref instant, il a un sourire heureux, presque fier.
- Il bat fort. Seigneur c’est…c’est magique à chaque fois…
Il recule doucement après avoir déposé un baiser sur son front.  
- Pourquoi est-ce qu'il est aussi rapide ? Il.. il va bien ?
- Oui, c'est parfaitement normal. Le rythme cardiaque d'un embryon peut aller de 120 à 160 battements par minute. Ce que je te préconise étant donné que tu as subi un traumatisme physique profond récemment, c'est de rester alitée quelques jours. Pas de sortie, pas de gymnastique, ni de mouvements brusques.
- Zut…je vais devoir annuler ton cours de barre au sol, Marisol, se moque gentiment Colgan avant de reprendre sur un ton plus sérieux. J’y veillerai, t’en fais pas.
Et il se montrera intraitable.
- Il faut vérifier si l'embryon est bien attaché et si ton col est bien fermé. Je peux pratiquer l'examen gynécologique mais quelque chose me dit que... cela pourrait être embarrassant pour toi.
- Sans déconner !
- Doc’…c’est assez crade…
- Dans ce cas, prenez un rendez-vous au plus vite pour une consultation prénatale.
- Je m’en occupe. Je vais voir si le médecin qui a accouché mes enfants exerce toujours. Elle mâchait pas ses mots mais s’est toujours montrée bienveillante et professionnelle.
- Evidemment, pas de cigarette, pas d'alcool et pas d'anxiolytique.
Il fait les gros yeux à Marisol et s’installe plus confortablement contre la tête de lit, entourant les épaules de la jeune femme de son bras et la serrant contre lui autant que possible.
- Plus de tequila.
- Il.. Il va naitre loup-garou ?
- Non. Dieu merci non. Il faudrait que tu sois Loup-Garou toi aussi. Ça sera notre louveteau quand même…mais sans poil et sans douleur.

Ca veut également dire qu’il aurait une espérance de vie plus courte… comme Marisol. Lui sera condamné à leur survivre. Il repousse toutefois cette nouvelle crainte de les perdre.
Il leur reste encore du temps. Cet enfant n’est même pas encore né. A ce propos, il essaie de tempérer un peu son enthousiasme, il sait comment se passe souvent les premières grossesses. Il échange un regard avec Marisol puis s’adresse à son beau-père.  

- Doc’…je sais que… Kara a eu deux fausses couches avant de mettre…Eliott au monde. Les médecins de l’époque nous on dit que c’était très courant pour des premières tentatives. Est-ce qu’il y a des trucs qu’on pourrait faire…pour…l’aider à s’accrocher ?
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Marisol Laciudad
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- Ca fait près de dix ans tu sais… y’a des trucs que j’ai oublié…
- C'est comme le vélo, ça s'oublie pas,
lâche mon paternel d'un ton monocorde.
- Je crois que c’est une vitamine essentielle pour le bon développement du bébé. Vitamine B quelque chose, je crois ? J’ai bon Prof’ ? J’ai le droit de rester du coup ?
- C'est passable, mais je t'autorise à rester.
Sourire en coin du zombie qui blague. L’acide folique et les folates sont essentiels à la multiplication des cellules et à la régulation de l’activité des gènes. Ils participent à la fabrication des globules rouges et blancs, au renouvellement de la peau et de la paroi de l’intestin, ainsi qu’à la synthèse des substances chimiques qui modulent le fonctionnement du cerveau. C'est indispensable pour le développement nerveux du foetus....Soulève ton t-shirt s'il te plait.

Cette toute première échographie me fait un drôle d'effet. Pour la première fois je suis confrontée à un autre petit morceau de vivant à la fois familier et étranger qui réside en moi. Ce battement de coeur affolé fait naitre dans mon cœur un sentiment tout neuf que je n'ai encore jamais expérimenté. Je me sens à la fois dépassée, émerveillée, débordante de joie et complétement terrifiée. Colgan n'a pas l'air dans un état plus stable que le mien. Il m'embrasse, me sourit, j'ai l'impression de retrouver notre complicité tactile d'avant.

- Il bat fort. Seigneur c’est…c’est magique à chaque fois…
- Oui, ça l'est...
Comme ton merveilleux sourire retrouvé. Pourquoi est-ce qu'il est aussi rapide ? Il.. il va bien ?

Je commence déjà à angoisser de la moindre anomalie, de la moindre bizarrerie... Colgan et Doc me rassurent et me tranquillisent pendant que je reste scotchée sur la vision de ce petit machin de rien qui exprime déjà son envie d'exister.
Mon bébé.
Notre bébé.
Je suis déjà en train de me projeter son image. Je l'espère roux et tacheté comme son père, avec les fossettes que j'ai reçu en héritage du mien. Fille ou garçon, peu m'importe, du moment qu'il soit en bonne santé. Est-ce que cela nous sera possible dans les conditions qui se profilent ?

- Doc’…je sais que… Kara a eu deux fausses couches avant de mettre…Eliott au monde. Les médecins de l’époque nous on dit que c’était très courant pour des premières tentatives.
- Je.. Je vais perdre mon bébé ?


Voilà que je recommence à m'affoler. Aussi informe soit ce petit machin pas plus gros qu'un petit poids, j'ai entendu sa fureur de vivre. Il est hors de question que sa présence me quitte aussi vite. Je m'y refuse !

- Le risque est de seulement une vingtaine de pourcent dans ta tranche d'âge.
- C'est énorme !
Je sers la main de Colgan en grande panique.
- Est-ce qu’il y a des trucs qu’on pourrait faire…pour…l’aider à s’accrocher ?

Mon père nous fusille du regard.

- Eviter les situations stressantes, les émotions fortes, les efforts inconsidérés, les charges lourdes. Tu peux faire du sport mais rien d'intensif : de la marche ou de la méditation. Tu dois absolument te relaxer donc exit le café et le thé : eau et tisane, le moins de sucre possible. Je te conseille des bains réguliers : l'eau détend les muscles. Bien dormir, manger de manière équilibrée. Et pas précaution, évitez les rapports sexuels durant cette période pour limiter les contractions utérines. Et évidemment continuer de prendre de l'acide folique.

Il se tourne vers Colgan avec un air plus sévère qu'à l'accoutumée.

- Ta priorité, désormais, c'est elle : son bien être, sa santé, son état mental. Tu vas prendre soin de ma fille comme jamais, Colgan. Est-ce que c'est clair ?
- Papa ! Ne.. ne lui mets pas la pression comme ça.
- La pression ? Il y a moins de 24h tu baignais dans ton propre sang parce qu'il n'a pas su t'écouter, alors la pression, ma fille, est tout à fait justifiée. Me suis-je bien fait comprendre ?
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Colgan Murtagh
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- Je.. Je vais perdre mon bébé ?
- Le risque est de seulement une vingtaine de pourcent dans ta tranche d'âge.
- C'est énorme !
Colgan ne peut qu’être d’accord. Il ne pensait pas la possibilité puisse être si élevée à vrai dire. Ce qui est…terrifiant.
- Est-ce qu’il y a des trucs qu’on pourrait faire…pour…l’aider à s’accrocher ?
- Eviter les situations stressantes, les émotions fortes, les efforts inconsidérés, les charges lourdes. Tu peux faire du sport mais rien d'intensif : de la marche ou de la méditation. Tu dois absolument te relaxer donc exit le café et le thé : eau et tisane, le moins de sucre possible. Je te conseille des bains réguliers : l'eau détend les muscles. Bien dormir, manger de manière équilibrée. Et pas précaution, évitez les rapports sexuels durant cette période pour limiter les contractions utérines. Et évidemment continuer de prendre de l'acide folique.
- Noté.
L’air sévère et grave qu’affiche le Doc’ en le scrutant lui fait froncer les sourcils.
- Ta priorité, désormais, c'est elle : son bien être, sa santé, son état mental. Tu vas prendre soin de ma fille comme jamais, Colgan. Est-ce que c'est clair ?
- Très clair Docteur. Je ne comptais pas faire autrement.
- Papa ! Ne.. ne lui mets pas la pression comme ça.
- La pression ? Il y a moins de 24h tu baignais dans ton propre sang parce qu'il n'a pas su t'écouter, alors la pression, ma fille, est tout à fait justifiée. Me suis-je bien fait comprendre ?

Colgan se raidit, le visage fermé puis se redresse, s’éloignant de Marsisol sans lâcher sa main. Il n’hésite pas à affronter le regard de son beau-père.

- J’ai conscience que ce qui s’est passé hier soir est de ma faute, Docteur Maintenon. Mais comme je suis un adulte, il ne me semble pas nécessaire de me le répéter. Et si tu penses que je laisserai une telle chose arrivée à nouveau…il se tait, la gorge serrée à cette simple idée. Je sais que j’ai commis des erreurs mais je pense avoir été un compagnon et un père plutôt attentif par le passé. Je sais ce que j’ai à faire…
Il porte la main de Marisol à ses lèvres puis sort du lit.
- Si tout va bien, je vais te préparer quelque chose à manger. Repose-toi.

Il enfile un pull et sort de la pièce, décidé à lui préparer un petit-déjeuner gargantuesque.
Les pancakes ne risquent pas de le juger, eux. Il en prépare d’ailleurs une montagne, des œufs qu’il cuit comme il se doit, de la tisane et une salade de fruits qu’il dispose sur un plateau, prêt à lui apporter.

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- J’ai conscience que ce qui s’est passé hier soir est de ma faute, Docteur Maintenon. Mais comme je suis un adulte, il ne me semble pas nécessaire de me le répéter. Et si tu penses que je laisserai une telle chose arrivée à nouveau…Je sais que j’ai commis des erreurs mais je pense avoir été un compagnon et un père plutôt attentif par le passé.
- Par le passé. Je te demande juste de revoir tes conjugaisons au présent
, lui répond mon père, laconique.

Je suis au milieu d'un duel de regards qui me fiche un malaise grandissant.

- Je sais ce que j’ai à faire…
- Et j'ai dit ce que j'avais à dire.


Je m'attends à voir Colgan exploser et toute ma carcasse se tend par reflexe. Au lieu de cela, il ignore  Doc, et m'embrasse les doigts.

- Si tout va bien, je vais te préparer quelque chose à manger. Repose-toi.
- D'accord...
dis-je un peu éberluée.

Je suis visiblement guérie, j'ai excessivement dormi, et pourtant je me sens vidée de toute énergie. Je retombe la tête sur l'oreiller avec un profond soupir. Mon paternel remballe ses affaires et vient me faire un bécot sur le front, ce qui  est dans son cas très précis parfaitement inhabituel.

- Je t'ai vraiment foutu la frousse, hein ?
- Oui. A chaque fois que tu m'enverras un sms avec "Je t'aime, papa" j'appellerais immédiatement pour vérifier que tu ne prépares une opération kamikaze.
-.... Je te demande pardon...
- Pardon accordé. Pour ce qu'il vaut... Repos et calme. On est bien d'accord?
- Dacodac, Doc !
- A plus tard Marisoleil.


Ebène sort de la chambre en laissant la porte ouverte. Il observe sans la moindre expression le dos de Colgan jetant toute sa frustration et son ressentiment dans la préparation d'un monticule de victuailles.

- Je repasserais suivre son état. Tiens moi au courant si son coeur ralentit à nouveau.

Mon coeur a ralenti.
Okaaaay.
Sans mot superflu, mon père s'en va nous laissant tous les deux. Enfin, tous les trois.
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Colgan Murtagh
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- Je repasserais suivre son état. Tiens-moi au courant si son cœur ralentit à nouveau.

Colgan préfère ne pas se retourner, d’ailleurs il ne lui répond pas non plus. Une vieille réplique de sa ma mère lui revient.

« Lorsqu’on a rien de gentil à dire, Colgan, mieux veut se taire. »

Alors c’est ce qu’il fait. Il ne sait pas exactement pourquoi les paroles du Doc’ l’ont à ce point touché. Sans doute parce qu’elles ne font qu’appuyer sur des erreurs dont il a parfaitement conscience et qu’il ne souhaite nullement qu’on les lui rappelle encore et encore. Comme s’il se permettait de lui remémorer constamment les siennes…

Payé…encore et encore.

Ce n’est qu’une fois la porte d’entrée fermée qu’il lâche sa spatule et s’appuie contre le plan de travail. Le poids des évènements semble s’abattre sur lui d’un seul tenant et il s’arrime fermement au bois, une détresse profonde inscrite sur le visage. Il prend de profondes inspirations et finit par reprendre l’approvisionnement de son plateau, finissant par verser l’eau chaude de sa tisane.

Flancher maintenant est impossible.
Pas alors que la Meute est dans une situation aussi précaire, pas alors que Marisol a besoin de calme et de repos pour faire grandir le bébé en tout sérénité et sécurité. Sauf qu’il n’a aucune certitude de pouvoir lui donner l’une ou l’autre. Il se recompose toutefois un visage neutre et lui apporte son petit-déjeuner.
Coupant court à toute protestation, il pose le plateau devant elle.

- Tu as besoin de force. Mange.

Il réarrange gentiment l’oreiller derrière son dos lorsque son portable vibre dans la poche de son jeans. Il le consulte rapidement et grimace. Malone lui demande si la réunion d’aujourd’hui tient toujours. Il lui envoie rapidement un message pour lui dire qu’elle est repoussée à ce soir.

Que leur dira-t-il ? Comment leur avouer qu’il a mis Marisol en danger ? Il a ouvertement déclaré la guerre à Yvain. Mais ne ferait-il pas mieux de faire profil bas ? La vengeance…encore et encore…elle semble ne jamais finir… et pourtant à la simple idée que cet homme arpente librement les rues, qu’il puisse un jour s’en prendre à nouveau à Marisol et au bébé, il voit littéralement rouge.
Une petite voix mesquine lui souffle qu’Yvain n’a fait que profiter d’une occasion qu’il est le seul à avoir créer.
Malgré tout…il ne peut pas se résoudre à laisser couler ce qu’il lui a fait hier.
Tôt ou tard, il répondra des horreurs commises.  
Colgan saura se montrer patient, mais il n’a pas assez d’énergie pour trouver un plan seul. Pas maintenant… ils en discuteront ce soir.

- Je vais te faire couler un bain, ça te fera du bien, annonce-t-il d’une voix neutre qui ne traduit en rien ses tourments intérieurs. Je vais voir pour prendre ton premier rendez-vous gynéco. Tu vas sans doute devoir faire quelques prises de sang. Je serai présent si…si tu as besoin de moi. Appelle si tu veux quelque chose. Je sais que ça va être rude pour toi mais… essaie de te ménager d’accord ?
Il pose une main contre son ventre.
- Il faut vous reposer. Tous les deux.
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Colgan me revient avec un plateau rempli à ras-bord de délicieuses choses à manger. Malheureusement -et c'est une première- mon appétit légendaire me fait défaut. Tout cela a beau me faire saliver, j'ai immédiatement le sentiment d'être barbouillée dans la foulée.

- Tu as besoin de force. Mange.
- Ok....
Je soupire. Inutile de m'infantiliser, hein... Je suis juste enceinte, pas en sucre.

Il ne semble pas tenir compte de ma remarque et fait gonfler l'oreiller calé dans mon dos.

- Merci... fais-je avec un sourire et une caresse. C'est gentil.

Je regarde en coin l'écran de son portable. C'est Malone. Nous devions nous réunir aujourd'hui. Je n'ai pas regardé mon propre téléphone. Il doit toujours trainer sur la table du salon et être bourré de messages inquiets.

- Mal te voulait quoi ? C'est pour la réunion d'aujourd'hui ?

A ma grande surprise et malgré les promesses faites plus tôt, mon loup élude la question.

- Je vais te faire couler un bain, ça te fera du bien.
- Je te remercie, mais ça ne répond pas vraiment à ma question...
-Je vais voir pour prendre ton premier rendez-vous gynéco. Tu vas sans doute devoir faire quelques prises de sang. Je serai présent si…si tu as besoin de moi.
- Evidemment que je vais avoir besoin de toi. Je marche en terrain complétement inconnu là...
- Appelle si tu veux quelque chose.
- Tu pars ? Tu vas où ?
- Je sais que ça va être rude pour toi mais… essaie de te ménager d’accord ? Il faut vous reposer. Tous les deux.


Je retiens sa main contre mon bide avec fermeté.

- Col', stop ! Arrête ça tout de suite... J'attends notre bébé et je ne veux pas le perdre, mais parce que je suis enceinte, je ne suis soudain plus apte à discuter des affaires concernant la meute ? Tu m'as dit, il y a pas moins de quelques minutes, qu'on ne romprait plus jamais la communication entre nous, que tu avais besoin de moi et que j'étais ton égale. Ne me mets pas de côté comme si j'étais en cristal et que j'allais me briser ! Qu'est-ce qu'il s'est passé pendant que j'étais inconsciente ? Pourquoi mon coeur a ralenti ? Qu'est-ce qu'il s'est dit à propos d'Yvain ? Il a lancé les Hurlants contre nous ?

Je reprends d'une voix plus douce.

- Chaton, ne me laisse pas dans le flou, parle moi.... C'est ton silence qui m'angoisse, pas l'inverse.


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