Les frissons, l’adrénaline, la nervosité et cette envie de se libérer de sa peau pour retrouver le Loup.
Hurler, chasser, courir, libre et féroce.

La lune pleine n’est pas encore là, mais je sens déjà son influence. J’essaie de maîtriser mon corps, ne pas paraitre aussi angoissée que je le suis. C’est moi qui suis sensé être raisonnable cette nuit. Ca sera moi le guide.
A l’arrière de la voiture de Magni, je tourne la tête vers Scott et lui sourit en cherchant sa main.

- Z’êtes certains que vous voulez pas qu’on vous surveille de loin ? demande à nouveau le Berserker en leur jetant un coup d’œil dans le rétroviseur. Il a l’air inquiet du papa poule qui va laisser son poussin dans la basse cours pour la première fois. C’est trognon en vrai.
- Nope, vous inquiétez pas ! J’ai fait prévenir tout le monde. Les gens chez Gaffy et les miliaires. Ils ont tous reçu pour instruction de ne pas sortir dehors ce soir. Y’a peu de chance qu’on croise qui que ce soit à part du gibier. Et puis on sera vite loin.
Si j’ai accepté que Magni et Jolhane nous « escortent », c’est uniquement pour qu’on s’enfonce plus profondément dans la forêt, là où la Meute se rend d’habitude, et aussi pour nous récupérer le lendemain.

P’tit loup et moi, on sait dans quel état on va être demain matin. Je préfère autant pas devoir me coltiner la marche après une pleine lune qui risque bien d’être éreintante.
- Voilà ! C’est par là ! que j’indique à notre chauffeur en pointant du doigt une clairière droit devant nous.
On sort tous de la voiture et la tension monte d’un cran, une tension à la fois familière mais aussi bien plus forte que d’habitude. Avec ses manières toujours franches et bourrues, Magni prend Scott dans ses bras et lui murmure :
- J’ai confiance en toi, fiston. Tu vas gérer. Enfin ton Loup. Mais c’est du pareil au même.
J’écarquille les yeux et me tiens comme une bûche lorsqu’il me réserve le même traitement.
- Tu fais gaffe à notre Scotty hein !
J’esquisse un sourire en coin et essaie de lui tapoter le dos. Ce qu’il est large ce bestiaux ! Une fois qu’il me libère je me tourne vers Jolhane et lui.
- Je vous promets que je ferai tout pour que sa première lune dehors se passe bien. A demain matin alors !

Je les laisse faire leur dernière recommandation à Scott avant de le prendre par la main et de le mener plus loin. Une fois qu’on est un peu moins « exposé ». Je me pose en face de Scott et plante mes yeux dans les siens en lui caressant la joue.

- Comment tu te sens ? Je te quitterai pas de la nuit. Je serai toujours avec toi. Il vaut mieux que je me transforme avant toi, ok ?

Je commence lentement à me déshabiller puis lui réserve le même sort, les yeux toujours dans les siens. Ca caille à mort mais la température est pas la seule à me faire frissonner. Une fois nue, je viens littéralement me frotter à lui, corps, visage partout où je peux. Je mélange nos odeurs autant que possible. Pour finir je mords fort dans mon bras et récolte un peu de mon sang que je passe du pouce sur sa lèvre supérieure et le dessous de son nez.

- Voilà… si avec ça tu m’as pas dans le pif ! Bon…je vais y aller d’accord.

J’aimerais l’embrasser mais je risque d’enlever ce que je viens de lui barbouiller sur le visage alors je lui prends les mains et le sers avec force.

Je recule ensuite, inspire un fond en fermant les yeux et me laisser glisser dans ma seconde peau.
Comme toujours ça fait un mal de chien et même si j’encaisse pas mal je couine de douleur plusieurs fois. C’est terrible cette sensation de souffrance suprême qui accompagne la délivrance de retrouver une partie de soi. Et pourtant malgré tout, je peux pas m’empêcher d’apprécier ce moment.
Comme un retour aux sources.
Mes os craquent, mes muscles se déchirent, ma peau se recouvre d’une fourrure noire aux reflets rouges et je finis à quatre pattes, terrassée jusqu’à la fin de la transformation.

Enfin, je me tiens debout sur mes pattes devant Scott et sautille joyeusement devant lui, pleine d’une exaltation nouvelle avant de m’approcher de lui.

« J’suis là, mon p’tit loup ! Maintenant tu sais qui je suis vraiment. »

Ses nerfs grésillent. Muscles sur le grill, il les imagine déjà se déchirer sous la métamorphose. Son esprit piaffe d'impatience, incapable de focaliser sur quoi que ce soit d'autre. Scott est brusque, revêche, ombrageux. Il ne retient plus ses coups, de poing, de reins ou de calcaire, au point que même Magni a dû sévir en faisant usage de la force pour le ramener au pas.
Le jeune homme taiseux développe une angoisse égale à la violence qui suppure de son être. Il ne comprend pas les ficelles qui tressent sournoisement les cordeaux de sa culpabilité. Le remord l'étouffe, compresse sa poitrine quand il contemple la peau bleuie et mordue d'Hina au petit matin, ou bien les marques de strangulation qu'il a laissé sur la gorge de Ryan à l'entrainement. Personne ne lui en veut. Sauf lui. Le malaise est là, rampant, sans nom, sans visage à part celui que lui renvoie le miroir.

Vivement que la lune désenfle.
La perte de contrôle le terrifie.

Silencieux, il ne lâche pas un mot dans l'habitacle de la voiture. Sa jambe tressaute de soubresauts incontrôlables. Il sert la main d'Hina par pressions régulières. Il a les trippes électriques du gars qui a le trac et qui sent la tension le rogner de l'intérieur. Les moteurs se coupent, la voiture à l'arrêt déverse ses passagers.
L'étreinte de Magni fait tressaillir Scott qui ferme les yeux une poignée de secondes. Il ne se rend pas compte qu'il enfonce ses doigts dans le cuir de Magni, comme un gosse qui a peur du noir et ne veut pas que son père éteigne la lumière.

- J’ai confiance en toi, fiston. Tu vas gérer. Enfin ton Loup. Mais c’est du pareil au même.

L'adolescent a un bref hochement de tête, incertain. Jolhane vient se poster alors devant lui. Elle caresse doucement sa joue, un geste rare pour elle. Ses yeux d'or communiquent à sa place. "Tu es mon fils." disent-ils et Scott déglutit. Il dessert une mâchoire douloureuse à force d'avoir été contractée. Son timbre est rauque par manque d'usage.

- Je reviens... Formule-t-il maladroitement.
- Je sais. Je t'attends. Répond-elle avec un sourire doux et énigmatique.

Les deux louveteaux s'éloignent un peu pour se retrouver en tête à tête.

- Comment tu te sens ?
- Pas ouf, avoue-t-il sobrement.
- Je te quitterai pas de la nuit. Je serai toujours avec toi. Il vaut mieux que je me transforme avant toi, ok ?
- Ok.

Hina se dépouille de ses frusques. Elle est magnifique. Elle est à lui. Et pour lui signifier la réciprocité, il la laisse le dévêtir, ses yeux glacés plantés dans les siens. Leurs peaux se mêlent, leurs effluves se mélangent. Il n'y peut rien si son corps réagit d'instinct, son sexe se dressant brut et droit. Il n'en conçoit pas la moindre honte d'ailleurs. Son esprit, comme ses sens sont baignés de la présence d'Hina. Elle occupe toute la place et réduit ses pensées à un schéma primitif et sommaire. La respiration du jeune lycanthrope est forte, grondante, et ses pupilles dilatées sur l'objet de son attention. Ses lippes s'ourlent et découvrent ses dents. Le prédateur se dissimule à peine derrière sa futile peau d'homme. Il veut planter ses crocs dans cette nuque gracile, la déchiqueter tout en copulant avec sa semblable, hurler à la lune et chasser. L'appel du sang bouillonne déjà dans ses veines alors qu'il n'a pas endossé son identité nocturne.

La transformation d'Hina le pétrifie pourtant, dans une sorte de sidération ébahie. Il tombe à genoux devant la louve au pelage sombre et à la silhouette élancée et gracieuse. Elle est si belle , si belle,... mais déjà le loup blanc gratte sous son crâne pour prendre la place. Il ne lutte pas quand, à son tour, son corps change. Le visage rougeaud d'effort, la bouche écumante, et les prunelles lumineuses, il hurle à pleins poumons de douleur et de libération. Il n'a pas le temps de caresser cette fourrure noire ou de graver l'image d'Hina la louve, dans son esprit. Celui-ci s'étiole, détricoté vers le néant.

Le loup blanc est là, poil neigeux et prunelles polaires. Son museau rougi de sang se plisse quand ses babines se retroussent. Il grogne, crocs menaçants et tourne autours d'Hina avec une méfiance proche de la menace.

Il jauge cette inconnue.
Cette autre.
Semblable mais peut-être ennemie.
Ses sens sont abrutis par sa présence, intoxiqués par son fumet.
Qui ?!
QUI EST-ELLE ?

Veut.
Prendre.

Sans crier gare, il rue vers elle pour l'attaquer. Ses intentions sont on ne peut plus claires : la soumettre dans tous les sens du terme.

Scott n’a pas le temps de faire connaissance avec ma louve. Déjà il se métamorphose à son tour, il hurle de souffrance sans retenue et je veille sur sa transformation comme je veillerai sur sa Nuit. Je couine en partage de cette épreuve commune, me sers contre lui et l’accompagne comme je peux.
Quelques douloureuses minutes plus tard un loup blanc avec les mêmes yeux que Scott se dresse devant moi mais j’ai déjà pris mes distances.
Il est absolument magnifique et je me gave de la vision de son loup au poil clair.
Il gronde, montre les crocs, me menace clairement.
Il me faut toute ma volonté pour ne pas lui répondre, garder mon calme, rester raisonnable, aux aguets malgré tout de ce qu’il pourrait faire. Je réponds à son grondement par un jappement sec.
« Tu me connais Scott »

Sauf qu’il n’est plus vraiment Scott.
Plus vraiment mon p’tit loup.
Pas encore.

Il se jette soudain sur moi mais je suis prête. Plus que prête. Et si je suis surprise par la férocité et la justesse de son attaque, je ne me laisse pas submerger pour autant. Je lui échappe, fluide et agile comme de l’eau. On se bat avec violence, mais j’arrive à échapper à chaque coup de croc, chaque coup de patte et je sens que ça l’agace. M’en fiche. L'important c'est de rester à sa hauteur, ne pas plier. Puis je contre-attaque, avec plus de ruse que de force et le renverse sur le dos quelques secondes que je mets à profit pour refermer mes crocs sur sa gorge. J’exerce une simple pression, rien de menaçant. Mon but est de lui prouver que je ne suis pas sa proie. Jamais sa proie.

Ta partenaire.
A égalité p’tit loup.
Toujours.
C’est comme ça entre toi et moi.

« Tu ne me domineras pas ! »
C’est ce que mon grondement à moi veut dire. Si tu veux m’avoir p’tit loup il va falloir montrer patte blanche. Et puis je lui échappe à nouveau et grimpe avec agilité sur un promontoire rocheux. La lune est haute maintenant et je peux pas m’empêcher d’hurler dans sa direction, baignée par ses rayons, énergisée par sa lueur et sa présence.
Ca me fait tout drôle de ne pas entendre les autres membres répliquer, de ne pas sentir la présence de Col et celle de Marisol. De ne pas voir Malone stoïque face aux facéties de Shareen, gardant un œil sur les autres. Sur moi.

Cette nuit c’est moi qui surveille. Cette nuit c’est moi qui guide.

Je pointe mon museau vers Scott et lui tourne autour, m’assurant toujours que j’ai son attention pleine et entière. J’aimerais aller me blottir contre cette fourrure blanche, aller le câliner pour essayer de lui montrer que je ne suis pas son ennemie. Mais mon instinct me souffle qu’il est beaucoup trop tôt pour ça. Mon corps lupin reste sur ses gardes. Je me sens aussi sereine qu’excitée par notre combat et par la chasse à venir. Je renifle dans l’air, cherche. Et puis je trouve. Une biche. Son effluve douçâtre me remplit les narines et je gronde un peu, jappe avec excitation pour l’inciter à me suivre.  
Je m’élance soudain sur la piste du cervidé.
« Tu veux une proie, p’tit loup ? J’vais t’en donner une. Suis-moi. »

Elle, cette femelle rusée et agile, lui file entre les pattes et Scott-loup en conçoit une frustration intense. Elle dégage quelque chose de différent du mâle roux qu'il a précédemment rencontré et  dont il a accepté la morsure à grand peine. Il s'est soumis à l'autorité du mâle mais il n'a aucune envie de se considérer comme inférieur à la femelle.

Il la veut pleine et entière.
Elle lui fait comprendre que cet honneur se mérite.

Méfiant mais intrigué il la laisse tourner autour de lui, décrivant un cercle lent. Il la fixe de son regard de givre.
Quelle sera l'épreuve ?
Qu'attend-elle de lui ?
Elle grimpe sur des hauteurs et hulule avec une exaltation contagieuse. Scott-loup ne peut s'empêcher de l'imiter et son hurlement fait vite écho au sien. Il trépigne. La Faim le taraude, l'appel de la chasse fait bouillonner son sang. Museau en l'air, il hume la nuit à gros goulots, cherchant à refouler le parfum d'Elle qui lui envahit encore les sens. Elle est est aussi excitée que lui et chaque fibre de son être résonne en diapason.

Brusquement, Elle détale.

Lui aussi l'a sentie.
Une proie.
Leur première de cette nuit.

Il la suit, la talonne, la rattrape bientôt. Ses foulées sont lestes et puissantes. Il y a une sorte de compétition  instaurée qui le stimule, qui le séduit même. Il va la coiffer au poteau, tuer cette biche, fanfaronner, gracieusement lui offrir un part de son butin et la posséder tout son soul après.
C'est enivré de cette idée qu'Elle et lui débusque leur gibier. Scott-loup est un prédateur-né, un tueur qui sait parfaitement traquer sa proie et l'acculer. Mais il est impétueux et trop sûr de lui. Sa mâchoire claque sur le vide à plusieurs reprises alors qu'il vise la jugulaire...

Il me rattrape vite.
Evidemment. J’en attends pas moins de mon p’tit loup. Juste pour le jeu, j’accélère encore, zigzague entre les troncs avec agilité, essaie de lui couper la route ou de le guider vers des terrains plus difficiles. Ça titille forcément son esprit compétiteur puisque ça le fait pour le mien.
Et lui et moi, sur ce point-là, on est pareil.
Pour la première fois, j’expérimente l’excitation à tous les niveaux en forme de louve. C’est… bizarre mais étrangement libérateur aussi, naturel. Ça veut pas dire pour autant que je vais m’offrir à lui sur un plateau.
Hors de question que je passe pour la femelle qu’on soumet.

On trouve rapidement notre proie, une belle et gracile biche. Mais en louve je ne vois que de la viande à tuer et à manger. Scott-Loup et moi, on lance la chasse mais il va trop vite, essaie de la mettre à mort seul, sans compter sur mon appui. Je gronde un peu.
« Avec moi ! On chasse ensemble ! »

La biche va nous échapper s’il ne m’écoute pas. Et ça c’est hors de question. J’augmente ma vitesse, me désintéresse de l’attaque pour forcer le cervidé à se rabattre sur Scott-Loup en essayant de mordre ses pattes agiles pour lui faire peur et la guider là où je la veux. Ma technique fonctionne et bientôt, l’animal, affolé, s’offre presque aux crocs du Loup-blanc qui n’a plus qu’à la tuer d’un claquement brusque de mâchoire. Le sang coule et son odeur me rend presque dingue. Le poitrail soulevé par ma respiration rapide, je m’approche de notre proie morte en me léchant les babines. J’ai presque l’air de frétiller sur place.

« T’as vu mon p’tit loup ? On forme une bonne équipe…Ensemble, on est vachement plus fort. »

Je m’approche encore, pleine de confiance, l’adrénaline encore vibrante dans tout mon corps. Je gronde un peu s’il le fait, mais finis par simplement donner un coup de langue sous son museau tâché de sang. Je le lâche pas du regard, prête à m’éloigner aussi sec s’il fait le moindre mouvement hostile. Malgré toutes les merdes qui nous sont tombées dessus…là, à cet instant précis, je suis heureuse.

D’être louve.
De chasser avec lui.
D’être là, sous la Lune, avec le garçon-loup qui me fait palpiter le cœur comme jamais.

« Comme j’aimerais que tu sois vraiment là, Scott ».  

Proie.
Tuer.
Il court, crocs découverts, foulées déliées.
Il est véloce, déterminé.

Il n'a pas besoin de cette femelle pour chasser. Pourquoi tient-elle à partager ? Il veut pour lui. Rien que pour lui. Il se gave de la peur qui exhale du cervidé. Elle se sait condamnée et sa terreur persille sa sueur. Lorsque sa gorge est à portée de crocs, il saute et lui arrache un beau morceaux de jugulaire, fauchant sa course. Explosion bouillonnante d'hémoglobine. Sa réception est parfaite et son pelage blanc souillé de sang. Exultation !

Planté devant la biche agonisante, il gronde en voyant la femelle approcher.

A moi.
La Proie.
La Forêt.
Toi.
Tout à moi !

Mais la menace ne semble pas avoir prise sur la donzelle. Elle lui rend son grognement et... lui lèche le museau. Agréable. Oui, c'est agréable.

Recommence !

Il s'approche et lui rend son coup de langue avec un jappement.

Recommence!
Je veux !
Allez !

Il la pousse avec sa truffe afin qu'elle poursuive le toilettage avant de finalement accepter qu'il grignote la biche à deux.

Juste parce que je le veux bien.

C'est du moins ce qu'exprime son regard animal quand soudain, une odeur sublime et entêtante surpasse celle de la viande de cerf encore chaude. Ses pupilles se dilatent.

De la chair encore plus fraiche.
De la chair d'humain!

Sans crier gare, il détalle en direction du merveilleux fumet.

Je suis tellement étonnée de ne pas subir de rebuffade sèche ou carrément des menaces que je reste figée un moment. Et puis il revient chercher des câlins et mon cœur se dilate de joie. Mon Scott est pas loin.
Je le sais.
Trop heureuse pour lui dénier des câlins post-chasse, je léchouille son museau pour nettoyer le sang de son pelage précédemment immaculé. C’est comme se bécoter finalement et j’en jappe de joie avant qu’on s’attaque au diner. La biche est délicieuse, encore chaude, la viande juteuse.
Ca doit paraitre dégueulasse pour les autres, mais y’a rien de meilleur que de béqueter l’animal encore frissonnant d’une vie qui vient de lui échapper et qu’on a chassé.
Scott a l’air d’aimer aussi.
Je suis tellement gonflée de confiance et d’excitation que je le sens une seconde trop tard.

Une putain de seconde trop tard.
Le fumet de l’humain.
Pas le temps de me demander le pourquoi du comment.
Scott est parti au quart de tour en délaissant sa proie déjà morte.
Et franchement… je le comprends. Les humains ont aucune idée d’à quel point ils sentent bons ! Pas bon, genre, je viens de faire un bain de parfums hein ! Genre bon comme un bon burger…ou un bon bifteck.

Un flot de trouille me prend aux tripes alors que je lui cours après. Et je sais pas si c’est moi qui suis plus rapide ou lui particulièrement lourdaud, mais je le rattrape sans difficulté et je me précipite sur son chemin pour l’arrêter. On roule au sol mais je me remets rapidement sur mes pattes.
Je me plante devant lui, furax et déterminée, le pelage dressé sur mon échine, les babines retroussées sur mes crocs et les oreilles presque plaquées sur ma tête.
Cette fois je plaisante plus !

« Je te laisserai pas devenir le tueur que tu redoutes tant, mon p’tit loup. Je te l’ai promis… »

Je me jette sur lui, bien décidé à lui faire une démonstration de domination. Ça m’emballe franchement pas plus que ça, mais je suis prête à tout pour qu’il ne fasse de mal à personne. Concentrée comme jamais pour ne pas qu’il m’échappe, j’esquive ses attaques et cette fois lui sert les miennes. J’ai des heures d’entrainement de bagarres déloyales avec Shane. Tous les coups tordus, je les connais d’avance. Je mords vicieusement un jarret, le mettant à terre. Puis j’attrape finalement la peau de sa nuque pour y planter violemment mes dents, le dominant de la hauteur de mes pattes. Scott aura des marques. Bien plus vilaines que celles que je lui fais d’habitude et non consenties. J’espère qu’il m’en voudra pas…
Des grondements et des jappements menaçants s’échappent de ma gorge et s’il fait mine de se relever, je fais jouer mes crocs qui claquent.
Dans le vide pour l’instant.
Je veux pas lui faire de mal.

« Ce soir, on joue selon mes règles. Comprend et accepte ou je te remets une dérouillée… »

Je rêve que d’une chose, c’est qu’il reprenne conscience et qu’on passe une vraie lune tous les deux. Mais je sais que ça n’arrivera pas de sitôt.
En attendant, je lui ai juré que je serai son garde-fou quand il se transforme en loup.
Et je tiens mes promesses.