Débarrassé de mon merveilleux chapeau – qui, il faut bien l’avouer, est pas hyper pratique en mission –, habillé en mission commando, je suis penché sur une grande table où a été dépliée deux cartes de la ville. Une première de la surface, et une seconde des égouts qu’on est en train de compléter au fur et à mesure de nos explorations pas très ragoutante. Même si je commençais à bien me repérer à TNN, j’écoute avec attention les indications de Shane. Lui la connait comme sa foutue poche.

- On a déjà fait tout ce tronçon hier. C’était plutôt calme et on a descendu ce qui s’y trouvait et sécuriser les bouches d’égout. Méfiez-vous à cette intersection, j’ai entendu pas mal de boucan qui venait de ce coin-là. Il prend un marqueur et entoure une rue en direction de l’Eden Rest et un endroit dans les sous-sols qui lui correspond. Pour aujourd’hui, ça serait bien d’avancer par ici.

Il montre le Salzen.
Le but du jeu est clairement d’avancer le plus possible vers les abords extérieurs de la ville. Même si ça risque de prendre un certain temps. Et puis Ainselsborough avait pas mal de boutiques bonnes à piller.
Shane prend un autre plan plus petit et note les différentes bouches d’égout dont il se souvient. Je le regarde faire avec effarement.

- Rahat ! T’as vraiment tout ça en tête ?
- Ouep… mon cerveau enregistre des trucs comme ça. Parfois c’est utile, parfois non.
Il a changé le gaillard. Je le vois bien. Moins nerveux, plus concentré. Je tapote son épaule avec un petit rire.
- Super pratique. Bien joué, p’tit gars, ça te va bien d'être là.

Shane se redresse et me lance un regard courroucé alors qu'il rougit comme une écrevisse. C'est A-DO-RA-BLE. Oui je sais, il a presque mon âge, mais il se comporte comme un gosse encore. Et je sens qu'il a besoin d'être validé dans ce qu'il entreprend alors je le fais bien volontiers.  

- Tu sais que techniquement j’suis presque aussi vieux que toi ?
Je lui fais les gros yeux.
- Bordel, j’oublie à chaque fois ! Désolé…
Je m’empare des pièces de mon bon vieux fusil à pompe et charge la mule en munitions. J’aime autant pas être à court si jamais.
- Du coup si tu m’accompagnes pas aujourd’hui, tu sais qui vient ? Ou c’est rodéo en solo ?
Ca me dérange pas. C'est ce que j'ai fais pendant des années.
- Comme si ta Madame allait te laisser y aller seul…
- Ouuuuh me dis pas ! C’est ‘Stache qui vient ?
J’en frétille d’avance. Ca va être encore mieux qu'une Pyjama Party !
- Nope, balance le jeune/vieux loup en désigne du pouce celui qui vient de pénétrer dans l’armurerie. C’est lui.

D’instinct je grimace. J’ai rien contre Hyppolite hein ! Soyons clairs… hormis le fait qu'il fasse pleurer ma femme. Mais je sais aussi que dans ce genre d'histoire entre frangins, c'est jamais tout noir ou tout blanc. Mais, lui a clairement un truc contre moi. En temps normal je m’en fous comme de ma première clope, mais là, s’agit d’une mission potentiellement délicate et j’aime autant savoir que mon partenaire va pas essayer de me balancer aux Priants pour se débarrasser de moi. Je force un large sourire sur mon visage et ouvre les bras comme si j’allais lui faire un câlin. Je m’y risquerai pas. J’aime bien ma non-vie finalement !

- Hyppo !!! Chouette ! Le Belge et le Roumain partent en mission ! On dirait le début d’une mauvaise blague non ? C’est pas que je veuille faire mon chieur mais y’avait personne de plus…affuté au combat pour m’accompagner ? J’aimerais pas que tu te salisses tu vois, je fais à Hyppolite avec un clin d'oeil en montant mon fusil en un tour de main. Je m’empare aussi de ma dague de chasseur qui me quitte quasiment plus quand je sors des bunkers. Je finis par hausser les épaules.

- Bon c’est pas tout ça, mais va falloir décoller. J’aime partir en mission mais j’aime encore plus en revenir. Qu’est-ce que j’te sers mon petit Hyppolite ? T’es branché gros calibre ? Lame ?

La vraie question c’est, est-ce qu’il sait au moins se servir d’une arme ? Après tout, je l’ai jamais vu en action le Poirot ! Enfin j’imagine que « ma Madame » aurait pas accepté autrement. On va bien voir ce qu’il a dans le ventre !

-Mon travail concerne la sécurité intérieure des bunkers et la gestion de nos prisonniers.
- Techniquement, tu seras toujours en intérieur... nuance Eustache avec un regard en coin.
- N'insulte pas mes cellules grises, réplique Hyppolite cassant.
- Ecoute, je ne fais que transmettre les ordres. Madame souhaite que tu prennes en charge cette mission.
- Permets-moi de trouver troublant la forte similitude de cette mission avec une mise au placard. Qui va me remplacer ?
- Personne ne va te remplacer...
- Je vais me répéter, mais par respect pour notre longue amitié, n'insulte pas mon intelligence.
- Je ne sais pas quelle est votre brouille cette fois, mais fait l'effort d'y mettre un terme rapidement en faisant amande honorable.
- Pourquoi serais-je forcément le fautif et pas la victime d'une odieuse injustice ?
- Parce que ça va plus vite dans ce sens. Simone a toujours été plus prompte à pardonner que toi.

Offusqué -car sans doute éclaboussé dans son égo par un semblant de vérité, Hyppolite se prépare, troquant son habituel costume pour un pantalon noir, un pull col roulé et une veste en cuir de la même couleur. Ajustant ses gants de cuir il se dirige vers l'armurerie où s'organise l'expédition afin d'y découvrir son binôme. Evidemment, il fallait que ce soit lui.

Bertus.
Le mignon de sa Soeur-en-Ténèbres.

- Hyppo !!! Chouette !

Son visage exprime l'exact opposé de cette assertion. Comme pour tous les gros durs bas de plafond, il n'y a que la carrure qui fait foi, or Hyppolite aussi grand que gracile, apparait bien frêle aux côtés du Taureau.

- Le Belge et le Roumain partent en mission ! On dirait le début d’une mauvaise blague non ? C’est pas que je veuille faire mon chieur mais y’avait personne de plus…affuté au combat pour m’accompagner ? J’aimerais pas que tu te salisses tu vois...

Il lui fait une démonstration de toute l'étendue de sa virilité guerrière ce qui exaspère profondément son congénère. Il lui répond par un silence dédaigneux.

- Bon c’est pas tout ça, mais va falloir décoller. Le chippendale à crocs lui présente l'armurerie que Poirot à personnellement constituée pour une bonne partie. Qu’est-ce que j’te sers mon petit Hyppolite ? T’es branché gros calibre ? Lame ?

Hyppolite juge alors qu'il est temps de faire comprendre à son cadet qu'il serait de bon ton qu'il apprenne le respect. Sinueux comme un serpent et aussi inversement vif que le poids de ses années,  il désarme Bertus par quelques points d'acupression qui lui engourdissent le bras et lui font lâcher sa machette. Hyppolite s'en empare et braque le tranchant sur la glotte de son binôme. L'action est allée si vite que ni Bertus, ni Shane n'ont pu avoir le temps de vraiment détailler ses étapes.

- J'ai fait les tranchées de la Grande Guerre, me salir n'a jamais été un problème. Par ailleurs, je suis le meilleur élève de Madame que ce soit au combat ou au tir. Aussi, devrais-tu ne pas te fier aux apparence, blanc-bec.

Il lui retourne la machette côté manche afin de le lui rendre. Avec une froide nonchalance, il choisit un glock 19, les munitions qui vont avec, plusieurs torches, une dague et... une rapière. Harnaché de la sorte, il plie soigneusement les cartes annotées par Shane et les range dans sa veste.

- Je suis prêt, déclare-t-il sobrement.

Alors que je tiens mollement ma dague, je me la fais chourrer et sa lame vient chatouiller ma glotte.
J’y jette un coup d’œil ennuyé puis lève mon regard vers Hyppolite l’air de dire : « Sérieusement gars ? ». L’ego de mon « beau-frère » et si chatouilleux que ça pourrait presque être mignon.

- Eh mais détends-toi mon gars !
- J'ai fait les tranchées de la Grande Guerre, me salir n'a jamais été un problème. Par ailleurs, je suis le meilleur élève de Madame que ce soit au combat ou au tir. Aussi, devrais-tu ne pas te fier aux apparence, blanc-bec.
Je ravale le blanc-bec et essaie de me montrer un poil plus adulte. Mère-nuit c’est dure !
- Cool. Sinon un simple, « J’suis opérationnel quand tu veux Bertus », ça marchait aussi mais c’était moins…flamboyant hein ? J’entends Shane tousser pour camoufler un petit rire, signe qu’y’en a au moins un qui s’amuse dans cette pièce. Si tu voulais tellement ma lame, fallait le dire. Et si c’est juste pour la démo, j’aime autant la récupérer. Héritage familial.

Je tends la main et récupère mon arme blanche. Puis je l’observe avec attention pendant qu’il s’équipe. Il choisit l’un des meilleurs semi-automatiques du marché, l’arme préférée des militos et flics.
Shane vient me claquer l’épaule avec un petit sourire de sale gosse.
- Amusez-vous bien les tourtereaux. Et soyez prudents.  

Laissés seuls, je regarde la carte disparaitre dans la poche d’Hyppolite et arque un sourcil.
- T’aurais peut-être pu y jeter un œil avant de la ranger ? J’veux bien que tu sois une grosse tête mais ça serait bien que tu saches où on va, non ?
- Je suis prêt.
Je m’appuie contre la table et croise mes bras, signifiant clairement que je ne bougerai pas tout de suite.
- Pas moi. Je pars pas comme ça en mission avec un mec aussi remonté contre moi sans m’assurer de deux, trois trucs avant. Je sais pas ce qui me vaut la détestation du grand Hyppolite Poirot mais je suppose que c’est grosso modo la même raison qui pousse Simone à battre froid à ta jolie druidesse sans réelle raison. Bref, c’est pas mes oignons et je fais avec. T’es un ancien soldat, donc j’ai pas besoin de t’expliquer que là-bas va falloir qu’on compte l’un sur l’autre. Si ça chauffe, tu seras peut-être mon seul rempart contre les saletés qui grouillent dans les égouts et la vraie mort ou l’incubation de leur foutus papillons. Je suis sérieux comme un pape et je plante mes yeux dans les siens. Je veux être certain que je peux compter sur toi, Hyppolite.

Je me gratte la nuque, gêné de la confession que je vais lui faire, mais j’estime que quand il s’agit de risquer sa vie, l’ego entre plus tellement en jeu.

- J’ai doublement besoin de le savoir parce que… j’ai la trouille des sous-sols depuis ma mort. Je gère la plupart du temps, surtout si je suis pas seul. Mais si pour une raison x ou y je dérape, j’ai besoin de savoir que je pourrais compter sur ton sang-froid pour me foutre une raclée et me ramener au moment présent. Petit sourire en coin. Je suis à peu près certain que c’est une partie du job que t’adorerai de toute façon… et pas la peine de faire exprès de me faire paniquer rien que pour écraser ton poing sur ma tronche. Si y’a que ça pour te faire plaisir, on s’entrainera une fois ou deux ensemble.

J’ai presque une expression aguicheuse. Si ça peut assainir notre relation au passage, ça serait pas plus mal.
Lentement je lui tends la main.

- Qu’est-ce que t’en dis ? Partenaires ? Just pour quelques heures. T’aurais le droit de me re-détester et de me montrer tout le dédain du monde après, comme d'habitude.

- Pas moi. Je pars pas comme ça en mission avec un mec aussi remonté contre moi sans m’assurer de deux, trois trucs avant.
- Je ne le suis pas, ce serait t'accorder bien trop d'importance.
- Je sais pas ce qui me vaut la détestation du grand Hyppolite Poirot mais je suppose que c’est grosso modo la même raison qui pousse Simone à battre froid à ta jolie druidesse sans réelle raison.

Crispation de mâchoire. Un silence assourdissant comme toute réponse.

- Bref, c’est pas mes oignons et je fais avec. T’es un ancien soldat, donc j’ai pas besoin de t’expliquer que là-bas va falloir qu’on compte l’un sur l’autre. Si ça chauffe, tu seras peut-être mon seul rempart contre les saletés qui grouillent dans les égouts et la vraie mort ou l’incubation de leur foutus papillons. Je veux être certain que je peux compter sur toi, Hyppolite.
- Contrairement à toi, Bertus, je sais faire fi de mes sentiments personnels dans le cadre professionnel. Nous sommes dans le même camp. Ce devrait être suffisant pour toi.

Il ne peut s'empêcher d'ajouter mentalement un "plébéien" parfaitement mesquin en ponctuation.

- J’ai doublement besoin de le savoir parce que… j’ai la trouille des sous-sols depuis ma mort. Je gère la plupart du temps, surtout si je suis pas seul. Mais si pour une raison x ou y je dérape, j’ai besoin de savoir que je pourrais compter sur ton sang-froid pour me foutre une raclée et me ramener au moment présent.

Poirot le fixe un long moment avant de consentir à adoucir le ton.

- Je ne l'aurais pas décelé. Tu donnes bien le change. Je veillerais sur ton séant de cowboy roumain. De toute manière si jamais il s'en trouve esquinté, Madame m'en voudra davantage que ça n'est le cas à présent.
- Je suis à peu près certain que c’est une partie du job que t’adorerai de toute façon… et pas la peine de faire exprès de me faire paniquer rien que pour écraser ton poing sur ma tronche. Si y’a que ça pour te faire plaisir, on s’entrainera une fois ou deux ensemble.

Sobre haussement de sourcil et sourire en coin vite dissimulé.

- Je ne suis pas sadique. Pas toujours. Si jamais j'en viens un jour à exploiter ta phobie, ce sera pour des finalités plus raffinés qu'un vulgaire coup de poing.
- Qu’est-ce que t’en dis ? Partenaires ? Just pour quelques heures. T’aurais le droit de me re-détester et de me montrer tout le dédain du monde après, comme d'habitude.
- Si tu m'en donnes le droit , en ce cas... ironise-t-il tout en lui serrant brièvement -mais avec une fermeté franche- la pogne. Bien, puisque te voilà rassuré, peut-on se mettre en route ?

- Contrairement à toi, Bertus, je sais faire fi de mes sentiments personnels dans le cadre professionnel.
- Ah ? Je m’étonne avec humour. C’est pas ce que ta petite démo a prouvé, je réplique avec un petit sourire en coin. Et je te trouve un peu injuste sur le coup. J’ai été espion pour ton organisation, il me semble. Et j’ai fait des trucs qui allaient totalement à l’encore de mes « sentiments personnels ». T’as le droit de pas m’aimer…me juge juste pas trop vite. C’est pas digne de ton intelligence suprême en plus.
- Nous sommes dans le même camp. Ce devrait être suffisant pour toi.
- Oui…et non.

Je lui explique exactement pourquoi, lui révélant un truc donc je suis pas spécialement fier. Mais je sais qu’il me prend pour un gros tas de muscles débile et bas du front. J’essaie juste de lui montrer que je suis pas que ça. Enfin je crois pas n’être que ça…

- Je ne l'aurais pas décelé. Tu donnes bien le change.
Son ton se fait moins méprisant et j’affiche un sourire plus large.
- Merci. Je veux pas que Simone s’inquiète et j’essaie de m’occuper l’esprit pour pas paniquer complètement. Je peux compter sur toi pour pas lui dire ? Elle a besoin de pouvoir compter sur moi. J’ai pas tellement le droit de jouer au pétochard.
- Je veillerais sur ton séant de cowboy roumain. De toute manière si jamais il s'en trouve esquinté, Madame m'en voudra davantage que ça n'est le cas à présent.
Je laisse filtrer un petit rire.
- Ca a ces avantages d’être le conjoint de la boss. Je suis à peu près certain que c’est une partie du job que t’adorerai de toute façon… et pas la peine de faire exprès de me faire paniquer rien que pour écraser ton poing sur ma tronche. Si y’a que ça pour te faire plaisir, on s’entrainera une fois ou deux ensemble.
- Je ne suis pas sadique. Pas toujours.
Cette fois, j’éclate de rire.
- C’est bon à savoir !
- Si jamais j'en viens un jour à exploiter ta phobie, ce sera pour des finalités plus raffinés qu'un vulgaire coup de poing.
Je lui propose une poignée de main qu’il me rend et je pousse un discret soupir de soulagement. J’aime autant ça.  
- Si tu m'en donnes le droit, en ce cas...
- Mais oui… tout ce que tu veux ! Qu’est-ce qu’on ferait pas pour la famille hein…
- Bien, puisque te voilà rassuré, peut-on se mettre en route ?
- Une minute.

Je pose ma dague sur la table et prononce les prières à Mère-Nuit solennellement. Je ne déroge jamais à ce rituel, comme tous les Taur j’imagine.

- Cette fois c’est bon, je déclare en rangeant mon arme et en reprenant mon fusil.
On se dirige vers la sortie des bunkers et l’atmosphère change soudain lorsque la lourde porte se referme derrière nous. Evidemment ça pue comme c’est pas permis, une odeur rance et humide qui vous prend à la gorge. Pas besoin de tendre l’oreille pour entendre des bruits d’eau au loin et des petites pattes qui courent un peu partout. Beaucoup d’animaux ont préféré se retrancher sous terre comme nous et pas juste des rats ou de la vermine. On a déjà vu des chiens et des chats, perdus sans leurs maitres.
- Ca y est, on est plus que nous deux… en route slăbănog, je prononce ce dernier mot sur un ton qui signifie clairement que je me fous gentiment de sa gueule. A tous les coups, il sait parler roumain, fichu intello. Oui j’aime jouer avec le feu.

Les chemins qui ont été déjà empruntés ont été balisés et on progresse tous les deux en silence. Un silence oppressant qui me rend un peu nerveux. J’aurais besoin de musique. Ca m’a toujours aidé dans ces cas là. Mais j’ai préféré m’abstenir de prendre mon portable et siffloter me semble pas très intelligent du coup je parle tout bas à mon compagnon, parce que j’ai que lui sous la main. Mes doigts se crispent un peu sur mon arme. Pourtant je sais qu’on se trouve encore dans une zone « sécurisée ». Mais à vrai dire, les monstres me font moins peur que l’absence d’air frais, de lumière et ce parfum dégueulasse de pourriture.

- Alors… comment ça se fait que tu te retrouves à arpenter ce magnifique paysage à mes côtés ? Je suppose que c’est pas toi qui a demandé… Petit rire nerveux. C’est une « punition » de Simone ? Tu sais dans le fond elle déteste pas vraiment Diana…enfin elle l’a connait pas assez pour ça. D’ailleurs, c’est du sérieux avec elle ? Non parce que si c’est juste un coup de quelques soirs, c’est peut-être pas la peine que je m’esquinte à travailler notre vampirette au corps pour qu’elle fasse des efforts, tu vois…

Comme tous les voies d'accès en extérieur des Shelters, il faut prendre un ascenseur pour remonter de plusieurs mètres afin de rejoindre les égouts sous l'Arena. Les deux vampire armés n'échangent guère durant leur voyage. Une fois les portes coulissantes du remonte charge, et la porte hublot en fonte épaisse du sas rabattue derrière eux, le sort complexe de dissimulation maquille la présence de cette issue.

A partir de là, même si des brouilleurs mentaux sont sensés dérouter et chasser les intrus sur plusieurs kilomètres, il leur faudra se montrer vigilant.

- Alors… comment ça se fait que tu te retrouves à arpenter ce magnifique paysage à mes côtés ?
- Pas la moindre idée.
- Je suppose que c’est pas toi qui a demandé…
- Tu supposes bien. Ca n'est pas mon affectation, ça n'est même pas mon niveau d'affectation... Manière de souligner qu'il n'est pas un vulgaire subalterne.
- C’est une « punition » de Simone ?
- A ton avis ... ? grince Hyppolite.
- Tu sais dans le fond elle déteste pas vraiment Diana…enfin elle l’a connait pas assez pour ça.
- Elle ne se prive pas pour la traiter comme une prostituée dont les dent raillent le parquet, pourtant....
- D’ailleurs, c’est du sérieux avec elle ?  Hyppolite tourne brutalement son nez pointu vers le roumain. Son air pincé de pure offuscation en dit long sur ce que lui inspire cette question. Tout son être hurle à l'outrage. Non parce que si c’est juste un coup de quelques soirs, c’est peut-être pas la peine que je m’esquinte à travailler notre vampirette au corps pour qu’elle fasse des efforts, tu vois…
- Diana n'est pas un "coup" pas plus que Simone n'est une "vampirette"! Un peu de respect que diable ! Je ne m'engage jamais dans une relation sans le sérieux et la considération qui va avec. Quant à Madame, elle est la Reine de la cour de Tir Na Nog, pas une vulgaire call-girl.

Un silence suit cette tirade sévère.

- Aussi curieux que cela puisse vous paraitre à toi et Simone, j'aime Diana plus viscéralement que je n'ai jamais aimé quiconque. Ceci étant... J'imagine que malgré la répugnance que m'inspire cette constatation, tu es le mieux placé pour ronger les angles de notre chère Simone....

Un bruit lointain les force à clore cette conversation. Difficilement identifiable à cette distance, il force les vampires à une concertation muette. Animal égaré ou véritable intru ?

- C’est une « punition » de Simone ?
- A ton avis ... ?
J’ai un petit gloussement, toujours légèrement nerveux mais au moins, lui parler me distrait.
- Ouais c’est bien son genre. Tu sais dans le fond elle déteste pas vraiment Diana…enfin elle l’a connait pas assez pour ça.
- Elle ne se prive pas pour la traiter comme une prostituée dont les dents raillent le parquet, pourtant...
- Oh ? Je fais mine de m’étonner. De la même façon que tu me traites comme une sorte de chippendale pas très futfut indigne de Simone ? Ca me surprend beaucoup ! Je dégouline d’ironie mais je trouve ça terriblement drôle qu’ils ne se rendent pas compte qu’ils sont simplement un peu jaloux. D’ailleurs, c’est du sérieux avec elle ? Non parce que si c’est juste un coup de quelques soirs, c’est peut-être pas la peine que je m’esquinte à travailler notre vampirette au corps pour qu’elle fasse des efforts, tu vois…
- Diana n'est pas un "coup" pas plus que Simone n'est une "vampirette" ! Un peu de respect que diable !
J’ai les yeux qui pétillent d’amusement.
- Vous êtes bien pareils Simone et toi… si collé monté ! C’est si mignonnement désuet ! Pour ta gouverne, il n’y a personne que je respecte plus que Simone, ce qui ne m’empêche pas de l’appeler ma « vampirette ». Ca fait du bien à ses merveilleuses chevilles.
- Je ne m'engage jamais dans une relation sans le sérieux et la considération qui va avec.
- Evidemment… j’espère que Diana sait tout ça.
- Quant à Madame, elle est la Reine de la cour de Tir Na Nog, pas une vulgaire call-girl.
- Mère-Nuit ! Le jour où je la traite de call-girl, je te permets de me descendre sans sommation.

Comme je le sens encore un peu chatouilleux aux entournures, je préfère me taire. Même si plus on avance, moins je me sens à l’aise. Je compense en étant deux fois plus vigilant, ça occupe mes nerfs. A ma plus grande surprise, c’est Hyppolite qui reprend la parole.

- Aussi curieux que cela puisse vous paraitre à toi et Simone, j'aime Diana plus viscéralement que je n'ai jamais aimé quiconque.

Je me tourne vers lui avec un petit sourire à la limite de l’attendrissement. J’ai l’impression de me voir un peu en lui. Les femmes ont le don de vous retourner la tête et le cœur. Et si j’en pensais un figer comme un roc, c’est bien celui d’Hyppolite. Diana doit vraiment avoir des dons d’ensorceleuse.

- Et aussi curieux que ça va te paraitre, je suis heureux pour toi, Hyppo. Tout le monde a le doit à sa part de bonheur. Surtout maintenant, je conclue très sérieusement.
- Ceci étant... J'imagine que malgré la répugnance que m'inspire cette constatation, tu es le mieux placé pour ronger les angles de notre chère Simone...
J’ai un petit ricanement.
- T’en a mis du temps à venir à cette conclusion ! Du coup… est-ce que ça ne serait pas le moment de te montrer super sympa avec moi ? je fais avec un sourire canaille.

Un son diffus nous parvient et on se fige l’un et l’autre, attentifs. Lentement, je sors ma lame et la fait instinctivement tourner dans ma main. Dans ces couloirs étroits et qui répercutent autant le moindre bruit, les coups de feu ne sont à donner qu’en ultime recours. Après un bref coup d’œil échangé, on se place instinctivement en posture de combat.
Mais plus le bruit se fait distinct, plus je perçois le tapotement de quatre pattes.

- Animal, je souffle avant de me détendre légèrement. Vu le poids je dirais un gros chien ou quelque chose d’approchant. Au détour d’un virage, la silhouette racée d’un berger allemand couvert de crasse et famélique nous apparait soudain. L’animal à un collier, signe qu’il appartenait à quelqu’un, pourtant il se met à grogner aussitôt qu’il nous aperçoit, tendu et méfiant.
- Oh pauvre bête…

Je range ma lame et lève les mains en avançant doucement. Je suppose qu’il a été dressé mais quelques semaines dans les égouts ont dû aiguiser ses instincts de survie. Personne ne devrait avoir à survivre dans le noir et dans la crasse, personne ne devrait avoir à perdre tout ce qu’il avait. Même ce clebs.
Je m’agenouille et lui parle doucement, d’une voix caressante.

- N’ai pas peur mon grand, on ne te veux pas de mal. Promisiune ! T’es tout seul hein ? Ouais… c’est franchement nul, c’est ça, approche…

Le chien semble être sensible au ton de ma voix et vient doucement vers nous, même s’il se départie pas de son air méfiant. Intelligent, le canidé ! Finalement il arrive à proximité de ma main tendue et la renifle.

- Ouais, je sais, je sens la chair morte, mais me bouffe pas ça te collerait une indigestion et mon pote là, il a rien que la peau sur les os et du muscle tout coriace et dur à mâcher. Enfin je suppose.

Finalement je me risque à lui caresser la tête et le chien se laisse faire avec un petit jappement. Il se colle presque à moi en couinant et lèche ma main. Je peux lire le nom sur son collier.

- Newton ? Rahat tes maitres étaient pas cool. C’est comme ça que tu t’appelles mon beau ? T’es un gentil toi, hein ?
Ok…j’ai envie de le ramener à la maison…il a que la peau sur les os et mériterait une bonne douche mais ça me crève le cœur de le laisser comme ça.
- Tu crois que Simone fera quelle tête si je lui ramène un toutou ?  

Les deux vampires se tendent, les sens à l'écoute. La menace peut prendre des formes inattendues et ils doivent s'attendre à tout. Cependant, le pas cadencé d'un quadrupède et le cliquetis de ses griffes sur le sol réduisent les suppositions.

- Animal, souffle Bertus.

Hyppolite acquiesce en silence. Reste à savoir quel type de mammifère il s'agit. Un berger allemand efflanqué et crasseux dont les côtes saillantes attestent d'un affamement manifeste.

- Oh pauvre bête…
- Il avait un maitre, commente sobrement Hyppolite.

Le canidé grogne, méfiant, mais approche malgré tout. Son éducation doit le pousser à trouver de nouveau un compagnon humain. Il renifle prudemment les doigts de Bertus.

- Ouais, je sais, je sens la chair morte, mais me bouffe pas ça te collerait une indigestion et mon pote là, il a rien que la peau sur les os et du muscle tout coriace et dur à mâcher. Enfin je suppose.
- Tu demanderas à Diana. Courte oeillade vers le chien avant de fixer la direction d'où il est venu. On devrait remonter la piste qu'il a suivi. Il est possible qu'on trouve son maitre... ou ce qu'il en reste.

Bertus décrypte le nom sur la médaille du collier.

- Newton ? Le canidé réagit avec une familiarité chaleureuse, trop heureux d'entendre son non, sans doute. Rahat tes maitres étaient pas cool.
- Pour ta gouverne Newton est une belle référence au fondateur de la mécanique et au précurseur des théories sur la gravité. Ses maitres devaient beaucoup le considérer au contraire.
- C’est comme ça que tu t’appelles mon beau ?
- Vu la manière dont il fait la fête, je suppute que oui.
- T’es un gentil toi, hein ?

A les voir batifoler l'un contre l'autre, Poirot se demande lequel des deux est le cabot.

- Tu crois que Simone fera quelle tête si je lui ramène un toutou ?

Hyppolite lève yeux au ciel.

- Attendons de voir si il n'a pas encore un maitre avant de ruer sur l'adoption sauvage. Pour ce qui est de Simone, tu la mettras devant le fait accompli de toute façon. Je me trompe ?

Et le belge de prendre le chemin emprunté par Newton en sens inverse.

- Ouais, je sais, je sens la chair morte, mais me bouffe pas ça te collerait une indigestion et mon pote là, il a rien que la peau sur les os et du muscle tout coriace et dur à mâcher. Enfin je suppose.
- Tu demanderas à Diana.
Je pivote la tête vers mon compagnon de misère avec un petit sourire malicieux.
- Tu viens de faire une blague grivoise ou c’est moi ? Mais j’y manquerai pas…
- On devrait remonter la piste qu'il a suivi. Il est possible qu'on trouve son maitre... ou ce qu'il en reste.
Je pousse un soupir en fixant la même direction que lui, essayant de percer l’obscurité.
- Je parie sur les restes mais on sait jamais. Je tourne à nouveau mon attention vers le chien. Il est où ton maître mon tout beau ? Newton ? Rahat tes maitres étaient pas cool.
- Pour ta gouverne Newton est une belle référence au fondateur de la mécanique et au précurseur des théories sur la gravité.
- Tu me prends pour une buse en fait ? Je sais qui est Newton merci… Même que je sais lire et écrire ! Un exploit pour un bouseux roumain hein ?
- Ses maitres devaient beaucoup le considérer au contraire.
Je lève les yeux au ciel.
- C’est sûr que c’est mieux que « Précieux » ou « Joujou ». Je t’accorde que Newton, ça a plus la classe. Newt ? C’est comme ça que tu t’appelles mon beau ?
Je préfère ce petit surnom et visiblement le chien le reconnait aussi.
- Vu la manière dont il fait la fête, je suppute que oui.
- Je cause au chien Hyppo ! T’as vu ça comme il est nombriliste un peu ? L’arrogance des vampires… j’te le fais pas dire ! T’es un gentil toi, hein ?

C’est pas pour rien qu’on dit que les chiens sont les meilleurs amis des hommes. J’ai jamais rien entendu sur les vampires par contre.

- Tu crois que Simone fera quelle tête si je lui ramène un toutou ?
- Attendons de voir si il n'a pas encore un maitre avant de ruer sur l'adoption sauvage. Pour ce qui est de Simone, tu la mettras devant le fait accompli de toute façon. Je me trompe ?
J’émets un petit rire plein de malice.
- Tu sais ce qu’on dit…mieux vaut demander pardon que la permission ! Ca marche avec ma Simone aussi. Excuse, « notre » Simone. Je suis très, très, très doué pour me faire pardonner.

Je m’attendais à un regard ou un reniflement de dédain, mais voilà qu’il se barre sans moi et sans un mot.
- Mais eh ! Attends, bougre de belge !

Je me redresse et sifflote le chien qui se met aussitôt sur mes talons. Je pétille de fierté alors que ce clebs a effectivement peut-être un maitre qui l’attend. En tous les cas, il est bien dressé. On reprend instinctivement une posture plus défensive et attentive. Je tends si fort l’oreille que j’entends chaque battement de cœur du chien et d’autres plus lointains et faibles qui doivent appartenir à rongeur certainement. Je suis assez calé niveau « bête qui grouille ». Heureusement la présence du chien et d’Hyppolite m’empêche de m’abimer dans mes souvenirs. On arrive devant un carrefour et on a beau regarder des deux côtés, rien ne bouge hormis des petites formes grisâtres au sol.

- Newt ? je murmure. A toi mon gars ! Tu viens d’où ? Il est où ton maitre ?

Le berger me regarde en penchant la tête sur le côté mais j’ai aucune idée de s’il se demande ce que je baragouine ou s’il me comprend. Lui aussi regarde à droite, puis à gauche avant de prendre tranquillement le chemin de droite. Je hausse les épaules avec une petite moue résignée.

- Si je me souviens bien de la carte, c’est vers notre destination non ?

Je vais pour suivre le chien quand un son étrange se répercute entre les murs de béton. Cavalcade, souffle laborieux, cœur qui bat à mille. Ca vient de l’autre côté, sur la gauche et je me tourne vers cette direction.

- Hyppo ? T’entends ça ? je chuchote si bas que seul un vampire peut percevoir mes paroles clairement. J’ai pas l’impression que c’est une de ces saletés…

Les bruits de pas se rapprochent et je mets en joue l’obscurité. Le truc se rapproche vite. Soudain une silhouette humaine perce les ténèbres, et un type tout en longueur en treillis nous fait face. Il a une tignasse de cheveux bouclés qui me semble pas très réglementaire et souffle comme un bœuf.

Il nous regarde, on le regarde, il nous regarde... bref ça continue comme ça pendant de longues secondes mais je garde mon arme levée. Soudain son visage se fend d’un large sourire et il s’appuie sur le canon de mon arme pour reprendre son souffle.

- Pfiou… j’ai jamais été aussi heureux de voir des gens ! J'ai cru que j'étais tout seul dans cette ville de dingue !
J’échange un regard perplexe avec Hyppolite. C’est quoi cet énergumène ? Il a pas l’air sale, ni malingre… et aussitôt je me méfie.
- T’es qui toi ?
Le gus nous sourit comme si tout était normal.
- Fletcher Webb… Fletch pour les intimes, ajoute-t-il avec un clin d’œil avant de bailler. Je serai ravi de papoter mais faut pas qu’on traine.
- Pourquoi tu…

Je m’arrête tout seul en entendant d’autres sons plus familiers. Bruits de gorge et claquement à vous faire hérisser le poil, d’autre pas de courses. Beaucoup. Même le gars peut les entendre à présent et se met aussitôt à détaller comme un lapin par le chemin d’où on vient.

- Courrez ! Vite ! Ces trucs sont affreusement dégueulasses !

Nouveau regard vers Hyppolite en armant mon fusil à pompe avec un sourire carnassier avant de siffler le chien.

Baston mon gars ?

Hyppolite, ouvrant la marche, arrive au carrefour avant Bertus et son nouveau compagnon canin. Il observe, les sens aux aguets. Ses instincts de vieux vampire sont chatouillés par un mauvais pressentiment : une atmosphère particulière empoisse l'air, de cette lourdeur silencieuse avant les plus terribles orages.
Bertus intime au chien de leur montrer le chemin et ce dernier obéit. Cependant, plus ils avancent, moins Poirot se sent à l'aise. Quelque chose cloche.

- Si je me souviens bien de la carte, c’est vers notre destination non ?
-En effet. répond sobrement son partenaire de mission. Reste attentif. Il y a quelque chose d'étrange qui plane, que je ne m'explique pas....

Une poignée de minutes à peine plus tard, le vampire perçoit le pouls agité et la respiration d'un humanoïde. Il se retourne aussitôt arme au poing.

- Hyppo ? T’entends ça ?
- Oui. souffle-t-il aussi imperceptiblement que son acolyte. C'est vivant et humanoïde... Et ne m'appelle pas "Hyppo".
- J’ai pas l’impression que c’est une de ces saletés…
- Je n'ai pas dit que c'était grouillant.

Un humain en tenue militaire fait son apparition. Il a l'air poursuivit par quelque chose. Malgré le port de l'uniforme, sa tignasse, sa stature maigrichonne et son endurance déplorable contredise la possibilité qu'il soit réellement des forces armées. Poirot n'aura pas le temps d'emmètre plus d'observations ou d'hypothèses. Le cliquetis caractéristiques de mandibules se fait entendre de son ouïe aiguisée.

- Pfiou… j’ai jamais été aussi heureux de voir des gens ! J'ai cru que j'étais tout seul dans cette ville de dingue !

Oeillade entendue vers Bertus. Il n'est pas plus dupe.

- T’es qui toi ?
- Fletcher Webb… Fletch pour les intimes. Je serai ravi de papoter mais faut pas qu’on traine.
- Pourquoi tu…
- Il est suivi, coupe Hyppolite..... J'en compte huit, peut-être neuf. Et toi ?
- Courrez ! Vite ! Ces trucs sont affreusement dégueulasses ! s'égosille le-dit Fletcher.

Hyppolite se tourne promptement vers le berger allemand :

- Newton ! Beschütze diesen Mann !

Le canidé semble comprendre l'ordre et court à la poursuite du fugitif. Avec une vélocité surnaturelle, le vampire se remet en position de tir. Il peut tirer quatre coups à cette distance avant que les Priants ne gagne leur position et qu'il ne faille reculer. Il s'exécute sans tarder, répondant par les actes. Il vise la tête avec son glock et fait mouche deux fois sur les quatre. L'un des monstre voit ses mandibules arrachées et s'en trouve ralenti. Un autre s'effondre, achevé à la seconde où le projectile lui a traversé la cervelle.

- Huit et demi, grogne-t-il pour lui même. Peux mieux faire...

Il y a une sorte de complicité qui s’instaure en un regard avec Hyppolite.
Moment de grâce…
… qui ne dure pas.

- Newton ! Beschütze diesen Mann !
Je regarde mon coéquipier du jour, parfaitement outré.
- Mais ! Donne pas d’ordre à mon chien enfin !
Je suis d’autant plus indigné que Newt lui obéit immédiatement. A ce stade je suis à deux doigts de croire que c’est un complot. Je note toutefois que le chien est dressé. Et plutôt bien. Il court comme une flèche vers le drôle de gars qui tourne la tête…

- Mais pourquoi vous me collez votre clébard aux fesses ?!

… et manque de se casser la gueule. Bien fait pour lui, on traite pas un pur berger allemand de « clébard ».
Après quelques moulinets des bras, le gus se rétablit avec plus ou moins de panache et le chien se poste dos à lui et montre courageusement les crocs aux créatures qui approchent.

Ce chien.
CE CHIEN.
Je l’aime.

Je le laisse donc gérer notre nouveau « pote » et attend les moches de pied ferme. J’arme mon fusil à pompe pendant qu’Hyppolite tire dans le tas et bien plus loin que je ne pourrais le faire. Il en touche deux. L’un ne se relève pas, l’autre avance moins vite.    

- Huit et demi. Peux mieux faire...
- Pauvre ‘tit Hyppopo ! (il a bien dit qu’il aimait pas Hyppo, non ? Du coup j’innove). T’inquiète, j’assure tes arrières.

Les coups partent alors que les Priants sont presque sur nous. Il y a une sorte de musicalité particulière au fusil à pompe, un rythme à chopper. Sans déconner ! C’est presque un instrument en soit. Juste qu’il donne la mort à la place d’une mélodie. Les balles hurlent hors du canon et trois horreurs se font trouer le crâne. Hors d’état de nuire. Les trois autres se les prennent dans le torse et comme on peut s’y attendre, ça ne les arrête absolument pas. Déjà, ils sont sur nous.

- Chier… faut que je recharge !
En attendant, je me sers de mon fusil comme d’une arme de corps à corps pour les repousser. Manière un poil rustique mais efficace puisque je les fais reculer de quelques mètres avec ma technique.
- Qu’est-ce qu’il pue ! Bon tu les finis ou t’as besoin d’une minute pour analyser le meilleur angle ?

Derrière eux, le « militaire » s’est arrêté de courir pour les observer, bouche bée et se met à dialoguer avec le chien qui s’est un peu détendu.
- Wow ! Vous assurez les gars ! crie-t-il les mains en porte-voix autour de sa bouche. Tu les connais depuis longtemps ? C’est vachement impressionnant. Tu me diras…tant mieux ! J’suis carrément nul en combat. Il se paie même le luxe de bailler. Par contre je serais pas contre une petite sieste !

- Pauvre ‘tit Hyppopo !
- Appelle-moi encore une fois comme ça et je te tire dans le cul.
- T’inquiète, j’assure tes arrières.
- J'ignore si tu files la plaisanterie !

Le fracas des balles lui prouve que : non. Le fusil à pompe de Bertus fait pleuvoir la mitraille tel un métronome pesant et sans concession. Son gros œuvre balaie trois Priants dont le crâne explose en pulpe comme des fruits mûrs.

- Chier… faut que je recharge !
- Replie-toi, il ne faut pas qu'ils te touchent !

Mais cet idiot joue de sa crosse comme d'un gourdin pour repousser les assaillants. Aussi peu orthodoxe soit la méthode, elle semble foutrement efficace.

- Qu’est-ce qu’il pue !
- Personne ne t'as demander de les embrasser ! Evite de te faire contaminer, Simone m'en voudrait.
- Bon tu les finis ou t’as besoin d’une minute pour analyser le meilleur angle ?
- Pour qui me prends-tu... lâche Poirot avec un sourire en pointe.

D'une oeillade , Hyppolite ajuste ses trajectoires et vise avec une précision létale. Il fait mouche par trois fois, logeant une balle dans la tête de chaque serviteur d'Unseelie. Il a manqué de peu la cervelle du quatrième mais le projectile a suffisamment fait de dégât pour l'hébéter, le figeant sur place. Le vampire attrape alors sa rapière et d'un geste aussi élégant que raffiné, s'approche de son adversaire et se fend d'une botte de Nevers parfaitement exécutée.

- Tu veux le dernier où je m'en charge ? demande Poirot avec un brin de provocation.

- Qu’est-ce qu’il pue !
- Personne ne t'as demandé de les embrasser !
Je grimace en repoussant le dernier.
- Ah parce que toi il te donne envie ? J’croyais que t’avais meilleur goût que ça.
- Evite de te faire contaminer, Simone m'en voudrait.
- Mon corps est un temple dédié à ma femme. Pas question de me faire toucher par ces merdes. Et puis chuuut à la fin arrête de papoter Hyppo ! Oupsi ça m’a échappé. Tu me déconcentre !  Bon tu les finis ou t’as besoin d’une minute pour analyser le meilleur angle ?
- Pour qui me prends-tu...
- Pour un putain de cérébral, je lance avec un grand sourire en reculant.

Je recharge vite fait tout en gardant un œil sur le combat. Hyppolite fait feu et créé de mignons petits trous en plein dans le front de trois Priants. Puis je l’observe sortir sa petite rapière en pinçant très fort les lèvres pour ne pas faire de commentaire. Du coin de l’œil je note que notre faux militaire (y’a qu’à voir ça dégaine pour comprendre qu’il est clairement pas dans l’armée) regarde le spectacle avec de étoiles dans les yeux. Sans déconner… c’est qui ce type ? Il cherche même pas à fuir, il est assis en tailleur sur un coin sec, les coudes sur les cuisses et mate les hostilités comme si c’était un diner spectacle…
Bon on s’occupera de son cas plus tard et je me tourne à nouveau vers Hyppolite. N’empêche que sa p’tite laminette nous débarrasse de la dernière mocheté sans trop de difficulté. Y’en reste un.

- Tu veux le dernier où je m'en charge ?
Je pince encore plus fort les lèvres mais sérieusement, j’arrive pas à me retenir. C’est inhumain la volonté qu’il me faut pour pas me foutre un tout petit peu de sa gueule.
- On n’attend pas tes autres potes les Mousquetaires ? Non ? Bon bah je m’en charge alors.
Rapide, je m’approche aussi près que possible et colle une basto dans le dernier monstre.
Vainqueurs par KO. Par acquis de conscience je fixe mon regard vers le tunnel d’où ils venaient et patiente, l’ouïe aux aguets.
- Ca a l’air bon, je balance au bout de quelques secondes.
Canon sur l’épaule, je me tourne vers Hyppolite.
- Eh ben ! On fait une bonne équipe non ? Qui l’eut cru ! Et j’te charriais. C’était plutôt classe ta botte.

Bon !
Il est temps de s’occuper de l’autre énergumène qui s’est déjà remis debout et applaudit avec enthousiasme. J’échange une nouvelle œillade sceptique avec mon partenaire de baston.
- Wow ! lâche le faux militaire. C’était super impressionnant ! Ca pétaradait de partout ! Rien que de vous regarder ça m’a crevé de fatigue ! On se serait cru dans un film d’action ou quelque chose comme ça. Ahaha du coup ça fait de moi la demoiselle en détresse qu…OI ! Mais… mais qu’est-ce qui vous prend ?
Il a rapidement levé les bras en l’air quand je l’ai menacé de mon fusil.
- Ca nous dit pas bien ce que tu fous là avec des vêtements qui ne sont clairement pas à toi…
L’homme déglutit et louche sur le canon.
- On… on pourrait pas en parler calmement là d’où vous venez ? J’imagine que vous avez trouvé un abri… non ? Allez quoi… soyez pas chien ! Vous voyez bien que sur l’échelle de la menace j’suis à zéro pointé. Tout ce que je veux c’est à manger et un endroit où dormir tranquille…
Il a un regard vachement suppliant, presque...hypnotique et au moment où il prononce le mot dormir… je m’écroule comme une masse.
Rideau.

- Eh ben ! On fait une bonne équipe non ? Qui l’eut cru !
- N'en fait pas un argument auprès de Simone pour repartir en vadrouille avec moi.
- Et j’te charriais. C’était plutôt classe ta botte.
- La "Botte de Nevers" pour ta culture, inventée par le chevalier Henri de Lagardère.
- Wow ! fait l'étrange énergumène. C’était super impressionnant ! Ca pétaradait de partout ! Rien que de vous regarder ça m’a crevé de fatigue ! On se serait cru dans un film d’action ou quelque chose comme ça.

L'impression bizarre qui assaille Poirot depuis qu'ils suivent la piste du chien ne tient pas aux embûches constituées par les Priants sur leur route mais à l'olibrius qui déblatère devant eux. Il en est certain à présent. Les deux vampires échangent un regard de connivence.

- Ahaha du coup ça fait de moi la demoiselle en détresse qu…OI ! Mais… mais qu’est-ce qui vous prend ?
- Ca nous dit pas bien ce que tu fous là avec des vêtements qui ne sont clairement pas à toi…
- On… on pourrait pas en parler calmement là d’où vous venez ? J’imagine que vous avez trouvé un abri… non ?
- Pas tant que nous n'avons pas statué de la menace potentielle que vous représentez.
- Allez quoi… soyez pas chien ! Vous voyez bien que sur l’échelle de la menace j’suis à zéro pointé. Tout ce que je veux c’est à manger et un endroit où dormir tranquille…

Une chappe de plomb s'abat sur la conscience d'Hyppolite. Il lutte avec énergie contre la torpeur qui fauche Bertus qui s'écroule brutalement. Newton le suit de près avec une gémissement plaintif. Poirot à  genoux se tient à un mur en bataillant pour rester conscient et c'est alors qu'il perd connaissance qu'il comprend à quoi il fait face. Il en a côtoyé un de nombreuses années avec cette même sensation de distorsion quand filtrait ses pouvoirs.

- ... Foutu avatar.......

Rideau. Bis.

- Oh bordel…
OH BORDEL DE MERDE !

- Non, non, non … ça recommence ! C’est pas vrai !! je lâche d’un ton sans doute plaintif.

Je regarde les trois corps au sol complètement horrifié…les mains dans mes cheveux. Même le chien roupille tranquillement. A chaque fois que je me trouve face à une situation délicate, c’est la même chose qui se produit.
POUF
D’un coup tout le monde s’endort… j’y comprends QUE DALLE ! Depuis que je suis sorti de taule (grâce à la même poudre de sommeil) et que j’ai eu la merveilleuse idée de venir me cacher dans cette ville ma vie part en sucette totale ! Non en fait, depuis que je suis seul je fais n’importe quoi ou alors la malchance me colle au cul…
Tout ça me sortira pas de ce nouveau pétrin royal.

- Hé ? je fais d’une voix faussement chantante en poussant le mec qui semble avoir un balai dans le cul du bout de ma botte militaire.
Evidemment ça ne le réveille pas. J'essaie de le secouer plus fort et je fais pareil à l'autre. Sans succès. En mordant ma lèvre, je zieute un peu autour de moi mais tout est calme et aucun des trucs qui me courraient après ne fait mine de bouger. Mon regard tombe sur les armes abandonnées par ceux que je prenais pour le service de secours – à tort – et pendant un cours instant. J’imagine les prendre et me barrer vite fait bien fait.
Et… cette simple idée me fait glousser nerveusement.

Je sais pas manier une arme ! Je serai capable de me faire mal en tirant ou de viser un truc qui ricocherait la balle qui viendrait se loger quelque part dans mon corps… et le pire c’est que je dramatise à peine ! Ces mecs sortent pas de nulle part… ils ont un abri.
J’ai besoin d’un lieu sécurisé ! Je tiendrais pas une semaine dans ce bordel ambiant qu’est devenu cette ville. Ok… ok… faut que je les réveille… mais comment ? Je sais déjà pas comment je viens de les endormir…
Et ils risquent bien d’être fumasses après ça… genre… assez fumasses pour me laisser ici… Avec beaucoup de réticence, je ramasse la plus petite arme des mains du brun, vérifie qu’elle soit chargée et la tient mollement le bras le long du corps.

- Ok, Fletch…tu peux le faire… tu PEUX le faire… fastoche ! T’es un genre de magicien ou je sais pas quoi ! Harry Potter en plus soporifique… Harry Dormeur… ahahah putain j’suis trop con. Allez concentration !!!

Je saute sur place comme un boxeur pas très athlétique, essaie de faire craquer mon cou mais c’est une plantade puisque je me coince un truc dans un petit cri et décide d’arrêter les frais niveau échauffement.
J’agite la main devant moi comme un Spiderman sous crack et qui n'aurait plus de toile.

- Allez debouuuuuut, je le veuuuuuuux.
Malgré mon ton tout à fait convainquant, ça ne donne RIEN de chez RIEN. C'est pas du tout la panique... et je me mets à faire les cent pas (enfin les dix, le tunnel est pas assez grand et hors de question que je m'approche des...monstres).
- Réfléchis, réfléchis…
Bon, j’ai parlé et soudain ils se sont écroulés… je me souviens d’une vague sensation de…quelque chose… ou plutôt d’une présence quand j’ai parlé de dormir… un truc qui me protègerait ?
- Allez machin… si je les réveille pas, je suis cuit, tôt ou tard… un p’tit coup de main ça serait pas du luxe...
Je ferme les yeux et me concentre sur mon envie de les voir réveillés.

Debout…debout… c’est plus l’heure de dormir les marmottes…Debout…

- DEBOUT !

Ca semble marcher pour l’un d’eux et je pousse un cri de victoire en balançant mon poing vers le ciel… avant de me rappeler qu’il tient une arme. Je la braque maladroitement sur celui qui se réveille.
- Ok… ok on reste cool. Je sais pas du tout comment j’arrive à faire ça, mais je vous ai juste endormi ! J’suis désolé. J’ai absolument pas fait exprès ! Faut me croire… je sais absolument pas ce qui m’arrive ni ce qui se passe dans cette ville. Je sais juste que si vous m’aidez pas, je vais crever. Et je veux pas crever.
Cette fois la détermination dans mon ton est bien plus palpable.

- DEBOUT !

Une poigne  brutale l'agrippe pour le sortir du néant de l'obscurité primordiale. Si Hyppolite Poirot avait encore des poumons et un coeur vivant, il se tiendrait la poitrine en haletant de terreur. Au lieux de cela, son agonie est parfaitement muette. Il se tourne vers "Fletch" avec un regard aussi noir que la colère qui l'habite.

- Nous vous sauvons la vie et vous osez nous endormir... ? Fait le vampire d'une voix sourde qui n'annonce rien de bon.
- Ok… ok on reste cool. Je sais pas du tout comment j’arrive à faire ça, mais je vous ai juste endormi ! J’suis désolé. J’ai absolument pas fait exprès ! Faut me croire…
- Pour qu'une relation de confiance s'installe, en général, on évite de mentir et de menacer son interlocuteur avec une arme... Rétorque Poirot en avançant toujours vers l'avatar.
- Je sais absolument pas ce qui m’arrive ni ce qui se passe dans cette ville. Je sais juste que si vous m’aidez pas, je vais crever. Et je veux pas crever.
- Première règle de survie élémentaire...

Avec une vitesse surhumaine, Hyppolite désarme l'imbécile heureux qui tient son glock comme un vulgaire pistolet à eau.

-... Ne pointez plus jamais une arme sur moi. Il range calmement la sienne dans son étuis. Deuxième règle, si vous ne savez pas comment se déclenche votre pouvoir, fermez votre grande bouche divine et attendez qu'on vous donne l'autorisation de la rouvrir. Vous auriez eu l'air fin si d'autre Priants avaient suivi la première salve. Vous ne savez même pas tenir une arme à feu correctement.... Non ! Interjection brusque index levé alors que leur troisième larron a clairement oublié les règles du Roi du Silence... On se tait. Rappelez-vous, vous ne voulez pas mourir, alors ne me donnez aucun motif pour vous abattre, voulez-vous ?, conclue Poirot avec une politesse glacée.

Bertus émerge doucement à son tour mais ça n'empêche pas Hyppolite de se faire plaisir en le giflant pour accélérer le processus.

- Tout de même ! Le chien écrase toujours, j'en étais à prendre les paris sur qui sortirais du coma le premier. Et à la question silencieuse de son camarade il ajoute avec un mouvement du pouce par dessus son épaule pour désigner l'individu qui les a endormi : ... Avatar. A force de côtoyer celui d'Odin je reconnais les signes. On n'a clairement pas terminé la mission de reconnaissance. Tu te sens de la poursuivre avec le Marchand de Sable ?

J’émerge doucement et je sens la piqure de gifles sur mes joues.
- Bordel Silviu, c’est bon… j’me lève !

Ce sagouin en profite toujours pour faire ça ! Alors qu’on sait parfaitement que de nous deux, c’est lui qui a une tête à claque ! J’ouvre subitement les yeux et attrape la main qui m’emmerde royalement en me redressant.

- Rahat ! Ca va Sil… Hyppo ?
- Tout de même !
Je regarde autour de moi, un peu ahuri. Le chien est au sol et je panique un chouillat. Pour le chien s'entend. La situation ? On verra plus tard.
- Newt ?
- Le chien écrase toujours, j'en étais à prendre les paris sur qui sortirais du coma le premier.
Ok… donc on a tous pioncer gentiment ? Mais c’est quoi ce délire ?
- Mais… qu’est-ce que… ?

J’ai du mal à bien saisir la situation alors je me relève et secoue la tête dans l’espoir de m’éclaircir un peu les idées. Hyppolite me désigne du pouce notre « nouveau pote » et je fronce les sourcils.
-... Avatar.
- Merveilleux !

L’homme hausse les épaules, se pince les lèvres, gonfle les joues comme s’il faisait un effort monumental pour ne pas ouvrir la bouche. Il plisse le front, agite les sourcils, puis se déporte vers moi dans une espèce de danse du crabe très étrange. Je le regarde faire avec un certain ahurissement. Mais qui c’est ce con ?

- Eh ben t’as perdu ta langue toi ? Et puis je capte qu’il se place précisément pour que mon corps se trouve entre lui et Hyppolite. Je rêve ou je te sers de bouclier ?
- C’est parce qu’il m’a interdit de parler ! explose-t-il soudain en pointant un doigt accusateur vers le belge. Votre pote m’a menacé !
Je frotte mes paupières avec un soupçon de début d’agacement.
- Ouais… faut pas le prendre personnellement, il fait ça souvent.
- C’est quoi cette histoire d’avatar ? C’est ce que je suis ?
- J’en sais rien et tu ferais effectivement mieux de la fermer si t’es capable de nous endormir à volonté.
- Mais ! J’ai le droit de…
- De que dalle, alors tu la boucles où je t’assomme…
- Je préfère être assommé que tué…
Non mais il ose ronchonner en plus ! Je le fusille du regard et échange un coup d’œil avec Hyppolite.
- On n'a clairement pas terminé la mission de reconnaissance. Tu te sens de la poursuivre avec le Marchand de Sable ?
Gros soupir las.
- Franchement ? C’est trop dangereux si monsieur le faux-militaire est capable de nous mettre hors-service en un mot…ou en un geste pour ce qu’on en sait. Ca pourrait arriver n’importe quand et j’ai aucune envie de compter sur la capacité de … « Fletch » à la fermer. Je dévisage mon coéquipier avec beaucoup de sérieux. Ça vaut pas le coup. S’il t’arrive un truc, non seulement Simone m’arrache les yeux mais en plus les bunkers vont sérieusement se mettre à partie en vrille… tout ça pour une banale mission de reconnaissance qui peut attendre un jour de plus. Qu’est-ce que t’en dis ? Retour au bercail ?

- Je préfère être assommé que tué…
- Nous sommes morts lui comme moi et ne nous en portons pas plus mal, déclare le vampire en fixant l'olibrius qu'il trouve déjà insupportable.

Le topo qu'il dresse à Bertus n'est guère reluisant. Il a déjà un avis sur la question mais lui demande le sien par pure bonté d'âme.

- Franchement ? C’est trop dangereux si monsieur le faux-militaire est capable de nous mettre hors-service en un mot…ou en un geste pour ce qu’on en sait. Ca pourrait arriver n’importe quand et j’ai aucune envie de compter sur la capacité de … « Fletch » à la fermer.
- Il a l'air plus pipelette que toi encore. Et ce n'est pas peu dire.
- Ça vaut pas le coup. S’il t’arrive un truc, non seulement Simone m’arrache les yeux...
- S'il t'arrive un truc, Simone m'arrache les miens. Tu as déjà fait repousser tes yeux ? C'est extrêmement douloureux et plutôt handicapant.
-...Mais en plus les bunkers vont sérieusement se mettre à partie en vrille…
- J'apprécie que tu le reconnaisses, fait son homologue avec un fin sourire de Joconde.
- Tout ça pour une banale mission de reconnaissance qui peut attendre un jour de plus.
- Certes.
- Qu’est-ce que t’en dis ? Retour au bercail ?
- Retour au bercail, confirme Hyppolite. Et vous, pas un mot, lance-t-il à Fletcher avec une oeillade polaire de tueur en série.

Le quatuor (puisque Bertus a finalement son chien) reprend la marche vers l'entrée escamotée des Bunkers qu'ils ont empruntée plus tôt.

- Tu comptes faire valoir quels argument à ma chère et tendre sœur pour qu'elle accepte d'avoir des poils de chien sur ses tailleurs noirs ? questionne Hyppolite avec un amusement habilement dissimulé.

- Ça vaut pas le coup. S’il t’arrive un truc, non seulement Simone m’arrache les yeux...
- S'il t'arrive un truc, Simone m'arrache les miens. Tu as déjà fait repousser tes yeux ?
- Ah non jamais !
- C'est extrêmement douloureux et plutôt handicapant.
- …Vous pouvez…faire repousser vos yeux ? Notre avatar de compagnie grimace salement. Mais c’est dégueulasse ! … et vachement impressionnant ! Vous êtes quoi ? Des X-men ?
- Vampires, je déclare en souriant de tous mes crocs.
L’avatar fraîchement pêché a un mouvement de recul drôlesque.
- Sans… sans déconner ? Et vous êtes du genre… Lestat ou Edward la boule à facette ? demande-t-il avec un sourire un peu fou qui me fait dire qu’on est pas loin du craquage nerveux chez ce pauvre gamin.
- Ni l’un ni l’autre maintenant la ferme on t’as dit ! Il me fait les gros yeux et pince les lèvres en croisant les bras sur son corps de gringalet. Je me retourne donc vers Hyppolite....Mais en plus les bunkers vont sérieusement se mettre à partie en vrille…
- J'apprécie que tu le reconnaisses.
Je roule des yeux.
- Je suis con mais pas aveugle à ce point. Bon et puis… Tout ça pour une banale mission de reconnaissance qui peut attendre un jour de plus.
- Certes.
- Qu’est-ce que t’en dis ? Retour au bercail ?
- Retour au bercail. Et vous, pas un mot.

Fletcher se rapproche de moi et me glisse tout bas. Pas assez bas pour qu’un vampire ne l’entende pas évidemment.
- Il me fout les boules votre pote. Mais merci de me prendre avec vous.
- A moi aussi, je lui glisse. J’te dis ça juste pour lui faire plaisir parce qu’il peut nous entendre.
La mine de l’avatar se fait si penaude que j’éclate de rire.

On reprend le chemin des bunkers dans des clapotis de chaussures et de pattes. Le chien me colle aux jambes et j’en suis ravi comme un gosse.
- Tu comptes faire valoir quels arguments à ma chère et tendre sœur pour qu'elle accepte d'avoir des poils de chien sur ses tailleurs noirs ?
Je lui décoche un sourire charmeur et des haussements de sourcils suggestifs.
- Figure-toi que mes charmes fonctionnent à merveille sur Simone. Je suis un gars relativement irrésistible ! Tu vas vite t’en rendre compte.
- Euh…
Groooos soupir.
- Cinq minutes c’est ton maximum au jeu du roi du silence ?
- Dites il va m’arriver quoi ? demande-t-il d’une voix un peu perdue.
J’échange une œillade avec Hyppolite.
- D’abord on va s’assurer que t’es un danger pour personne. Et ensuite on avisera.
- Ok… Il a la voix exceptionnellement las. Vous m’aiderez ? A trouver ce que j’ai ?

Il se met à bailler soudain, papillonne des cils et manque s’étaler de tout son long dans la crasse. Heureusement pour lui Hyppolite et moi on a de sacrés réflexes. Avec un soupir je le hisse sur mon dos alors qu’il roupille comme un bienheureux. Je donne un coup de coude à mon accolyte.

- Hey ! Au moins on aura pas totalement perdu notre temps. Un chien et un avatar ! C’est pas ce qu’on cherchait mais c’est pas mal ! Faut qu’on se refasse ça à l’occasion. T’es pas si terrible comme partenaire. T’es même très acceptable. Toi et moi, c’est le début d’une belle amitié…je le sens ! T’es pas d’accord, beauf ?

Je me décale aussitôt en riant, sachant pertinemment que la réplique sera cinglante et douloureuse. Mais j’crois bien que je commence à l’apprécier.
Bien trop pour son propre bien.