Le dragon accède à sa demande et Gi-Ja en est le premier surpris. Et très heureux. Leurs deux grandes carcasses gigotent pour arriver à se ménager assez de place pour elles deux. L'humain est pris d'un gloussement idiot. Il se fait la réflexion qu'il n'a jamais fait de soirée pyjama étant enfant et que ça doit sans doute y ressembler un peu. Leurs peau nue se touchent, se collent même. Neorvrim dégage une chaleur réconfortante qui appelle a relaxation. Gi-Ja se détend doucement le visage tourné vers son ami.

- Si tu entends quelque chose chuter durant la nuit, il y a de fortes chances pour que ça soit moi… Nouveau pouffement juvénile. Il est vraiment fatigué pour ricaner aussi bêtement. Tu risques d’avoir un peu chaud à mes côtés…
- Non, au contraire. J'ai toujours les pieds froids, ce sera parfait.

Le dragon dégage une mèche de ses cheveux relâchés d'un geste naturel et pourtant très intime. L'un l'autre échange un regard pétri d'une affection qui est et restera sans doute, toujours un peu trouble.

- Bien. Monseigneur est-il satisfait ?
- Parfaitement, merci, mon brave...
- Dors à présent. La soirée fut riche en émotion pour toi.
- Ok... Le jeune homme ferme les yeux, le sommeil est déjà en train de l'engloutir... Merci, Neo.... baragouine-t-il dans une semi-conscience avant de s'abandonner au sommeil.

Il dort comme une pierre cette nuit là et d'une traite, épuisé qu'il est. Si bien que quand le clairon retentit à 7h sous la forme de cinq voix féminines s'égosillant sur un rythme pop, il a l'impression d'avoir clos ses paupières il y a à peine deux minutes.

"Yeah, I'll tell you what I want, what I really, really want
So tell me what you want, what you really, really want
I'll tell you what I want, what I really, really want
So tell me what you want, what you really, really want
I wanna, I wanna, I wanna, I wanna
I really, really, really wanna zigazig ah
I wanna, I wanna, I wanna
I really, really, really wanna zigazig ah"

Gi-Ja redresse mollement sa tête en vrac. Son menton repose sur un truc doux, chaud et ronronnant. Il papillonne des cils en se rendant compte que dans la nuit il s'est rapproché de Neorvrim au point de carrément s'étaler sur son torse comme un bon vieil oreiller.

"If you want my future, forget my past
If you wanna get with me, better make it fast
Now don't go wasting my precious time
Get your act together we could be just fine"

Le soldat louche sur le visage du draconien assoupi. Il a vraiment une beauté singulière : tout semble tordu, asymétrique et improbablement démesuré sur ce faciès et pourtant, l'ensemble s'harmonise d'une curieuse manière pour former un portrait tout à fait séduisant. Il aurait voulu jouir de ce spectacle un peu plus longtemps mais les Spice Girls en ont décidé autrement. Dehors, on entend déjà Smitthens gueuler "qu'il va buter Devane et ses goûts de merde". Une envolée lyrique qui ne manque pas d'appuyer le réveil de son camarade de lit.

- Salut... Fait Gi-Ja avec un sourire échevelé avant de se redresser sur les coudes et de se déporter sur le flanc, loin de toute ambiguïté.

Rester naturel.
Avoir l'air de rien.
Et ce, même avec une érection matinale.

Neorvrim s’est abandonné au sommeil sitôt assuré que Gi-Ja s’était endormi et rien n’a l’a éveillé d’un sommeil réparateur…

Jusqu’à ce que des voix féminines et pour le moins énergiques ne l’arrachent à des songes plutôt embrouillés. Le réveil est absolument terrible, comme tous les matins d’ailleurs. Il n’arrive à se faire ni à l’heure matinale chaque jour ni à la façon brutale que ces guerriers ont de s’arracher au sommeil.

Il grogne de déplaisir, lâche un ou deux jurons en draconiens puis tire la couverture dans l’idée de la mettre par-dessus sa tête pour atténuer les beuglements rejoints par des injures et des promesses de torture.
Sauf que le drap reste coincé et qu’il se rend compte que cette étrangeté est due à la présence de quelqu’un avec lui.

Il ouvre les yeux pour tomber nez à nez avec le séduisant – voilà un qualificatif nouveau – visage du caporal qui lui dédit un sourire encore ensommeillé qui remue quelque chose en lui. Impossible de ne pas lui rendre alors qu'il se surprend à nouveau à dégager son regard d'une mèche vagabonde. Gi-Ja est plus ou moins perché sur lui et il se trouve, de fait, plutôt bien installé. L’un de ses bras a même mollement cerclé la taille de l’humain pendant son sommeil.
Depuis combien de temps n’a-t-il pas dormi avec quelqu’un ? Une éternité très certainement. Iska se faisait de plus en plus rare, partagée qu’elle était entre ses différents consorts.

- Salut...

L’humain se recule vers le mur et Neorvrim se passe une main lasse sur le visage.

- Bonjour… les réveils avec vous sont un plaisir sans cesse renouvelés…quelle est donc cette musique infernale ? N'est-ce pas de la torture d'après vos lois ? Il émet un petit rire désolé. Navré… je ne suis pas du matin. Mais, oh miracle, je suis toujours sur le matelas et je t’ai, à priori, servi de mmm… il fronce le nez pour se rappeler du mot… radiateur ? c’est cela que l’on dit non ? Il se tourne sur le flanc pour faire face à Gi-Ja et cale un bras sous sa tête. As-tu bien dormi au moins pendant ces deux ou trois trop petites heures ?

Neorvrim a le réveil grognon et ses grommellements font pouffer le soldat. "C'est atrocement mignon !". C'est ce qui explique son sourire sans doute et son peu de hâte à quitter son torse. Néanmoins, ne pas rendre la situation déjà ambigüe plus qu'elle ne l'est serait une bonne chose. Il s'écarte en roulant contre le mur.

- Bonjour… les réveils avec vous sont un plaisir sans cesse renouvelés…quelle est donc cette musique infernale ?

Gi-ja éclate de rire, un bras relevé au dessus de sa tête, le dos contre le matelas.

- Le premier tube des "Spice Girls".
- N'est-ce pas de la torture d'après vos lois ?
- Et encore t'as échappé à la période Céline Dion de Devane....

Il rit encore un peu et le dragon se joint à lui. L'atmosphère est étrangement détendue.

- Navré… je ne suis pas du matin. Mais, oh miracle, je suis toujours sur le matelas et je t’ai, à priori, servi de mmm…  Radiateur ? C’est cela que l’on dit non ?
- Je préfère "bouillotte", répond l'humain avec une petite grimace amusée. Je trouve ça plus mignon, ponctue-t-il avec un sourire malicieux.

Neorvrim se tourne vers lui en faisant grincer un peu le lit sous sa grande carcasse. C'est dangereusement plaisant, cette familiarité, entre eux, alors qu'il devrait s'en trouver profondément gêné.
Il pourrait y prendre gout.
Il n'en a absolument aucun droit.

- As-tu bien dormi au moins pendant ces deux ou trois trop petites heures ?
- Pas assez... gémit-il. Il attrape son coussin et le rabat sur son visage. J'ai aucune envie de me lever.
- Va falloir pourtant les marmottes ! lance une voix étouffée qui provient de l'autre côté de la fenêtre, dans le dos du dragon. Allez, debout !
- HAILEY ! Qu'est-ce que tu fous là !

Gi-Ja se redresse immédiatement en position assise, la tignasse en pétard et l'air ahuri. Il est littéralement au lit avec un autre homme ( humanoïde mâle, mais à ce stade qui s'en soucie vraiment ? ) !

- Je matte, quelle question ! J'adore ton nouveau doudou... Elle fait un clin d'oeil à Neorvrim.
- FOUS LE CAMP IMMEDIATEMENT ! s'offusque le Caporal Cosgrave en balançant son oreiller sur la fenêtre. Les rires de sa camarade s'éloignent avec elle. Quelle grosse morue ! Gi-Ja se laisse retomber tragiquement sur le matelas. J'ai encore moins envie d'y aller maintenant..... soupire-il le visage caché dans ses mains et les joues gonflées par son manque de motivation.

La musique a brusquement cessé, laissant place au brouhaha des troupes qui commence à s'activer.

- Ah... Je crois que Smithens a jeté la compile de Devane par la fenêtre. Le devoir m'appelle ! Reste dormir un peu, toi...Il s'étire, faisant jouer ses muscles sous sa peau couverte d'encres.

- Je préfère "bouillotte". Je trouve ça plus mignon.
- Mignon ? Encore un mot qu’il a appris récemment. Eh bien en tous les cas ça t’amuse...

Ils se sourient, face à face, avec une étrange intimité. Etrange parce qu’elle lui semble de plus ne plus naturelle, comme si elle avait toujours été là. Une sensation qu’il a connu avec Iska mais uniquement parce qu’il était presque inscrit dans sa flamme qu’elle et lui le serait. Là tout est différent, troublant également.

- As-tu bien dormi au moins pendant ces deux ou trois trop petites heures ?
- Pas assez...
- Je ne peux qu’approuver !
- J'ai aucune envie de me lever.
- Serait-ce si grave si tu te portais pâle ?
- Va falloir pourtant les marmottes ! Allez, debout !
La voix familière le fait d’abord sursauter et il se retourne brusquement avant d’éclater de rire.
- HAILEY ! Qu'est-ce que tu fous là !

La réaction de Gi-Ja est encore plus hilarante.
- C’est toi… qui est mignon… comme ça ! s’étrangle-t-il à moitié.
- Vrai ! Lance Hailey.  Je matte, quelle question ! J'adore ton nouveau doudou...
Neorvrim lui fait un salue de la main en gloussant encore.
- Dame Hailey… je vous trouve très en beauté ce matin
- FOUS LE CAMP IMMEDIATEMENT !
Mais manifestement la visite n’est pas au goût de Gi-Ja qui balance un pauvre oreiller sur la fenêtre.
- Quelle grosse morue !
- N’est-ce pas un poisson ? ... Suis-je aussi délabré que le doudou ours de Marnie ?
- J'ai encore moins envie d'y aller maintenant….
Neorvrim retire doucement ses mains de son visage et lui lance une œillade amusée.
- Tu sais bien qu’elle ne dira rien…

L’on s’active dans les couloirs redevenus plus silencieux – la Flamme Sacrée en soit louée ! –
- Ah... Je crois que Smithens a jeté la compile de Devane par la fenêtre.
- Je m’occuperai de la brûler plus tard…
- Le devoir m'appelle ! Reste dormir un peu, toi...

Le soldat se redresse et ses étirements font jouer ses nombreux dessins sous sa peau. Fasciné, le dragon se hisse sur un coude et les observe s’animer sous ses yeux. Avec une certaine révérence en caresse du bout des doigts les dessins.  

- Beaucoup de tes collègues portent ces… tatouages… Cela fait-il mal de les inscrire sous la peau ? Je suis persuadé qu’ils ne sont pas là que pour le plaisir des yeux… même s’ils le sont. Très esthétiques je veux dire.
Joueur il le tire à nouveau sur le matelas.
- Tu es fatigué toi aussi, souffle-t-il légèrement penché vers lui. Tu aurais besoin de plus de repos. Tu manipules des explosifs, j’aime autant que tu sois bien éveillé pour éviter les catastrophes. Tu n’aurais qu’à dire que tu es malade... susurre-t-il avec ce soupçon d’envoûtement dans sa voix. Cela vous arrive non ?

On frappe soudain à la porte.
- Gi ? marmonne la voix fatiguée du Major. T’es là ? T’es pas mort ?? Je t’ai pas vu à la fête… Tu nous as manqué ! Bordel mon crâne… ils peuvent entendre le major cogner son front contre la porte. J’vais aller me noyer dans de l’aspirine…
Neorvrim se tait mais fait savoir à renfort de moult moues et oeillades qu’il s’agit de l’occasion idéale de ne pas aller travailler tout de suite.

La peau de Gi-Ja se grêle au toucher de Neorvrim. Des étincelles s'allument dans son bas-ventre. Il laisse échapper un petit cri surpris et se retourne.

- Tu.. Tu fais quoi ?
- Beaucoup de tes collègues portent ces… tatouages…
- Ca t'intrigue vraiment, hein ?
- Cela fait-il mal de les inscrire sous la peau ?
- C'est plus ou moins douloureux selon la zone du corps. On transperce la peau avec une aiguille mécanique très fine pour introduire un pigment coloré dessous. Après cicatrisation du derme, le dessin reste visible en transparence. Plus le tatouage est grand, plus la séance est longue et parfois éprouvante. Mais le pire c'est la cicatrisation. Il faut être rigoureux sur les soins plusieurs mois durant... Moi celui qui m'a fait le plus mal, c'est celui ci... Il désigne un minuscule dessin avec deux mains croisées sur ses clavicules. L'os était juste sous la peau, l'aiguille vibrait dessus, c'était franchement désagréable...
- Je suis persuadé qu’ils ne sont pas là que pour le plaisir des yeux… même s’ils le sont. Très esthétiques je veux dire.

Gi-Ja le lorgne avec un petit sourire en coin par dessus son épaule.

- Lequel plait le plus à tes yeux ? Pétillement malicieux dans ses prunelles sombres. Esthétiquement parlant, évidemment.

Pour toute réponse, Néorvrim le fait basculer sur le matelas. Le dragon le surplombe et l'humain reste un instant interdit. Son pouls cavale vite, soudain. Une drôle de tension s'installe alors qu'ils se fixent tous deux.

- Tu es fatigué toi aussi, lui glisse le draconien sur un timbre suave qui produit d'étrange frétillement dans sa poitrine. Agréables. Tu aurais besoin de plus de repos. Tu manipules des explosifs, j’aime autant que tu sois bien éveillé pour éviter les catastrophes. Tu n’aurais qu’à dire que tu es malade...
- Tu me demandes de mentir ?
- Cela vous arrive non ?
- Ca dépend...Tu te portes volontaire pour jouer les infirmières ? fait le soldat, avec un brin de provocation.

Un silence s'ensuit, intense et pétri de possibles.
L'instant éclate en morceau au son de trois coups donnés à la porte.

- Gi ? Echange de regards muet entre les deux amis. Caleb est là. Le visage de Gi-Ja se décompose. Un sorte de panique douloureuse s'empare de lui. T’es là ? T’es pas mort ?? Je t’ai pas vu à la fête…
- Je n'étais pas super en forme... amorce-t-il. Et ça ne va pas vraiment mieux ce matin.
- Tu nous as manqué !
- Désolé...
- Bordel mon crâne… J’vais aller me noyer dans de l’aspirine…
- Major ? Puis-je avoir la permission d'avorter la matinée ? Si je suis toujours patraque cette après-midi, j'irais voir Emma...

Cosgrave attend la réponse avec un tantinet d'appréhension. Il se fait l'effet d'un sale ado qui cache sa petite amie dans son lit après des activités crapuleuses et qui est sur le point de se faire chopper par sa mère.
Sauf que...

Ce n'est pas une petite amie.
Juste un ami.

- Tu me demandes de mentir ?
- J’appelle ça contrefaire la vérité, lâche-t-il avec un rictus malin. Cela vous arrive non ?
- Ca dépend...Tu te portes volontaire pour jouer les infirmières ?
- S’il le faut…

Une tension inexplicable s’abat sur eux. Comme une étrange énergie qui ferait ronronner son feu plus fort encore et torturerait sa peau de picotement et chatouillerait son bas-ventre. Le phénomène le laisse sans voix. Il ne peut qu’observer l’humain en quête de réponse qu’il n’arrive pas à déchiffrer.  

Tout vole brusquement en éclat lorsque le Major manifeste sa présence.
- Gi ?
Le dragon continue de fixer Gi-Ja et assiste au changement radical de son expression. A taton, il cherche la main du caporal et la sert avec force dans la sienne.
« Je ne te lâche pas. Je suis là. » exprime-t-il silencieusement.
- T’es là ? T’es pas mort ?? Je t’ai pas vu à la fête…
Le dragon l’encourage d’un sourire et le caporal arrive finalement à sortir une belle excuse à son supérieur.
- Major ? Puis-je avoir la permission d'avorter la matinée ?
- Merde… c’est à ce point ? Bah ouais évidemment. Soigne-toi vieux ! Reviens-nous en forme… remarque on va pas tous être très frais ce matin.
- Si je suis toujours patraque cette après-midi, j'irais voir Emma...
- T’as intérêt ! Je repasserais plus tard…si j’agonise pas dans un coin. A Plus !

Neorvrim attend que les pas du Major s’éloigne avant de laisser échapper un petit rire.
- Tu vois. Ça n’avait rien de compliquer. Lentement il relâche la pression qu’il exerçait sur ses doigts. Toutefois, il va bien falloir que tu te confrontes à lui un jour, tu sais, déclare-t-il d’une voix douce. Tu y arriveras. Je n’en doute pas un instant. En attendant, reprends des forces. Il fait mine de bouger puis se ravise soudain. On pourrait presque penser qu'il cherche la moindre excuse pour s'attarder. Et pour répondre à ta question précédente, j’aime ces sortes de nids d’abeille. On dirait un peu des écailles… et puis ce cœur… fait-il en en traçant les contours. Le cœur humain a quelque chose de très… mécanique. Si tu m’ouvrais la poitrine tu n’y verrais qu’une Flamme pour m’animer. Si c’est la magie qui me permet de vivre, ton corps à toi est un trésor d’ingénierie.
Il balaie lentement ledit corps du regard, comme une lente caresse.
- C’est assez fascinant. Il a un petit sourire d’excuse. Peut-être me laisserai-je un jour tenter par l’un de ses tatouages que j'inscrirai sous ma peau… qui sait ? Et je divague… Je te laisse te reposer, je vais regagner mes quartiers.      

Le contact de la main de Neorvrim aide Gi-Ja a reprendre pieds. Le jeune homme tisse ses doigts aux siens pour mieux s'y accrocher et y puiser la ressource de répobndre aussi naturellement que possible à son Major.

- Tu vois. Ça n’avait rien de compliquer.
- Je n'arrive pas à croire que tu me félicites de resquiller...
- Toutefois, il va bien falloir que tu te confrontes à lui un jour, tu sais

L'humain soupire en regardant le plafond.

- Ouais...
- Tu y arriveras. Je n’en doute pas un instant. En attendant, reprends des forces.

Neorvrim fait mine de sortir des drap et Gi-Ja en conçoit un petit pincement au coeur. Cependant, il n'a aucune bonne excuse à brandir pour le faire rester. Le dragon étire un peu le moment, malgré tout. Est-ce que lui aussi n'a pas envie de partir ?

- Et pour répondre à ta question précédente, j’aime ces sortes de nids d’abeille. On dirait un peu des écailles…
- Je me les suis faites tatouer en faisant mes classes. J'ai toujours trouvé que l'armée ressemblait un peu à une ruche où chacun a une tâche complémentaire de l'autre.
- ... Et puis ce cœur… Nouveau frissons délicieux sous la caresse. Nouveau départ de feu dans son bas-ventre. Le cœur humain a quelque chose de très… mécanique. Si tu m’ouvrais la poitrine tu n’y verrais qu’une Flamme pour m’animer. Si c’est la magie qui me permet de vivre, ton corps à toi est un trésor d’ingénierie.
- Je voulais exprimer ça, mais surtout... Qu'il faut m'arracher mon "costume" de "bon petit soldat" pour voir la vérité en dessous. Petite grimace. Pas très subtile, j'en conviens.
- C’est assez fascinant. Peut-être me laisserai-je un jour tenter par l’un de ses tatouages que j'inscrirai sous ma peau… qui sait ?
- Tu crois que ta peau marquerait avec ton pouvoir de régénération ? C'est à tester...
- Et je divague… Je te laisse te reposer, je vais regagner mes quartiers.  

Gi-Ja pose une main sur son bras avec une grande douceur.

- Tu n'es pas obligé... Mais si tu y tiens, attend un peu qu'il y ait moins de circulation dans les couloirs, ok ?  

Il a épuisé son crédit de "caprices". Il ne peut pas l'empêcher de quitter la quiétude de cette chambre. Qiétude que sa présence seule a su instaurer.

- Je voulais exprimer ça, mais surtout... Qu'il faut m'arracher mon "costume" de "bon petit soldat" pour voir la vérité en dessous.
- Je vois, déclare-t-il avec un petit sourire en coin. Ai-je réussi à ôter ce fameux costume ?
- Pas très subtile, j'en conviens.
Il se penche, l’air d’un conspirateur qui va délivrer les secrets de l’univers.
- Veux-tu que je te confie un secret ? Je ne crois pas votre espèce taillée pour la subtilité. Vos atouts se trouvent ailleurs. En tous les cas, c’est assez fascinant. Peut-être me laisserai-je un jour tenter par l’un de ses tatouages que j'inscrirai sous ma peau… qui sait ?
- Tu crois que ta peau marquerait avec ton pouvoir de régénération ?
- Les dragons régénère bien moins vite et moins bien que certains autres peuples de faërie ou vos loups-garous et les djinns par exemple. Enfin de ce que j’en sais. Certaines cicatrices ne s’en vont jamais. Il trace la plus importante des siennes, située sur sa cuisse, par-dessus son pantalon. J’en ai quelques-unes moi-même. Mon premier combat. Ma première erreur et une lance plantée dans ma patte de part en part.  
- C'est à tester...
- Pourquoi pas ? Bien que je n’ai aucune espèce d’idée de tatouage assez important pour le laisser éternellement sur ma peau. Et je divague… Je te laisse te reposer, je vais regagner mes quartiers.  

La main de Gi-Ja sur son bras est d’une douceur infinie. Il a déjà remarqué à quel point le jeune homme s’autorise plus de ce genre de geste dans cette forme-ci… et à quel point il-même apprécie ce contact autant sur ses écailles que sa peau d’humanoïde.

- Tu n'es pas obligé... Mais si tu y tiens, attend un peu qu'il y ait moins de circulation dans les couloirs, ok ?
- Oh, évidemment. Je n’avais pas pensé à cela. Dans ce cas…, il essaie de se rallonger sans prendre autant de place et finit donc sur le flanc. Dors. Je m’en irai lorsque le « danger » sera passé. Je te le promets. Nous nous retrouverons ce soir pour notre entrainement si tu te sens d’attaque.

Dans une position qui fait miroir à celle du dragon, le jeune homme se laisse lentement happer par le sommeil. Il n'a pas conscience de son expression alanguie et un rien juvénile. Plus tard, quand il se réveillera à nouveau, ce sera seul dans son lit mais avec les draps encore tièdes de la présence du dragon.

Et son odeur de pierre chaude qui devrait accompagner sa solitude bien des nuits suivantes.

***

(à la suite de ces événements )

Le retour de Tae'alam s'est fait dans un silence morne et pesant. Le caporal Cosgrave ne pipe mot même si ses bras ont été intégralement restaurés après leurs brûlures et Neorvrim s'est endormi comme une masse sur l'épaule du soldat. Malgré son absorption, le feu n'a pas suffi au dragon pour le guérir totalement de la perte énergétique subie. A quel point sa magie a-t-elle affectée ? Gi-Ja l'ignore. Attentif à la tiédeur de son ami, il lui tient la main, faisant fi des regards insistant du Major dans le rétroviseur. Pour le moment, il n'a d'yeux que pour son camarade à écailles.

Arrivés à la garnison, ils se sont mis à plusieurs pour transporter le dragon dans sa chambre. L'animal pèse son poids. Des couvertures supplémentaires et même un poêle électrique ont été dépêchés auprès du draconien assommé de fatigue. Malgré ces judicieuses initiatives, ce dernier reste anormalement frais. Gi-Ja a humblement demandé la permission à son supérieur de veiller Neorvrim comme lui l'a fait après son traumatisme crânien. Accordée ou pas, il serrait resté, de toute manière. Une détermination farouche suinte de tout son être que personne ne lui a jamais vue : personne ne le déboulonnera de sa chaise.

Laissé seul avec l'endormi, l'humain s'inquiète de ne pas voir sa température augmenter. Finalement il décide de retirer ses chaussures et de se faufiler sous les draps. Il cale Neorvrim confortablement contre son buste et l'entoure de ses bras, éspérant faire grimper son thermostat de quelques précieux degrés. Il caresse son front délicatement et abandonne à ses longues boucles noires ses doigts inquiets.

- Allez, Neo... Il faut que tu te réchauffes maintenant.... S'il te plait....

Après avoir prononcé quelques mots pour rassurer tout le monde, Neorvrim n’a plus été capable d’aligner plus que des grognements.
Tout le reste de son énergie s’est évaporé lorsqu’il a revêtu sa forme humanoïde, bien plus transportable et il s’est à nouveau écroulé.  
Un épuisement totalement inconnu jusqu’alors s’est insinué dans toutes les fibres de son corps et s’il ne se sent plus aussi glacé qu’après être sorti de la grotte, il frissonne par intermittence. Il a l’impression d’être gelé de l’intérieur et est souvent pris de quinte de toux qui laisse échapper de la fumée.
Il n’a nullement conscience de l’inquiétude et de toutes les attentions dont il est l’objet. Il alterne entre des phases d’éveil vaseux et d’inconscience profonde qui ressemble singulièrement au sommeil magique invoqué par les nains.

Parfois, il entend parler à côté de lui, des conversations qui lui parviennent comme des murmures. Il entend le Major, Ciulin, Hailey parfois et … Gi-Ja.
Lorsqu’il est éveillé, il aimerait avoir la force de lui demander s’il va bien ? Le houspiller pour son inconscience… mais la fatigue l’emporte aussitôt même que l’idée l’effleure.

Il ne sait combien de ses états il alterne avant d’avoir enfin la sensation d’avoir un peu plus de prise avec son esprit. Enfoui sous des couvertures épaisses et callé contre un corps merveilleusement chaud, il a l’impression de flotter. Tout son environnement n’est que chaleur et douceur, contraste encore plus saisissant avec la tiédeur de son corps qui lui apparait toujours bien trop froid.
Il a du mal à se souvenir pourquoi…

Des doigts délicats jouent avec les mèches de ses cheveux et il sourit faiblement. Personne n’a jamais eu ce genre de geste à son égard.
Les dragons ne se câlinent pas.
Mais les humains oui et il reconnaitrait n’importe où celui qui le tient serré contre lui.

- Gi-Ja … articule-t-il avec difficulté avant de se serrer plus encore contre cette source inespérée de chaleur. Par la Flamme, tu es si chaud…

Il semble faire d’intense effort de réflexion avant de lâcher un « Bouillotte » triomphant.
Et puis les évènements de… quand d’ailleurs ? Depuis quand est-il dans cet état ? lui reviennent et il relève le menton pour palper faiblement les bras du caporal.

- Tes brûlures ! Tu n’as plus rien… le soulagement coule sur ses traits comme un voile. Une quinte de toux le secoue et le laisse presque à bout de force. Néanmoins il fait l’effort de se redresser pour croiser son regard et un rien de flamboiement colérique bien mince se reflète dans ses iris.
- Imbécile ! Pourquoi…as-tu fais une chose pareille ! Qu'aurais-je fais si tu étais mort par ma faute ?

Qu'aurait-il fait sans lui ?
Cette perspective lui sert la gorge.

- Gi-Ja...

Neorvrim remue doucement contre lui, se presse comme un gros chat ronronnant. Le jeune homme ressert ses bras autour du corps à peine tiède du dragon avec un sourire

- Oui...
- Par la Flamme, tu es si chaud… ... Bouillotte....

Le jeune homme a un petit rire tendre.

- C'est ça... On inverse les rôles...

Le draconien s'agite encore et lui effleure le bras.

- Tes brûlures ! Tu n’as plus rien…

Il tousse abondamment et l'humain l'oblige à se calmer, en le tenant fermement par les épaules.

- Hey, Hey... Neo... Arrête de gigoter tu veux bien ? Le soldat soupire. Les djinns m'ont soigné... répond-il et l'on sent à son timbre qu'il s'est retenu d'encadrer le mot "djinn" d'un chapelet d'injures.
- Imbécile !
- Pardon ! lâche Gi-Ja un ton au dessus, sourcils froncés.
- Pourquoi…as-tu fais une chose pareille ! Qu'aurais-je fais si tu étais mort par ma faute ?
- Est-ce que tu te fous de moi ?! s'insurge son ami, animé par une colère semblable. Il lui enfonce son index dans la poitrine. Tu ne t'es absolument pas posé la question en acceptant de te sacrifier pour ces connards ! J'aurais fais quoi, moi, en retrouvant ton cadavre ?! Est-ce que tu as seulement une idée de la frayeur que j'ai eu ?! Tu étais glacé !!! s'étrangle-t-il. J'ai cru... Il déglutit, refoulant ce brusque accès d'émotion. J'ai cru que tu allais t'éteindre.... j'ai complétement vrillé....

Il baisse les yeux, offrant le spectacle de ses longs cils noirs humides.

- J'aurais fait quoi sans toi... moi...

Plainte à peine audible.

- Est-ce que tu te fous de moi ?!
Parfaitement étonné pour cet élan de colère, Neorvrim essaie à nouveau de s’extirper de ses bras et de se redresser afin d’avoir la colère plus digne, les multiples couches de couvertures glissant sur le côté.
- Pas du tout ! Tu n’es pas ignifugé que je sache !
Son regard courroucé se fige sur le doigt planté dans son torse.
- Tu ne t'es absolument pas posé la question en acceptant de te sacrifier pour ces connards !
- Il n’a jamais été question de sacrifice, enfin ! Par contre tu allais bêtement te jeter dans le feu avec moi ! Je savais que la chose était risquée mais que pouvais-je bien faire d’autre ? Les laisser mourir ? S’éteindre misérablement comme… il pince les lèvres sans finir sa phrase et pause sa main contre son cœur pulsant lentement mais avec force. Je ne pouvais pas faire autrement. Pas quand il était en mon pouvoir de faire quelque chose.
- J'aurais fait quoi, moi, en retrouvant ton cadavre ?!
Comme elle est brusquement montée, sa colère redescend aussitôt et son visage fatigué exprime une émotion similaire à celle qu’il peut lire sur le visage du soldat.
- Gi’…
- Est-ce que tu as seulement une idée de la frayeur que j'ai eu ?! Tu étais glacé !!!
- Je sais.
- J'ai cru... J'ai cru que tu allais t'éteindre... j'ai complétement vrillé...

Tous deux secoués par une émotion palpable et difficilement explicable, Neorvrim glisse une main sur la joue du caporal et colle son front contre le sien.

- Chuuut… je suis désolé. Tout va bien à présent. Je suis là… je ne voulais pas t’inquiéter à ce point. Mais je ne veux plus jamais que tu mettes ta vie en danger pour la mienne. Mon réveil ne peut se traduire par ta mort. Je m'y refuse.
- J'aurais fait quoi sans toi... moi...

Ces quelques mots le figent.
Un jour, il ne sera plus là.
Pendant quelques instants… quelques jours, il avait oublié ce fait. Le sommeil éternel ne lui parait plus aussi séduisant qu’avant. Mais sa promesse… il ne peut décevoir son peuple une deuxième fois.
Oui mais Gi-Ja ?

Le dragon prend une profonde inspiration et recule la tête pour le fixer dans les yeux.
- Tu aurais continué à avancer, à vivre. Pourquoi a-t-il tant de mal à prononcer ces simples mots ? Le dragon met cela sur le compte de sa terrible fatigue. Il ne peut en être autrement. Fais m’en la promesse. Ici et maintenant.

Il n'a pas oublié ce soir là...et sa confession...

"Tu es le Feu, Neo. Et à ce moment là..... A ce moment là, j'ai eu envie de m'immoler."

- Chuuut… je suis désolé. Tout va bien à présent. Je suis là…

La main de Neorvrim sur sa joue -trop tiède- Gi-ja frotte son front contre le sien, tel un animal malheureux. Le dragon est là, oui, mais jusqu'à quand ?

- Je ne voulais pas t’inquiéter à ce point. Mais je ne veux plus jamais que tu mettes ta vie en danger pour la mienne.
- Je n'ai pas réfléchi...
- Mon réveil ne peut se traduire par ta mort. Je m'y refuse.

Le caporal Cosgrave est un soldat, la mort fait partie intégrante des risques de son métier. Mais il ne l'a jamais envisagée pour un être tel que Neorvrim. Un être éternel. Un être qui, tôt ou tard, finira par l'abandonner puisqu'il doit retrouver le repos auprès de sa reine.

- J'aurais fait quoi sans toi... moi... laisse-t-il échapper.

"Je ferais quoi quand tu reprendras place dans ton caveau."

- Tu aurais continué à avancer, à vivre.

A vivre comme avant ?
Comme un imposteur ?
Sans maitre d'arme, sans confident, sans soutien, sans chaleur...
Sans lui.

- Il ne peut en être autrement.
- Tu ferais mieux de te rallonger...
- Fais m’en la promesse.
- ...Tu as fait tomber toutes les couvertures.
- Ici et maintenant.
- NON !

Gi-Ja, courroucé, le défie du regard.

- Si ça t'empêche de recommencer à te mettre en danger, alors non ! Je refuse ! Tu ne m'extorqueras pas une promesse pour avoir la conscience tranquille au moment où tu voudras de nouveau t'oublier pour une cause, aussi noble soit-elle !

Que ce soit pour sauver une poignée d'effrits ou pour l'honneur d'un peuple entier déjà mort depuis des siècles. Une détresse terrible infiltre ses yeux en amande, mais aussi, une affection immense, puissante et pure.

- Il y a aura un avant et un après toi, Neo. C'est comme ça.

- NON !

A moitié redressé et bien trop proches pour de simples amis aux yeux de n’importe qui les observerait à cet instant, dragon et soldat se toisent avec la même terrible réalisation au fond des yeux.

Un jour, l’un s’en ira et oubliera.
L’autre restera et gardera tout en mémoire.

- Si ça t'empêche de recommencer à te mettre en danger, alors non ! Je refuse ! Tu ne m'extorqueras pas une promesse pour avoir la conscience tranquille au moment où tu voudras de nouveau t'oublier pour une cause, aussi noble soit-elle !
- Tu es injuste ! Crois-tu que je supporterai une perte de plus ? Crois-tu que te perdre ne pèsera pas aussi lourd que la disparition des miens ?  

De quoi parle-t-il exactement ? De son choix d’aider les Efrits ou celui, très clair depuis le début, de retrouver la paix et de respecter la promesse qu’il a faite à l’aube de l’extinction de son espèce ?

Il a commis une grave erreur, il n’aurait jamais dû s’impliquer dans quoique ce soit.
Il a simplement voulu aider et le voilà tomber dans son propre piège.

A apprécier être ici, avec ces improbables humains.
A envisager de les aider dans leur quête de survie.
A aimer être l’ami de Gi-Ja.

Comme au diapason, leurs regards se parent de plus de douceur et de quelque chose de plus triste également. Bien plus triste.

- Il y aura un avant et un après toi, Neo. C'est comme ça.
La bouche du dragon se fend d'un sourire plein de mélancolie.
- J’aime à le croire oui même si cela est terriblement égoïste. Que ma présence, si fugace soit-elle, t’auras aidé d’une quelconque façon. Sache qu'il y a également un avant et un après mon réveil. Un avant et un après toi, souffle-t-il avec une extrême délicatesse comme si ses mots étaient fragiles.  

Epuisé, il se laisse tomber sur le côté et ressemble les couvertures sur lui lorsqu’un frisson le secoue. Il passe une main lasse sur son visage et tente de rassembler ses esprits.  
- Depuis combien de temps suis-je cloué dans ce lit ? La manœuvre a-t-elle au moins réussie ? Les Efrits…comment se portent-ils ?

- J’aime à le croire oui même si cela est terriblement égoïste. Que ma présence, si fugace soit-elle, t’auras aidé d’une quelconque façon. Sache qu'il y a également un avant et un après mon réveil. Un avant et un après toi...

Humain et dragon s'étreignent du regard à défaut d'oser le faire vraiment. Gi-Ja est submergé par un maëlstrom d'émotions dont il n'est pas certain de comprendre la teneur. Il pensait être amoureux de Caleb mais ce qu'il ressent pour Neorvrim est plus intense, plus profond, plus spontanéel, plus intime, plus déstabilisant encore que l'acceptation de son homosexualité. Avec lui, il ose être lui même, il s'autorise à être en colère ou ému aux larmes, il se permet de rire aux éclats et d'avoir le cœur qui bat vite et fort. L'évidence le frappe : Il pourrait mourir pour lui, pour le protéger.

Est-ce vraiment de cette manière que l'on se comporte avec un ami ?

Neorvrim s'arrache à cette confrontation oculaire et se laisse lourdement tomber sur le coté. Avec une prévenance toute naturelle, Gi-Ja s'écarte et rajuste les couvertures sur le corps encore frissonnant du dragon.

- Depuis combien de temps suis-je cloué dans ce lit ?
- Depuis notre retour de Tae'alam. Tu as somnolé quasiment toute la journée et la nuit. On est presque le matin.

Il l'a veillé tout se temps, en oubliant de se sustenter. C'est Hailey qui, intuitive comme à son habitude, et venue lui apporter un plateau. Elle s'est éclipsée sans mot dire et Cosgrave n'a même pas cherché à justifier sa présence dans le lit du dragon. Il est arrivé à digérer qu'elle sait et qu'elle est une alliée silencieuse qui le couvrira en toutes occasions.

- La manœuvre a-t-elle au moins réussie ? Les Efrits…comment se portent-ils ?
- D'après ce que j'ai compris, leur source t'a sucé la vie au point de presque te tuer et s'en trouve toute requinquée. Ca devrait aller pour eux.

Un silence s'instaure entre les deux amis, moins paisible que d'ordinaire. Gi-Ja finit par le briser.

- On a tout mis en oeuvre pour que tu te réchauffes mais je n'ai pas la sensation que cela fonctionne... Même moi en super bouillotte grandeur nature ! essaie-t-il de plaisanter. Et je n'aime pas cette toux que tu te traines... Tu crachais de la cendre au début, j'avais l'impression que tu t'effritais de l'intérieur. L'artificier ferme les yeux et secoue la tête pour chasser l'horrible vision du dragon perdant ses écailles une à une. Lorsqu'il les rouvre c'est pour se pencher au dessus de Neorvrim. Il faut à tout prix que tu guérisses, d'accord ? Qu'est-ce que je peux faire pour que tu ailles mieux ?

Il hésite, puis finit par laisser faire son besoin instinctif de le toucher, effleurant sa pommette pointue, le couvant d'une tendresse qu'il ne peux pas refouler.

- Dis-moi ?

- Depuis combien de temps suis-je cloué dans ce lit ?
- Depuis notre retour de Tae'alam. Tu as somnolé quasiment toute la journée et la nuit. On est presque le matin.
- Et tu me veilles depuis lors ? Il lui lance une œillade de côté, connaissant déjà la réponse. As-tu au moins pris le temps de manger quelque chose ?

Il avise soudain le plateau posé sur la sorte de bureau.
- Hailey ? Evidemment. Cette femme a une conscience des autres admirable. Je te remercie. La manœuvre a-t-elle au moins réussie ? Les Efrits…comment se portent-ils ?
- D'après ce que j'ai compris, leur source t'a sucé la vie au point de presque te tuer et s'en trouve toute requinquée. Ça devrait aller pour eux.
- Mmmm… tu ne les portes pas vraiment dans ton cœur, je me trompe ? demande-t-il avec une pointe d’amusement malgré son état. Au moins, tout cela n’a pas été vain. Je suis heureux d’avoir ranimé leur Flamme mais il est vrai qu’elle était particulièrement gourmande. Je ne m’attendais pas à un tel… désespoir.  

Le silence qui s’étire n’a rien de confortable. Il est peuplé de non-dits dont le dragon n’arrive pas à prendre la pleine mesure. Est-ce dans les habitudes humaines de s’impliquer à ce point pour un ami ? Ou ce qu’il partage avec Gi-Ja est-elle unique et différente. Difficile à dire. Finalement le caporal reprend la parole.

- On a tout mis en oeuvre pour que tu te réchauffes mais je n'ai pas la sensation que cela fonctionne...
- J’avoue n’avoir encore jamais ressenti un tel froid interne.
- Même moi en super bouillotte grandeur nature !
- J’étais très bien contre toi, assure le dragon sans mesurer le poids de ces mots-là.
- Et je n'aime pas cette toux que tu te traines... Tu crachais de la cendre au début, j'avais l'impression que tu t'effritais de l'intérieur.

Neorvrim fronce les sourcils. Cela non plus il ne l’a jamais expérimenté et une légère inquiétude le prend. Cracher des cendres… cela voudrait-il dire que sa propre Flamme a subi des dommages et s’étiolerait ? Comment pourrait-il en être sûr ? Ne voulais pas inquiéter outre mesure son ami, il préfère taire ses craintes.

- Je suppose que la chose est normale. J’ai perdu énormément de feu et d’énergie vitale et en ai reçu beaucoup par la suite. Cela a certainement engendré un déséquilibre dans mon métabolisme. La magie qui me tient debout doit s’ajuster à ses changements brutaux surtout si mon corps était déjà en train de…

Il ne finit pas sa phrase. C’est inutile.

Le visage du soldat envahit soudain son champ de vision et il en reste coi quelques secondes.  
- Il faut à tout prix que tu guérisses, d'accord ?
- Je… je vais essayer oui. Il tente de lui offre un sourire rassurant. Tout va bien Gi-Ja, je suis solide. Comme il l’a déjà fait auparavant, il guide la main de l’humain sur son cœur. Tu le sens ? Il est toujours là. Affaibli, mais toujours présent et embrasé.
- Qu'est-ce que je peux faire pour que tu ailles mieux ?

Il suit du regard ces doigts caressants puis remonte vers le visage de Gi-Ja et louche sur ses lèvres. Il les trouve admirablement dessinées et pleines. Une invitation à croquer.
Sa faiblesse le pousse à nouveau vers d’étranges pensées. Quelques étincelles pétaradent au creux de sa poitrine sans qu’il ne sache si cela est bon signe ou non.  

- Dis-moi ?
- Je… eh bien… il bafouille comme un idiot. Me tenir chaud en me couvrant de la sorte. Je vais avoir besoin de temps… et de feu encore. A plus petite dose pour me rééquilibrer. Pour la toux… j’imagine qu’elle partira au fur et à mesure.
A vrai dire il n’en sait rien.  
- Mais ne te sens pas obligé de rester auprès de moi. Ses doigts attrapent les siens et jouent inconsciemment avec. Tu as déjà fait beaucoup et tu as toi aussi besoin de manger, dormir et te changer les idées plutôt que de servir de bouillotte à un vieux dragon décrépi.

Gi-Ja caresse délicatement la poitrine du dragon du pouce, la paume à plat sur ce noyau élémentaire qui pulse faiblement. Son coeur bat, timidement certes, mais vaillament tout de même. Le jeune homme en revient à fixer Neorvrim. L'entendre bafouiller de la sorte est une chose rare et plaisamment déconcertante. Il a donc des côtés maladroits aussi adorables ? Une onde de chaleur crépitante se répand dans toute la cage thoracique de l'artificier.

- Je… eh bien… Me tenir chaud en me couvrant de la sorte.
- Entendu...
- Je vais avoir besoin de temps… et de feu encore. A plus petite dose pour me rééquilibrer. Pour la toux… j’imagine qu’elle partira au fur et à mesure.
- Je t'allumerais un petit bûcher dans notre clairière dès demain si tu es d'attaque pour marcher. Sinon, on fera ça ici dans la cour de la caserne.
- Mais ne te sens pas obligé de rester auprès de moi.

Malgré l'assertion, les doigts du dragon, plus honnêtes, retiennent ceux du soldat.

- Tu as déjà fait beaucoup et tu as toi aussi besoin de manger, dormir et te changer les idées plutôt que de servir de bouillotte à un vieux dragon décrépi.
- J'ai mangé et Hailey ne me laissera pas mourir de faim. Je peux dormir ici. Et avec une oeillade malicieuse, il ajoute. Et tu n'es ni vieux, ni décrépi.

Il se mordille la lèvre avant de sourire, ses dents blanches fièrement découvertes.

- Laisse-moi deux secondes, lui intime-t-il ensuite. Il sort du lit et retire la quasi totalité de ses vêtement à par son boxer avant de replonger sous les draps et les strates de couvertures. Viens là... Intime-t-il en ouvrant ses bras. Il étreint Neorvrim le plus étroitement possible contre lui. Selon les principes de la thermorégulation, le peau à peau est le plus efficace pour la transmission de chaleur.  Tu es bien installé ? s'enquiert-il.

- Je vais avoir besoin de temps… et de feu encore. A plus petite dose pour me rééquilibrer. Pour la toux… j’imagine qu’elle partira au fur et à mesure.
- Je t'allumerais un petit bûcher dans notre clairière dès demain si tu es d'attaque pour marcher. Sinon, on fera ça ici dans la cour de la caserne.
Il a bien entendu l’accent mis sur le « notre » et sourit.
- Bonne idée, fait-il en soupirant. Nous verrons. Présentement, la seule pensée de quitter ces couvertures me frigorifie d’avance. Ne parlons pas de sortir du bâtiment. J’imagine que tout le monde a vu le fier dragon rentré quasiment sur les genoux. Comment suis-je arrivé dans cette chambre d’ailleurs ? Mais ne te sens pas obligé de rester auprès de moi…. pour… me tenir compagnie. Tu as déjà fait beaucoup et tu as toi aussi besoin de manger, dormir et te changer les idées plutôt que de servir de bouillotte à un vieux dragon décrépi.
- J'ai mangé et Hailey ne me laissera pas mourir de faim. Je peux dormir ici.
- Je ne te conseille pas la chaise. Elle est d’un inconfort terrible.
- Et tu n'es ni vieux, ni décrépi.
L’éclat de rire de Neorvrim finit en toux fumante qu’il chasse d’un revers de main lasse.
- Là, tu vois bien ! Décrépi te dis-je. Et très, très vieux. C’est une réalité.

Ces arguments ne font rien pour éteindre le petit éclat digne d’un enfant sur le point de faire une bêtise dans les yeux de Gi-Ja.

- Qu’as-tu donc en tête ?
- Laisse-moi deux secondes.

Curieux, le dragon lève le menton pour voir ce qu’il s’apprête à faire et, éberlué, constate qu’il se déshabille.
- Gi-Ja ?
Mais le jeune homme est déjà de retour sous les couches de literie et lui tend les bras.
- Viens là...
-  Là ? Dans tes bras ? euh… soit.
Le corps un peu crispé, il s’exécute et se trouve soudain enrobé par la chaleur corporelle de l’humain. Faut-il qu’il soit terriblement faible pour le trouver si chaud ?
Il profite toutefois de l’apaisement que cela lui procure. Timidement, il glisse une jambe entre les siennes et se pelotonne contre son cou.
- Selon les principes de la thermorégulation, le peau à peau est le plus efficace pour la transmission de chaleur.  
- Hum, hum…ronronne-t-il. Il n’est pas encore complètement détendu mais n’en ai franchement pas loin. Vous êtes une espèce excessivement tactile… C’est surprenant. Pas désagréable…mais surprenant.
- Tu es bien installé ?
- Dans la mesure où tu ne survivrais pas si nous étions dans un volcan je suppose que oui… articule-t-il difficilement. J’ai l’impression d’être dans un cocon…
Il a beau avoir les yeux fermés et éprouver une grande fatigue, la conscience de ce corps étranger contre le sien est encore trop troublant pour qu’il s’abandonne au sommeil. Un long frisson le saisit et il s’y colle d’autant plus.
- Fais-tu cela pour moi ou pour éviter de dormir sur la chaise ? demande-t-il avec malice en relevant le menton.

Mauvaise idée.
Ses yeux tombent nez à nez avec sa bouche.
Encore.

Pourquoi fait-il donc soudain une fixette là-dessus ? Il ne ressent pourtant aucun de ses élans carnassiers et dangereux qui l’ont amené la première fois à vouloir y goûter.
D’autant qu’il sait maintenant que cela ne se fait pas entre ami. Ce qui amène la question suivante, perturbante.
Gi-Ja est-il vraiment un ami ?
Il ne se rend même pas compte qu’il fixe ses lèvres depuis de bien trop longues secondes. Gêné, il se sert d’un autre frisson pour revenir contre son cou.

- Comment suis-je arrivé dans cette chambre d’ailleurs ?

Gi-Ja lui explique qu'il ont du se mettre à quatre pour le transporter au lit, précisant que Devane s'était même exclamé qu'il n'avait jamais rien porté de si lourd. Le caporal Cosgrave s'était chargé de le déshabiller et tous s'était collectés pour donner une ou deux couvertures en rab. Le radiateur portatif était un prêt d'Emma qui l'avait ausculté. La base s'était mobilisé pour lui.

- Tu es bien installé ?
- Dans la mesure où tu ne survivrais pas si nous étions dans un volcan je suppose que oui…

Le soldat pouffe tendrement.

- Je pense que si tu devais aller barboter dans la lave je te regarderais du bord du cratère en te faisant coucou. Ceci dit, ce serait peut-être une bonne idée. Il faudrait que je demande si des volcans sont accessible en Faërie...
- J’ai l’impression d’être dans un cocon…
- Tant mieux...

L'humain lui frotte doucement l'échine, ses doigts dévalant les muscles de son large dos. Personne ne les espionne, il s'adonne donc sans retenue aux câlineries qu'il réserve d'ordinaire à Pati ou aux chats errants (c'est du moins ce dont il essaie de se se convaincre.) Neorvrim, pelotonné contre lui semble regagner quelques degrés. Son souffle brûlant lui chatouille le cou. C'est bon signe... en plus de déclencher des réactions particulières. L'artificier se sent pétiller de l'intérieur, du ventre à la tête, comme une boisson gazeuse. Sa propre respiration s'est calée sur celle du draconien, se faisant plus vaporeuse. Le frisson qui ébroue la carcasse de Neorvrim, pousse Gi-Ja à le presser davantage contre lui.
Il déglutit.
Son attitude ambigüe floute pour beaucoup la frontière qu'il pensait avoir dressée entre affection et désir. Les deux sont aussi fusionnels l'un que l'autre quand il s'agit de Neo. A-t-il perverti cet être foncièrement honnête ?

- Fais-tu cela pour moi ou pour éviter de dormir sur la chaise ?
- Peut-être un peu des deux, rétorque le soldat en riant.

Neorvrim a un instant d'arrêt, louchant sur sa bouche. Gi-Ja baisse écarte une boucle brune qui barre le visage du dragon, avec un soupçon d'inquiétude.

- Qu'est-ce qu'il y a ?

Son ami replonge dans le creux de son cou pour toute réponse et l'humain frissonne en écho du sien, mais certainement pas pour les mêmes raisons. "L'idée c'est de réchauffer Neo, pas de me chauffer moi !" se sermonne-t-il.

- A quoi pensais-tu ? souffle-t-il à l'oreille du draconien, une main dans son épaisse tignasse, qu'il peigne négligemment avec ses doigts comme il le ferait du pelage de Pati ( se persuade-t-il).

Ces doigts dansants sur son échine sont terriblement relaxants et d’autres frissons s’invitent sur sa peau. Des frissons inconnus, qui se rapprochent de ce qu’il ressent lorsqu’il touche ses écailles tout en étant différents. Il n’avait jamais eu l’occasion d’expérimenter à quel point sa peau humanoïde était sensible.
Il a conscience de cette atmosphère particulière, intime, chaleureuse et quelques peu tendue. Comme si l’air lui-même attendait quelque chose.
Et le fait que des pensées inappropriées envahissent à nouveau son esprit n’aide pas. Mieux vaut donc qu’il cesse et se concentre sur le réchauffement de son cœur et de tout son être.

- Qu'est-ce qu'il y a ?
Ayant noté l’inquiétude dans le regard de son ami, il se contente d’un vague
- Tout va bien. Malgré le frisson qui l’a saisi, il s’empresse d’ajouter. Ton corps est une incroyable source de chaleur et me fait beaucoup de bien.
… et de détente. Même s’il ne s’explique pas ce dernier point.

Les doigts de Gi-Ja s’invitent à présent dans ses cheveux dans des gestes lénifiants à souhait. Ils ont beau être pratiquement imbriqués l’un à l’autre, il se rapproche encore et la main qu’il avait sagement calée sur la hanche de l’humain glisse dans le creux de ses reins. De sa gorge s’échappe des petits sons proches d’un feu ronronnant.

- A quoi pensais-tu ?
Nouveau frisson qui part de son oreille et dégringole le long de sa colonne.
- Que je suis bien… incroyablement bien, que ta peau est chaude et douce. Il soupire, ses lèvres très proches de ladite peau. Je n’ai pas… l’habitude de toute cette proximité physique. Je sais qu’elle est plus courante chez les humains. Mais je ne savais pas mon derme si sensible sous cette forme. Après toutes ses années d'existence, je découvre encore des choses sur moi… et ça n’est pas déplaisant. Malgré ses résolutions, il lève les yeux vers le jeune homme pour croiser son regard. Et toi ?  

- Tout va bien. Ton corps est une incroyable source de chaleur et me fait beaucoup de bien.

Gi-Ja raffermit sa prise sur le corps alangui du dragon. Il arbore un sourire satisfait et joue nonchalamment avec sa sombre chevelure. Les boucles d'ébènes glissent entre ses phalanges, lui procurant un sentiment d'intimité à la fois inadéquate et délicieux. Neorvrim l'enlace d'avantage. Sa paume s'aventurant au creux de ses reins suscite un soupir de bien être -et de bien autre chose- qui s'étiole dans l'atmosphère chaleureuse de la pièce.

- A quoi pensais-tu ? lui murmure l'humain.
- Que je suis bien… incroyablement bien, que ta peau est chaude et douce.

Gi-Ja se sent rosir malgré toute sa volonté de se concentrer sur la température de son ami. Il n'y peut rien, cependant : la respiration du dragon ricoche sur son derme et lui grêle délectablement.  Il ferme les yeux une poignée de secondes. Veine tentative de chasser les pensées moins chastes qui commencent à s'égrainer dans son esprit.
Combien ses nuits ont-elles dérapé sur des rêves mettant en scène des situations comme celle-ci ?

- Je n’ai pas… l’habitude de toute cette proximité physique.
- Moi non plus, à vrai dire.
- Je sais qu’elle est plus courante chez les humains. Mais je ne savais pas mon derme si sensible sous cette forme.
- Vraiment ?
- Après toutes ses années d'existence, je découvre encore des choses sur moi… et ça n’est pas déplaisant.
-  Je suis.. un peu flatté que moi, petit humain, arrive à t'apprendre encore des trucs sur toi, rétorque le jeune homme avec un sourire. La curiosité le pousse à poursuivre sur une pente qu'il sait pourtant savonneuse. Mais...Iska et toi... vous euh.. vous ne vous touchiez jamais sous cette forme ? Non pas que je me compare à elle, hein... s'empresse-t-il d'ajouter avec embarras. Juste... Je trouve ça surprenant....
- Et toi ?

Leurs regards se croisent. Neorvrim a tout le loisir de constater le teint empourpré et les prunelles fiévreuses de son ami.

- Je.. Je n'ai jamais tenu quelqu'un dans mes bras comme je te tiens aujourd'hui... souffle-t-il en le fixant intensément. Je me le suis toujours interdit.... Il émet un petit rire d'excuse. D.. du coup si j'ai des réactions.. euh.. un peu... un peu trop... Comme la tension malvenue qu'il sent darder un peu plus bas sous la ceinture de son boxer... Je m'en excuse...

A son tour de loucher dangereusement sur la bouche au tracé noble et à la lippe fine du draconien.

- Après toutes ses années d'existence, je découvre encore des choses sur moi… et ça n’est pas déplaisant.
- Je suis.. un peu flatté que moi, petit humain, arrive à t'apprendre encore des trucs sur toi.
Neorvrim émet un rire léger.
- Il serait prétentieux de croire que ma longue vie m’ait tout enseigné. Toi et les tiens m’en apprenez beaucoup depuis mon réveil. Votre vision de la vie est… rafraîchissante. Vous avez un instinct de survie tout à fait incroyable. Petite moue amusée. Sauf toi évidemment… Il redevient sérieux un instant. L’odeur de ta chair brûlée me hantera un moment je crois…
- Mais...Iska et toi... vous euh… vous ne vous touchiez jamais sous cette forme ?
- Parfois. Très peu au goût des humains.
- Non pas que je me compare à elle, hein... Le dragon sourit contre sa peau. Juste... Je trouve ça surprenant....
- Pourquoi donc ? Cette forme humanoïde n'est qu'une seconde peau plus… diplomatique, plus civilisée. Nos accouplements ne sont ni l’un, ni l’autre. Cette apparence, nous ne l’avons acquise que très récemment si l’on regarde l’ensemble de notre histoire. Nous ne faisons que mimer ce que l’on a pu observer chez les faes principalement. Et le contact physique n’est pas non plus leur fort. Les câlins, les baisers, ce… genre d’étreinte là, cela m’était inconnu. Et quelque part… tant mieux. Tout cela à quelque chose d’addictif… J’aurais eu bien plus de mal à supporter l’éloignement d’Iska … et le reste. Il se tait un instant, tiré vers un semble de souvenirs doux-amers et préfère ramener le sujet ailleurs. Et toi ? A quoi pensais-tu ?

La rougeur de son teint et ses yeux pétillants étrangement l’inquiète soudain. Il dégage l’une de ses mains et la pose sur le front du jeune homme. Aussitôt il se redresse pour moins se coller à lui.
- Gi ? Tout va bien ? Je te donne trop chaud ?

- Je.. Je n'ai jamais tenu quelqu'un dans mes bras comme je te tiens aujourd'hui... Je me le suis toujours interdit...
- Pourquoi ? N'as-tu jamais été avec quelqu'un ? Penses-tu que c’est mal ce que nous faisons là ? demande le dragon, perplexe. C’est pourtant agréable… enfin je présume peut-être de ton bien-être à cet instant.
- D… du coup si j'ai des réactions… euh... un peu... un peu trop... Je m'en excuse...
Cette fois Neorvrim fronce les sourcils, complètement perdus.
- De quel genre de réactions parles-tu ? Un peu trop quoi ? souffle-t-il.

Le regard de l’humain vient à nouveau de changer et s’abime dans la contemplation de son … menton ? Non plus haut.  
Sa bouche.
Les frontières de ce qu’ils sont l’un pour l’autre sont si flous et poreuses qu’il ne sait plus ce qu’il veut ou se refuse lui aussi, ce qu’il peut et ne peut s’autoriser à avoir. Sans même y réfléchir au préalable ses lèvres formulent une demande qui risque d’en franchir les limites.

- Gi ? Certains amis s’embrassent-ils chez les humains ?
Sa voix a repris des accents envoûtants et hypnotiques alors qu’il se redresse légèrement sur un coude pour le fixer sans ciller.

- Pourquoi donc ? Cette forme humanoïde n'est qu'une seconde peau plus… diplomatique, plus civilisée. Nos accouplements ne sont ni l’un, ni l’autre. Cette apparence, nous ne l’avons acquise que très récemment si l’on regarde l’ensemble de notre histoire.
- Ah oui ? Je croyais bêtement que vous naissiez avec...
- Nous ne faisons que mimer ce que l’on a pu observer chez les faes principalement. Et le contact physique n’est pas non plus leur fort.
- De ce que j'ai vaguement compris c'est qu'ils ne se reproduise pas de façon... sexuée.
- Les câlins, les baisers, ce… genre d’étreinte là, cela m’était inconnu. Et quelque part… tant mieux.
- Pourquoi ?
- Tout cela à quelque chose d’addictif… J’aurais eu bien plus de mal à supporter l’éloignement d’Iska … et le reste.

"Addictif."
Gi-Ja s'accroche à ce mot qui résonne puissamment en lui. Neorvrim aime le contact, celui qu'il lui procure, lui. L'esprit de l'humain s'embrume un peu plus. Il est en train de faire n'importe quoi, de se méprendre et comme d'habitude de dénaturer quelque chose de beau. Leur amitié est ce qu'il possède de plus précieux au monde. Les évènements de Tae'alam le lui ont fait comprendre.

- Gi ? Tout va bien ? Je te donne trop chaud ?

La large paume du dragon se pose sur son front et le jeune homme manque un battement de coeur.

- N.. Non ça va, au contraire, ça veut dire que tu assimiles ma chaleur et que mon corps se trouve obligé d'en produire plus. Il se contraint à poursuivre avec un timbre égal. Je me disais.... Juste... Je.. Je n'ai jamais tenu quelqu'un dans mes bras comme je te tiens aujourd'hui... Je me le suis toujours interdit...
- Pourquoi ? N'as-tu jamais été avec quelqu'un ?
- Non... enfin... pas vraiment.

Evacuer ses urgences de libido avec des inconnus pour se haïr ensuite ne peut pas franchement être comparé.

- Penses-tu que c’est mal ce que nous faisons là ? La question le laisse muet. Il se trouve incapable de présenter une réponse convenable. C’est pourtant agréable… enfin je présume peut-être de ton bien-être à cet instant.
- C'est très agréable, dit-il cette fois sans détour. Je me sens toujours, extrêmement bien auprès de toi...En paix...Je ne sais pas pourquoi, tu me fais un effet pareil.... souffle-t-il en le contemplant avec la même intensité que Neorvrim a vu luire quelques fois dans ses prunelles : en le regardant à la dérobé, quand ils ont dormi cette fois là ensemble, lorsqu'il est sorti de son bain de flammes... D… du coup si j'ai des réactions… euh... un peu... un peu trop... Je m'en excuse...
- De quel genre de réactions parles-tu ? Un peu trop quoi ?

Gi-Ja rougit un peu plus, louchant sur cette bouche qui palabre, qui pose de terribles et insurmontables questions, qu'il a monstrueusement envie d'embrasser. Il tente de mobiliser toute sa volonté qui se fait aux abonnés absents.
"Mon ami ! C'est mon ami !"

- Gi ? Certains amis s’embrassent-ils chez les humains ?
- Ca dépend lesquels... s'entend-il répondre avec la même suavité, la pulpe de ses doigts effleurant inconsciemment le menton du draconien. Ses lèvres s'entrouvrent d'elles même, comme dans l'attente que Neorvrim trouve sa réponse par l'action.

- C'est très agréable. Cette affirmation franche fait sourire le dragon. Je me sens toujours, extrêmement bien auprès de toi...En paix...
- Je m’en réjouis.
Toujours aussi égoïstement.
- Je ne sais pas pourquoi, tu me fais un effet pareil…
- Est-ce si important de le savoir ?

Gi-Ja le regarde avec une intensité fascinante, troublante. Jamais on ne l’a contemplé de cette façon. Pas depuis des centaines et des centaines d’années. Il a une flamme particulière dans ce regard. Attirante, comme toutes ses congénères. Apte à vous brûler. Même un dragon ignifugé n’est pas l’abri.
- D… du coup si j'ai des réactions… euh... un peu... un peu trop... Je m'en excuse...
- De quel genre de réactions parles-tu ? Un peu trop quoi ?

Mais ces questions-là resteront sans réponse et c’est terriblement frustrant. Il voudrait comprendre.
Mais il n’insiste pas. Par respect. Il n’est pas dans sa nature d’imposer quoique ce soit. Pas à ceux qu’il estime et apprécie. Néanmoins, une autre question franchit la barrière de ses lèvres, une question qui le tourmente depuis quelques temps maintenant.

- Gi ? Certains amis s’embrassent-ils chez les humains ?
- Ca dépend lesquels...

La légère caresse des doigts qui parcourent son menton le distrait un court instant. Suffisamment pour s’arracher à la contemplation de cette bouche, source de toutes ses interrogations et de son appétit à cet instant.
Mais la réponse de Gi-Ja n’en est pas vraiment une.
Et le voilà suspendu à nouveau dans l’incertitude. De ce qu’il souhaite, de ce qu’il peut se permettre.

- Lesquels ? Lesquels le font ?

Son corps humanoïde qu’il connait si mal semble plus honnête, il veut expérimenter. Son instinct animal se pose moins de question, il veut goûter.

Alors il se penche encore et presse ses lèvres contre celles de Gi-Ja un court instant et avec beaucoup de délicatesse. Le contact est aussi doux et tendre que ce qu'ils font depuis que l'humain l'a rejoint sous les draps.
Loin d’être désagréable mais pourtant il ne peut s’empêcher d’être déçu.
Une agréable chaleur s'est répandu dans sa poitrine, mais les sensations qui l’assaillent sont loin de ressembler aux envolées passionnelles dont il a été le témoin.

Signe finalement qu’il ne ressemble pas à un humain de ce point de vue-là. Il sourit toutefois, rassuré que cette expérimentation ne changera rien à la merveilleuse relation qu’il entretien avec cet humain unique à ses yeux.
Il repose la tête contre l’oreiller.

- Merci pour ce baiser, Gi-Ja. Je le garderai précieusement en mémoire. Avec le reste.

- Lesquels ? Lesquels le font ?

"Aucun."
"Ceux qui couchent ensembles par arrangement."
"Ceux qui n'y mettent aucun sentiment..."

Gi-Ja panique et pendant ce laps de temps, Neorvrim vient poser ses lèvres sur les siennes. C'est doux, tendre, chaste, mais surtout, cela le prend complétement au dépourvu. Le jeune homme se fige un instant, incapable de réfléchir, le coeur en cavale et la cervelle à l'agonie. C'était si court, si peu, si... anecdotique.
Le dragon recule, visiblement déçu et lui exprime une gratitude qui laisse l'humain complétement déstabilisé. Il devrait se trouver soulagé que le draconien se satisfasse de cette expérience, devrait s'accrocher à ce retour à la réalité un peu abrupt mais sain, se laisser convaincre par la douloureuse affirmation que Neorvrim n'éprouve pas le moindre désir pour lui.

Il devrait.

Malheureusement, son corps décide que les choses n'en resteront pas là, à moins que ce ne soit un sursaut de fierté ou bien de vexation. Ses émotions sont beaucoup trop emmêlées pour qu'il parvienne à les identifier.
Gi-Ja se redresse et surplombe soudain Neorvrim, une flamme déterminée, presque vindicative, dans le regard. Sans énoncer le moindre mot, il s'empare du visage de Neorvrim à pleines mains, enfonçant ses phalanges dans son épaisse tignasse. Là, il lui décoche un baiser farouche, envahit sa bouche avec une suavité vorace.
Carnassier, comme un dragon.
Passionné, comme un amant.
Gi-Ja reflue, après ce long échange, le souffle court et haché, le palpitant au bord de l'explosion et l'envie de pleurer inexplicablement en même temps.

- Si tu dois garder un baiser en mémoire... Préfère-celui-là. Assène-t-il à son ami.

Le soldat s'apprête à glisser hors des draps. Les premières lueurs de l'aube, dardent au travers des stores. Le clairon ne va pas tarder à sonner, de toute façon, et Devane a décidé de se venger avec du Britney Spears. Ce qui s'est passé dans cette chambre, restera dans cette chambre.