I thought you were my new best friend (my)
Wish I knew better then

"J’ai… du respect pour toi, Cassandra.
Et tu devrais en avoir plus pour toi."

Ta gueule !
Ta gueule !
Ta gueule !

Malgré les coups de rein de Silvio, les quelques mots prononcés par Urdred continuent de la hanter et l'empêche de pleinement lâcher prise. Elle n'a pas le luxe de noyer ses peines dans l'ivresse, elle : la dope, l'alcool, la nourriture, le sport.... Plus aucun de ces dérivatifs ne fonctionne sur son corps mort. Tout ce qui parvient à la remplir encore c'est le sang et le sexe.
Maigre consolation pour une existence éternelle.

L'orgasme arrive enfin, besogneux et poussif. Elle profite à peine de ces quelques secondes de court-circuit cérébral. Le démon se retire avec un soupir et se rhabille déjà.

- Je ne peux pas rester plus longtemps.
- Pas grave, fait la vampire en reboutonnant son propre jean.
- T'es sûre que ça va ?
- Ouais... pourquoi tu me demandes ça ? fait-elle en redressant le menton, l'air revêche.
- Je ne sais pas. Tu n'avais pas l'air... "dedans".
- C'est toi qui était "dedans" techniquement... ricane-t-elle avec désinvolture.
- Non, mais... T'avais l'air préoccupée. On peut en parler , si tu veux...
- Ecoute Silvio, toi et moi ça n'a rien de personnel. Ok ? T'es un super plan cul, mais j'ai pas envie de te raconter ma vie. Si on baise en semble c'est pour me détendre, pas pour ressasser mes problèmes avec toi.
- Ok.. ok... je vois, je ne pose plus de questions ! fait le Dormeur en levant les mains en signe de reddition. Mais à un moment donné, faudra pas t'étonner que je te ferme moi aussi la porte.

Cassandra se passe une main sur le visage. Elle prend conscience qu'elle est non seulement injuste mais en plus parfaitement égoïste.

Je deviens pire qu'Urdred...

- Silvio... fait-elle en tendant une main vers lui.
Il la repousse sèchement.
- Non, c'est bon. Bonne nuit, Cass...

Elle le regarde partir, vexé, avec une sensation acide dans le fond de la gorge.

- Putain, fait chier...

Son poing s'enfonce dans le tronc d'un arbre et fait voler son écorce en éclat.
Alors, seulement, elle prend conscience qu'elle a un spectateur.

On ne peut même plus être déprimé peinard !?

Sincèrement, plus ça va, moins je me sens en phase, et comme je n'ai plus du tout de réserve d'herbe de Belle Plante, plus je me souviens de tout. Absolument tout. Le nombre de battement de cœur qui me sépare de la dernière fois où j'ai souris, le nombre de respirations que j'ai prises depuis que je n'ai plus rien.

“Je serai toujours là pour toi” Ha ! Quelle connerie…

Je suppose aussi que plus ça va, plus la compagnie des autres est préférable à la mienne…

Ouais, je ne peux pas leur en vouloir, étant le seul connard de l'histoire.

Cette partie de jambes en l'air -parce qu'il s'agit de cela- m'intrigue. Bon. Quitte à n'avoir plus de porno sous la main. Bref. Me jugez pas !

Je m'approche, faisant mine de cueillir des champignons… bordel, j'ai envie de champignons maintenant ! De bons champis hallucinogènes ! Ouais !

...Et j'observe la scène. Ce n'est pas ce que j'avais cru. Aussi reculé, je m'attendais à un couple passionné et avide, mais il n'en est rien. C'est un peu comme un mauvais film, en fait, ou un drame, ou un amateur ?

C'est presque fait comme une corvée, parole de corvidé !

Finalement, ça se finit quand lui a fini et ça part en engueulade. J'aurais dû arrêter le film avant. Madame envoie le monsieur bouler bien proprement, et Monsieur réagit de la pire des manières et se barre. Classe.

Madame est sexy.

Madame m'a vu.

Merde.

“Salut ! J'habite dans le coin, j'vous ai entendu. Belle technique, mais un peu classique.”

D'accord…

“Est-ce que tout va bien ?”

Cassandra se tourne vivement vers l'olibrius qui accroupis dans l'herbe fait genre d'y avoir perdu une boucle d'oreille. Son expression est aussi furieuse que son poing est en sang.

- Ca va j'te dérange pas ?

Impression désagréable de "déjà-vu".
Urdred l'avait surprise en train de se nourrir sur une biche, ce drôle de type en train de copuler. Deux actes pour le moins intimes.
Il faut qu'elle arrête de tout relier à son foutu colocataire.

- Salut ! J'habite dans le coin, j'vous ai entendu. Belle technique, mais un peu classique.
- Tu veux le remplacer, peut-être, pour me montrer la tienne ? qu'elle suggère avec une sensualité aussi agressive que dénuée de la moindre pudeur. C'était pas génial, de toute façon, tu ne pourras pas être pire.

Son carnet bal se réduisant à peau de chagrin et la nuit n'allant pas en s'allongeant, elle ne vas pas faire la fine bouche. Il n'est pas vilain dans son genre. Peut-être que ça l'aidera à évacuer le vague à l'âme plus efficacement que les performances de Silvio.

- Est-ce que tout va bien ?
- Putain , mais qu'est-ce que vous avez tous à me poser la question ? Hein ? J'ai l'air à ce point au fond du trou ?! explose-t-elle

Neorvrim la surveille du coin de l'oeil comme s'il s'attendait à ce qu'elle craque, Silvio trouve qu'elle a la tête ailleurs, même Urdred la trouve pâlichonne.

- Tu crois que je me ferais prendre à la sauvette contre un arbre pour le boxer ensuite si j'étais bien ?


"J’ai… du respect pour toi, Cassandra.
Et tu devrais en avoir plus pour toi."

Ta gueule !
Ta gueule !
TA GUEULE !

L'envie de pleurer la fauche sans préavis. Ses larmes coulent, rouges et poisseuses, de canaux lacrymaux asséchés par son décès. Elle renifle et s'essuie d'un revers de main rageux.

"Non, ça va, tranquille."

Oh bordel, elle a l'air d'en avoir beaucoup sur la patate, celle-ci !

"Alors j'aimerais bien, mais j..." Je ne pourrais pas être pire ? Je ne te le fais pas dire ! Moi, j'aurais fait ça bien, je l'aurais fait venir, encore et encore, jusqu'à ce qu'elle demande grâce et oublie jusqu'au fait que je n'arrive pas à bander si facilement. "Attends, tu m'envisages sérieusement ?"

Je pose la question qu'il ne fallait pas et elle se met à crier. Je lève les mains comme pour l'apaiser mais j'attends patiemment la fin. Ouais, t'as l'air vraiment au fond du trou.

On dirait moi.

C'est simple, on dirait moi en meuf.

Et en plus sexy.

Et en plus musclée.

Et en plus chanceuse parce qu'elle a pu tirer son coup !

"Je ne sais pas qui est ce "tous", je suis seul, ici. C'est mon endroit pour exploser de colère à moi. Mais je te le prête, si tu veux."

Finalement, elle lâche, tout, absolument tout. Quelque chose en elle cède, enfin. Je crois comprendre que c'est du lourd. Oh que oui, on dirait moi.

"Crois-moi, je pense qu'on a eu le même souci, toi et moi."

De mes mains tendues, paumes vers elle, je les retourne pour montrer mes phalanges. Elles se sont restaurées, depuis, mais on voit très clairement la marque violacée de coups portés sur quelque chose de dur.

"Mais moi, c'était un mur en béton, un bâtiment abandonné. Ici, j'évite de taper sur les arbres, on ne sait jamais quelle bestiole on va finir par vexer."

Mes bras retombent le long de mon corps.

"Allez, viens-la."

D'un geste, je l'invite à venir dans mes bras. Après tout, elle voulait faire bien pire avec moi, il n'y a pas deux minutes. J'ai envie qu'elle me raconte son histoire, mais je ne suis pas certain de vouloir partager la mienne. Je me sens encore trop nul, trop idiot, trop... moi.

Quand nos peaux entrent en contact, je me rends compte à quel point elle est froide. Pour une raison qui m'échappe totalement, cela me donne envie de serrer plus fort encore, fort comme sa détresse, et la mienne.

- Alors j'aimerais bien, mais j...Attends, tu m'envisages sérieusement ?
- Pourquoi pas. Je suis vraiment frustrée et tu serais pas le premier inconnu avec qui je m'envoie en l'air... La vampire a un ricanement sinistre. Il parait que je n'ai aucun respect pour moi-même.

Finalement, elle explose.
Elle ne comprends pas pourquoi maintenant, comme ça, dans ces circonstances pour le moins incongrues.

- Je ne sais pas qui est ce "tous", je suis seul, ici. C'est mon endroit pour exploser de colère à moi. Mais je te le prête, si tu veux.
- Ah ouais.. renifle-t-elle. T'as gravé ton nom dans l'herbe ? C'est lui que tu cherchais ? lâche-t-elle bravache.
- Crois-moi, je pense qu'on a eu le même souci, toi et moi.
- Genre, je ne sais même pas qui tu es...

Et puis, il lui montre ses mains.
Leur vision foudroie Cassandra à cœur, allumant quelque chose dans sa poitrine. Une alarme. Un signal de reconnaissance.

- Mais moi, c'était un mur en béton, un bâtiment abandonné. Ici, j'évite de taper sur les arbres, on ne sait jamais quelle bestiole on va finir par vexer.

Elle s'ébroue d'un gloussement involontaire. Ses tâches de rousseur s'animent, sous la crasse rouge, vibrantes sur ses pommettes rondes

- Pas faux. C'est vrai qu'ils savent marcher maintenant...

Peut-être.
Peut-être que ce drôle de bonhomme connait lui aussi cette peine innomée, ce poids qui pèse et compresse la cage thoracique, ce trop plein d'émotion qui ne peuvent pas s'exprimer, vouées à s'entasser et pourrir.

- Allez, viens-la.

L'étranger la prend brusquement dans ses bras.
Passée la surprise, son corps se décrispe, fondu dans la chaleur de cet autre, si humaine, si tendre, si spontanée. Un véritable cadeau. Ses bras se referment sur cette carcasse brulante de vie et elle s'y blottit, elle et son chagrin. Tout entière.

Comme pour y disparaitre à jamais.

On va juste accélérer jusqu'à ce que la partie sarcasme soit finie. Waaaala…

C'est pas que je n'aime pas le sarcasme. J'en fais plein, tout le temps, mais je fais une overdose. Tour ce que je ressens chez elle est de la détresse, une détresse que personne ne devrait plus jamais avoir à ressentir.

J'arrive même à la faire rire au moins un peu. C'est plus le gloussement de quelqu'un de surpris, mais je prends. J'ai envie de faire rire. J'ai très envie de la réconforter, de l'apaiser, d'être là pour elle comme j'aurais eu envie qu'on soit là pour moi. S'il faut rester avec elle H24, aucun souci, je signe.

Je pense à cela tandis que je sens sa poigne se fermer autour de moi. Elle a l'air de s'accrocher comme un naufragé sur un rocher.

T'inquiètes, belette, je ne te lâcherai pas.

Et voilà, nous sommes comme deux crétins tristes. Son contact me ramène des souvenirs heureux, des rires, des choses que j'ai envie de vivre, et en aucun cas de 'juste' me souvenir, pétri de regrets.

Après un temps que je n'ai plus envie de calculer, on se desserre enfin.

“Bon. Dis-moi… t'es plutôt du genre à vouloir en parler pour vider ton sac, à préférer que je t'occupe l'esprit pendant un temps, ou à vouloir faire l'un puis l'autre ?”

Moi suis partant pour les deux ! Même si je suis curieux de savoir quel taré l'a rejetée.

Un connard sans aucun doute. Ou une connasse ?

Après un temps qui semble à la fois infini et trop court, l'inconnu la relâche doucement.

- Merci... souffle-t-elle en baissant pudiquement le regard. J.. J'ai salopé ton cuir avec mes chouineries sanglantes, là...
- Bon. Dis-moi… t'es plutôt du genre à vouloir en parler pour vider ton sac, à préférer que je t'occupe l'esprit pendant un temps, ou à vouloir faire l'un puis l'autre ?
- Je suis du genre à coucher avec des inconnus pour me vider la tête. Je t'en laisse déduire tes propres conclusions, fait-elle avec un sourire piteux. Je ne sais même pas comment tu t'appelles...

La vampire se masse la nuque, gênée.

- Moi c'est Cassandra. "Cass", si tu préfères. Et toi ?

Elle prend une inspiration, mais sans le moindre signe de souffle. Ses poumons ne semblent pas en activité, son coeur non plus d'ailleurs. Aucune pulsation caractéristique d'un battement.

- Tu avais quoi en tête quand tu proposais de m'occuper l'esprit ? s'enquiert-elle.

"On s'en fout de mon cuir."

Ses "chouineries", alors c'est bel et bien un chagrin d'amour, de ceux qu'on trouve ridicule, et de ceux dont on n'arrive pas à se détacher.

Coucher avec les inconnus ? Ow... WOW !

"Sincèrement, si j'étais pas aussi fucked up dans ma tête et si j'avais un état émotionnel stable, je penserais que c'est le destin qui t'envoie." Je ne me gêne pas pour la regarder de haut en bas avec un petit sourire satisfait. Franchement, elle a l'air d'être quelque chose avec quelqu'un qui sait quoi faire de ses dix doigts. "Je m'appelle Baphomet. Ou Baphy, ou l'aut con, ou le type de la plage."

Je n'ai sincèrement aucune idée de si elle a déjà entendu parler de moi.

Peu importe en fait.

Moi, je la connais de vue, nous nous sommes déjà croisés quand j'allais un peu mieux, mais j'ai plus envie de faire fonctionner ma mémoire pour me rappeler très exactement du pourquoi du comment. Ce pouvoir s'use ces derniers temps, je ne sais pas pourquoi.

Que pourrions-nous faire ? Excellente question !

"Alors je n'en ai foutrement aucune idée. Je pensais à des courses de voitures dans le sable, un cache-cache géant dans la forêt, à un jeu du post-it..." je repense à mon histoire de champis "À trouver des substances hallucinogènes, et juste voir où ça nous mène et dans quel état on va se réveiller demain... Je ferais gaffe au soleil qui se lève, c'est promis."

- Sincèrement, si j'étais pas aussi fucked up dans ma tête et si j'avais un état émotionnel stable, je penserais que c'est le destin qui t'envoie.
- Ah... Le fameux : "C'est pas toi c'est moi", ironise-t-elle. Pas très original mais toujours efficace. C'est toujours préférable à entendre que le "Je te respecte beaucoup trop pour ça."

Cassandra est secoué par un ricanement aigre. Pourtant, l'homme la reluque comme s'il était parfaitement appétissante. C'est... plaisant. Surtout quand on se mange tous les jours que vos muscles sont disgracieux.

- Je m'appelle Baphomet.
- C'est un nom de démon connu, ça  ! Tu es un démon ?
- Ou Baphy, ou l'aut con, ou le type de la plage.
- Attends, t'es vraiment "le" Baphomet ? C'est pas un pseudo ? La vampire écarquille les yeux, ébahie et ricane. Pourquoi "le type de la plage" ? T'as une plage de poche, toujours disponible ? s'amuse-t-elle.

Quel drôle de personnage !
Mais au moins, sa conversation est agréable et elle apprécie de lui plaire aussi franchement.

- Tu avais quoi en tête quand tu proposais de m'occuper l'esprit ?
- Alors je n'en ai foutrement aucune idée. Je pensais à des courses de voitures dans le sable, un cache-cache géant dans la forêt, à un jeu du post-it...
- Quoi ?! Dans cinq minute tu m'annonce que t'as un Tardis et qu'on peut échapper à cette foutue réalité...
-... À trouver des substances hallucinogènes, et juste voir où ça nous mène et dans quel état on va se réveiller demain...
- Je suis une vampire...
- Je ferais gaffe au soleil qui se lève, c'est promis.
- Non, c'est pas ça... La drogue ou l'alcool, tout ça n'a plus d'effets sur moi. Sauf si tu te défonces et que je te suce le sang après... Là j'en sentirais peut-être les effets.

"Non, vraiment, t'es suuuper sexy. Je me déteste moi-même, je t'assure ! Mais effectivement, pour le coup, je vais avoir besoin d'aller mieux pour ça... et... Merde. Le coup du "je te respecte trop", on te l'a fait à toi aussi ? Fuck, c'est nul ! Moi j'ai eu droit à toute une panoplie de "tu mérites mieux que moi", ou encore le fameux et indétrônable "Je préférerais qu'on reste amis, hihi"... coiffé de son magnifique "Il y a forcément quelqu'un pour toi, mais ce n'est pas moi"."

Je me présente, et elle me reconnait, ou du moins, elle reconnaît ce que je suis. C'est agréable. Et voilà que je lui fais un énorme sourire quand elle se permet de se moquer de moi.

"Le seul et l'unique, ouaip !"

Bon, d'accord, je suis fier. Mais j'ai le droit, c'est pas souvent que ça m'arrive. Les autres connaissent mes pairs, mais rarement moi.

"Ouais, mais c'est chiant parce que j'ai les poches pleines de sable... Non, c'est juste que j'étais connu sous ce magnifique pseudonyme à la caserne, fut une époque."

Ah merde... La pauvre.

Je grimace quand elle m'annonce qu'elle ne peut plus se mettre dans un état second. Je ferais tout pour trouver le moindre truc psychotrope en ce moment. Oublier, putain, juste oublier !

"Alors... j'ai pas de Tardis, mais je peux t'assurer qu'il est plus gros à l'intérieur qu'à l'extérieur."

'Tit sourire canaille, tit clin d'œil.

"Bon, que faire ?" Je fais semblant d'ouvrir un livre invisible et de tourner les pages. "En cas de rencontre entre deux inconnus qui ont besoin de se distraire... Cinéma... non... Restaurant... non... Balades à cheval nus sur la plage...nooon..." Je continue jusqu'à mettre le doigt sur quelque chose. "Déjà, parlant de ça, est-ce que tu vas avoir besoin de te nourrir ?"

Depuis quand je suis devenu aussi prévenant avec les vampires, moi ?

"Du coup, tu t'es isolée du monde, toi aussi, ou t'arrives à te rendre utile dans le groupe ?"

Je lui fais un signe de tête pour l'inviter pour une balade. C'est con, une balade au clair de lune, mais ça fait toujours du bien.

- Non, vraiment, t'es suuuper sexy.
- Vraiment ?

Cassandra sait qu'elle a pu plaire, auparavant, mais jamais elle n'a pu adouber cette idée elle-même. Elle n'a jamais été que "l'autre soeur", et désormais "l'autre fille". Sa seule certitude c'est qu'elle n'est pas le premier choix.
Jamais.

- Je me déteste moi-même, je t'assure ! Mais effectivement, pour le coup, je vais avoir besoin d'aller mieux pour ça...
- Je comprends, c'est pas grave. J'ai l'habitute.

"Moi aussi je me déteste..."

- Et... Merde. Le coup du "je te respecte trop", on te l'a fait à toi aussi ?

La vampire grimace de manière drolatique.

- Ouep !
- Fuck, c'est nul ! Moi j'ai eu droit à toute une panoplie de "tu mérites mieux que moi", ou encore le fameux et indétrônable "Je préférerais qu'on reste amis, hihi"... coiffé de son magnifique "Il y a forcément quelqu'un pour toi, mais ce n'est pas moi".
- Ah ouais, ça craint... la sainte trinité de la friendzone. Je connais... Avec option "t'es trop masculine pour que je te regarde un jour de cette façon. Tes muscles sont disgracieux, mais t'as de beaux yeux..."

Elle ricane tristement.

- Putain... Et le pire c'est que ça m'a fait plaisir, ce compliment. c'est pathétique, hein ? J'en suis à ce point... souffle-t-elle, le regard perdu vers l'obscurité.

Cassandra décide de rapidement changer de sujet.
Une question de survie à ce stade.

- Alors... j'ai pas de Tardis, mais je peux t'assurer qu'il est plus gros à l'intérieur qu'à l'extérieur.
- Hum... roucoule-t-elle avec un haussement de sourcil appréciateur. Dommage que tu ailles trop mal pour me "le" montrer...
- Bon, que faire ? En cas de rencontre entre deux inconnus qui ont besoin de se distraire... Cinéma... non... Restaurant... non... Balades à cheval nus sur la plage...nooon...
- Avec ou sans scelle... c'est pour savoir si on aura mal au cul !

Elle ponctue d'un rire malicieux qui lui fait du bien à l'âme. Rire de bêtises, sans guetter la prochaine pique, sans prendre sur soi constamment,...c'est étonnamment agréable.

- Déjà, parlant de ça, est-ce que tu vas avoir besoin de te nourrir ?
- Non, je suis tenue à un régime sec par le doc Grass. J'ai pas voulu boire de sang humain pendant une trop longue période, ça m'a salement carencée... du coup je suis à la poche d'hémoglobine obligatoire tous les jours. Bref, tu n'a rien à craindre, je ne vais pas te sauter dessus.

Ils entament une balade côte à côte.

- Du coup, tu t'es isolée du monde, toi aussi ou t'arrives à te rendre utile dans le groupe ?
- Non... je.. Je suis pas très à l'aise avec... Elle se désigne dans sa globalité d'un geste vague. Tu vois ? J'avais les pétoches de faire du mal à quelqu'un... Mais depuis quelques temps j'essaie de soigner ça... J'essaie parce que je dois montrer l'exemple à quelqu'un dont je prends soins......

Long silence.

- Et toi ? Pourquoi tu t'isoles ? Tu veux garder la plage pour toi tout seul ? Nouveau rire.

"Vraiment ? Non, pas 'vraiment', évidemment que tu es super sexy ! Si je t'avais connue avant, j'aurais tout fait pour t'embaucher et tu aurais été une des pièces maîtresse de mon entreprise !"

Sans mauvais jeux de mot...

Est-ce qu'elle dit ça pour se faire mousser ? Aucun problème pour moi, je lui rentrerais cette idée dans la tête avec la subtilité du dromadaire.

Oh non, pas de "j'ai l'habitude" avec moi ! C'est le genre de trucs qui pourrait me faire plier, et je pense qu'elle ne veut pas d'un partenaire comme moi quand je ne vais pas bien. C'est trop... dangereux, dans mon état de nerf.

"...Attends, quoi !?"

Putain, mais...

"Quel connard a bien pu te balancer ça ? Non... en fait... à quel degré de fragilité masculine, il faut arriver pour te critiquer sur ton physique ? Excuse-moi, mais... Celui qui t'a balancé ça a une confiance en lui totalement rétamée."

Je secoue négativement de la tête.

"Pathétique... Disons que j'ai été dans l'exacte même situation. Chaque petit compliment me faisait plaisir et nourrissait des espoirs... unilatéral "

... La fille trop amoureuse qui tombe amoureuse de tout le monde à l'exception du seul type qui la suit des yeux depuis des années. Bref, passons. On y reviendra plus tard.

"Sans selle, évidemment ! J'ai dit que c'était à poil."

Pour commencer, je lui demande si elle va avoir besoin de se nourrir dans un avenir proche.

"Alors... Je demandais plus cela par confort que par réelle crainte que tu me sautes dessus. Ceci dit, je pense que je n'aurai absolument pas ma chance. T'es une petite jeune dans le monde merveilleux des vampires alors ?"

Ah oui, toute neuve, toute neuve ! Je tourne mon regard vers elle. Alors la personne dont elle prend grand soin est le connard susnommée ?

"Je m'isole parce que je n'arrive pas à trouver ma place parmi les survivants. J'ai l'impression de faire de la merde, de faire fuir tout le monde et... d'être un peu laissé de côté. Y a des gens qui dépriment dont on a envie de prendre soin. Je ne suis pas de ceux-là, je t'assure."

Je lève le visage vers le ciel. Le bonheur me paraît tellement inaccessible, en cet instant. Mais bon, les autres ont besoin de moi, alors il faut que je laisse tout cela de côté.

"Tu menais quoi comme existence, avant ? Non, laisse-moi deviner... Je suis certain que tu étais... Hm... conceptrice de jeux-vidéos ? Naaah, c'est encore trop tranquille. Capitaine d'un navire pirate ! Je te vois trop en terreur des mers !"

- Si je t'avais connue avant, j'aurais tout fait pour t'embaucher et tu aurais été une des pièces maîtresse de mon entreprise !

Cassandra fronce les sourcils mais ne relève pas. Dans quel genre de business peut tremper un démon tel que lui ? Sa légende suggère plusieurs pistes, toutes peu enviables.

-...Attends, quoi !? Quel connard a bien pu te balancer ça ? Non... en fait... à quel degré de fragilité masculine, il faut arriver pour te critiquer sur ton physique ? Excuse-moi, mais... Celui qui t'a balancé ça a une confiance en lui totalement rétamée.

La vampire a un petit rire tendre en pensant que le portrait brossé n'est pas si loin de la réalité.

- Un connard qui vit des choses compliquées et qui s'accroche à sa connaritude parce qu'il ne lui reste plus que ça. Il n'est pas méchant, tu sais, et foncièrement honnête. Mais oui, son ego a été réduit en miette dernièrement. En tous cas, tu as tord pour une chose : il pensait ce qu'il a dit. Chaque mot. Il est trop fier pour s'abaisser à mentir.

La conversation se poursuit avec une certaine fluidité, une aisance dont elle n'a plus l'habitude.

- T'es une petite jeune dans le monde merveilleux des vampires alors ?
- Ouais... Pour être honnête, j'aurais préféré ne jamais le devenir. Légère hésitation. Elle avoue finalement. Sans Mister Connard, je pense que je me serais déjà offerte au soleil. M'occuper de son cas... ça m'empêche de me foutre en l'air.

Elle a un rire désabusé.

- Youhou ! Comment je viens de casser l'ambiance !... C'est horrible, je ne sais plus socialiser.  Et toi ? Pourquoi tu t'isoles ? Tu veux garder la plage pour toi tout seul ?
- Je m'isole parce que je n'arrive pas à trouver ma place parmi les survivants.

Alors ça, c'est mettre le doigt sur un sentiment précis et prégnant qu'elle partage pleinement avec lui.

- J'ai l'impression de faire de la merde, de faire fuir tout le monde et... d'être un peu laissé de côté.
- Ah ah... je comprends ça, ouais. J'ai plus de famille et plus d'amis. J'ai Connard et... peut-être son frère. Un gars gentil et compréhensif. Pas spécialement avec moi, avec tout le monde... Et j'ai encore ma mère... Même si elle est devenue sénile et qu'elle ne se souvient pas de moi. Elle est en bonne santé et s'est fait des copains au sanatorium du haras....
- Y a des gens qui dépriment dont on a envie de prendre soin. Je ne suis pas de ceux-là, je t'assure.
- M'en veux pas, mais...Je crois... Je crois que j'ai les mains trop occupées avec l'autre abruti pour parvenir à prendre soins de qui que ce soit d'autre.

Le vœu informulé, c'est qu'elle aimerait qu'on prenne également soins d'elle. Malheureusement, elle est toujours convaincue de ne pas mériter pareils égards.

- Tu menais quoi comme existence, avant ?
- Je ne suis pas certaine que tu ais vraiment envie de savoir...
- Non, laisse-moi deviner... Je suis certain que tu étais... Hm... conceptrice de jeux-vidéos ?

Cassandra fronce le nez, signifiant par là qu'il est loin du compte.

- Naaah, c'est encore trop tranquille. Capitaine d'un navire pirate ! Je te vois trop en terreur des mers !

Elle éclate de rire. Un vrai rire, léger et solaire qui dévoile toutes ses dents, qui agite sa frimousse tachetée.

- Aaah.. ça aurait pu être super projet de carrière si je connaissais quoi que ce soit à la navigation. Non.. J'ai été... Son expression se fait lointaine, plus grave... J'ai été un danger public, au sens littéral du terme. J'ai travaillé pour un type louche pour qui je fabriquais de la drogue. Pas de l'herbe qui fait rigoler, hein ! De la came bien costaude : met, kéta, ecsta,... J'étais super douée pour fabriquer des substances capables de te rendre accroc à la première prise... Et j'ai fait de la prison pour ça.

Lourd silence, deuxième session.
Cassandra s'ébroue d'un gloussement pathétique.

- Hé ben.... Cassage d'ambiance le retour de la vengeance... Désolée. Moi non plus je ne rentre pas dans la catégorie des gens déprimés qu'on a envie de réconforter.

Oh par les enfers... Je lève les yeux au ciel. Elle défend le connard qui a osé dire qu'elle n'était pas assez féminine. C'est simple, je déteste cordialement toute personne qui ose critiquer le physique de quelqu'un sur sa féminité ou sa virilité.

Bon, OK, je viens d'un endroit où je cultive et valorise cette différence... Et j'ai jamais été humain... et donc, je ne peux pas réellement me permettre de juger de la superficialité des gens. Mais merde, ça ne se fait pas. Point.

"Il a le droit de penser ce qu'il veut ! Mais ce n'est pas à lui de te dire ce qui est féminin ou non. Et toi, tu as le droit de lui dire à quel point c'est un connard. C'est pas parce que son égo s'est cassé la gueule que ça lui donne le droit de s'attaquer au tien ! Bordel !"

En tout cas, s'il reste à ne voir que les apparences, tant pis pour lui, voilà !

Et outre le fait que Cassie soit sexy, elle a l'air d'être une personne réellement très intéressante, avec qui on ne s'ennuie pas. Et ça tombe bien, j'ai pas envie de m'ennuyer !

La suite de son récit fait que je la comprends un peu mieux.

"Ah ouais, t'es coincée avec un mec qui a besoin de toi parce que t'es la seule assez gentille pour lui... Merveilleux. Tu dois te sentir obligée, et tellement coincée. Comme une femme avec sa belle-mère à domicile trop vieille pour s'occuper d'elle-même, non ?"

J'ai un rire qui suit le sien. Non, elle n'a pas cassé l'ambiance. Nous enquillons sur mon propre cas. Elle me comprend et... Je saute sur une occasion beaucoup trop belle.

"Hé bien, tu sais quoi ? Laisse le dude à son frère s'il est siiii formidable, et viens passer du temps avec moi ! Moi, j'ai les mains absolument pas occupées et j'ai très envie d'entendre un vrai rire sortir de cette bouche ! Je vais m'occuper de toi. Ensuite, on jouera à celui qui est le plus fucked up, mais pas tout de suite."

J'essaie de deviner la personne qu'elle est. Sans surprise, je me plante totalement... Mais j'entends son rire, un rire sauvage qui semble n'être pas sorti depuis longtemps. C'est un début, mais je n'ai pas l'intention de m'arrêter là.

Son histoire est fascinante. Alors c'est aussi une tête intelligente en plus d'être forte ? Bon, d'accord, on aurait dû se rencontrer à mon arrivée. Les choses auraient été différentes et je peux assurer à quiconque est en train de lire dans ma tête qu'elle aurait claqué la première personne à lui faire croire qu'elle n'était pas féminine.

"Ow, de la zonzon, carrément !"

Je secoue la tête.

"Oh non, tu ne casses pas l'ambiance, bien au contraire. Je ne te laisserai même pas te cacher derrière cette excuse à la con. T'as fait des trucs avec d'autres femmes en prison ? Tu t'es battue ? Tu as connu l'amour au féminin ? Raconte !"

Tout à notre marche, je n'ai d'attention que pour Cassandra.

Nous arrivons près d'un bâtiment en ruine, abandonné de tous, on dirait un genre d'ancienne usine qui aurait été pillée jusqu'à la moelle.

- Ah ouais, t'es coincée avec un mec qui a besoin de toi parce que t'es la seule assez gentille pour lui... Merveilleux.
- C'est horrible comme résumé... Mais assez vrai. Disons que j'ai l'habitude d'encaisser le sauts d'humeur des autres.
- Tu dois te sentir obligée, et tellement coincée. Comme une femme avec sa belle-mère à domicile trop vieille pour s'occuper d'elle-même, non ?
- Non... En vrai, il n'a rien demandé. C'est moi qui me suis imposée. J'ai choisi de lui venir en aide et de l'accompagner dans sa... "transition". Je me sens vraiment utile à ses côtés, tu sais. Je sens que malgré son comportement, je lui suis bénéfique...

Même à ses oreilles ça sonne horriblement servile, voir affreusement naïf. Jim comme Urdred ont certainement raison : elle est parfaite pour être esclave.

- Hé bien, tu sais quoi ? Laisse le dude à son frère s'il est siiii formidable, et viens passer du temps avec moi !
- Quoi ?! Mais...
- Moi, j'ai les mains absolument pas occupées et j'ai très envie d'entendre un vrai rire sortir de cette bouche ! Je vais m'occuper de toi. Ensuite, on jouera à celui qui est le plus fucked up, mais pas tout de suite.

Cassandra en reste comme deux ronds de flan. Personne - encore moins un homme- ne lui a balancé de but en blanc qu'il voulait prendre soin d'elle. Quelque chose de brulant se détache de sa poitrine et tombe dans les tréfonds de ses entrailles, irradiant d'une douce chaleur.

- Ok...Elle est bizarrement émue "pour que dalle!" et se sent obliger de détricoter cette émotion avec une blague. Si c'est pour chopper mon âme que tu fais ça, pas sûre qu'elle soit de grande qualité... Je ne sais même pas si les vampires en ont encore une !

S'ensuit des devinettes sur son passé. La réalité est bien moins drôle que les hypothèses de Baphomet.

- Oh non, tu ne casses pas l'ambiance, bien au contraire. Je ne te laisserai même pas te cacher derrière cette excuse à la con.
- Pourtant ça devrait te dégouter : ma défonce a détruit des vies à l'échelle de familles entières...
- T'as fait des trucs avec d'autres femmes en prison ? Tu t'es battue ? Tu as connu l'amour au féminin ? Raconte !
- Les putains de clichés ! J'ai connu l'amour au féminin dès le lycée, pas besoin d'attendre la taule. J'ai eu relativement peu d'emmerdes parce que je me tenais à carreaux et aussi parce que le mec pour qui je bossais avec une aura monstrueuse. Ca m'a pas mal protégée, mais également isolée. Je ne me battais que si nécessaire. Par contre j'ai beaucoup lu - je travaillais à la bibliothèque - j'ai passé quelques diplômes utiles pour ma réinsertion notamment une équivalence en chimie, j'ai appris une langue ou deux, je suis devenue vegan et j'ai fait pas mal de sport... Voilà. C'était... plutôt très tranquille, en fait.

Court silence.

- Et toi ? C'était quoi ta vie d'avant ?

Je m'en serais douté, quelque part. Elle est du genre à encaisser, dans tous les aspects de sa vie, de passer sous des "c'est pas grave" les coups dur, y compris ceux qui sont trop blessants.

Ouais... Mais pas avec moi !

"J'en doute sincèrement pas. Mais il ne faudrait pas que ça te bouffe non plus. Tu sais à quel point une personne dans le besoin peut être une véritable sangsue pour toi ?"

Quand je lui propose de prendre soin d'elle, il y a quelque chose qui se passe, quelque chose que j'ai brisé. Une carapace, peut-être. J'espère. Et j'éclate de rire à sa remarque.

"Merde, mon plan machiavélique est révélé ! Dommage ! Il ne me reste plus qu'à rendre ton âme qualitative pour cela."

Voilà qu'elle me casse mes fantasmes les uns après les autres. Bon, un peu rehaussé par ses amours de lycée. Bon, elle a surtout étudié en prison. Je suis content pour elle, parce que c'est un excellent état d'esprit. Bon, je ne me prive tout de même pas de la charrier.

"Pfff, la prochaine fois, tu m'inventes une histoire bien bandante, s'il te plaît ! Des codétenues en manque, débridées, des douches, un gardien qui matte... tout ce que tu voudras !"

Cependant, je ne peux pas m'empêcher de relever un détail.

"Je mange assez peu de viande, en réalité... Ça a dû être une putain d'épreuve de devoir te nourrir de sang après ta transformation."

Bon... J'ouvre la porte d'entrée d'un coup de pied et nous entrons dans cette ancienne usine où le sol est jonché de débris tant et si bien que ça croustille sous les pas.

Il est temps de répondre à la question. Je me tourne vers Cassandra d'un air faussement timide.

"J'étais propriétaire d'un donjon BDSM, Maître, pour être précis. Alors, je sais très bien ce que tu vas te dire, les gens ont des préjugés assez lourds envers ça aussi... Mais en réalité, même si c'était souvent épuisant émotionnellement et physiquement, je dois bien admettre que j'adorais mon métier. Explorer les fantasmes des autres, se démerder pour les réaliser à la perfection... Ouais, c'est encore ce que je savais faire de mieux !" J'en parle avec de plus en plus de passion... et de regrets. "Chez moi, personne n'avait honte de ce qu'ils ressentaient, tout le monde pouvait parler librement. Les fous rires entre collègues ou avec les clients n'étaient vraiment pas rares. Pour la société, mes invités étaient de vrais monsieur et madame tout le monde, mais pour nous, ils étaient spéciaux, chacun d'entre eux avec leurs histoires."

... et je me sentais infiniment moins seul avec mes délires...

Ouais, c'était la belle vie, franchement.

"Voilà, tu peux balancer tes commentaires et tes conneries. Je t'en prie ! J'assume ce que j'ai été."

- J'en doute sincèrement pas. Mais il ne faudrait pas que ça te bouffe non plus. Tu sais à quel point une personne dans le besoin peut être une véritable sangsue pour toi ?
- "Sangsue"... C'est comme ça qu'il me surnomme. Je ne peux pas être un moustique, tu vois, je n'ai pas d'ailes.

Et même ce surnom a finit par lui être attachant.
Baphomet semble dépité par sa description de l'univers carcéral.

- Pfff, la prochaine fois, tu m'inventes une histoire bien bandante, s'il te plaît ! Des codétenues en manque, débridées, des douches, un gardien qui matte... tout ce que tu voudras !

Cassandra éclate de rire.

- Toi, tu as beaucoup trop maté de porno...
- Je mange assez peu de viande, en réalité... Ça a dû être une putain d'épreuve de devoir te nourrir de sang après ta transformation.
- J'ai détesté... Je déteste toujours ça, d'ailleurs. Je suis devenue une créature qui est obligée de blesser pour bouffer. Mes convictions sont complétement piétinées.

Et sa personnalité change drastiquement. Elle hait la Cassandra-vampire, sans pitié, sexuellement désinhibée et vorace à tous points de vue. Elle hait cette prédatrice carnivore incapable de contrôle.

Ils pénètrent dans un vieux hangar désaffecté, en pleine forêt. Quelle usine a pu installer ses locaux en pleine cambrousse ? Une scierie peut-être ? Baphomet lui raconte sa vie d'avant.

- J'étais propriétaire d'un donjon BDSM, Maître, pour être précis.
- Aaaah... ça explique pas mal de choses, déclare-t-elle avec un sourire en coin.
- Alors, je sais très bien ce que tu vas te dire, les gens ont des préjugés assez lourds envers ça aussi... Mais en réalité, même si c'était souvent épuisant émotionnellement et physiquement, je dois bien admettre que j'adorais mon métier.

En effet, il en parle avec une passion peu commune. Cass l'observe avec acuité, la tête légèrement penchée sur le côté. Un homme qui aime son travail, c'est toujours très sexy, en verité.

- Voilà, tu peux balancer tes commentaires et tes conneries. Je t'en prie ! J'assume ce que j'ai été.
- Pourquoi j'en ferais... C'est un métier comme un autre, à mi chemin entre le psy, la courtisane et le magicien. Je trouve ça plutôt fascinant, en fait. Tu as réussi à créer une sorte de safe-place où chaque client avait l'impression d'être unique et important... J'aurais payée cher pour pouvoir ressentir ça.

Après tout, elle l'avait fait en travaillant pour Jim : devenir son âme damnée pour quelques minutes de reconnaissance, accepter sa corruption pour se sentir appréciée pour elle-même, l'ombre d'un instant...

Ma seule vraie drogue.

- Et avec un boulot pareil, j'imagine que t'étais pas marié, si ? Je veux dire... T'as de la famille ? Un compagnon ou une compagne ?

“Pourquoi il t'appelle comme ça ?” Ne pas poser la question, ne pas… “Tu l'as sucé ?” j'hausse nonchalamment une épaule. “Pour moi, c'lui la sangsue.”

Si ce n'est pas le cas, alors c'est le résultat d'un préjugé… décidément, ce mec a l'air adorable ! J'ai un rire à sa remarque. Touché.

“J'en ai regardé un bon paquet, oui. Mais ce que je préfère, ce sont les bêtisiers. Entre les mecs qui ont des pannes, les meufs qui éclatent de rire parce qu'on les chatouille, ou n'importe quel événement qui arrive en plein milieu…”

Bordel, la pauvre. J'imagine même pas à quel point ça doit la faire chier. En fait, je pense même sans peine qu'elle a dû essayer de ne pas se nourrir, voire de mourir de faim.

Finalement, elle me demande des questions sur mon passé. C'est donc avec fair play que je réponds. Si je savais qu'elle n'allait pas faire de remarques désagréables, elle ne fait pas même de commentaires et ne se moque même pas gentiment… avant de me balancer sans doute l'un des plus beaux compliments sur mon métier que je n'avais jamais entendu.

“Owow…” allez, je peux être plus éloquent que ça ! “Hé bien merci beaucoup… je… je t'aurais accueilli avec plaisir. Je pense que tu t'y serais beaucoup plu.”

Cette fois, c'est moi qui lui sourit en coin.

“Merci de me dire ça. Personne ne partage trop ce point de vue, malheureusement. Mais c'est cool de l'entendre, vraiment. Putain, je ne vais plus me sentir pisser avec ton coup du psy magicien courtisane !”

Eeeeet elle met le doigt sur un truc vrai. Douloureux, mais comme une vieille blessure qui ne fait plus vraiment mal avec la force de l'habitude. Quelque chose en moi tressaille quand elle me demande si j'ai été marié… c'est idiot. Personne de sain d'esprit n'aurait envie de se lier à moi.

“On ne m’envisage pas comme un homme sérieux, non, pas vraiment. J'suis… j'étais bien pour un coup en passant, histoire de se remonter le moral… ou le bon pote, à la limite.”

En fait, pratiquement toutes les personnes que j'ai aimé ne m'ont jamais regardées de cette façon là. Et aujourd'hui ? Non. Je suis trop brisé pour être un bon compagnon de vie.

“Et toi ? J'imagine qu'avec une mère à charge, c'est delicat d'avoir une vie intime… et je te vois pas vraiment en ménagère enfermée dans un mariage chiant à crever avec un mari ou une femme pour qui tu fais à manger et qui s'adresse à toi en mode ‘chérie, j'suis rentré !’ N'est-ce pas ?”

Nous continuons un peu dans l'entrepôt. Il n'y a plus rien à piquer. On dirait que de gros véhicules ont été garés ici.

“On dirait un repaire de mafieux. Un endroit où on amène un otage pour le faire parler.”

Je me tourne vers Cassie et prend un accent sicilien.

“Nous avons les moyens de vous faire parler. Qu'avez-vous fait de mon chat ?”

- Pourquoi il t'appelle comme ça ? Tu l'as sucé ?

La plaisanterie tape tragiquement juste. Cassandra écarquille les yeux comme s'il avait reçu une gifle imaginaire.

J'ai failli lui tailler une pipe.

- J'ai.... Oui. Je l'ai bu.

Rien que le souvenir lui fait frétiller les papilles et chauffer les veines. Son sang était délicieux, riche en gout comme en émotions. A cet instant, elle avait su qu'elle ne boirait jamais rien de plus fabuleux que lui. Elle avait également compris qu'à son corps défendant, elle éprouvait un profond désir de lui. Cela l'avait laissée interdite et démunie, car jamais Urdred ne la laisserait recommencer et jamais il ne la considérerait sous cet "angle".

- Pour moi, c'lui la sangsue.
- C'est moins unilatéral que tu ne le crois. J'ai autant besoin de lui qu'il n'a besoin de moi... C'est quelqu'un de bien, malgré ses défauts. Il est juste foutrement trop fier pour admettre qu'il a besoin d'aide ou même qu'il m'apprécie...

Et voilà qu'elle le défend encore telle une femme battue qui cherche des excuses constante à son mari.
Sauf que la situation n'est pas exactement la même.
Sauf qu'Urdred a juste les biais d'une éducation draconique différente de la sienne. Il ne cherche pas à la blesser, il se contente simplement d'être... lui.

Heureusement la conversation va voguer sur d'autres eaux. Baphomet est un type avec un parcours original et très intéressant.

- ...Putain, je ne vais plus me sentir pisser avec ton coup du psy magicien courtisane !

La vampire éclate d'un rire limpide qui se répercute en écho dans le vide de ces vastes bâtiments délaissés. Un peu à leur image, finalement.

- On ne m’envisage pas comme un homme sérieux, non, pas vraiment. J'suis… j'étais bien pour un coup en passant, histoire de se remonter le moral… ou le bon pote, à la limite.
- Désolée, si ma question fait ressurgir des trucs pas cool. T'as l'air d'être un chouette gars, qui mérite de trouver quelqu'un de bien. Toi aussi t'as le droit à ce qu'on s'occupe de toi, tu sais ?
- Et toi ? J'imagine qu'avec une mère à charge, c'est délicat d'avoir une vie intime… et je te vois pas vraiment en ménagère enfermée dans un mariage chiant à crever avec un mari ou une femme pour qui tu fais à manger et qui s'adresse à toi en mode ‘chérie, j'suis rentré !’ N'est-ce pas ?

Merde, ça ressemble beaucoup à ma vie avec Urdred, quand même.

Cassandra ricane, prise d'un certain malaise.

- A vrai dire, je suis plutôt le genre de meuf qui gâche une relation saine, parce qu'elle est obnubilée par l'idée de plaire à des gens pas bons pour elle, le genre de conne qui détruit son couple par loyauté pour son boss, parrain du crime organisé... Je suis du genre à faire chialer mes partenaires parce que je me dévoue tout entière à mes "amis". J'ai plus eu personne dans ma vie depuis la prison. J'enchaine juste les sex-friends... C'est.. une forme d'anti-dépresseur plus qu'autre chose. Bref... Je suis une belle calamité.
- On dirait un repaire de mafieux. Un endroit où on amène un otage pour le faire parler. Nous avons les moyens de vous faire parler. Qu'avez-vous fait de mon chat ?

Elle rit de bon coeur.

- Pitié, non, pas les mafieux... ça résonne un peu trop comme ma vie d'avant. J'ai plus envie de croire que c'était... je sais pas... La fabrique de chocos de Willy Wonka ! C'est pas plus chouette comme perspective, ça ? J'ai lu tous les Roald Dhal à ma petite soeur quand on étaient gamines. Elle adorait "Charly et la Chocolaterie"...

En moi, quelque chose se passe, un relent de jalousie. Je vois ses pupilles qui se dilatent d'envie à ce souvenir, ses lèvres qui se tordent de ce plaisir passé. Finalement, je ne parviens pas à comprendre cette émotion avant qu'elle ne se perde définitivement.

Mais bon, revenons-en à nos boucs.

“Nice catch, girl !”

J'imagine que ça n'a pas dû lui plaire que ça lui plaise autant d'être mordu ! Oui, cette phrase est étrange, mais dans un monde où les gens désavouent leurs attirances, je me comprends !

“Sincèrement, je souhaite qu'une chose : que vous trouviez votre bonheur, quel qu'il soit. Mais toi, t'as aussi besoin de vacances auprès de quelqu'un qui te le fera oublier quelque temps !”

On continue sur ma propre condition pas glorieuse et elle met les pattes dans quelque chose.

“Sens toi libre de me poser toutes les questions que tu veux. J'assume tout ce que je suis.”

...dans les limites des stocks disponibles, offre limitée dans le temps...

"Ah oui, tiens, je l'ai eu ça aussi, 'tu mérites de trouver quelqu'un de bien'..." Je secoue la tête avec un air d'excuse sur le visage. "Je ne veux entraîner personne sur cette pente, et surtout pas les gens qui sont suffisamment fous pour vouloir s'occuper de moi."

Si j'ai été isolé au moment où j'avais le plus besoin des autres, ce n'est pas une coïncidence. Cependant, je suis en train de remonter maintenant, alors j'en profite pour tirer Cassandra avec moi.

... Tirer hors du gouffre !

La miss me raconte son histoire. Je l'écoute tout du long. Oh oui, j'ai eu les mêmes soucis. Asmodée n'est pas un boss accaparant, loin de là, mais j'ai eu tellement besoin de sa reconnaissance qu'il n'aurait eu qu'à bouger le petit doigt pour que je vire femmes et enfants pour me mettre à quatre pattes devant lui.

À la fin de son histoire, je ne peux pas lui dire qu'elle a tort, ou qu'elle a raison. C'est vrai que de se faire reléguer au second rang après les amis ou un travail, ce n'est jamais agréable. Tout ce que je peux lui dire tient en une phrase que je prononce, ma main sur son épaule, mes yeux dans les siens.

"Maintenant, tu es libre."

Bon alors, quel est cet endroit ? Je tourne sur moi-même. Pas un repère de mafieux, parce que cela déplaît à la Dame.

"Aaaaah Willy Wonka, mon ami ! Pour une raison qui me dépasse, il était le fantasme de pas mal de femmes ! Le premier film uniquement, pas l'adaptation avec Johny Depp."

D'un coup, je me mets à imiter sa gestuelle, faisant semblant d'avoir un chapeau haut de forme et une canne. Je l'ai tellement étudié, j'ai dû me faire fabriquer un costume sur mesure et trouver un moyen de me teindre les cheveux sans trop les abimer. Finalement, je me mets à dire avec le même accent que lui, en faisant semblant de manger un chocolat.

"The suspense is terrible, I hope it will last.”

Finalement, j'attrape la main de Cassandra pour l'inviter à me suivre.

"Viens, continuons notre exploration !"

- Sens toi libre de me poser toutes les questions que tu veux. J'assume tout ce que je suis.
- Pas mon genre de forcer des confession, tu sais. Si tu veux en parler, tu en parleras... Ok ?

Cassandra lui dédie un sourire honnête et compatissant. Effectivement, le bonhomme semble se trainer un cœur en miette dans une chaussette. Elle pourrait presque entendre les tessons tintinnabuler quand il bouge.

- Maintenant, tu es libre.

Libre de faire quoi ?
La liberté est un poison pernicieux quand on ne sait pas quoi foutre de sa carcasse et qu'on déteste son état. Cass a l'éternité devant elle, plus de famille, plus d'attache et pourtant, elle ne s'est jamais sentie aussi prisonnière de toute son existence, piégée dans le néant avec elle-même.

J'ai promis à Urdred de guérir...
J'ai promis que je m'accrocherais...
On a encore du chemin à faire, lui et moi...

Et elle essaie.
Fort.
Mais la voie choisie n'est pas toujours aisément praticable. Elle trébuche souvent, comme ce soir.

- Celui avec Gene Wilder ? Ce qu'on a pu le poncer avec Evangéline ! La version avec Depp n'était pas mal mais n'avait pas le charmer désuet du premier...

L'imitation du démon est impeccable et la vampire applaudit.

- Bravo l'artiste ! Très réussi !
- Viens, continuons notre exploration !

La main de Baphomet est chaude, rassurante quand la sienne est glacée comme du métal. Elle se laisse entrainée avec un gloussement enfantin. Elle avait oublié ce que pouvait être la légèreté.

- Tu crois que l'on va découvrir un trésor ? Chuchote-t-elle, espiègle. Ma soeur et moi on a voulu devenir chasseuse de trésor un temps... Notre période Indiana Jones. Tu as des frères et soeurs ? Je ne sais pas du tout comment ça fonctionne chez les démons...On en devient un comment d'ailleurs ? On ne nait pas comme ça, si ?

"Tu te souviens que tu disais que tu gâchais l'ambiance ? Mes confessions à moi sont d'un tout autre délire."

La liberté ne semble pas lui convenir. Soit elle est comme un chien abandonné qui n'aspire qu'à se retrouver un maître, soit elle n'est pas tout à fait libre, suffisamment enchaînée à quelque chose pour la priver de ses mouvements, pas assez pour pouvoir s'en plaindre, même à elle-même. Peut-être un mélange des deux, finalement.

Du coup, on parle de Charlie et la Chocolaterie. Logique !

"Mais oui ! Pourtant, j'aime beaucoup cet acteur, mais va savoir pourquoi, Gene Wilder était un fantasme de jeunes filles devenues femmes qui m'a égayé pas mal de soirées. J'adore les fantasmes des femmes, franchement, je pense que j'aurais pu passer des soirées avec quelqu'un juste pour qu'elle m'explique en détail ses pires fantasmes et le pourquoi du comment. Les hommes aussi ont des délires, mais ils sont plus simples, moins travaillés."

Nous continuons dans un couloir dans lequel on peut voir un genre de vestiaire. C'étaient sans doute des ouvriers qui travaillaient ici.

"Quel est le trésor que tu aimerais découvrir ?"

Nous continuons de marcher en se tenant la main, pour ne pas tomber, mais aussi parce que sa main froide dans la mienne est très agréable. À sa manière, elle éteint un peu le feu qui brûle en moi. Cela me permet, en tout cas, d'être plus serein, surtout quand vient le sujet de la fraternité.

Pour quelqu'un qui ne voulait pas poser de questions, elle s'en débrouille pas mal.

"J'ai un frangin, oui." Ma voix se fait plus grave et ma main se serre un peu plus sur la sienne. "Mais je le déteste." ...en fait, il va mourir de ma main, c'est un des seuls trucs qui me fait tenir. Après ? Après... On verra bien ce que je fais de moi.

Réfléchissant à ma réponse, je dodeline de la tête.

"Alors, je ne te conseille pas le voyage, mais en gros, on peut naître cambion si le père est un démon et la mère humaine, un cambion devient démon à sa mort. Tu peux aussi renaître démon si t'as fait des grosses conneries pendant toute ta vie. Et enfin, tu peux aussi vendre ton âme à un démon pour renaître parmi eux. Mais franchement, sincèrement, encore une fois, je ne te conseille pas le voyage. Ce n'est pas simplement que c'est déplaisant, c'est... que ça te détruit, jusqu'au plus profond de ton être."

Bon, pour moi, ça a été un tout autre délire, j'ai juste suivi mon maître.

"Et toi, c'est quoi ton pire fantasme sexuel le plus inavouable ? Je t'assure que j'en ai connu d'autres !"

Le démon glisse du récit de Roal Dahl aux... fantasmes et leur différences selon les genres. Cassandra met ce dérapage de babillage sur le compte de la précédente profession de Baphomet. Elle lui manque, c'est évident. Elle est cependant bienheureuse que la conversation s'éloigne du sujet.

- Quel est le trésor que tu aimerais découvrir ?
- On est un peu loin de la mer pour un trésor pirate, mais... peut-être que pour celui d'un farfadet ? fait-elle avec un large sourire. Ou bieeen.... Une arme magique ! Une Excalibur fichée dans la pierre, ou alors, une Blanche-Neige dans son cercueil de verre ? C'est moi qui l'embrasserait pour la réveiller, si ça ne te fait rien !

Leur discussion dérive sur la famille. Sujet épineux.

- J'ai un frangin, oui. Mais je le déteste.
- Ah... C'est pas facile la famille. J'avais une soeur aussi. Une petite. Mais on avait à peine un an d'écart donc on avait l'air de jumelle. Des fausses... c'était la plus jolie et la plus intelligente. Je l'ai détestée longtemps... Mais maintenant, elle est morte et.... elle me manque horriblement. On ne se rend jamais vraiment compte de ce que l'on a avant de l'avoir perdu... dit-elle avec une certaine mélancolie.

La conversation bifurque une nouvelle fois. Ils sautent du coq à l'âne au point de replonger à pieds joints dans un domaine qui instille un profond malaise en elle. Elle retire vivement sa main de celle de Baphomet.

- Je ne te raconterais jamais ça.... Ni le pire, ni le meilleur. Je ne te connais pas, fait-elle de nouveau sur la défensive.

Je hausse une épaule, nonchalante

“Si on trouve une arme, je la garde. Si on trouve une fille, tu la gardes. Moi ça me va.”

J'ai plus de gens à tuer qu'à embrasser de toute façon, et je pense qu'avec ce qui m'arrive, une arme plongée dans un corps serait beaucoup plus efficace que quoi que ce soit d'autre venant de moi.

“...Je pourrai regarder ? J'adore les trucs entre filles !”

Si je peux en plus me rincer l'œil, je ne dis pas non. Je ne dis jamais non.

En tout cas, s'il y a bien un sujet sur lequel il ne vaut mieux pas me lancer, il vient d'arriver sur le tapis. La miss essaie de me parler de sa propre sœur, mais cela ne fait qu'exacerber mon agacement. Heureusement, j'arrive à garder tout à l'intérieur, comme un bon petit soldat, à l'exception d'une terrible nausée et de ma main qui tremble.

Allez, Baphomet, tout va bien. Pense à autre chose et parle d'autre chose…

Et nous avons tiré LE numéro !

Alors j'avoue rester perplexe un instant. Elle me voulait comme amant et elle ne veut pas me dire ce qui lui ferait plaisir ? Voilà qui m'intrigue et l'aurait transformé en centre d'intérêt privilégié si j'étais encore en activité… mais ce n'est pas mon cas. Je lève les mains en signe de reddition.

“T'as raison. On ne se connaît pas. Déformation pro, autant pour moi.”

Bordel, qu'est-ce qui peut bien l'ébouriffer à ce point ?

“Pardonne-moi. Tu veux bien continuer cette exploration avec moi ? Imagine je trouve la belle au bois dormant et je lui dis qu'elle doit attendre que je sois moins con pour avoir son baiser !”

Je serre les dents.

“Elle risque d'attendre longtemps…”

D'accord, peut-être que je ne peux rien faire pour elle, pour comprendre l'origine de cette… retenue. Mais je vais essayer, en douceur. Ça va me changer, tiens !

“Alors… euh…”

Demander ce que ça fait de devenir un vampire ? Mauvaise idée. En demander plus sur l'organisation actuelle des choses ? Non plus. Prendre la température quant à ce que l'avenir nous réserve ? Nope !

“Ok. Tu m'as eue… je suis tellement peu habitué au monde que je ne sais pas avoir de conversation normale, légère… attends… t'as vu ? Ça s'est rafraîchi !... non… je dois parler de sujet particuliers.”

Qui me donnent la sensation de la connaître.

Plus la discussion se déroule, plus un sentiment de malaise profond s'instaure en Cassandra. Cet homme, ce démon, est-il dangereux ? Ne va-t-il pas l'assassiner dans un coin sombre ? Pourquoi le sexe l'obsède autant ? Dans son propre paradoxe, la vampire est capable de s'offrir à des inconnus du moment qu'ils n'ouvrent pas la bouche ou cherchent à s'attacher mais souffre assez mal les blagues libidineuses et déplacées. Elles coulent sur elle comme de la poix collante dont elle n'arriverait pas à se débarrasser.
Chaque fois que Baphomet lui apparait sympathique, il parvient à contrebalancer cette impression avec une pirouette graveleuse et des réactions dissonantes. La méfiance naturelle de la jeune femme est désormais trop haute pour reprendre une conversation parfaitement détachée.

- T'as raison. On ne se connaît pas. Déformation pro, autant pour moi. Pardonne-moi. Tu veux bien continuer cette exploration avec moi ?
- Je ne sais pas si j'en ai très envie.
- Imagine je trouve la belle au bois dormant et je lui dis qu'elle doit attendre que je sois moins con pour avoir son baiser ! Elle risque d'attendre longtemps…

Cassandra a un sourire involontaire, de pitié peut-être. Ce démon est sans doute juste un triste-sire un peu maladroit.

"As-tu vraiment du temps à perdre avec ce genre de personnage fatiguant ?"
Oui, c'est certainement ce qu'Urdred dirait et, elle n'est pas très loin de le penser.

- Ecoute, Baphomet, je crois que je vais... rentrer.

Le voilà qu'il panique et son comportement erratique affole la paranoïa de la vampire.

- Alors… euh…Ok. Tu m'as eue… je suis tellement peu habitué au monde que je ne sais pas avoir de conversation normale, légère… attends… t'as vu ? Ça s'est rafraîchi !... non… je dois parler de sujet particuliers.
- Ok.. Bon... C'était sympa de te rencontrer, mais je ne peux pas.... Je suis désolée. Je ne peux pas assumer ton mal-être en plus du mien. Cela me demande déjà beaucoup trop d'efforts de m'occuper de moi, déjà...

"Et de mon dragon."

- Merci pour la balade. J'éspère... J'espère que tu trouveras l'épée, ou la fille, ou les deux. Et... que tu iras mieux. Ok ? dit-elle avec un regard d'excuses. Salut Baphomet...

La minute suivante, elle a pris la poudre d'escampette à vitesse vampirique décuplée. En s'éloignant, elle éprouve un brusque soulagement qui lui fait dire qu'elle a bien fait de s'écouter, pour une fois.