Elle avait sacrifiée son enfant, elle avait reçu un pouvoir innommable en plus d'avoir celui de ses ancêtres cumulés sur des siècles. Le pacte avait été scellé et Velbegurt avait disparu dans la nature. Qu'importe, pour l'heure Aleera avait bien plus important à penser. Sous les sifflements de la foule, elle reste stoïque en observant le bourreau qui ajuste le bois sous son bûcher. Oui, aujourd'hui, on allait la brûler. Ses cheveux châtains au vent, la femme reste là, dans une simple robe de lin à observer chaque visage qui constitue le petit peuple de Tir. Aucun parmi eux n'attire sa sympathie à par un peut-être... Juste là, au regard de chat. De démon. Un sourire extatique étire ses lèvres charnue, le regard fou, la sorcière observe l'inhumain caché au milieu de la plèbe. Qu'attend t-il ? Que le feu brûle ? Cela ne saurait tardé.

« Baphomet !!!! »

Hurle la femme pour couvrir les voix des paysans, des paroissiens et de tout ceux qui étaient là dans l'espoir de voir la jeune femme trépasser dans d'atroce souffrance. Mais elle ne dit rien de plus, se contentant de rire à gorge déployée, un rire qu'elle dédit à ce démon, cette crapule infernale. Plus elle rit, plus la foule s'indigne, se met en colère. Alors vient les jets de pierre, de légumes, de tout ce qui peut leur passé sous la main. Même cette humiliation est veine mais qu'importe, la torche brandit, ici au crépuscule, s'apprête à offrir un spectacle mémorable. Aleera toise le bourreau , croisant son regard à travers la cagoule qui lui couvre le visage. L'espace d'une seconde, elle perd le démon de vu et le feu est mit au bois. Bien vite une fumée âcre monte, monte monte encore, les flammes dévore le bois, le bûcher crépite et embrase sa victime sous les cris victorieux de la foule. Aleera tousse, la respiration difficile alors que les braises volent et enflamment à leur tour sa robe de lin. Bientôt, c'est un véritable feu de joie.

Elle hurle.
Mais ce n'est qu'une comédie.

Personne ne s'en serait douté, sauf si l'on avait fait attention à l'absence de chair brûlée, une odeur pourtant, bien caractéristique. Enhardit pour leur joie, les gens ne remarque même pas que les cris de la sorcière se sont arrêté. Inutile de s'arracher les cordes vocales avec ça, elle n'éprouve même pas la douleur, immuniser contre les femmes. Kali a parfaitement fait son travail. Elle patiente, peinant malgré tout à respirer sous la chaleur, le feu et la fumée et lorsque enfin les cordages qui la retiennent brûlent à leur tour et se disloque, elle s'avance, sort des flammes. Les gens se fige, un silence pèse soudainement alors que la silhouette enflammé de la sorcière saute à terre. On recule, on panique, on cri mais de peur cette fois. Le délire le plus complet. Le diable est à l’œuvre, gémit-on et ils ont tout à fait raison. Bien vite elle se détourne de la là, marche jusqu'à l'entrée de la forêt si proche du village. Elle sait qu'il doit être par ici. Une fois à l'abri du regard, le traumatisme imposé par sa sournoiserie et le surnaturel dévoilé, Aleera chasse les flammes d'un mouvement face à son corps... Nue. Elle l'est, comme au premier jour, parce que le tissus a brûlé sans doute plus vite que le reste. Elle est là, couverte de suif, souillée de la tête au pied alors qu'elle tousse encore, agitant la main devant son visage et lâche.

« Je sais que tu es là, sors donc de ta cachette... et par pitié, fais moi le plaisir de me donner de quoi me couvrir. » Rictus. « J'espère au moins que ma mise en scène te satisfait... Cela m'a donné du mal de hurler comme une truie que l'on égorge ... »

La vipère reste là, rictus accroché à ses lèvres charnues alors qu'elle observe le démon, chevelure flamboyante au vent et yeux reptilien qui trahissaient sa nature. Il aurait pu faire tout ce qu'il aurait voulu, Aleera savait qui il était, lui comme le reste de ses confrères. C'était là tout l'intérêt de pratiquer ardemment la Goetie, d'aimer les démons au delà du raisonnable (au point d'en finir sur un bûcher, que diable!) et surtout d'avoir pactiser avec Kali pour des connaissances qu'ils étaient pourtant préférable, de ne pas mettre entre de mauvaises mains. Mais c'était entre les griffes de la dernière des Belkhan de la démone avait accepté de mettre ce pouvoir. Pourquoi ? Parce que les Belkhan lui était dévouées depuis des siècles déjà et qu'Aleera avait payé le prix fort et douloureux au possible pour ce pouvoir. Un pacte est un pacte, non ?

« Je ne savais qu'une sorcière sortie fraîchement d'un bûcher... enfin fraîchement... » Elle frotte son ventre, ses bras, cherchant à se débarrasser de la sombre suie qui la recouvre. « Bref, j'ignorais que cela était dans tes goûts, Baphomet... »

Elle retrouve le silence, suivant du regard le démon qui vient poser sa cape sur ses épaules, déliant doucement ses boucles brunes aux reflets cuivrés. Aleera ne peut s'empêcher de sourire un peu plus face à la question absolument absurde et mal placée de son comparse des bas fonds.

« Définie crier et circonstance. »

Non pas qu'elle se fiche de lui ouvertement en jouant sur les mots mais pour une femme qui avait donné la vie quelques temps plus tôt avant de sacrifier son bébé l'instant d'après à une entité démoniaque, on pouvait dire que crier et dans quelles circonstances, semblait un peu flou. Mais elle savait ce que le renard voulait, attendait, ce dont il parlait et c'est bien pour cela qu'elle continuait de sourire, ajustant la cape qui cache sa nudité. Non, elle n'était pas pudique, c'était une femme et une sorcière assumée en tout point.

« Le noir me va plus que n'importe quelle autre couleur... Je crois que je suis faite pour cette teinte. »

Minaude t-elle d'un ton faussement prude tout en jouant avec les pans de la cape, dévoilant sa peau, les bides de son corps sans la moindre forte de honte. Elle ne cherchait pas pour autant à embraser le désir du démon, mais il aurait pu la prendre ici et maintenant contre qu'un arbre, que la sorcière se serait contenter de lui offrir sa vulve comme un vulgaire bout de viande. Amen.

« Là encore... redéfinie crime... ? » La jeune femme au regard d'un bleu glacé fait la moue, dardant ses yeux sur le démon et lâche, de façon plus abrupte bien que posé. « Qu'est-ce que tu crois , la nécromancie, ça ne se fait pas avec des miettes de pain. Il me faut des cadavres et il se trouve que le cimetière est juste là... » elle tend le bras vers le village. « Derrière leur stupide chapelle ! » La main retombe mollement le long de sa hanche, faciès blasé. « Les nouveaux pouvoirs que m'a conféré Kali demande... Une certaine... disons... maîtrise de soi et... des connaissances... des ingrédients... Qu'on ne trouve pas à chaque pieds d'arbre de cette forêt. Et puis bon, ces gens étaient déjà mort de toute façon.. enfer ou paradis, qu'importe où ils vont, la seule chose que je voulais c'était leur carcasse ! Ce n'est quand même pas si criminel ! » s'indigne t-elle en écartant les bras, se dévoilant complètement comme si de rien n'était. « Quand à toi... je peux savoir ce que tu faisais ici à me regarder cramer attacher à bûcher... ? Non pas que je sois méfiante, disons plutôt que... j'aime couvrir mes arrières. A défaut de mon derrière. » Et hop, la voilà qui remet la cape en place avec un nouveau sourire qui en dit long sur son humour douteux.

Baphomet semblait avoir une idée très précise de ce qu'il attendait pour le reste de sa journée et Aleera s'en amusait déjà. Mais allait-elle répondre à ses attentes, cela, c'était une toute autre histoire. Sous la cape, elle passe sa main sur son ventre lisse, effleurant sa peau de jeunette qui, il y a encore quelques semaines, portaient les marques, vestiges d'une grossesse qui n'était plus qu'un mauvais souvenir ? Kali avait fait des merveilles sur ce corps en lui offrant jeunesse et beauté tant qu'elle serait en vie. Lentement, la sorcière s'approche, ses pieds nus foulant le sol humide de la prêt avant de venir prendre ses doigts, le menton du démon.

« Comment résister à ces yeux reptiliens et cette crinières flamboyante, hm.... ? »

Oui, il était un magnifique spécimen mais ce n'était pas pour autant que la garce allait se laisser prendre au jeu aussi facilement. Elle effleure ses lèvres des siennes, osant glisser la pointe de sa langue sur sa lippe avant de reculer vivement, sourire en coin.

« Je te trouve un poil trop curieux quant à ce que m'a offert Kali. »

Affirme t-elle simplement avant de le relâcher et de contourner le démon. Oh, sa déesse lui avait donné beaucoup... beaucoup... beaucoup. Trop, sans doute. C'était un pari risqué, joué avec le feu, s'en amuserait sans doute Baphomet lui-même. Mais ses ancêtres à Aleera, tout comme elle au travers de son propre enfant, avait payé le prix le plus élevé pour ce pouvoir, quitte à se damnées ainsi que leur descendance.

« Disons que... je ne suis plus vraiment en adéquation avec... ce que j'étais avant. »

C'était vague. Plus qu'évasive, la sorcière préfère de loin les démonstrations aux mots. Elle s'approche d'un arbre, posant sa main dessus, le caressant. Avant, elle l'aurait aidé à pousser, s'épanouir, l'aurait auréolé de verdure... mais ce qui se passait là, n'avait rien à voir avec la vie, la terre. Pas dans le sens où on espérait le voir. L'arbre se flétrit, se rabougris dans un crissement sinistre, son bois se meurt, se noircit, se couvre de moisissures alors que ses feuilles tombent et meurt comme un millier d'insecte alors que la sorcière tourne autour de lui, continuant de caresser son tronc . Elle disparaît, avant de se pencher, observant le démon, ses yeux se colorant d'une lueur ambré, sournoise, le sourire malsain.

« Un arbre, un humain, un animal... » souffle t-elle alors que les feuilles mortes se changent en volutes sombres qui viennent la couvrir, camouflant dans la pénombre son petit corps gracile. « Ce n'est plus la vie qui me nourrit, c'est moi qui la dévore. »

Son rire, voix persiflant, mauvaise, échappe à sa bouche et résonne dans la clairière alors que sa silhouette se fond dans les ombres entres les arbres.

« Le dernier arrivé à la rivière finira en enfer ! »

Alors que l'ombre disparaît avec une allure vive, seule la cape du démon retombe sur le sol souillé, accompagné d'une odeur de chair putrescente.

Il y avait beaucoup de chose qu'Aleera ne supportait pas, à commencer par la cendre qui la recouvrait et à l'odeur de brûlé qui la suivait. Elle ne tarde pas à balancer la cape sur l'herbe avant de venir s'approcher de l'eau. Le démon n'allait sans doute pas tarder, emporté par sa curiosité et sans doute par le désir que la sorcière avait fait naître en lui, par plus égoïsme. Non pas que Baphomet n'était désirable, loin de là, disons juste que depuis le sacrifice de son bébé à peine l'accoucher terminé avait durement atteint Aleera dans son besoin d'écarter les cuisses. Et puis, c'était trop facile, ça ne lui plaisait pas.

« Le monde ne m'appartient pas. Pas encore, et c'est bien cela le problème, vois-tu.... »

Souffle la sorcière en s'accroupissant, nue et les pieds dans l'eau à observer son reflet dans la rivière vive qui s'écoulait à un rythme continue. Tout ce pouvoir... Mais qu'en faite, tel était la question la plus légitime.

« Que ferais-tu, si tu disposais de tant de puissance, Baphomet ? Éclaires-moi, inspires-moi... »

Son imagination était en berne et sa cruauté stagnait. Elle se relève et s'avance, s'enfonçant un peu plus dan l'eau qui la fait grelotter. Bon sang, c'était glacé ! Rien de mieux pour mettre son esprit en pause quelque instant. Aleera agite les bras, créant des remous dans l'eau de la rivière, ajoutant des bruissement aux glouglous incessant. Elle pivote son visage ovale aux traits poupins pour observer le démon qui entre dans l'eau à son tour, loin de subir le froid de la même façon que la sorcière. Elle revient vers lui lentement, nageant tout autour comme un prédateur qui cherche une faille chez sa proie, ses boucles brunes s'étirant dans l'eau comme des serpents.

« Dis, tu crois aux prophéties... ? » elle enfonce son visage dans l'eau jusqu'au nez, ses yeux bleus le fixant ardemment avant qu'elle ne le relève, ajoutant. « J'ai vu grâce à l'Haruspice, quelque chose auquel je ne m'attendait pas... mais je ne sais pas si je peux me fier à mes visions... »

La petite monstresse plaque ses cheveux son crâne, détournant le visage pour observer la forêt. Pas le moindre bruit, ni des arbres, ni du vent, encore moins des animaux. Était-ce leur présence qui créait ce malaise dans la nature ?

« Je vais vivre longtemps, bien au delà de ce qu'un humain peut espéré... des siècles, Baphomet. Je vais vivre des siècles... mais je n'ai vu ni joie, ni bonheur... Il faisait noir et froid... mais j'ai vu une once de lumière, quelqu'un... impossible de voir son visage, mais je sais qu'il sera là avec moi, pour moi. Tu crois qu'un fou, quelque part dans ce monde, pourrait vouloir d'une Belkhan ? Mes ancêtres vont se retourner dans la fosse et Kali m'arracher la tête, ça c'est une certitude... L'amour c'est contre nos lois. Nous ne vivons pas pour le bonheur, juste pour le pouvoir, pour faire perdurer notre lignée, quoi qu'il nous en coûte. »