- Bonjour pour le moment…plus pour très longtemps je crois…
- J'ai beaucoup dormi, semble-t-il.

Elle s'approche et lui fait couler un café. Il est désormais difficile de nier sa présence concrète dans son appartement. Theodora est aussi réelle que les événements de la veille.

- Tu sembles reposé.
- Les bienfaits d'un bon repas et d'une copieuse activité physique.

Silence. Il percoit sa gêne mais ne sait pas comment l'interpréter. Regrette-t-elle son activité coïtal avec lui ? Cela expliquerait son malaise. Elle lui tend une tasse de café et il bredouille un merci.

- Si tu veux…tu peux prendre une douche…Pendant ce temps si tu as faim...
- J'ai faim... confirme-t-il.
- Je peux te faire quelque chose à manger ?
- Oui. Entendu.
- Ne t’en fais pas, je ne compte pas m’incruster chez toi.

Ébène à un froncement de sourcil d'incompréhension. Il ne voit pas le lien de cause à effet.

- Je… J'ai juste besoin de l’halopéridol et je te laisserais tranquille.

Quelque chose de pointu se coince dans sa poitrine. Une forme de picotements désagréables. Son froncement de sourcil s'accentue.

- Ebène ?
- Hum ?
- Tu...tu sais que tu es nu, n'est-ce pas ?

Il baisse le regard sur l'ensemble de sa robinetterie qui prend l'air. Il lève son tarin aquilin vers elle.

- Oui. Certes. Cependant, mon anatomie n'a plus de secrets pour toi, non ? Son ton laconique s'est paré d'une nuance d'irritation. Est-ce que tu as couché avec moi pour l'haloperidol ? Puisque, tu n'es là que pour ça.

Il boit son café d'une traite et sans respirer. Il claque le mug sur le plan de travail.

- Je vais m'habiller.

Pourquoi faut-il que la situation soit si gênante ? Est-ce elle qui la rend ainsi ?
- Oui. Certes. Cependant, mon anatomie n'a plus de secrets pour toi, non ?
- Eh bien…techniquement…il faisait noir…
- Est-ce que tu as couché avec moi pour l'haloperidol ?

Theodora est tellement soufflée par sa question qu’elle en reste coite pendant de longue seconde à le regarder stupidement. Une épine acérée vient se ficher dans son cœur et la souffrance qu’elle engendre remonte jusque dans ses yeux qui expriment à quel point elle est blessée par sa suggestion.

- Mais non !....enfin comment…j’ai…les courses…
Elle tente de se justifier, de lui démontrer que rien n’est plus faux mais tout sort de façon décousue.

Tu n’as à te justifier devant rien ni personne !

- Puisque, tu n'es là que pour ça.

Comment un ton aussi neutre peut sonner aussi durement et froidement à ses oreilles ? Elle en perd littéralement la parole et ne peut que l’observer boire son café en une seule gorgée.

- Je vais m'habiller.

Il fait mine de se détourner et Theodora serre les poings alors qu’une brusque et incontrôlable bouffée de rage la submerge, remplaçant la douleur. La colère de Theo nourrit celle de la déesse toujours latente. Son aura se déploie et n’a plus rien de doux. Ses yeux expriment l’animalité de Sekhmet, pleine d’une ire ancestrale.
Elle s’avance vers Ebène, féline, le menton fièrement dressé, le regard flamboyant d’une fureur divine.

- Comment oses-tu ?! Comment oses-tu nous traiter de vulgaire prostituée, misérable esclave ! Nous nous sommes données à toi car tel était notre plaisir, sans aucune arrière-pensée. Et tu nous insultes en retour ?  

Sa voix a pris des accents grondants et autoritaires, celle de Sekhmet se superposant à nouveau à celle de Theodora. Sauf que cette fois, elles expriment un sentiment et une pensée partagée.
L’air ambiant se fait presque étouffant de chaleur, comme si des vents brûlants venus du désert balayaient l’appartement. Elle repousse soudain le corps d’Ebène avec force, si bien qu’il atterri les fesses sur le canapé, démontrant la puissance de la guerrière.  

- Garde donc ta médecine et tes paroles acérées mort-vivant ! Tu es bien comme tous les autres ! Nous voulions t’aider mais tu ne mérites rien, toi qui ne nous respecte pas !

Elle lève brusquement la main et dans son creux apparait une boule de feu qui bouge et s’étire jusqu’à former une sorte de flèche.

- Nous voulions lutter mais à quoi bon. La colère est bien plus facile ! Adieu protégé d’Erz…Non !!

Si Sekhmet se laisse consumer par la rage par habitude, Theo se bat toujours contre elle et finit par la repousser temporairement.
Elle referme brusquement la main et fait disparaitre la flèche. La main en appui sur le mobilier, elle mène une bataille interne contre cette rage qui l’étouffe. Sa respiration est courte et forte.  

- Ebène…aide-moi…, supplie-t-elle.

La voix de Théodora se gonfle d'une colère divine qui explose dans l'appartement avec la force de trompettes gutturales. Ébène pivote lentement sur lui même. Il fixe la lionne qui hurle sa rage et son sentiment d'être bafouée. Ce qu'il retient n'est ni la démonstration de fureur, ni les pupilles fendues de l'entité féline, mais les mots suivants : "Nous nous sommes données à toi car tel était notre plaisir, sans aucune arrière-pensée."

Alors que sa cervelle bloque sur cette donnée et l'analyse, il est propulsé sur le canapé, cul-nu et menacé sans autre forme de procès d'être empalé par une flèche enflammée. Sa peau grésille et cloque sous la pression de la pointe brulante. Imperméable à la peur, ses prunelles noires fixées sur elle, il lui dit simplement.

- Tu sais que je vais ressusciter ?
- Adieu protégé d’Erz…Non!!

Théodora  repousse Sekhmet avec toute la force de sa volonté. Fasciné, le Zombie observe la femme, l'humaine, et sa pugnacité terrible à l'oeuvre. Quand bien même l'attaque n'est vouée qu'à le faire momentanément disparaitre, il admire la détermination de Theo à le protéger.

- Ebène…aide-moi…

Maintenon tend les mains vers le visage en sueur et contracté par la souffrance de la jeune femme. Il l'attrape par la nuque, la fait chuter vers ses lèvres et échange avec elle un long et puissant baiser que d'aucun qualifierait "de cinéma".

- Tel était mon bon plaisir, aussi, lui répond-il avec une sincérité qui peine à franchir l'austérité  expressive de son faciès. Je t'ai mal comprise quand tu as dit que tu n'avais besoin que de l'halopéridol et que tu partirais. Je crois.... je crois pouvoir dire que ça m'a peiné. J'ai réagi avec le manque de discernement d'un homme blessé. J'en suis navré.

Il faudra avoir foi en sa parole car encore une fois, ni son timbre atone, ni son expression figée ne l'aideront à statuer sur la véracité de ses émotions.

- Tu es la première femme que je touche en plus de trente ans et la seconde de toute ma vie. A ce stade "être rouillé" est un euphémisme.

Trop surprise pour reculer, Theo se laisse embrasser et finit par lui rendre son baiser. Celui-ci l’ancre à nouveau à son corps et s’il fait fondre une partie de sa colère, ça n’est pas le cas de celle de Sekhmet, qui n’y voit là qu’une manipulation masculine supplémentaire pour la brider.

- Tel était mon bon plaisir aussi.
Theodora a un faible sourire, les poings refermés sur le moelleux du canapé.
- Je t'ai mal comprise quand tu as dit que tu n'avais besoin que de l'halopéridol et que tu partirais. Je crois.... je crois pouvoir dire que ça m'a peiné. J'ai réagi avec le manque de discernement d'un homme blessé. J'en suis navré.
- Je n’ai pas couché avec toi pour ça ! lâche-t-elle presque désespérément ce qui ne fait que renforcer la détermination de la lionne à devenir la Déesse du carnage qu’elle incarne aussi.

Sekhmet je t’en prie… calme toi…
Cet homme s’est servi de nous uniquement pour nous insulter par la suite ! Il ne mérite pas notre clémence !
C’est faux…ne te laisse pas aveugler. Aie confiance en moi…tout ira bien.
Tu le laisses te retourner la tête comme je me suis laissée endormir par les douces paroles des hommes de ma famille… regarde où tout cela m’a menée !
Je sais ce que tu as vécu, je ne laisserai pas la même chose nous arriver à nouveau. Tu n’es pas seule…à deux nous serons plus forte. Lutte avec moi. S’il te plait…je ne veux pas lui faire du mal…

La déesse se tait.
Theo lève son regard vers Ebène et puise la force de faire face à une nouvelle vague. Cette fois elle sent Sekhmet joindre ses efforts au siens et au prix d’un dernier effort, elles repoussent ensemble cette flambée destructrice qui la parcourt sans répit sans avoir recours au calmant.
L’air devient à nouveau respirable et sa peau ne luit plus comme un petit soleil. Tous ses muscles se relâchent et elle s’écroule, le corps en proie à de violents tremblements, sa température corporelle anormalement basse.

- Je…je ne savais pas si…si tu voulais encore…de moi…ici… je… Elle prend une douloureuse inspiration, claque misérablement des dents. Je ne…sais pas…ce que tu attends de moi… après…après hier soir… Je… suis plus douée…pour décrypter…des momies…que…que pour déchiffrer mes…contemporains…
- Tu es la première femme que je touche en plus de trente ans et la seconde de toute ma vie. A ce stade "être rouillé" est un euphémisme.

Theo vrille ses yeux bleu-gris dans les profondeurs des siens, consciente d’avoir imaginé des choses sans aucun fondement. Il n’y avait donc pas d’erreur hier soir… c’est elle qu’il voulait. Cela change-t-il quelque chose au fait qu’elle risque de souffrir horriblement si elle persiste dans cette voie ?

Tout.
Rien.

Elle ne sait plus vraiment. Sa main gantée se pose non loin de la brûlure qu’elle lui a infligé, ironiquement tout près du cœur. Elle a une expression profondément affligée.

- Je…suis désolée…je ne voulais pas …te blesser…de quelque manière que …ce soit ! Mon dieu ! J’ai…failli te tuer… Je sais… que tu serais revenu mais… ça n’aurait rien changé…au fait que j’aurais eu…ton sang sur mes mains…

- Je…je ne savais pas si…si tu voulais encore…de moi…ici… je…
- Pourquoi donc ? demande Ebène en pleine et complète incompréhension. Je t'ai réclamé de rester à maintes reprises. Penses-tu que je sois le genre d'homme qui une fois la copulation consommée, jette sa partenaire dehors ?
- Je ne…sais pas…ce que tu attends de moi… après…après hier soir… Je… suis plus douée…pour décrypter…des momies…que…que pour déchiffrer mes…contemporains…
- Je suis plus proche de la momie que des sus-nommé contemporain. Tu es la première femme que je touche en plus de trente ans et la seconde de toute ma vie. A ce stade "être rouillé" est un euphémisme.

Le docteur constate qu'elle est de nouveau en hypothermie. Il la déshabille alors qu'elle claque des dents et la soulève sans grand effort pour la ramener dans sa chambre. Il la pose sur le lit.

- Je…suis désolée…je ne voulais pas …te blesser…de quelque manière que …ce soit ! Mon dieu ! J’ai…failli te tuer…
- Je ne peux pas mourir.
- Je sais… que tu serais revenu mais… ça n’aurait rien changé…au fait que j’aurais eu…ton sang sur mes mains…
- Cesse de parler, tu vas finir par te mordre la langue.

Il se glisse auprès d'elle et rabat la couverture sur eux.

- Colle-toi à moi. Le peau à peau est plus efficace pour te réchauffer.

Il l'enrobe de ses bras et force Theodora à se blottir contre son torse. Maladroitement, il lui caresse les cheveux.

- ... Tu choisis toujours le scénario le plus catastrophique, celui qui te dessert. Je ne comprends pas pourquoi, ça me laisse profondément perplexe.

Incapable de l’arrêter ou de coordonner ses mouvements, Theo se laisse déshabiller entièrement et porter vers la chambre alors même qu’elle s’était promis de ne plus y mettre les pieds. Une fois sur le lit, elle se recroqueville en position fœtale et tente de contrôler ses claquements de dents.

- Je…suis désolée…je ne voulais pas …te blesser…de quelque manière que …ce soit ! Mon dieu ! J’ai…failli te tuer…
- Je ne peux pas mourir.
- Je sais… que tu serais revenu mais… ça n’aurait rien changé…au fait que j’aurais eu…ton sang sur mes mains…
- Cesse de parler, tu vas finir par te mordre la langue.

Elle pousse un bref soupire lorsque la couverture la recouvre et s’y enroule sans se faire prier, son nez dépassant à peine.

- Colle-toi à moi. Le peau à peau est plus efficace pour te réchauffer.
- Ca…ça va all…

Mais il l’entraine sans cérémonie contre lui et sa chaleur est si attirante qu’elle finit par lui grimper dessus à moitié, la tête calée contre son menton. Lovée étroitement contre lui, les bienfaits sont si immédiats qu’elle laisse échapper un faible gémissement de contentement. Elle est surprise de sentir sa main dans ses cheveux et cesse de bouger, si on omet les tremblements incontrôlables de son corps. En fermant les yeux, elle pourrait presque imaginer qu’il s’agit d’une véritable et tendre étreinte.
Sauf que ça n’en est pas une. L’oublier est dangereux. En quelques minutes ses dents finissent par arrêter de jouer des castagnettes.

- ... Tu choisis toujours le scénario le plus catastrophique, celui qui te dessert. Je ne comprends pas pourquoi, ça me laisse profondément perplexe.
Elle relève la tête pour pouvoir l’observer.
- Parce que je n’ai aucune idée…de ce à quoi tu penses…je ne sais pas…Elle s’arrête pour se redresser un peu plus. Les mœurs ont beaucoup changé dans les relations entre les hommes et les femmes, tente-t-elle d’expliquer avec un petit sourire. Il n’est pas rare du tout qu’on couche…simplement par pulsions physiques et le lendemain chacun reprend sa vie comme avant, sans plus se voir. Ça m’est déjà arrivé alors je préfère prendre les devants…plutôt que d’être jetée dehors. Il est plus facile de gérer les bonnes surprises que les déceptions. C’est juste…de la préservation de sentiments ?

Accoudée au matelas, la tête légèrement penchée, sa main encore prise de légers soubresauts vient frôler sa joue.

- Essayons d’être honnête alors, ça sera sans doute plus facile pour tous les deux. Qu’est-ce que tu attends de moi, Ebène ? On oublie hier soir ? On reste sur un terrain plus...professionnel ? Quand on sera habillé tous les deux je veux dire, précise-t-elle avec un petit rire, ou... tu envisages ...autre chose...de recommencer ? Embrassée elle se trémousse un peu pour moins coller son corps au sien. Dis-moi... Ça m’évitera d’échafauder des théories erronées toutes seules.

Nus l'un contre l'autre, Theo cesse enfin de se débattre et accepte la chaleur consenti par Ebène. D'un bras ferme, il la maintient sur lui et la frictionne un peu, de l'autre, il lui caresse les cheveux.

- Parce que je n’ai aucune idée…de ce à quoi tu penses…je ne sais pas…
- Ah.

Il est vrai que c'est un problème récurrent. Les gens ne savent jamais sur quel pied danser avec lui et, dans la mesure où il ne comprends pas toujours (c'est à dire très souvent) ce qu'il éprouve, il peine à verbaliser le peu d'émotion qu'il repère.

-Les mœurs ont beaucoup changé dans les relations entre les hommes et les femmes. Il n’est pas rare du tout qu’on couche…simplement par pulsions physiques et le lendemain chacun reprend sa vie comme avant, sans plus se voir.
- Je suis vieux jeu, Théodora. Il y a des professionnelle tarifées pour ce genre de "pulsions" qui, à mon sens sont tout de même une belle excuse pour ne jamais s'engager. Je ne m'engage jamais à la légère. Du reste, j'ai relativement peu de manifestation de désir.
- Ça m’est déjà arrivé alors je préfère prendre les devants…plutôt que d’être jetée dehors.
- Vraiment ? Ce siècle me désespère. N'y a-t-il plus rien de sacré en ce monde ?
- Il est plus facile de gérer les bonnes surprises que les déceptions. C’est juste…de la préservation de sentiments ?

Il prend un air songeur, réfléchissant sérieusement à ses arguments. Après un moment, il décide de statuer.

- J'entends ce que tu me dis. A la lumière de ton passif avec tes précédents partenaire masculin, je conçois le traumatisme des abandons respectifs perpétré et les mesure prise pour y palier.
- Essayons d’être honnête alors, ça sera sans doute plus facile pour tous les deux.
-... Bien.
- Qu’est-ce que tu attends de moi, Ebène ?
- Je ne sais pas.
- On oublie hier soir ?
- .... Non. Je ne vais pas pouvoir.
- On reste sur un terrain plus...professionnel ? Quand on sera habillé tous les deux je veux dire...ou... tu envisages ...autre chose...de recommencer ?
- Recommencer.... Comme hier soir ?
- Dis-moi... Ça m’évitera d’échafauder des théories erronées toutes seules.

Il plisse les yeux et prend le temps de peser chacune des questions qu'elle lui a posées. Il expire longuement après un silence presque aussi long.

- Je ne comprend pas vraiment, ce que j'éprouve. Cette fonction est comme désactivée chez moi. Ce dont je suis certain et que je peux affirmer sans détour c'est que j'apprécie ta présence. La plupart des gens me fatiguent ou m'indiffèrent. Toi, c’est différent. J'apprécie t'écouter, te voir bouger, même quand j'estime que tu t'agites inutilement, je trouve ça plutôt... charmant. Je crois. Tu est intéressante, curieuse, la conversation est plus facile. Il est indéniable que tu me plais. Physiquement, j'entends. Je ne peux pas nier ce que mon corps exprime mieux que moi. Nos corps sont alchimiquement compatibles. Je fantasme à ton propos, ce qui est aussi rare que mes brusque montée de libido. Et pour conclure, j'aimerais te voir plus souvent. Je trouve ça toujours trop court, presque frustrant.... Copuler avec toi était satisfaisant.

Un silence méditatif.

- C’est tout ce que je peux dire pour le moment. Je ne pense ni plus ni moins. Je ne saurais dire si cela te rassure ou si tu préfère te préserver.

Theo le laisse réfléchir. Il semble prendre ses questions avec beaucoup de sérieux.
Puis il se lance sur un ton neutre et clinique dont elle essaie de faire abstraction pour se concentrer sur ce qu’il dit.
Elle traduit tout cela par le fait qu’elle le met à l’aise et qu’il la désire. Ce qui est mieux que rien. La question est : peut-elle seulement se contenter de « mieux que rien » ?

- Et pour conclure, j'aimerais te voir plus souvent. Je trouve ça toujours trop court, presque frustrant.... Copuler avec toi était satisfaisant.

Si le début de sa phrase la fait sourire, la fin lui fait froncer les sourcils.
« Satisfaisant ».
Est-ce là tout ce qu’elle obtiendra de mieux de sa part si elle décide de mener une relation avec lui ? Sans doute. Et le pire c’est qu’elle ne peut certainement pas le blâmer pour ça. Une nouvelle bouffée de colère l’étreint contre Erzulie Dantor. Et quand bien même Sekhmet semble émettre beaucoup de réserve sur Ebène, elle trouve elle aussi son « état » abominable et contre-nature. Elle est peut-être la Déesse du carnage, mais elle n’a jamais joué ainsi avec les âmes des mortels. Theo hait cette loa et ce qu’elle a fait à Ebène.
Ne pas se laisser entrainer à nouveau…la colère ne résoudra rien.
Elle bascule doucement sur le côté et observe le plafond pour se calmer.

- C’est tout ce que je peux dire pour le moment. Je ne pense ni plus ni moins. Je ne saurais dire si cela te rassure ou si tu préfères te préserver.

Elle se dresse finalement en position assise, lui offrant le spectacle de son dos nu et passe une main dans ses cheveux pour les tirer vers l’arrière. Un petit rire un peu perdu s’échappe de ses lèvres.

- Je ne sais pas Ebène…je n’en sais rien du tout.
Un bras maintenant la couverture sur sa poitrine, elle se tourne à moitié vers lui.
- Quand il a fallu choisir ce que j’allais exercer comme métier, j’ai eu la chance d’avoir de nombreuses portes ouvertes devant moi. J’aurais pu choisir n’importe quoi, quelque chose de plus lucratif, de moins exigeant et qui ne ruinerait pas mes relations sociales… mais non j’ai choisi de suivre ma passion. Parce que je ne conçois pas de vivre une existence sans cela. Pire…j’en ai besoin…un besoin viscéral. Elle me rappelle que j’ai survécu… que je suis en vie. Elle jette un bref regard vers ses mains puis vint lentement caresser la joue légèrement barbue du docteur avec le dos de ses phalanges. Si ton échelle s’arrête à « Satisfaisant », la mienne continue avec des « Exaltant », « Merveilleux », « Grisant », « Etourdissant » et je pourrais continuer comme ça un moment. C’est ce que j’ai ressenti avec toi. Je ne sais pas faire dans la demi-mesure alors je ne m’engage jamais non plus à la légère mais…égoïstement j’aspire à être plus que…satisfaisante. Tu comprends ? Et c’est d’autant plus dur parce que…sa voix se fêle un peu… parce que je sais que rien de tout ça n’est de ta faute… et que tu me plais aussi. Beaucoup… Voilà… voilà ce que moi je pense.
Elle se rend alors compte que quelques larmes se sont frayées un chemin sur ses joues alors elle les essuie avec un rire sans joie.
- Oui, j’ai peur de souffrir et de m’impliquer dans une relation où je ne recevrai jamais autant que je donne mais je sais aussi que si j’arrête tout…je risque de le regretter…parce que je suis bien avec toi et que ça n’arrive pas si souvent dans une vie… En un mot… je suis…complètement perdue…

Ébène est conscient que sa réponse n'a rien de romantique, plaisante ou rassurante. Il a fait du mieux qu'il pu. Erzulie Dantor l'avait prévenu avant qu'il ne fasse son choix. À l'époque, la douleur du deuil, la colère le consummant, l'infinie tristesse de l'absence avait décidé de son choix. Ne plus rien éprouver, appuyer sur le bouton arrêt.
Le silence.
Il n'avait pas regretté.
Pas sur l'instant.
Pas les décennies qui suivirent.

Puis vint Rena.
Sa Lucinda.
Un premier regret, celui de ne pas avoir su lui rendre pleinement son amour. Celui d'être limité par son propre cœur mort.
Marisol suscita un battement. Un affolement tachycarde. Rena le lui avait caché, le jugeant inapte à être père. Son regret le plus cinglant. Il ne pouvait lui donner tord.

À présent, il allait devoir renoncer à Théodora.

Il se redresse lentement et frotte son dos avec douceur. Il vient essuyer ses larmes d'un mouvement de pouce lui balayant les joues.

- Je suis sincèrement désolé, Théodora. Je ne suis pas destiné à être aimé. Si c'est à cause de moi que tu pleures, il vaut mieux que tu me fuis avant d'être trop attachée à un homme incapable de te considérer comme il se doit. Tu mérites mieux qu'un cadavre ambulant.

Fantôme de sourire infiniment mélancolique.

- La mère de ma fille m'a quitté en apprenant qu'elle était enceinte. Elle avait traversé un océan par amour pour moi, mais dès lors qu'elle a su qu'elle portait une petite vie en elle, elle m'a jugé incapable d'être un bon père. Elle pouvait endurer le manque d'amour et vivre avec, mais elle ne supportait pas l'idée que son enfant subisse la même chose. Elle a préféré lui dire que je l'avais abandonnée.

Un silence file.

- Hier, quand nous avons fait l'amour, j'ai senti mon cœur battre comme s'il était encore vivant. C'est maigre, j'en conviens, mais c'est le seul argument que j'ai en ma faveur. Tu mérites des affirmations plus solides. Un homme meilleur. Une vie heureuse. Il faut que nous tuions cet embryon de relation dans l'œuf.

Il sait cette résolution la plus raisonnable, la plus sécurisante pour l'avenir de la  jeune femme. Il a un froncement de sourcils, comme si finalement tout cela le contrariait. Il lui sert la main, ses prunelles sombres fixées sur la peau brûlée.

-... Pourtant, je n'ai pas envie que tu t'en ailles.

- Je suis sincèrement désolé, Théodora. Je ne suis pas destiné à être aimé.
Une expression de désarroi traverse le visage de la jeune femme.  
- Ne dit pas ça…
- Si c'est à cause de moi que tu pleures, il vaut mieux que tu me fuis avant d'être trop attachée à un homme incapable de te considérer comme il se doit. Tu mérites mieux qu'un cadavre ambulant.
- Tu t’es résigné à poursuivre cette existence comme ça alors ?

Il lui explique ensuite brièvement ce qu’il s’est passé avec la mère de sa fille et Theo se sent bien minable face à l’amour de cette femme qui a tout quitté pour le suivre et qui était prête à tout endurer et accepter à condition d’être avec lui. Elle ne devrait pas comparer l’incomparable, mais elle se sent bien lâche soudain.

- Hier, quand nous avons fait l'amour, j'ai senti mon cœur battre comme s'il était encore vivant. Elle lève subitement les yeux vers les siens, un faible espoir fait briller ses yeux bleus. C'est maigre, j'en conviens, mais c'est le seul argument que j'ai en ma faveur. Tu mérites des affirmations plus solides. Un homme meilleur. Une vie heureuse. Il faut que nous tuions cet embryon de relation dans l'œuf.

Un espoir qui s’éteint aussi vite qu’il s’est allumé. Elle lui sourit pourtant vaillamment, des larmes plein les yeux à nouveau puis hoche la tête.
- Tu as sans doute raison. Après tout, c’est sûrement toi le plus sensé et le plus raisonnable de nous deux, non ?  
Elle pose ses doigts sur ses lèvres pour s’empêcher d’en dire plus ou de laisser filtrer n’importe quel son comme les sanglots qui restent bloquer dans sa gorge. Son regard se détourne de lui tandis qu’elle cherche la force de quitter définitivement ce lit. Mais il lui attrape soudain la main et la serre dans la sienne.

-... Pourtant, je n'ai pas envie que tu t'en ailles.
- Moi non plus… chuchote-t-elle d’une petite voix désespérée.

Mais enfin Humaine, reprends-toi ! Ce que tu veux, tu te bats pour l’obtenir ! Cesse de geindre comme une enfant !

Theo fronce soudain les sourcils et se tourne complètement vers lui, se redresse à genoux en se moquant de se montrer quasi nue devant lui. Un espoir farouche fait à nouveau pétiller ses yeux humides. Elle encercle son visage de ses mains.

- On pourrait aussi trouver le moyen de briser le pacte que tu as contracté auprès de ta loa ! Je refuse de croire qu’il n’y a aucune échappatoire ! Il doit y avoir…un moyen ! On pourrait chercher ensemble ! On pourrait…on pourrait essayer… ? Est-ce que tu serais prêt à te battre pour retrouver celui que tu étais ?

Y croire...même un tout petit peu... ça lui suffirait.

- Moi non plus…

Ébène se résigne. Theodora doit vivre sa vie, lui est à demi-mort. Égoïstement, il n'arrive pas à la laisser aller. Soudain, Elle se lève, le surplombant de toute sa superbe. Magnifique, déterminée et vindicative. Un frisson incompréhensible qui lui secoue l'échine.

- On pourrait aussi trouver le moyen de briser le pacte que tu as contracté auprès de ta loa ! Je refuse de croire qu’il n’y a aucune échappatoire ! Il doit y avoir…un moyen ! On pourrait chercher ensemble ! On pourrait…on pourrait essayer… ? Est-ce que tu serais prêt à te battre pour retrouver celui que tu étais ?
- Je n'ai jamais osé la défier.

Enfant, il a été bercé par les récits de ces déités, par leur grandiloquence, leur ambivalence, leur espièglerie, tantôt figures de sagesse, tantôt de violence et de furie. Erzulie Dantor, la forme Petro d'Erzulie est la plus vindicative et la plus brutale de ses facettes. La plus maternelle et protectrice, aussi.

- Son courroux sera terrible. Elle risque de vouloir se venger et de te faire du mal.

Il secoue la tête en lui prenant les mains.

- Je ne veux pas redevenir l'homme que j'étais... amorce-t-il en la couvant de ses prunelles de goudron. J'étais un homme brisé, émotif et violent capable de colères abominables et de mélancolie suicidaires...

Il poursuit, pourtant, avec une vaillance qu'il puise dans cette maigre illusion de cœur battant par sa seule présence.

- Je veux pouvoir être le père de ma fille et l'homme qui pourra te faire croire aux plus belles options de scénario.... Je... Je veux bien essayer.

Malgré son timbre blanc, sa voix monotone, son expression égale, il est sincère. Terrifié mais sincère.

- J'ignore s'il existe un moyen et en quoi il consiste. Une déité à la fois cependant.... La tienne en premier.

- Je n'ai jamais osé la défier.
- Il y a un début à tout !
Qu’il ne refuse pas tout net donne un second souffle à son espérance et sa bouche esquisse à nouveau un sourire.  
- Son courroux sera terrible. Elle risque de vouloir se venger et de te faire du mal.
- Eh bien c’est une chance que je ne sois pas seule dans ce cas…ses yeux reflètent un instant ceux de la lionne. Nous n’avons pas peur.

Si pour Sekhmet c’est une évidence – la déesse ne craint effectivement rien – c’est aussi vrai pour Theo. La possibilité qu’elle puisse rencontrer un jour le « vrai » Ebène Maintenon, qu’elle puisse entendre son rire pour la première fois et contempler son sourire à nouveau l’emplit d’un courage sans doute un peu stupide qui la ceint d’une confiance inébranlable.

- Je ne veux pas redevenir l'homme que j'étais... J'étais un homme brisé, émotif et violent capable de colères abominables et de mélancolie suicidaires.
- Oh…je vois…elle ne sait que faire de cette information. Rejette-t-il finalement sa proposition ?
- Je veux pouvoir être le père de ma fille et l'homme qui pourra te faire croire aux plus belles options de scénario.... Je... Je veux bien essayer.

Si avec n’importe qui d’autre Theo aurait cherché à décrypter le langage corporel de son interlocuteur, elle sait à quel point elle ne peut pas s’y fier avec lui. Seules ses paroles, bien que parfois maladroites, comptent. Ainsi elle le croit sur parole et un sourire rayonnant éclaire soudain son visage, reflétant une joie sauvage et l’excitation de l’affrontement de Sekhmet, prête à en découdre.
Elle se penche soudain et lui vole un baiser farouche scellant une sorte d’accord d’alliance.
- C’est tout ce que j’avais besoin de savoir… On réussira, tu verras !

Et dans le cas contraire ? Theo refuse de l’envisager. Pas encore. Peut-être que le jour où elle le devra, elle aussi pourra se dire que mieux vaut une vie sans amour qu’une vie sans lui…

- J'ignore s'il existe un moyen et en quoi il consiste.
- Les choses les plus précieuses sont souvent les mieux dissimulées. J’ai quasiment passé ma vie à chercher…les défis ne me font pas peur.
- Une déité à la fois cependant.... La tienne en premier.
- Tu rêves ! s’exclame-t-elle avec une bonne humeur retrouvée en haussant un sourcil. Comme si j’allais pouvoir laisser ça de côté maintenant. Franchement qu’est-ce que quelques crises de colère contre le vol d’une âme ? Et puis…tu m’as aidée à la repousser…tout à l’heure et j’ai le calmant en cas de problème… Ma situation pourrait être bien pire.

Elle met volontairement de côté cette histoire de fusion d’esprit ou le fait que Sekhmet pourrait supplanter le sien à un moment. Sa main trouve involontairement son pendentif qu’elle garde précieusement autour du cou.
Son regard tombe sur la brûlure qu’arbore toujours le torse d’Ebène et elle grimace en frôlant la peau meurtrie.

- Je suis tellement désolée… je crois que j’y suis allée un peu fort…tu risques d’en garder une cicatrice…une de plus… Je ne savais même pas…que j’étais capable de ça ! Tu as de la crème contre les brûlures ?

- Tu rêves !

Son exclamation est si vive, qu'elle fait basculer Ébène sur le dos qui l'emporte avec lui. Par réflexe, il ramène la couverture sur eux. Theo passe du chagrin à la joie avec une élasticité qu'il est incapable de suivre.

- Comme si j’allais pouvoir laisser ça de côté maintenant.
- Tu sembles réjouie, mais ce sera loin d'être simple. Il vaut mieux trouver la recette de ton breuvage au préalable.
- Franchement qu’est-ce que quelques crises de colère contre le vol d’une âme ? Et puis…tu m’as aidée à la repousser…tout à l’heure et j’ai le calmant en cas de problème… Ma situation pourrait être bien pire.
- Ce pacte, je l'ai accepté de mon plein gré. Elle ne m'a rien volé.

Elle tripote sa peau boursouflée avec une expression navrée. Elle est aussi changeante que la flamme d'une bougie.
- Je suis tellement désolée… je crois que j’y suis allée un peu fort…
- Je ne sens rien.
- Tu risques d’en garder une cicatrice…une de plus…
- Celle-ci sera particulière.
- Je ne savais même pas…que j’étais capable de ça !
- En tant qu'avatar de Sekhmet, tu possède certains de ses pouvoirs. Avec un peu d'entraînement tu sauras bientôt les discerner et les mettre en pratique.
- Tu as de la crème contre les brûlures ?
- Sans doute.

Quelque part loin de ses courbes et de cet agréable position. Il lui écarte une mèche de cheveux du visage, délicatement.

- Tu es vraiment très belle...

Son corps bien plus honnête que lui, se montre très démonstratif. Il a un  foncement de sourcil et lorgne vers un point loin sous la couverture.

- Toutes mes excuses, dit-il en la regardant de nouveau.

- En tant qu'avatar de Sekhmet, tu possèdes certains de ses pouvoirs. Avec un peu d'entraînement tu sauras bientôt les discerner et les mettre en pratique.
Theodora réfléchit un instant, calée à nouveau contre le grand corps d’Ebène.
- Sekhmet la puissante … L’œil de Rê…Son souffle exhale la chaleur du désert…elle transperce ses ennemis de flèches enflammées. De l’entrainement tu crois ? … je ne suis pas certaine de pouvoir le faire à volonté…J’ai…une peur bleue du feu. Son visage se plisse dans une grimace. Je ne suis pas le choix d’avatar idéal pour cette déesse solaire. La jeune femme semble perdue dans ses pensées. Protectrices des médecins et des vétérinaires… on la priait pour retrouver la santé… Tu penses… tu penses que je pourrais guérir des malades ? Je devrais peut-être essayer ?... Faire quelque chose de bien pour contrebalancer les morts que j’ai provoqué. Theo revoit les photos des cadavres de ses collègues qu’on lui a exposé sous les yeux en la sommant de s’expliquer. Une mort atroce… Elle tressaille mais revient soudain à lui. On va commencer par toi ! Tu as de la crème contre les brûlures ?
- Sans doute.
Comme il ne fait pas mine d’en dire plus, elle lui glisse un petit sourire.
- Je suppose qu’elle se trouve dans ta pharmacie dans la salle de bain… Je vais la chercher…

Alors qu’elle va pour se glisser hors du lit, le geste d’Ebène la surprend assez pour lui faire cesser tout mouvement et ses yeux se vrillent aux siens.

- Tu es vraiment très belle...
Elle émet un petit rire, gênée et ravie à la fois, les joues adorablement rougissantes.
- Merci. Puisqu’on a décidé d’être honnête l’un envers l’autre…elle se penche pour venir donner un petit coup de nez sur le sien… je vous trouve également fort séduisant, très cher docteur.
Il fronce soudain les sourcils et regarde vers le bas.
- Toutes mes excuses.
- De quoi tu parles ?
Theo baisse mécaniquement les yeux et bouge suffisamment pour comprendre ce qui perturbe tant Ebène.

- Oh !
Elle mordille sa lèvre charnue pour contrôler son envie de rire, tout en se plaquant contre son corps pour sentir pleinement l’effet qu’elle semble lui faire.

- Pourquoi tu t’excuses ? demande-t-elle une lueur taquine dans les yeux et la tête légèrement penchée sur le côté. Je trouve ça plutôt…flatteur.

Elle amorce de très légères ondulations du bassin et vient déposer quelques baisers au coin de sa mâchoire, attrapant l’une de ses grandes mains pour la caler contre sa hanche.

- Quand tu me touches, Sekhmet ronronne comme un chaton docile, révèle-t-elle. Elle a beau dire qu’elle ne t’apprécie pas et ne te fais pas confiance, elle aime ce que tu nous fais ressentir…

- De l’entrainement tu crois ? … je ne suis pas certaine de pouvoir le faire à volonté…J’ai…une peur bleue du feu. Je ne suis pas le choix d’avatar idéal pour cette déesse solaire.
- Au contraire, tu es peut-être le choix le plus pertinent pour la tempérer.
- Protectrices des médecins et des vétérinaires… on la priait pour retrouver la santé… Tu penses… tu penses que je pourrais guérir des malades ?
- C'est une possibilité qu'il te faudra explorer.

Au fil de la conversation, Ébène prend conscience que son bas ventre manifeste une raideur inconfortable. Il s'en excuse, ce qui semble passablement amuser sa compagne.

- Pourquoi tu t’excuses ?
- C'est inconvenant.
- Je trouve ça plutôt…flatteur.

Ébène à un hoquet et un tressaillement involontaire qui le surprennent. Il ne comprend pas les réactions inopinées de sa carcasse, visiblement en roue libre. Théodora bouge son bassin d'une manière qui excite la mécanique de ses organes génitaux. Il contracte la mâchoire et sent son rythme cardiaque faire de sévères embardées. Sa respiration saccade comme un pneu crevé forcé de rouler.

- Ah... Tant mieux... Si tu ne te sens pas insul... Tée.

Theo guide ses mains sur son corps. Lui tente de comprendre l'électricité qui parcourt ses muscles et les petillement singuliers dans son ventre et sa cervelle.

- Quand tu me touches, Sekhmet ronronne comme un chaton docile.
- Vrai... Ment ? La fin du mot est aspiré par un drôle de soupir.
- Elle a beau dire qu’elle ne t’apprécie pas et ne te fais pas confiance, elle aime ce que tu nous fais ressentir…

Est-ce ce compliment qui l'enhardit ? Possible.
Ébène fait glisser ses doigts le long de sa colonne vertébrale, gravissant chaque vertèbre avec délicatesse, puis redescend lentement, à la manière dont il flatterait le pelage d'un chat. La main invitée sur la hanche de la jeune femme empoigne le charnu d'une fesse qu'il pétrit doucement.

- Ça.... Vous aimez bien ? Interroge-t-il curieux. Quoi d'autre ? Montre moi.

Theo arque l'échine sous la caresse de ses doigts qui coulent dans son dos avec une douceur étonnante et vient frotter sa joue contre sa courte barbe comme un chat en manque de câlin. Sa gorge relâche une exclamation de surprise et de plaisir mêlé lorsqu’il referme ses doigts sur l’une de ses fesses.

- Ça.... Vous aimez bien ?
- Mmm… je pensais que c’était évident mais oui…

Que les choses soient claires, humaine ! Je ne fais que « subir » ton plaisir ! Je ne ronronne…Par Rê !
Au moment où il se met à en malaxer la chair, le ronronnement est pourtant bien sonore dans l’esprit de Theo qui sourit largement.

- Oh oui, elle adore ça…elle fait simplement de la résistance en surface.
- Quoi d'autre ? Montre-moi.
Elle dégage ses cheveux sur un côté de sa tête et d’un doigt, tourne le visage d’Ebène vers le sien. Elle baise doucement, presque délicatement ses lèvres.
- Tu as besoin de réviser ton anatomie féminine, Ebène ? Je suis comme toutes les autres femmes, tu sais…

Elle se saisit de la main qui parcourt son dos et la pose sur sa joue qu’elle blottit contre sa grande paume, toujours à la manière d’un félin.

- J’adore tes mains, commente-t-elle distraitement en en baisant le creux comme il la fait pour elle la veille, des mains guérisseuses…

Ses lèvres s’y attardent, vénérant chaque parcelle de sa peau. Joueuse, elle mordille la pulpe charnue du bout de ses doigts avant de la faire redescendre sur sa gorge puis de la guider plus bas, sur les courbes tendres de sa poitrine. Elle referme les longs doigts du docteur sur l’un de ses seins et pousse un petit soupir d’aise, blottie contre lui. Elle continue ses légers mouvements de houles qui lui permettent de déceler quelques notes de troubles sur son visage pourtant toujours aussi neutre.

- On aime quand elles sont là…

Elle continue la descente de cette main pourvoyeuse de plaisir entre ses seins, là où pend son collier puis sur son ventre qui frémit sur son passage, ondulant doucement. Elle finit par l’arrêter entre ses cuisses, ses yeux plantés dans la noirceur des siens.

- Et là…souffle-t-elle finalement après un faible gémissement. Oh oui là… Ebène…
Sa bouche cherche maladroitement ses lèvres.

- Mmm… je pensais que c’était évident mais oui…
- Toujours vérifier les évidence par l'expérience. Même Sekhmet ?
- Oh oui, elle adore ça…elle fait simplement de la résistance en surface.
- Quoi d'autre ? Montre-moi.

Il se laisse docilement guidé par son bon-vouloir. Ses lèvres pulpeuses sont moelleuse et et agréable. Il y revient sans trop se faire prier.

- Tu as besoin de réviser ton anatomie féminine, Ebène ? Je suis comme toutes les autres femmes, tu sais…
- Chaque femme est différente, toi plus que les autres, répond-il avec la simplicité des évidences.
- J’adore tes mains...
- Je préfère les tiennes...

Theodora prend possession de ses phalanges et sans s'en apercevoir Ebène retient sa respiration. Quelque chose agrippe ses poumons, la poigne d'un sentiment qui tente de surnager dans l'eau saumâtre de son puits. Eperdument fasciné, il la regarde enduire ses doigts de miel et de désir.

- ...des mains guérisseuses…

Des mains qui ont frappé à se fendre les os.
Des mains qui ont étranglé et tenu des couteaux.
Des mains d'assassin et de bourreau.

Il redécouvre le corps de Theodora, avec toute sa lucidité. Des courbes de velours, des mamelons fiers et drus, sensibles dès qu'il les effleure. Très sensible.

- On aime quand elles sont là.
- Je... Il trésaille légèrement... le constate.

Sa cervelle pétille d'étincelles qui le parasitent, par intermittences. Il a l'impression d'avoir des absence, le corps suspendu à ces brusques et fugitives interruptions de programmes. Theodora continue de guider ses gestes, sur son ventre encore ferme, sur cette toison pubienne, sombre et humide comme une jungle, dans ce temple intime d'une chaleur féconde.

- Et là…

Son gémissement impudique allume d'avantage d'étincelles sous son crâne et dans son bas-ventre, dur au point d'en être désagréable. (Quoique la pression induite par le mouvement de hanches de Theo produise des accalmies si délectables qu'il s'entend soupirer. Paradoxe.) Cependant, il se concentre sur ses zones érogènes à elle, et il est vrai qu'en anatomiste confirmé, il sait exactement où placer ses doigts et comment les bouger pour produire le bon effet.

- Là..?
- Oh oui là… Ebène…

Ebène est hypnotisé par ses expressions faciale. Elle est si démonstrative, si éloquente !
Il l'aide à trouver sa propre bouche. Il est à peut près certain de pouvoir affirmer ceci : il apprécie l'embrasser. Il n'a jamais été expansif en matière de vocabulaire, mais il irait bien jusqu'à dire qu'il adore ça. D'autant que chaque baiser décuple ses propres sensations jusqu'alors en sourdine. Il entend de mieux en mieux la musique de son corps. Celui-ci exige de plonger en elle, de se repaitre de ses chairs et d'y rependre sa semence.

- Theo... fait-il le souffle court, entre deux de ses baisers voraces, Je...veux.......sans parvenir à aller au bout de cette simple phrase car les pensées cohérentes se dérobent à lui.

Ebène joue de son corps avec un doigté certain et elle le récompense d’une musique composée de ses gémissements et de ses soupirs libérés. Theo a agrippé sans même sans rendre compte la nuque d’Ebène pour s'ancre à lui et lui dévore la bouche par intermittence. Elle se découvre un appétit insatiable qui ne semble pas s’offusquer du manque de réaction de son partenaire. Ou plutôt qui semble se satisfaire de ce qu’elle perçoit. Elle ne dit rien mais ses regards enfiévrés et ses démonstrations de plaisir parlent mieux que sa bouche ne serait le faire.

Son corps se tend et se relâche par intermittence et son bassin continue de se mouvoir au rythme des doigts habiles d’Ebène. 

- Theo...Je...veux...

L’entendre trébucher ainsi sur ses mots amène un sourire séducteur sur ses lèvres, vite brouillé par une expression de ravissement lorsque ses caresses trouvent un point plus sensible. 
  
- Quoi ? … Qu’est-ce que tu veux Ebène… ?

Après un dernier long baiser, elle finit toutefois par mettre fin à leurs attentes et leurs tourments et se dresse au-dessus de lui, triomphante et inondée de soleil.
Elle aussi veut plus.
Gourmande, elle se lèche les lèvres du bout de la langue avant de le laisser glisser en elle avec une délicieuse lenteur. La tête rejetée en arrière, un premier cri s’échappe vers le plafond alors qu’elle savoure cette sensation incomparable de ne faire qu’un avec lui.

Son regard retrouve ses prunelles sombres et s'y accroche alors qu'elle reste immobile. L'union a apaisé un temps ce besoin de le sentir en elle mais bien vite elle ne suffit plus. Alors, les deux paumes en appui sur son torse, elle commence à bouger doucement, languide, sensuelle. Le bout de ses doigts trouve les pulsations de son cœur et elle y presse sa main abîmée avec avidité, ébahie de le sentir battre si fort comparé à ce qu’elle a déjà observé.  

- Dis-moi…est-ce que tu te sens vivant… là ? … avec moi ?

Succube.
Le premier mot qui lui vient en tête alors qu'elle se meut, ondoyante et sublime au dessus de lui, le plaisir l'éclairant de mille et une facettes. Lui, n'est qu'un roc effrité, éprouvé par cette marée qui ne cesse de monter, de l'éroder. Son coeur cavale anormalement, affolant sa carcasse toute entière.
Surchauffe.
Son cerveau ne parvient plus à analyser, il se trouver noyé. Les pensées incohérentes se succèdent, s'étiolent et se perdent. Reste l'instinct du primate, brut et animal.

- Quoi ? … Qu’est-ce que tu veux Ebène… ?

Il lui répond par un grognement de frustration. Elle le met au pas avec un baiser sauvage. Brusquement affamé, le regard brulant, presque possédé, il la contemple se redresser et s'empaler lentement sur lui. Elle exulte avec superbe tandis que lui, bienheureux damné, se renverse et expire un grondement rauque, des étincelles plein la tête.

Oui.
C'est bien ça qu'il voulait.

Il empoigne le charnu de ses fesses comme un conquérant et les presse sans délicatesse. Son bassin se soulève par à-coups furieux dont il ne maitrise pas la logique. Il ne comprend plus, il fait juste. Il fait, surplombé par Theodora qui se cambre et gémit. Ses mains brulées pétrissent son plexus comme pour en excaver son palpitant. "Prends.. Prends le...." Ce dernier tambourine, tempétueux, dangereusement énervé contre sa pauvre cage thoracique.

- Dis-moi…est-ce que tu te sens vivant… là ?
- O.. Oui , annone-t-il
- … avec moi ?
-... T.. Toi...

Une étincelle un peu plus brutale que les autre lui fait relever le menton et rouler des yeux dans ses orbite. Fulgurance. Mise en bouche du contentement suprême à venir. Il la bascule sans prévenir pour l'écraser de toute sa virilité, fusionner peau à peau, chair contre chair. Ebène est un amant qui manque de rondeur dans les gestes mais qui fait montre d'une passion farouche. Il plante ses lèvres dans sa gorge offerte, aspirant le derme à l'en bleuir. Il grogne et jappe, la mord à certain endroit, comme un animal furieux, cherchant à la posséder toujours plus profondément. Il avale sa bouche avec un appétit goulu lorsque soudain, il sent son coeur sur le point d'éclater. Front à front avec Theo, sans jamais la quitter des yeux, il jouit avec un râle douloureux.

Explosion.
Extase grandiose.

Quelque chose vient de changer chez lui, aussi rapidement que si elle venait de presser sur un bouton. Son regard, à lui seul, cherche à la posséder, l’avaler toute entière. Si elle s’y laisse prendre pendant de longues secondes, elle finit par reverser la tête en arrière pour s’y dérober au risque de s’y noyer. Chacun des coups de reins énergiques d’Ebène attise des flammèches qui lèchent son corps tout entier. Inconsciemment les doigts sur son torse se resserre, y laisse la marque de ses ongles.  

En quelques secondes, le monde de Theo bascule et elle se retrouve allongée sur le matelas, le corps d’Ebène se pressant contre le sien avec force. Ce qui ne l’empêche pas resserrer automatiquement ses cuisses sur ses hanches et de continuer à onduler vigoureusement du bassin autant que sa position le lui permet. Elle pousse des cris entre la douleur et le ravissement quand il plante ses dents dans sa chair et la marque. Ebène s’est transformé en tornade déchainée et l’emporte avec elle.  

Confusément, elle se demande ce qu’il lui prend. Jamais elle ne s’est montré si… animal avec ces précédents amants…hier soir les choses étaient également différentes…Chez elle comme chez lui d’ailleurs…
Pourtant, non seulement elle découvre que l’expérience lui offre un plaisir rarement atteint mais elle finit par se montrer aussi bestiale que lui. Ses doigts agrippent et fourragent dans ses boucles épaisses sans plus de délicatesse.
Le rythme devient presque insoutenable… délectable néanmoins… ses ongles se font griffes et esquintent la peau déjà abîmé de son dos alors qu’elle essaie de lui rendre son baiser à la limite de la bestialité.

En elle, Sekhmet jubile. C’est après tout une déesse de violence, de passion. Et à cet instant elle délaisse volontiers celle du sang pour le plaisir charnel. Elle souffle à son avatar quelques gestes, mais se rend compte qu’elle n’a pas besoin d’être guider tant que cela.
Déesse comme femme se laissent complètement aller à leurs instincts sauvages.

La pression dans le bas-ventre de Theo se fait de plus en plus forte, ses cris de plus en plus aigus. Les phalanges perdues dans sa chevelure, elle se dresse de quelques centimètres et vient happer le lobe de son oreille qu’elle mord. Elle y susurre alors avec une férocité certaine de cette voix double dans deux langues distinctes.

- Un jour, tu nous appartiendras … tu seras à nous, corps et âme. Sans pacte, sans rituel…juste à nous.  

Le corps soudain submergé par de violents courants électrique, Theo retombe en arrière et s’accroche comme une désespérée à la tête de lit. Bouche entrouverte, front contre le sien, elle se perd dans les ténèbres de ses iris et se cambre tandis que sa conscience explose dans une exclamation étranglée alors qu’elle le sent partir quelques secondes plus tard.

Sa vision se brouille, toute pensée lui échappe, elle n’est plus que sensation, plus que plaisir. Son corps semble attiré les rayons du soleil qui en illumine sa peau.  
Suspendue hors du temps et de l’espace pendant quelques extraordinaires secondes, Theo revient finalement à la réalité, soufflée par l’intensité de son orgasme et revient chercher sa bouche dans un baiser plus suave et plus lent.
Elle dénoue lentement ses doigts crispés sur la tête de lit et pose une paume contre son front, un sourire ravi aux lèvres.

- Mon dieu…souffle-t-elle encore éblouie par la puissance de leur étreinte. C’était…
A cours de vocabulaire, elle se contente de resserrer tendrement ses bras autour du corps alangui d’Ebène. Comme la veille, elle l’enrobe de douceur. Sa gorge laisse échapper un petit rire.
- Ne dis plus jamais que tu es un zombie. Pas après ça…
Elle baisse les yeux sur sa gorge marquée de coup de dents, et frôlent les empreintes et les meurtrissures du bout des doigts. Son cou doit être dans le même état. Pourtant le même sourire comblé flotte sur ses lèvres.
- Cela dit…il est possible que tu m’aies dévoré quand même…

La tempête passe, secoue encore son corps et fait pétiller sa cervelle. Son incompréhension est totale mais les lèvres de Theodora sont douce et il les accueille avec une docilité de grand enfant en mal de tendresse. Ebène s'écroule sur elle, l'écrasant de tout son poids, toujours ancrée en elle et n'ayant aucune envie d'en être délogé. Il flotte à côté de sa carcasse, en, suspension au dessus du vide, retenu par la douceur de ses caresses et le moelleux de son giron.

Theodora cherche à poser des mots pour qualifier cette expérience. Lui n'essaie même pas. Il respire son cou, sa peau en sueur, son parfum voluptueux gorgé de phéromone. Elle rit, et sa gorge tressaute contre sa joue.

- Ne dis plus jamais que tu es un zombie. Pas après ça…

A sa grande surprise, il s'entend rire aussi (enfin cela ressemble plus à une éructation étouffée d'imbécile heureux.)

- Cela dit…il est possible que tu m’aies dévoré quand même…
- Désolé.... Il se redresse un peu sur un coude, effleure les marques profondes qu'il a laissées, contemple son forfait. Non, en fait je ne le suis pas. Haussement de sourcil et sourire plus pérenne que tous ses précédents. Désolé de ne pas être désolé. Fugace grimace.

Il revient se caler contre elle. Ses longues phalanges dessinent son adorable petit nez et ses lèvres pleines et gonflées. Il adore sa bouche. Il sent déjà son pouls décélérer, son vide reprendre ses droits. Son rythme cardiaque est en chute libre, alors, avant de perdre le courage insufflé par ce plein de sensations, il se dresse au dessus d'elle et dépose une série de baisers fervents sur son visage. Ses billes noires la fixent sans ciller.

- Viens vivre avec moi. Tu me rendras vivant tous les jours, comme ça....

L'expérience de Colgan est juste : il ne l'a plus dans la tête à présent, il l'a dans la peau.

Un cliquetis suspect se fait entendre. Quelqu'un tourne une clé dans la serrure de sa porte d'entrée. Ebène fronce les sourcils et se fige.

- Tu as entendu comme moi ?

Il se redresse et remarque que la nuit est tombée. Un affreux soupçon l'étreint alors que la porte s'ouvre.

- Dooooc' ? fait une voix féminine et chantante. Papa, t'es là ?

Il vient de se souvenir qu'il avait donné un jeu de clés à sa fille en cas d'urgence.

Theo le contemple, les yeux pétillants, en entendant son semblant de rire, son dont elle se repait avec délectation. Elle aime son rire. Elle remarque alors les traces laissées sur sa peau.

- Cela dit…il est possible que tu m’aies dévoré quand même…
- Désolé... Elle frissonne sous ses longs doigts. Non, en fait je ne le suis pas. Elle éclate de rire et retrace délicatement le contour de ses lèvres souriantes. Désolé de ne pas être désolé.

Elle se hisse jusqu'à sa bouche pour un baiser furtif.
- Ne le sois pas ! Ca ne me dérange pas...et Sekhmet a adoré...

Il la gratifie de douces caresses et elle soupire de contentement. Elle va avoir bien du mal à sortir de ce lit...de cet appartement... pour retrouver le sien, plutôt impersonnel puisqu'elle ne devait y rester que quelques mois et où seul son chat l'attend. Il cesse ses câlins aussi brusquement qu'il les a commencé et elle pousse une petite plainte de protestation. Les yeux plantés dans les siens, il lui propose alors.

- Viens vivre avec moi. Tu me rendras vivant tous les jours, comme ça....

Elle le fixe un moment, les yeux ronds, ne sachant pas s'il est sérieux ou non.

- Tu...tu plaisantes…? Elle sourit mais son expression laisse clairement deviner sa perplexité. On se connaît à peine...et...et tu...ça voudrait dire que j'envahirai ton espace...sans compter que je ne suis pas seule...mon chat je veux dire...et…

A cours d'arguments, elle encercle son visage de ses paumes et vient l'embrasser avec passion, les phalanges perdues dans sa tignasse.

- Tu es complètement fou...souffle-t-elle, un large sourire éclairant son visage. Ou alors tu cherches juste quelqu'un pour te faire à manger...

Un cliquetis suspect se fait entendre dans l'appartement et Theo se fige.
- Tu as entendu comme moi ?
- Oui... elle fronce les sourcils, concentrée et cherche à savoir d'où vient le bruit. Tu as confié tes clés à quelqu'un ?

- Dooooc' ? fait une voix féminine et chantante. Papa, t'es là ?

La panique submerge la jeune femme, effaçant les bienfaits de leur étreinte. Papa ? Oh mon Dieu c'est sa…

- Ta fille …? Chuchote Theo dans un couinement horrifié. Elle tente de se redresser, de s'échapper de sous son grand corps. Tu parles d'une première rencontre !
Elle tente de discipliner ses cheveux d'une main, ce qui a pour effet d'empirer le choses. Ses yeux fouillent le sol à la recherche de ses vêtements quand elle se souvient soudain où ils se trouvent. Elle se tourne vers le docteur, clairement désespérée.

- Ebène...tous mes habits sont dans le salon…

De toute façon, il y a peu de chances pour qu'en les voyant sortir de la chambre tous les deux, échevelés, sa fille n'en tire pas les conclusions qui s'imposent...
Theo a l'envie subite de se cacher sous les draps...mieux sous le lit et de disparaître.

******

- On a dit en cas d'urgence Marisol… il est peut-être au travail…

Dans l'autre pièce, Colgan les mains occupées par un large reste de gratin concocté par Marisol entre dans l'appartement avec une certaine hésitation. Il s'arrête toutefois rapidement et renifle l'air.

- Marisol...le doc est pas seul … prévient-il en se souvenant où et quand il a déjà senti ce parfum.

Il arque un sourcil en avisant les vêtements féminins sur le sol et les lui indique du menton. Est-ce que...Le doc aurait suivi leurs conseils finalement ? Il se gratte la gorge pour cacher son rire.

- Ça explique peut être pourquoi il ne nous a pas entendu toquer...

- Tu...tu plaisantes…?
- Non.
- On se connaît à peine...et...et tu...ça voudrait dire que j'envahirai ton espace...sans compter que je ne suis pas seule...mon chat je veux dire...et…
- Techniquement, en te faisant cette proposition j'en adopte déjà un... alors deux.

L'idée ne semble pas tant lui déplaire puisqu'elle lui donne une de ses gourmands baisers.

- Tu es complètement fou...Ou alors tu cherches juste quelqu'un pour te faire à manger...
- Peut-être un peu des deux... ponctue-t-il avec un très mince sourire qui fane aussitôt. Tu as entendu comme moi ?
- Oui... Tu as confié tes clés à quelqu'un ?
- Euh.... hé bien...
- Dooooc' ?......Papa, t'es là ?
- ....................à ma fille.
- Ta fille …? La nouvelle ne la réjouit pas franchement. Lui, s'est simplement assis avec un froncement de sourcil.
- Pourquoi est-elle là ?
- Tu parles d'une première rencontre !

Ebène affiche une expression vaguement contrariée. C'est qu'il était bien , là, il y serait bien resté.

- Ebène...tous mes habits sont dans le salon…
- Ah.

Le bon docteur se frotte l'arrête du nez et pousse un long soupire d'homme blasé. Qui a dit que la mort s'apparentait au repos éternel ?

***

- On a dit en cas d'urgence Marisol… il est peut-être au travail…
- Ou cané dans un coin de son appart' parce qu'il a oublié de bouffer ! J'te jure qu'il est capable !
- Marisol...le doc est pas seul …

La jeune femme soulève un soutien-gorge par la anse du bout de son index.

- Ah oui, j'constate !

Elle a un sourire espiègle qui creuse ses joues de fossettes et anime son visage tout entier. Elle pouffe de rire en s'approchant de Colgan.

- Oh merde! chuchote-t-elle hilare. Tu crois qu'on les a interrompus ? Hihihi.... Elle enfouit son visage dans l'épaule de Colgan pour étouffer un nouvel éclat comme elle peut. La boulette... enfin... le gratin plutôt ! Ahahaha... ppfff..... Hum...
- Marisol...? fait la voix monocorde de son cher papa de derrière la porte de  sa chambre.
- Oui... hum...C'est nous ! Colgan est avec moi! croit-elle bon de préciser en essayant de conserver son sérieux. Est-ce que... tu veux que je t'apporte les vêtements de ton amie Theodora ? Elle a peut-être envie de se changer ?

Silence.

- Oui... Oui ce serait fort aimable, je t'en remercie.
- Ca roule Doc' !

Le timbre de Marisol cache difficilement son amusement. Elle rassemble les vêtements de la fameuse "Theo", même les gants bizarres qu'elle trouve entre une culotte et un pantalon, et s'approche de la porte qu'elle entrebâille à peine, juste pour y glisser son bras et les quelques habits qui y pendent. On la déleste très vite de son fardeau et on lui claque la porte au nez.

Quelque minute plus tard, Ebène maintenon parait (en pyjama, faute de mieux). Il se gratte le sommet du crâne en secouant ses boucles brunes en bataille. Il a l'air un peu désorienté, vaguement bougon et en même temps étrangement détendu.
Sa fille enlace son père et lui colle un bisou sonore sur la joue.

- Bonsoir !
- Bonsoir Marisoleil.... Colgan. Il croise le regard du loup et lui assène. Aucun commentaire.

Il s'écarte ensuite de la porte pour laisser passer Theodora qu'il sait horriblement mortifiée.

- Ah oui, j'constate !
Colgan observe la lingerie, un fin sourire sur les lèvres.
- Joli. Le doc s'embête pas à priori.

Il dépose son fardeau sur la table de cuisine. L'air amusé de Marisol et la situation le mettent immanquablement de bonne humeur. Ses fossettes le rendent parfaitement dingue.

- Oh merde! Tu crois qu'on les a interrompus ?
- Mon ouïe de super loup n'a rien détecté. Soit ils font une partie d'échec soit le show s'est terminé avant notre arrivée...
Il passe un bras autour de la taille de la jeune femme et ils gloussent de concert comme des gamins espiègles.

- Marisol...?
- Oui... hum...C'est nous !
Colgan se mord l'intérieur de la joue jusqu'au sang pour ne pas rire.
- Est-ce que... tu veux que je t'apporte les vêtements de ton amie Theodora ? Elle a peut-être envie de se changer ?

Sa femme est terrible quand elle s'y met...absolument terrible...

- Oui... Oui ce serait fort aimable, je t'en remercie.
- Ca roule Doc' !

Pendant que Marisol s'occupe des vêtements de sa probable belle-maman, Colgan se poste contre le plan de travail, bras croisés sur le torse.
S'il devait miser, il parierait volontiers que le Doc vient de prendre son pied comme il se doit aux vues de la tête qu'il affiche en sortant de la chambre. Il semble aussi...contrarié ? Qu'il le soit n'a rien d'étonnant, qu'il puisse le percevoir l'est bien plus.

- Bonsoir !
- Bonsoir Marisoleil.... Colgan.
- Doc.
- Aucun commentaire.

Le Loup sourit, mime une fermeture éclair sur sa bouche, tourne une clé imaginaire et la jette par-dessus son épaule.

Dans la chambre, Theo patiente, les draps serrés contre son corps, les mains coincées sous ses aisselles et l'envie de disparaître de plus en plus forte. Évidemment Marisol trouve ses vêtements et même d'ici elle peut entendre l'hilarité qui secoue sa voix lorsqu'elle propose de les rendre à sa propriétaire. Ébène les réceptionne pour elle et Theo les récupère sans même croiser son regard avant de commencer à se rhabiller lentement, profitant de ses derniers instants de répit pour retrouver son sang froid. Lorsqu'elle enfile ses gants en dernier, elle a recouvert un semblant de calme. En apparence du moins. Sauf que même en boutonnant son chemisier jusqu'en haut, impossible de cacher les marques sur son cou...après tout au point où elle en est.
Un dernier coup du plat du gant sur ses vêtements pour les défroisser, et une profonde inspiration plus tard, elle se sent enfin prête à sortir. Après tout, il ne s'agit rien de moins qu'une représentation comme pour ses conférences.

N'aies pas honte. Tu es fille du soleil.

Même si elle ne sait pas tellement en quoi ça l'avance, elle sort donc, un sourire poli sur les lèvres, repoussant toute gêne avec plus ou moins de réussite. Après un échange de regards avec Ébène, elle tombe ensuite sur celui, amusé, du grand rouquin qu'elle a déjà croisé.

- Bonjour Colgan, ou plutôt bonsoir…
- Theo. Content de vous revoir…

Les yeux de l'homme pétillent littéralement pas dupe un instant. Elle se tourne ensuite vers une brune à la beauté renversante et au charisme impressionnant. Difficile de se faire à l'idée que cette femme de son âge à peu près, est la fille d'Ebène. Inconsciemment elle tente de chercher des similitudes entre le père et la fille et en trouve finalement de nombreuses. Subtiles mais bien présentes.

- Marisol je suppose ! Enchantée de…

Elle s'arrête soudain. Sekhmet est aux aguets pour mieux observer cette déesse d'un panthéon inconnu. Theo approche, fascinée de trouver quelqu'un comme elle. Elle ne perçoit pas Colgan se tendre et l'observer avec méfiance. Tout ce qu'elle voit c'est la présence de cette "sœur"...

- C'est...si étrange... je sens qu'elle est là...Ch'aska c'est ça ? Déesse stellaire…

Elle penche la tête sur le côté et la scrute avec une fixité animale.

- Je suis tellement soulagée de savoir que je ne suis pas la seule à héberger une visiteuse parfois légèrement encombrante. J'ai tellement de questions...plus tard peut-être quand tu auras du temps à me consacrer ? Je vais vous laisser en famille...

Ebène pince les lèvres et lève les yeux au ciel devant la mimique de Colgan. Ces deux là sont vraiment deux grands crétins quand ils s'y mettent. Ceci étant, cela le conforte dans son idée que leur relation de couple est plus apaisée. Un sourire filtre malgré lui.
Theodora ose enfin sortir de son repaire, habillée de pied en cap comme on se carapaçonne de son armure. Ebène et elle échange un regard qu'on pourrait qualifier d'entendu. L'oeil du médecin ne voit que les traces de suçons violacés et il se mord la lèvre inconsciemment pour chasser le ricanement qui lui vient spontanément.
Ses émotions semblent couler un peu plus facilement que d'ordinaire et s'afficher sans qu'il ne le soupçonne.

- Bonjour Colgan, ou plutôt bonsoir…
- Theo. Content de vous revoir…
- Marisol je suppose !
- Tu supposes bien ! fait sa fille avec un sourire éblouissant qui souligne les fossettes héritées du paternel.
- Enchantée de… Elle s'interrompt. C'est...si étrange... je sens qu'elle est là...Ch'aska c'est ça ? Déesse stellaire…Je suis tellement soulagée de savoir que je ne suis pas la seule à héberger une visiteuse parfois légèrement encombrante.
- Je suis là, rectifie Marisol. Elle est moi et je suis elle depuis un moment déjà. Mais ouais, ça picote à l'arrière de la nuque, c'est super bizarre ! Donc toi et ... Sekhmet c'est ça ? Vous êtes coloc' depuis longtemps ?
- J'ai tellement de questions...plus tard peut-être quand tu auras du temps à me consacrer ? Je vais vous laisser en famille...
- Bah non, te barre pas à cause de nous! C'est nous qui nous sommes incrustés comme des malpropres.
- Je ne te le fais pas dire.
- Heeey! tu m'as filé tes clés j'te signale! Et on a apporté du gratin chorizo-poisson ! Recette maison ! Depuis la dernière fois qu'on s'est vus, j'avais peur qu'il se nourrisse pas cet idiot ! Elle désigne vaguement la zone de sa gorge avec un sourire malicieux. Mais, je vois qu'il mange quand même...
- Marisol.... gronde son père.
- Pas de commentaires... ouiiiiiii! Mais c'était trop tentant avoue ! Elle se tourne vers Colgan en quête d'assentiment. Désolée, Theo c'est pas contre toi et Sek', mais je savoure la situation, c'est la première fois qu'il nous ramène une petite copine !
- Arrête de parler de moi comme si j'étais un chien errant ou ton gamin! bougonne Ebène en allant regarder la tête du gratin sur la table. Il va pour plonger son index dedans mais sa fille lui tape la main.
- Fais pas ça c'est, dégueulasse papa !
-... Hum.... regard boudeur d'enfant pas content suivi d'un énorme soupire. Vous mangez avec nous ? Quand je dis nous, c'est avec Theodora et moi. Je précise, fait-il en regardant les "Murtagh".