~- C’est un voyage que tu peux que faire seule.
- Je sais.

Il a franchement l’impression de ne réussir qu’à la démoraliser plus encore et ça l’attriste. Il aimerait avoir les mots, les bons. Mais ils lui ont toujours échappé et ses efforts pour les trouver semblent toujours vains.

~-Mais…si tu as des doutes ou que tu veux parler, je suis là.
- Tu me tiendras la main, pour faire le voyage ?

Il décrypte son langage corporel, sent sa fragilité et devine qu’elle n’est pas non plus du genre à demander de l’aide quand bien même elle en a besoin.

~- Si..si tu as besoin oui. Il faut pas que tu aies peur, Salomée. T’es pas…toute seule.
- Je le suis, dans ma tête. Je n'ai jamais été aussi seule et aussi démunie de l'être.
~- Comme tout le monde…faut juste que t’apprennes à vivre avec…
- Une part de moi se satisfaisait de sa laisse, Marcus, quand l'autre voulait la ronger. Laquelle des deux suis-je en réalité ? La fille qui pleure son geôlier ou celle qui veut s'en affranchir ?
Il réfléchit quelques secondes et son visage se plisse un peu mais pour lui la réponse lui parait évidente.
~- Tu sais, rien dans la Nature n’est tout noir ou tout blanc… tout est nuance. Toi aussi. Pourquoi tu pourrais pas être un peu des deux ? Pourquoi tu l’envisages pas ? Y’a plusieurs Salomée, comme y’a plusieurs Marcus en moi. Enfin y’a moi et Numéro 68. Tu vois ce que je veux dire ? Tu peux être les deux…laisse toi être les deux… L’une va pas sans l’autre.

Peut-être ferait-il mieux de se taire, il est bien plus doué avec ses silences. Il se demande fugacement pourquoi elle se confie à lui qui n’a aucune expérience des gens et de leur mode de fonctionnement. Lui qui ne connait certainement qu’un tout petit prisme de la vie.

- Je n'ai pas ta force mentale. Je suis bien plus faible que tu ne te le figures.

Dans un geste spontané et totalement maladroit, il la reprend soudain dans ses bras et la serre un peu plus fort, espérant stopper la vive émotion qu’il vient de lire dans son regard avant qu’elle ne pleure à nouveau. Il n’aime décidemment pas la voir pleurer.

- Y’a rien de plus faux, sa voix commence à fatiguer mais il persiste, ne crois pas que c’est si facile de s’enlever de la tête des trucs qu’on nous y glisse depuis qu’on est gamin. Et tu emmerdes royalement ceux qui pensent le contraire. Soit patiente. Pas à pas, Salomée. Respire. T’es là. Tu es toi. Peu importe si tu te connais pas encore tout à fait. Ça viendra. Il tousse un peu. Désolé…ma voix déraille.

Il recule un peu pour croiser son regard et la fixe un moment sans rien dire.

- Ca va aller ? chuchote-t-il doucement.  

~- Tu sais, rien dans la Nature n’est tout noir ou tout blanc… tout est nuance. Toi aussi. Pourquoi tu pourrais pas être un peu des deux ?Pourquoi tu l’envisages pas ?

Pourquoi ?
Il a raison.
Je suis ces deux femmes là à la fois,
aussi paradoxale cela puisse-être.

~- Y’a plusieurs Salomée, comme y’a plusieurs Marcus en moi. Enfin y’a moi et Numéro 68. Tu vois ce que je veux dire ? Tu peux être les deux…laisse toi être les deux… L’une va pas sans l’autre.

Le regard de Salomée s'allume d'une lueur nouvelle : un nouvelle éclairage sur sa condition. Malheureusement, elle est vite rattrapée par ses émotions. L'abattement l'enlise brusquement comme un sentiment terrible de désespoir.

- Je n'ai pas ta force mentale. Je suis bien plus faible que tu ne te le figures.

Marcus la sert soudain avec une effusion incontrôlée et malhabile. Elle a un léger sursaut de surprise, avant de se laisser fondre dans ses bras. Il est si apaisant d'être avec lui. Si doux. La jeune femme enlace la taille du sorcier et ses mains remontent le long de son dos comme pour s'agripper à ses omoplates. Elle fermes yeux, bercée par les paroles réconfortantes de son ami au creux de son oreille.

- Y’a rien de plus faux. Ne crois pas que c’est si facile de s’enlever de la tête des trucs qu’on nous y glisse depuis qu’on est gamin. Et tu emmerdes royalement ceux qui pensent le contraire. Soit patiente. Pas à pas, Salomée. Respire. T’es là. Tu es toi. Peu importe si tu te connais pas encore tout à fait. Ça viendra.

Sa voix de plus en plus rauque s'affaiblie et s'esquinte en toux.

- Désolé…ma voix déraille. Ca va aller ?

La dragonne hoche doucement la tête. Elle a une expression étrange où se mêle gratitude tendre et doucereuse mélancolie. Elle effleure la glotte de Marcus du bout des doigts puis la pulpe de ses lèvres.

- Je suis navrée de te forcer à causer autant. Faible sourire. Faut vraiment que tu m'apprennes à signer, hein ?

Longs regard échangé, noyé de silence et d'intimité. Salomée reflue jusqu'à se détacher de son compagnon. Elle fouille dans sa poche et sort un petit sachet de bonbons.

- C'est au miel et au plantes. Ca va soulager ta gorge.

Elle sort une des pastilles dorées et lui tend entre l'index et le pouce. Pendant une fraction de secondes, l'idée la traverse de lui déposer directement sur la langue et peut-être l'aider à la liquéfier avec la sienne.

Tu dérailles toi aussi !

Elle déglutit et ne laisse rien paraitre, si ce n'est une légère rougeur sur ses pommettes hautes.

A priori son geste spontané n’a pas dépassé certaines bornes que le sorcier ne maitrise pas encore. Et il a poussé un profond soupir de soulagement lorsqu’elle a enlacé sa taille de ses bras. Alors qu’il tente de lui faire voir les choses à sa manière sans doute bien plus simpliste, sa voix lui échappe.

- Désolé…ma voix déraille. Ca va aller ?

Il lui sourit quand elle hoche la tête, sincèrement heureux d’avoir pu l’aider à prendre un peu de recul sur sa situation pour se figer l’instant d’après lorsqu’elle touche son cou. Il déglutit et observe ses doigts qui remontent jusqu’à sa bouche, comme fasciné.

- Je suis navrée de te forcer à causer autant.
- C’est pas grave…

… si c’est avec toi.

-...je dois l'exercer un peu...
- Faut vraiment que tu m'apprennes à signer, hein ?

Il hoche la tête avec l’expression d’un gamin content. Ce qu’il est plus au moins. Qu’elle veuille réellement faire l’effort de communiquer avec son langage, le touche sans qu’il comprenne exactement pourquoi.
Ils restent là, à se regarder bêtement…ou pas tant que ça après tout, appréciant simplement la présence et la proximité de l’autre jusqu’à ce qu’elle finisse par baisser les bras. Marcus prend ça comme le signal que le « câlin » réconfort est terminé et dénoue ses bras à tour avec une petite moue indéchiffrable.
Salomée fouille sa poche et en sort un sachet de bonbons.

- C'est au miel et aux plantes. Ca va soulager ta gorge.
Marcus sourit encore plus, amusé.
~- Ah. T’as toujours ça dans ta poche ?

Elle lui tend alors une sorte de bonbon, invite claire à ce qu’il la prenne. Sans réfléchir, il se penche, referme ses lèvres sur le bout de ses doigts et amène la pastille dans sa bouche d’un mouvement de langue avant de se redresser.

Ça n’est qu’après avoir effectué ce geste qu’il se pose la question de savoir s’il était vraiment adapté à la situation. Et s’il en croit l’air de Salomée et sa légère rougeur, il en déduit qu’il a peut-être fait n’importe quoi.
~- Euh…désolé…il aurait pas fallu que je fasse ça comme ça hein ?
Il prend délicatement la main de Salomée et essuie le bout de son index et de son pouce qui ont fini dans sa bouche avec la manche de son sweat-shirt.
Gêné à son tour, il suçote furieusement son bonbon, sans trop oser la regarder franchement.
~- Merci. Ca a bon goût ! Je dois…te donner un truc en échange ou…
Il n’est pas toujours très au fait des marchandages des hommes. Ce qui doit être payer de ce qu’il ne l’est pas.

Marcus a d'adorable fossettes quand il sourit. Ses yeux s'étrécissent pour devenir deux amandes sombres, rieuses et pétillantes.

- Tu as vraiment un sourire de lutin... s'entend-t-elle murmurer avec un je ne sais quoi de perturbant pour elle même dans son timbre. Elle n'a guère l'habitude de parler avec une voix si douce, presque cajoleuse.

Salomée se détache lentement mais résolument du charme inexplicable qu'exerce l'expression de joie enfantine de son compagnon. De terrible pensées l'assaillent, des pensées dégoulinantes d'inconvenance qui agitent ses entrailles. Elle lui tend néanmoins résolument les pastilles concoctées par Salomon.

- C'est au miel et aux plantes. Ca va soulager ta gorge.
~- Ah. T’as toujours ça dans ta poche ?
- J'ai pas l'habitude de parler beaucoup, moi non plus. Or ma voix a été très sollicitée cette semaine. Du coup, oui : j'en ai toujours sur moi.

Elle lui tend le bonbon et, alors que son imagination s'enflamme de fantasmes inattendus, Marcus approche ses lèvres de ses doigts pour les sucer. La sorcière contemple, ébahie, le geste qui -elle en a l'impression- s'effectue au ralenti. La bouche humide se referme sur ses phalanges, y imprimant une moiteur délicieusement étrangère. Salomée a cessé de respirer l'espace d'une demi-seconde. Son visage s'embrase comme un fétu de paille.

~- Euh…désolé…il aurait pas fallu que je fasse ça comme ça hein ?
- Ah.. Euh... sont les seuls vocables qui parviennent à se rendre audibles. Déjà, Marcus se répand en excuse et lui essuie les mains avec des méthodes de petit garçon. C'est presque pire tant il est mignon.
~- Merci. Ca a bon goût ! Je dois…te donner un truc en échange ou…
- Oui.... soupire-t-elle inconsciemment avant de se reprendre, presque choquée qu'elle ai proféré ce désir tout haut. Non ! Bien sûr que non ! G.. garde le paquet. C'est pour toi. je peux en avoir d'autres... Hum... Bon.. Il faut qu'on termine cette ronde...

Elle fait quelque pas dans un sens avant de se rendre compte qu'ils ont déjà inspecté les arbres de ce côté.

- Euh.. par là.. hum... Elle effectue un demi-tour qu'elle espère le plus digne possible et lui offre son dos. Marcus a tout loisir de remarquer l'écarlate de ses oreilles et de sa nuque, balayée par sa queue de cheval.

Mais.. Qu'est-ce qui m'arrive ?

~- Merci. Ca a bon goût ! Je dois…te donner un truc en échange ou…
- Oui....
~- Ah…euh…c’est que j’ai pas grand-chose.
Il réfléchit toutefois à ce qu’il pourrait lui donner en échange et se dit qu’un autre câlin le tente bien mais que ça ne serait sans doute pas très juste parce que c’est à lui que ça ferait plaisir.
- Non ! Bien sûr que non !
Confus, Marcus fronce les sourcils.
~- Oh…ok, t’es sûre ?
- G.. garde le paquet. C'est pour toi. Je peux en avoir d'autres... Hum... Bon… Il faut qu'on termine cette ronde...

Marcus contemple le sachet entre ses doigts un moment et se dit que c’est le premier cadeau qu’on lui fait depuis…depuis bien longtemps. Le dernier c’était un livre que Malone lui a donné. Il passe le bout de ses doigts sur le plastique. Sans doute que pour elle ça ne signifie pas grand-chose. Pour lui si.
Alors qu’il va pour le lui expliquer, il note que Salomée s’est déjà détourné et s’apprête à faire demi-tour.
Il lui attrape la main pour l’arrêter.

- C’est de ce côté…indique-t-il d’une voix très douce qu’il ne contrôle pas vraiment.
- Euh.. par là.. hum...

Elle se détourne non sans qu’il note la rougeur qui a envahi son visage soudain. Salomée est franchement bizarre et il se dit que c’est sans doute de sa faute. En pleine réflexion, il fait tourner la pastille dans sa bouche avec sa langue.  
« Humaine malade ? »
Il n’a même pas pensé à cette possibilité. Il se précipite à sa suite et se porte à ses côtés. Il penche soudain la tête sur le côté pour l’observer.

- Hey, ça va pas ? T’es toute rouge.
Il l’arrête en posant une main sur son épaule et l’autre sur son front, l’air soucieux.
- Pas de fièvre.

Il l’examine avec attention, ses yeux ciel d’été balayant ses traits. Ses longs doigts chutent tout doucement sur sa joue si douce qu’on dirait du velours. Pas de plume ou de poil. Juste de la peau humaine chaude et délicate. Il aime bien ce contact-là. Ses phalanges s’enhardissent à venir chercher celui d’une mèche blonde égarée de sa queue de cheval, à la froisser un peu contre la pulpe avant de la replacer gentiment derrière son oreille.
Pourquoi se permet-il de la toucher de cette façon ? C’est absurde.
Il n’aime pas le contact humain.
Mais il aime bien celui avec Salomée.
Il aime bien Salomée.
Tout court.
Presque tout est facile avec elle. Sauf de décrypter ses émotions. Ça il ne sait toujours pas faire, mais il essaie.

~- T’es…fâchée ? C’est…un truc que j’ai dit ou fait hein…
Il soupire.
~- Je suis désolé.
Comme pour appuyer les propos de son Compagnon, Chien vient léchouiller le bout des doigts de Salomée.

Salomée est troublée. Tout cet afflux d'émotions, de sensations, de pensées parasites est nouveau pour elle. Jamais elle n'a ressenti cela. Jamais Edgard ne le lui a permis. C'est grisant et effrayant à la fois.

Il ne faut pas qu'il me touche.
Quand il me touche, je...

Marcus apparait brusquement à ses côtés et impose ses doigts frais sur son front brulant. Cette fièvre n'a pourtant rien de pathologique. Elle ne s'explique pas les picotements suaves dans sa cage thoracique ou les éboulis de pierres qui dévalent du coeur et s'écrasent au ventre. Sa respiration s'accélère galopant après son pouls en cavale.

- Hey, ça va pas ?

Non ! Rien ne va !

- T’es toute rouge.

Mon corps m'échappe!

- Pas de fièvre

SI! Je m'incendie de l'intérieur !

Epinglée comme un beau scarabée par la douceur de la caresse, elle lui offre une expression fragile, déboussolée et assoiffée d'être cajolée encore, encore, encore, encore....

~- T’es…fâchée ?
- ... Non....
- C’est…un truc que j’ai dit ou fait hein…
-... Elle ouvre la bouche sans qu'un son ne filtre. Ses prunelles limpides le fixe toujours entre frustration et désespoir. Si seulement j'étais plus éloquente ! Mais comment décrire ce que l'on ne comprend pas ?
~- Je suis désolé.

La jeune femme fronce les sourcils. Ils se mécomprennent. Encore. Il faut qu'elle le contredise, qu'elle lui dise tout court... quelque chose... n'importe quoi...
La langue râpeuse du Husky sur ses doigts lui donne étrangement l'allant dont elle manquait.

- J'aime beaucoup trop ça.... lâche-t-elle. Expression affolée. Quand tu me touches, j'veux dire. Elle déglutit et baisse les yeux, offrant une frange de cils longs et fournis au regard de Marcus. Je ne sais pas si c'est normal...

Elle a vraiment l’air pas bien, comme si elle allait pleurer à nouveau et la culpabilité s’invite en lui. Il essaie de « pêcher » la moindre de ses expressions pour essayer de mieux la comprendre. Pourquoi fronce-t-elle les sourcils si elle n’est pas fâchée ? Elle a pourtant l’air…frustrée ?

~- Je peux …faire quelque chose ? propose-t-il en désespoir de cause.
- J'aime beaucoup trop ça...
Cette fois, elle semble complètement alarmée, ce qui ne fait que l’inquiéter et le rendre plus perplexe encore.
~- Quoi ?
- Quand tu me touches, j'veux dire.
L’information a du mal à faire son chemin dans son esprit et c’est le rire moqueur de Corbeau qui le sort de sa transe.
« Stupide, stupide ! Si stupide ! »
« Tais-toi Corbeau. Va voler ailleurs pour voir si j’y suis. »
« Certainement pas ! Beaucoup trop amusant ! »

L’explosion de sa stupeur est très intérieure et se matérialise dans l’échauffement soudain de ses joues qui ne fait que ressortir ses taches de rousseur. Pourtant il ne détourne pas les yeux, même quand elle baisse les siens. De son index, il vient délicatement relever son menton. Il ne comprend évidemment pas tout ce qui se joue entre elle et lui. Mais ça lui semble naturel, agréable…ça lui suffit. Ça lui suffit amplement.

- Je ne sais pas si c'est normal...
Il secoue la tête, un sourire complice aux lèvres.
~- On s’en fiche, non ? On a déjà dit qu’on en avait rien à faire de la normalité.
Sa voix se fait de plus en plus rocailleuse et il avale le reliquat de pastille.
~- Tu veux… que je recommence ?

Doucement il souffle dans ses mains en coupe autour de sa bouche pour en réchauffer les doigts puis les approche de son visage. Très lentement, il trace le contour de son visage, une petite moue tendre sur le sien, l’arrête de son nez, la courbe de ses sourcils marqués et expressifs, l’arc de ses lèvres.
- T’es si douce… s’émerveille-t-il.  
Il explore son visage comme si son handicap venait de se déplacer sur ses yeux et la puple de ses doigts mémorisent chaque sensation de sa peau.

~- On s’en fiche, non ?
- Tu.. Tu crois qu'on peut ? s'inquiète-t-elle. Et si c'était un des symptômes de sa dégénérescence à venir ?
~- On a déjà dit qu’on en avait rien à faire de la normalité.

L'argument est sensé et semble peser sur son affolement pour en étouffer le feu.

~- Tu veux… que je recommence ?

Salomée lève un regard ardent vers lui. Elle hésite encore à se laisser aller, à écouter ses envies. Elle ne l'a jamais fait. Elle n'a jamais eu ce privilège ce droit. Edgard l'a privée de tout contact humain, préservant la primeur pour lui. Néanmoins, jamais il ne l'a touchée comme Marcus la touche. Elle se sent...

... spéciale.

-... Oui... souffle-t-elle.

Marcus promène ses doigts sur son visage. C'est agréable, si agréable qu'elle ferme les yeux et tend le menton vers lui. Instinctivement, elle s'est rapprochée pour retrouver l'accroche de son sweat à deux mains.

- T’es si douce…

Le compliment la fait soupirer d'aise comme un chaton bienheureux qu'on gave d'attention.

- Je.... ne savais pas.... fait-elle vaporeuse. Alors qu'elle le sent sur le point d'arrêter, elle retient ses poignets à deux mains. Continue... s'il te plait....

Les paupières toujours closes, elle niche sa joue dans le creux de sa paume, recouvrant ses phalanges de ses doigts abîmés de guerrière. Elle remue délicatement la tête, se frottant à ce contact merveilleux. Elle se sent si bien, en cet instant, si détendue, dans une bulle de savon légère que rien ne pourrait percer. Ses longs cils soyeux s'ébrouent sur ses pupilles dilatées.

- Moi... Est-ce que moi je peux te toucher ?

Hésitante, elle effleure sa pommette et dévale son visage tout en longueur. Elle goûte les aspérités de son poil naissant, qui hérisse sa peau en reliefs minuscules et accidentés. Sa bouche de travers se dessine sous le passage délicat de ses doigts. Sa lippe est si charnue. Avec une curiosité avide, elle plonge dans les boucles brunes et épaisse du charmeur de bête.
Petit rire ravie, espiègle même.

- J'avais très envie de savoir quel effet ça fait....

- T’es si douce…
- Je.... ne savais pas...
- Tu l'es...vraiment beaucoup...

Lorsqu’il a fait le tour de ce qu’il pouvait toucher, un soupçon de bon sens lui dicte d’arrêter. Retrouvant au passage sa gêne, reflue pour se faire stopper immédiatement.

- Continue... s'il te plait...
Il ne se fait pas tellement prier et pose obligeamment sa paume contre sa joue duveteuse. Paupières closes, soupir de satisfaction, elle vient s’y frotter comme un chat et il caresse sa pommette du pouce, son autre main suivant délicatement la ligne de sa mâchoire et descend jusqu’à son cou.
Toute cette peau, tous ce contact, l’enivre complètement. On la déjà toucher. Il a déjà toucher. Jamais dans l’unique but de faire du bien. C’est pourquoi il n’a jamais saisi ce besoin permanent qu’on les autres de vouloir se toucher à tort et à travers.
Là, à cet instant, il comprend.
Avec Salomée en tout cas.
Il en oublie un peu toute raison et ses doigts cherche à se faufiler sous le tissu avant qu’il ne se reprenne dans une sorte de sursaut.

- Moi... Est-ce que moi je peux te toucher ?
Il hésite un moment, les yeux dans les siens qu’elle vient de rouvrir, puis hoche doucement la tête. Après un très léger mauvais de recul instinctif, il s’excuse et la laisse venir à lui. Il la dévore du regard pendant qu’elle s’exécute avec autant de délicatesse que lui et doit se contenir pour ne pas bouger, respirant à peine lorsqu’elle effleure ses lèvres. Chaque caresse déclenche une avalanche de sensations et de frissons dans tout son corps.
Puis ses doigts se perdent dans sa chevelure indisciplinée et elle rit.
Marcus aimerait croquer dans ce rire qui a l’air aussi doux et bon que la pastille pour sa gorge.

- Ca te va bien…de rire…
- J'avais très envie de savoir quel effet ça fait...
Il a un sourire en coin.
- J’avais la tête rasée à l’ICV, je savais même pas qu’ils étaient aussi…bouclés.
Ses phalanges coulissent sur la pointe de ses cheveux blonds retenus par un élastique.
- Les tiens accrochent la lumière…on dirait de l’or…

Il attrape le poignet de Salomée et attire le creux de sa main sur son visage à nouveau. A la place de s’y blottir, il tourne légèrement la tête et y dépose quelques baisers. D’abord légers puis de plus en plus appuyés, comme s’il y prenait goût. Il se concentre un instant sur l’effet de ses lèvres contre sa peau et son goût. C’est…unique.

Ses yeux retrouvent ensuite les siens et il ne sait exactement quel comportement adopté. Sans doute a-t-il épuisé toutes ses ressources de bravoure. Et puis il se sent arrivé à la lisière de ce dont il sait confusément être des barrières sociales. Pourtant il ne recule pas, priant pour qu’elle ait une idée de quoi faire à présent, quelle conduite adoptée.

- Ca te va bien…de rire…
- Tu trouves ? .... J'avais très envie de savoir quel effet ça fait...
- J’avais la tête rasée à l’ICV, je savais même pas qu’ils étaient aussi…bouclés.
- La discipline capillaire, c'était pas pour ta tignasse... glousse-t-elle. Elle a la vague impression d'être un peu ivre.
- Les tiens accrochent la lumière…on dirait de l’or…
- Ah bon ? étonnement sincère. La mère d'Edgard lui disait qu'elle n'avait qu'une touffe de paille en guise de cheveux : fins, rêches et cassant. Moi aussi on m'a rasée la tête, surtout petite. C'était plus simple que de perdre du temps à me peigner. C'est Edgard qui a décidé un jour que je les aurais long. Haussement d'épaules. Ca n'a toujours été que des poils sur la tête pour moi : ni beaux, ni .....laids.

La jeune femme se fait surprendre par les bécots d'oisillon au creux de sa main. Son palpitant rate une marche et dévale les étages jusqu'à son bas-ventre. Marcus lui picore la peau avec la bouche. C'est chaud, c'est doux, c'est moelleux et un peu humide aussi. Si bizarre. Si intime.

- Je.. J'ignorais que tu savais ... embrasser... profère-t-elle, le timbre voilé et l'expression un peu chose.

Embrasser.
Des baisers, chauds, mouillés, légers, inconséquents, tendre ou délictueux... Elle a observé Edgard en dispensé des milliers à d'autres. De son promontoire de poupée, conditionnée à écouter sans entendre et à voir sans comprendre, ce qu'elle éprouvait n'avait pas la moindre importance.

J'étais à Edgard.
"Si je ne te baise pas c'est parce que je te respecte, tu sais."

Des baisers ou des caresses, elle n'était pas destinée à en recevoir. Le sorcier n'avait pas eu besoin de marquer son territoire en possédant son corps. Il violait son esprit tous les jours. Il consommait leur mariage mentale depuis leur plus jeune âge. Elle ne représentait pas le moindre enjeu pour l'esprit de conquête du sorcier.

On bien était-ce simplement parce que je n'étais pas de la même espèce que lui : franchement qui songerait à culbuter son animal de compagnie ?

Son attention revient à Marcus qui la dévisage avec une telle intensité qu'elle s'imagine se liquéfier entre ses doigts. L'instant est suspendu à un fil arachnéen, prêt à rompre à tout instant. Le jeune homme semble attendre quelque chose de sa part, mais elle ignore quoi exactement. Elle ne sait pas quoi faire pour calmer son myocarde qui cogne anormalement fort et bien trop vite.

- Personne ne m'a jamais embrassée... laisse-t-elle flotter entre eux, en chuchotant presque.

L'éternité s'effiloche entre eux, entre leurs lèvres prêtes à entrer en collision.
Chien aboie bruyamment.
Le fil se casse, net.
L'instant s'effondre sur lui même, réduit à l'état de poussière.

Salomée s'est écartée vivement, les sens alarmés, reprenant son attitude détachée de femme soldat en exercice. Elle balaie leur alentour immédiat du regard, cherchant la cause des aboiements du husky. Qu'a-t-il pu voir qui l'agite ainsi ?

- Je.. J'ignorais que tu savais ... embrasser...
- Je sais pas vraiment…j’ai juste…vu faire.  

Inutile de chercher bien long pour en avoir des exemples. La société est remplie de gens qui s’embrassent à tout bout de champs…à croire qu’ils ne peuvent pas s’en passer. Il pensait pourtant que ça impliquait deux bouches ... Mais après tout qu’en sait-il… ? Rien absolument rien. Ca restera donc un mystère.

- Personne ne m'a jamais embrassée...
- Moi non plus…

Ni enlacé, ni cajolé, ni touché. Rien. Le néant absolu de l'affection.
Salomée semble se rapprocher un peu plus, ou bien est-ce lui ? Difficile à dire. Son corps est, de façon certaine, en auto-pilote, son cerveau ayant définitivement décidé que tout cela dépassait largement son domaine de compétence.
Tout ce qu’il sait, c’est qu’il ne voit plus qu’elle et que ça lui va bien.

« Ecureuil ! » aboie soudain chien en coursant le rongeur qui le nargue avec des « Tu m’auras pas grosse bête ! »
Marcus redresse la tête, sursaute comme s’il venait de se réveiller.
« Stupide chien ! Parade nuptiale fichue maintenant… »
Le sorcier recule carrément de quelques pas et se gratte la tête, l’esprit en plein confusion. Qu’est-ce qu’il vient de faire ? Qu’est-ce qu’il a failli faire ? Il n’en pas la moindre idée.
C’était agréable…et étrange…mais agréable…

En voyant l’attitude défensive de Salomée, il déclare dans un soupir.
~- Un écureuil.

Chien fait le planton au pied de l’arbre où s’est réfugié, l’animal et continue à lui aboyer copieusement dessus.
« Chien, viens, ça sert à rien. »
« Veux l’avoir ! »
Trouvant là une parfaite excuse pour s’éloigner, Marcus se porte à la hauteur du canidé et lève la tête vers les hauteurs.
« Tu l’auras pas. Tu ne sais pas monter aux arbres ou voler. »
La négociation patiente mais âpre dure quelques minutes avant que Chien ne consente à abandonner l’idée de mettre les crocs sur l’animal rieur.

~- Désolé. Question de pulsion étrange. Pour Chien je veux dire… il…euh… peut pas s’en empêcher et il était persuadé d’arriver à attraper l’Ecureuil qui le narguait d’en haut.

Il rougit violemment en s’adressant à nouveau à Salomée, bien loin du jeune homme d’il y a quelques minutes. Le regard baissé, il montre du menton le chemin à suivre pour le reste de la ronde, les mains ancrés ferment autour des lanières de son sac à doc. Il se remet en marche en silence, les yeux braqués sur le sol devant lui. Incapable de savoir comment gérer la situation, il préfère donc faire comme si rien ne s’était passé. Enfin il essaie... 

~- Un écureuil.
- Oh...

Salomée se détend un peu, relâchant la tension brusque qui a saisi ses muscles. Marcus s'éloigne sans un mot pour retrouver son compagnon canidé et la jeune femme reste plantée là, à l'observer en se tenant un bras. Une étrange sensation de froid s'insinue en elle et la glace jusqu'au os. Frisson.

J'ai failli embrasser Marcus.

Le teint de la jeune femme se pare de cramoisi. L'idée qui avait cheminé comme un fantasme saugrenu, interdit, a failli prendre corps dans la réalité tangible. Elle n'arrive pas à savoir si cela est une bonne ou une mauvaise chose. La seule certitude, c'est qu'elle se sentait terriblement bien blottie contre le Charmeur de bête. La chaleur de son corps, son odeur particulière, ses boucles folles entre ses doigts, tout cela lui manque déjà.

Tu le connais à peine.
Et pourtant, tout chez lui me semble familier.

~- Désolé. Question de pulsion étrange.
-...Ok.
~- Pour Chien je veux dire…
- Evidemment.
~- Il…euh… peut pas s’en empêcher et il était persuadé d’arriver à attraper l’Ecureuil qui le narguait d’en haut.
- Vilain écureuil.

Marcus a les joues aussi tartinées de ketchup que les siennes. Salomée pince les lèvres. Son compagnon regrette-t-il de lui avoir prodigué un peu d'affection ? Il n'en avait pas l'air sur le moment. Le doute s'invite sournoisement sous son crâne alors qu'ils reprennent leur inspection. Ils marchent côte à côte mais avec un bon mètre de distance entre eux. Cet écart est presque douloureux pour la dragonne sans qu'elle ne sache réellement pourquoi. D'ordinaire, le silence est son allié. Elle le préfère à toute compagnie ou à toute conversation. Néanmoins, ce silence là est comme une chappe de plomb qui alourdit ses épaules, son humeur et son cœur. Parfois, elle regarde Marcus à la dérobée, sondant son expression fermée.

Ils poursuivent la ronde, échangeant peu de mots, constatant toujours  plus l'avancée anormale de la lisière. Lorsqu'ils reviennent enfin à leur point de départ, qu'ils s'avèrent inévitable qu'ils doivent se quitter, Salomée reste plantée devant lui, indécise, peut-être un peu malheureuse aussi.

- Tu regrettes... ? demande-t-elle finalement. Tout à l'heure...

Parce que moi, oui.
J'aurais dû avoir le courage de t'embrasser.

Marcus chemine et rumine.
Son imagination, guère fertile, tente toutefois de deviner ce qui aurait pu se passe si Chien ne les avait pas brusquement ramenés à la réalité. Il regrette sincèrement de ne pas en être capable. A défaut, il se remémore la sensation de son corps contre le sien, le satiné de sa peau sous ses doigts peu habitué à tant de douceur vibrante de vie ou encore ses doigts à elle sur son visage, dans ses cheveux.

Ses joues conservent donc une belle teinte cramoisie pendant de longues minutes si bien qu’il n’ose pas tout de suite relever la tête. Son regard glisse parfois vers Salomée, mais il ne le laisse jamais assez longtemps pour noter l’expression de son visage. Est-elle fâchée de ce rapprochement ? Heureuse d’avoir été interrompu ? Frustrée comme lui de ne pas avoir pu poursuivre ce moment où ni la gêne ni le manque d’expérience ne les arrêtaient ?
Impossible de le savoir.
Sauf s’il le demande.
Hors, il ne s’en sent pas le courage.

Sale peureux…

Oui c’est exactement ce qu’il est. Un animal craintif qui a peur de se fait rejeter ou repousser.
Inconscient d’avoir interrompu quelque chose, Chien gambade à leurs côtés, redressant parfois le cou, les oreilles pivotantes comme s’il captait un bruit.
Le reste des vérifications se fait rapidement et avec toujours le même constat. La forêt avance. Ça n’est pas juste un trompe-l’œil. Il traine un peu les pieds pour revenir vers le ranch et donc le début de leur patrouille. Salomée a certainement d’autre chose à faire que de rester avec lui à surveiller des arbres.

Il se replace en face d’elle, assez loin des Humains pour ne pas être vus mais assez près pour entendre le murmure de leurs activités.
Marcus se gratte la tignasse et force à nouveau un peu sur sa voix. Regarder la bouche de la jeune femme est maintenant devenue une habitude, pourtant il ne l’a encore jamais vu comme une sorte de source de tentation.
~- Merci…de m’avoir accompagné…je suppose que tu as des tas de choses à faire…
- Tu regrettes... ? Tout à l'heure...

Il faut donc croire que Salomée a bien plus de courage que lui. A vrai dire il n’en doute pas vraiment. Il remonte ses yeux dans les sien, la regardant presque sans ciller avant de secouer lentement la tête de droite à gauche. Mais comme il a l’impression que ce moment revêt une certaine importance, il ajoute verbalement.

~- Non. Je pourrais pas regretter le premier contact agréable que j’ai eu avec un Humain.

En quelques minutes elle lui a prodigué plus d’affection qu’il n’en a eu de toute sa vie. Et puis il se souvient de ses paroles.

Elle aime quand je la touche.

C’est fort de ce rappel, que son courage retrouve un peu d’allant. Marcus approche à nouveau sa main de son visage et caresse sa joue de dos de ses phalanges avec un petit sourire avant de l’abaisser.
~- J’aurais voulu que ça s’arrête pas tout de suite, avoue-t-il dans un murmure, comme si c’était un secret inavouable. Il vient à nouveau vriller son regard dans le sien. Tu promets de prendre soin de toi ?

~- Non. Je pourrais pas regretter le premier contact agréable que j’ai eu avec un Humain.

L'air comprimé dans la poitrine de Salomée s'échappe soudain, la rendant plus légère. Tout ce poids qui la lestait s'est miraculeusement envolé. Un battement de cils, un sourire à peine dissimulé.

- Tant mieux. J'ai eu peur de.. de t'avoir imposé quelque chose dont tu n'avais pas vraiment envie, énonce-t-elle maladroitement en balayant le sol du regard.

Elle remarque les pieds de Marcus dans son champ de vision un peu tard. Lorsqu'elle lève le menton, il lui caresse déjà la joue.
Frisson délicieux.
Terriblement addictif.
Bien trop court.

~- J’aurais voulu que ça s’arrête pas tout de suite... Tu promets de prendre soin de toi ?
- Seulement si tu le promets aussi... déclare-t-elle, en le contemplant avec la même intensité.

Un long silence s'ensuit.
Salomée se mordille la lèvre.

- Marcus... Tu veux bien fermer les yeux ? Fais-moi confiance...S'il te plait.... Ne les ouvre sous aucun prétexte, d'accord ?

La jeune femme attend patiemment qu'il s'exécute. Une fois fait, elle prend une longue inspiration. Un sentiment paradoxale de honte et d'excitation s'empare d'elle. Néanmoins, elle ne recule pas. Ses mains enrobent délicatement le visage d'elfe du sorcier pour mieux le tenir en coupe. Elle caresse ses pommettes des pouces et déglutit. Elle fixe sa lippe charnue et s'en approche lentement, fébrilement. Elle veut le faire. Elle peut le faire. Ses lèvres effleurent les siennes, apprivoisant ce corps étranger avec une infinie douceur, puis s'y posent, résolument. Pression de chaires pulpeuses et mouillées. Découverte d'une saveur inédite et différente.

Le gout de l'autre.

La jeune femme reflue et s'écarte. Lorsque Marcus ouvre les yeux, Salomée dévale déjà la pente d'herbes sauvages sans se retourner, lui offrant le spectacle de son dos. Sa nuque et ses oreilles écrevisses contrastent avec le vert de son uniforme. La jeune femme tripote sa bouche du bout des doigts, le sourire gorgé d'une joie espiègle, le palpitant écumant comme un chien fou.

J'ai embrassé Marcus...

Elle a envie de rire et de pleurer en même temps. C'est bizarre. Un bizarre qui lui plait bien.

~- J’aurais voulu que ça s’arrête pas tout de suite... Tu promets de prendre soin de toi ?
- Seulement si tu le promets aussi...

Marcus hoche solennellement la tête et chien aboie comme pour approuver. Ils restent un instant l’un devant l’autre sans rien se dire.

- Marcus... Tu veux bien fermer les yeux ? il fronce un peu les sourcils, la mine inquisitrice. Fais-moi confiance...S'il te plait...
~ Ok.
- Ne les ouvre sous aucun prétexte, d'accord ?

Nouveau hochement de tête et il obéit tout en se demandant ce qu’elle compte faire exactement. Partir en courant pour ne pas avoir à se dire au revoir ? C’est une habitude humaine qu’il n’a encore jamais observé. Mais, étonnement, il fait une confiance aveugle en Salomée. S’être sauvé mutuellement la vie dès leur première rencontre joue certainement.

Il sent soudain ses mains prendre son visage en coupe et il a un léger mouvement de recul à nouveau qu’il contrôle.
Confiance…faire confiance… se répète-t-il en essayant de se détendre. Ses pouces flattent ses pommettes et il esquisse un sourire. Elle voulait simplement lui rendre la pareille et préfère ne pas avoir à affronter son regard. Il peut comprendre.
Et puis quelque chose d’un peu humide et extrêmement doux vient frôler ses lèvres. La sensation est si étrange qu’il manque d’ouvrir les yeux et les plisse un peu en les refermant très vite à nouveau.
Est-ce que c’était bien … ? La pression se fait plus forte contre ses lèvres et…

Son cerveau court-circuite complètement.
Impossibilité de penser.
Bras ballants le long de son corps.
Seuls des mots s’enchainent sous son crâne.

Doux – Chaud – Etranger – Tendre – Excitant – Si, si agréable – Salomée…

…et son odeur et maintenant son goût qu’il perçoit à peine lorsqu’il passe un coup de langue sur ses lèvres lorsqu’elle reflue.
Il reste un instant immobile puis se décide à ouvrir les yeux. Mais elle est déjà partie et il n’aperçoit que son dos et sa queue de cheval qui bat la mesure. Corbeau vient se percher sur son épaule alors qu’il se touche les lèvres.
« Compagnon sourit stupidement. »
«  Ah ? » fait Marcus effectivement tout sourire.
Finalement l’Apocalypse n’a pas que du mauvais, elle lui a apporter Salomée et ce premier baiser.

******

Marcus arpente plus profondément la forêt et découvrir des traces qui lui sont totalement inconnues, des signes de passage de bêtes qu’il n’arrive pas à identifier. Comme il le soupçonnait, la présence de cette espèce de géant de pierre n’est pas la seule « anomalies » qui peuplent à présent la forêt.
Il n’arrive toujours pas à décider s’il y est toujours en sécurité ou pas. Jusqu’à présent, il n’a plus fait de mauvaise rencontre et n’a eu aucun problème.
Chien dresse soudain les oreilles et le museau.

« Humaine qui sent bon ! »

Marcus fronce les sourcils et regarde aux alentours. Que ferait Salomée si loin du ranch ?

« Où ça ? Guide moi »
Chien obéit diligemment, tout heureux de retrouver la jeune femme. Corbeau a pris une légère avance et lui fait son rapport.
« Humaine droit devant. Poursuivie par un autre homme qui crie. »

Méfiant mais inquiet, Marcus accélère la cadence et se tapit dans les hautes herbes pour prendre la pleine mesure de la situation. Salomée est non loin, effectivement, mais semble plus agacée qu’effrayé. Il lui suffit de voir la couleur de l’uniforme de l’homme qui la poursuivit pour comprendre. Elle n’est pas « en danger », elle cherche simplement à se cacher de l’un de ses hommes. Après avoir ordonner à Corbeau et Chien de rester silencieux, ils les contournent tous les trois et courent silencieusement jusqu’à apparaitre sur le chemin de la jeune femme. Marcus plaque doucement une main contre la bouche de Salomée – qu’il a embrassé, il a beau y avoir pensé à peu près tout le temps, il a encore du mal à se dire qu’il n’a pas rêvé – puis, tout sourire, il pose l’index contre ses propres lèvres et lui indique, toujours mutique, une direction du menton avant de lui tendre la main.
Les nuages au-dessus d’eux laissent éclater la pluie qu’ils semblent avoir retenus toute la matinée et c’est donc sous la pluie qu’ils courent jusqu’au nid en laissant l’homme de Salomée derrière eux, sans doute en train de s’époumonner pour appeler sa supérieure.

And still somehow
You may find your heart here
Right here

Footing.
Du moins c'est ce qu'elle prétend, oreillettes dans les tympans.
Elle court, sans se retourner, feignant de ne pas entendre le sergent Wilson la héler. Qu'il s'égosille ! Salomée n'a aucune intention de se laisser priver de sa pause salutaire loin de toute humanité. Pourquoi faut-il toujours que ses responsabilités la rattrapent ? Elle espère secrètement que Marcus apparaitra sur son chemin pour la kidnapper. Faire l'école buissonnière pour la première fois de sa vie.

Une petite folie au gout d'interdit.

Comme si la forêt pouvait exaucer ses souhait les plus profonds, elle est soudain happée dans les ténèbres d'un buisson par une silhouette familière. Elle reconnait immédiatement l'odeur de Marcus et le toucher particulier de ses doigts sur sa bouche. Elle lui lance un regard surpris, se demandant, une poignée de secondes, si tout cela n'est pas le fruit de son imagination.
Elle a beaucoup pensé au charmeur de bêtes. Elle en a même rêvé, parfois de manière qu'on pourrait qualifier d'inappropriée, découvrant des terrains inexplorés de sa propre sensualité.
Lorsque le sorcier retire sa main pour prendre la sienne, Salomée lui adresse un sourire espiègle de petite fille. Les deux gamins bien trop grands courent à travers bois, abandonnant le pauvre Wilson s'époumonant sur le chemin, se demandant où diable a pu passer sa supérieure.
La pluie éclabousse les arbres gaiement couvrant leurs éclats de rire. C'est trempés jusqu'aux os et hilares, que les deux sorciers parviennent au Nid.

- Merci Ô mon preux chevalier! Vous m'avez sauvée d'une nouvelle supervision de corvées !

La jeune femme s'esclaffe à nouveau. Sa main refuse de quitter celle de Marcus.

S’il en croit le sourit que Salomée affiche, elle semble plutôt heureuse de ce « kidnapping » en règle. A vrai dire il n’a pas tellement réfléchi, voulant juste la revoir et passer du temps avec elle.
Il se surprend à rire pendant leur course folle, et voit qu’elle aussi a la face hilare. Ils glissent, dérapent sur le tapis de feuille mais se rattrapent toujours in extremis l’un à l’autre.

Ils arrivent finalement au Nid et s’abritent sous son minuscule perron. Sourires jusqu’aux oreilles, ils se déchaussent pour ne pas laisser de traces de boue à l’intérieur. Il la fixe avec intensité alors que la façon dont ils se sont quittés lui revient en tête.

J’ai envie de recommencer, pense-t-il au moment même où elle se met à parler. Il met donc quelques secondes à se concentrer pour lire cette bouche qu’il sait maintenant délicieuse.

- Merci Ô mon preux chevalier ! Vous m'avez sauvée d'une nouvelle supervision de corvées !
Il rit à nouveau et avec un certain sens de l’humour enfantin qu’il ne savait même pas posséder, il effectue une courbette ampoulée.
- A votre service madame ! Vous sembliez en détresse.

Ca l’a fait rire et il s’en trouve tout content. C’est au moment où il voulait signer qu’il se rend compte qu’il ne lui a pas rendu sa main. Son pouce fait inconsciemment des vas et vient sur sa peau.
- Quel genre de corvées ?
Il est franchement curieux de savoir ce qu’implique son rôle au ranch. Il la guide vers l’intérieur de la maison où le poêle allumé dispense une chaleur bienvenue. Bien obligé, il finit par lâcher sa main, non sans en baiser le dos comme le chevalier qu’il est censé être.

« Ne te secoue pas ! » ordonne-t-il à Chien qui les a suivi à l’intérieur et qui semble en mourir d’envie.
Un petit détour par sa minuscule salle de bain et il revient avec des serviettes propres et sèches. Il lui en tend une avant de retirer manteau et sweat-shirt. Même son tee-shirt est trempé et lui colle à la peau. Il dépose le tout sur une chaise devant le poêle puis s’occupe de son compagnon canidé avant lui. Il déroule une énorme serviette et se met à genoux par terre.

« Allez viens là gros Chien ! »
Sans se faire prier, l’animal se laisse enrober et sécher frénétiquement par les mouvements vifs du sorcier.
« Voilà »
« Secouer ! »
« No… »
Trop tard, l’animal s’ébroue et fait voleter le reste des gouttes un peu partout. Marcus éclate de rire avant de remarquer enfin Corbeau à la fenêtre qui cogne son bec contre la vitre. Il se précipite pour l’ouvrir et l’oiseau vient immédiatement lui picorer le haut du crâne dans ses cheveux humides et encore plus bouclés.
« Oublié ! Oublié ! »
« Pardon …arrête Corbeau ! »

Il se tourne vers Salomée, le sourire toujours aux lèvres et note que ses vêtements la moulent…un peu trop. Il rougit aussitôt mais a du mal à détourner le regard. Il finit par lever les yeux vers son visage uniquement, une petite lueur au fond de ses iris bleus qu’elle n’a jamais dû voir – et lui non plus d’ailleurs. Sans un mot il va chercher deux t-shirts et deux pantalons. Il dépose l’un et l’autre sur le lit à côté d’elle.
~- Tu peux aller dans la salle de bain si tu veux…euh…passer des vêtements secs….
Une goutte orpheline orne encore le haut de la pommette de la jeune femme et il l’essuie du bout pouce d’un geste qui lui parait totalement naturel.  

- A votre service madame ! Vous sembliez en détresse.

Marcus se fend d'un baise-main galant qui la fait mourir de rire. Elle répond d'une révérence princière en prenant soins de bien tenir le pan de sa robe imaginaire.

Des gosses.
C'est tout ce qu'on est.

- Quel genre de corvées ? interroge les doigts câlins sur sa peau humide.
Salomée pince et mordille sa lèvre inférieure sans y penser.
- Superviser des listes de matériels récoltés, de provisions, recenser les réfugiés qui affluent, trancher sur certaines décisions et apaiser des conflits internes. Des broutilles super pénibles. conclue-t-elle avec de gros yeux.

Elle attrape la serviette éponge avec gratitude et s'effeuille. Son hoodie et son jogging sont des serpillères. Même son t-shirt blanc est trempé et révèle sa peau en transparence. Elle le retire également ne laissant que ses sous-vêtements noirs et fonctionnels sur sa silhouette fine et ferme. Couronnée de sa serviette sur la tête, elle étend ses frusques mouillées sur la chaise devant le poêle.
Les éclats de rire lui font pivoter la tête. Elle a tout loisir d'observer Chien éclabousser son compagnon dont le visage de lutin dégingandé s'anime de fossettes et de lumière. Elle lui découvre une musculature dessinée et dont elle n'aurait pas soupçonnée la présence sous ses sweaters informes.

Il est si beau,
à sa manière tordue.

Elle s'émerveille de cette simple constatation. Les coups de bec furieux de Corbeau la sortent brutalement de sa rêverie. Elle s'empresse de chasser le volatile du crâne de Marcus.

- Mais tu vas arrêter, vilain volatile! Elle se hisse sur la pointe des pieds pour inspecter son scalp. C'est bon, il ne t'a pas blessé...

Son regard tombe sur les prunelles du sorcier qui la fixent avec une intensité dévorante. Hypnotisée, elle retire lentement ses doigts de ses boucles brunes. Elle prend conscience qu'elle est à moitié nue, presque collée à lui.
Tétanie. Sa carnation prend quelques rougeurs.
Visiblement la chose n'a pas échappée à son compagnon qui s'escamote en silence vers la minuscule salle de bain. Il en revient avec des vêtements secs qu'il pose sur le lit.

~- Tu peux aller dans la salle de bain si tu veux…euh…passer des vêtements secs….

Il lui caresse délicatement la joue, alors qu'elle ne cesse de se noyer dans son regard. Une tension étrange, délestée de toute infantilité s'est installée entre eux. Sans prononcer le moindre mot, Salomée se retourne doucement, lui offrant la vision de la courbe de ses reins. Sans une réelle conscience de ses gestes, elle défait l'accroche de son soutien-gorge et s'en déleste avec une lenteur exacerbée par la présence de Marcus. Elle fait de même avec sa culotte, puis enfile les habits de rechange offerts qui flotte sur sa svelte silhouette.

Elle lui fait face de nouveau.

- Tu devrais te changer, tu vas attraper froid....

- Mais tu vas arrêter, vilain volatile !
Corbeau croasse et part bouder sur son perchoir en leur tournant le dos.
~- Il est fâché…En même temps je l’ai oublié sous la pluie…

Elle se hisse sur la pointe des pieds et farfouille dans ses boucles, lui abaissant la tête au passage. Ce qui fait qu’il a une vue plongeante sur…sur l’espèce de truc qui cache à peine le reste de son anatomie. Son regard chute jusque ses jambes pâles qui lui paraissent interminables sous cet angle avant de remonter. Fasciné, il fixe ses deux globes blancs qui ressortent encore plus en contraste avec la noirceur de la dentelle. Ca a l’air moelleux et doux au possible. S’il osait…

- C'est bon, il ne t'a pas blessé...

Ou alors si, Corbeau vient de lui ouvrir le crâne et de manger une partie de son cerveau…il ne voit que cette explication pour le blanc soudain qui envahit son pauvre esprit. La peau de Salomée rougit soudain et il relève la tête, inconscient de l’intensité de son regard caressant. Elle retire ses mains de ses cheveux et il a l’envie subite de lui attraper le poignet pour qu’elle continue à le toucher. N’importe où. Où elle voudra.
Mais la truffe humide de Chien contre sa paume le ramène à la réalité et il se dit qu’elle a sans doute froid elle aussi. C’est pourquoi il va leur chercher de vêtements secs à tous les deux.

~- Tu peux aller dans la salle de bain si tu veux…euh…passer des vêtements secs….

Sauf qu’à la place de se rendre dans la minuscule pièce pour se changer en tout intimité, elle se retourne simplement.
Il a déjà trouvé tout un tas de choses ou de créatures belles, parfois à leur façon peu conventionnelle. Jamais encore il n’avait trouvé quelqu’un d’attirant.
Salomée l’attire. D’une façon qu’il ne comprend pas vraiment, qu’il ne conscientise qu’à peine. C’est son corps qui prend le relais, quand sa pauvre cervelle ne suit plus. Il voudrait la toucher, explorer d’autres terrains que son visage. Ce dos nu par exemple, cette affolante cambrure, plus bas, et ce que révèle sa culotte, encore plus bas. Jamais il n’a eu l’occasion de contempler une anatomie féminine de ses propres yeux. Elle est renversante pour ses sens. Il voudrait refermer ses doigts sur toute cette chair pâle, en tâter la douceur. Vaguement il se dit que c’est forcément mal et inconvenant, à la limite d’une pulsion animale. C’est déroutant au possible. Lentement sa main se lève et ses doigts frôlent le rideau de ses cheveux humide dans son dos, le besoin pressant de vérifier qu’elle n’est pas qu’un mirage fabriqué par son imagination.
Un afflux sanguin fait pomper son myocarde plus vite et se concentre soudain entre ses jambes.

Il m’arrive quoi ?

Bien trop vite, elle s’habille et se retourne. Elle parle, il voit bien ses lèvres bouger mais il est incapable de savoir ce qu’elle dit exactement, pas assez concentré pour lire cette bouche qu’il observe pourtant avec la pulsion soudain de l’écraser contre la sienne.

Mais qu’est-ce qui m’arrive … ??

C’est un peu la panique à tous les étages. Il faut qu’il reprenne le dessus.
- Quoi ?
Il en oublie même de signer et elle répète obligeamment.
- Tu devrais te changer, tu vas attraper froid...
Il hoche la tête, incapable de détourner son regard d’elle et finit toutefois par retirer son Tee-shirt machinalement, sans plus trop savoir quoi faire de son corps.
Il devrait avoir froid mais il se sent au contraire incroyablement brûlant. Il est peut-être fiévreux lui aussi.
Remettre un tee-shirt, ordonne son cerveau qui surnage dans la testostérone.
Il remet donc un vêtement sec et tente de retrouver le fil de ses pensées, de retrouver des pensées autres que de toucher le corps nu de Salomée.
~- Désolé…j’ai pas tellement réfléchi quand je t’ai amené ici…va falloir attendre que la pluie s’arrête.  

Si Salomée désirait découvrir les effets de sa propre sensualité sur Marcus, l'expérience est pour le moins réussie. Néanmoins, c'est un acte qu'elle a conduit sans réellement le conscientiser. Le trouble visible chez son hôte l'inquiète et la contente paradoxalement. Elle ignore tout du phénomène de séduction. On l'a conditionnée à ne se percevoir que comme un être quelconque, passe-partout et oubliable. La jeune femme découvre au travers du regard de son compagnon qu'elle peut plaire au point de subjuguer.

Sans la moindre manipulation magique...
Tu vois ?

Le charmeur de Bêtes la dévore des yeux si bien que sa peau grêle d'une excitation incongrue. L'expectative d'être caressée. Sa poitrine menue, nue sous le tissu, darde pour indiquer sa présence à son insu. Touche moi ! s'entend-elle penser. Touche moi, Marcus ! Mais sa bouche traitresse prononce d'autres mots. Des phrases sensées, raisonnables,.. des mensonges.

- Tu devrais te changer, tu vas attraper froid...

Touche-moi...

- Quoi ?

Fais courir tes mains sur moi !

- Tu ...devrais te changer, tu vas attraper froid... répète-t-elle dans un souffle un peu rauque.

Touche-moi comme tu le fais, quand je pense à toi...

Sa respiration s'accélère lorsque le jeune homme retire son t-shirt. Salomée ne peut s'empêcher de laisser couleur son regard sur son torse dévoilé, son derme mouchetée, les dénivelés de sa musculature sèche, les reliefs de poil sur son pectoral, semblable à celui qui court sur ses bras. Le palpitant de la sorcière s'affole comme son ventre. Des étincelles éclatent en bouquet le long de sa colonne vertébrale, jusqu'à ses reins. La retenue se dispute avec son envie d'inspecter de ses propres mains tous les secrets de cette anatomie masculine dont on l'a préservée.
Marcus revêt un T-shirt sec avant qu'elle ne parvienne à se décider.

~- Désolé…j’ai pas tellement réfléchi quand je t’ai amené ici…va falloir attendre que la pluie s’arrête.
- C'est parfait. J'ai une bonne excuse pour ne pas y retourner... Tu as enlevé le lieutenant -colonel des Dragons d'Emeraude, que comptes-tu faire pour répondre de tes crimes... ? Demande-t-elle avec un petit sourire amusé.

Ses doigts s'invitent sur le bas du t-shirt de Marcus et le triture machinalement. Elle lui lance une oeillade par dessous, dangereuse comme une invitation.

~- Désolé…j’ai pas tellement réfléchi quand je t’ai amené ici…va falloir attendre que la pluie s’arrête.
- C'est parfait. J'ai une bonne excuse pour ne pas y retourner...
Marcus émet un faible rire, toujours chamboulé par ce qu’il vient de se passer entre eux, sans qu’il n’arrive à y mettre des mots. Plus de peau nue et inconnue à l’œuvre et pourtant, la tension entre eux ne faiblit pas. A croire que c’est…magique.
~- Ravi de te servir d’excuse…le temps risque de te paraitre long…y’a pas grand-chose à faire ici.
- Tu as enlevé le lieutenant -colonel des Dragons d'Emeraude, que comptes-tu faire pour répondre de tes crimes... ?
~- Je sais pas… souffle-t-il à son tour. J’ai pas l’habitude de suivre les lois des Humains de toute façon…et puis pour être puni, il faudrait déjà qu’on m’attrape.

Elle joue avec le bas de son tee-shirt à nouveau tout près de lui et il observe le manège de ses doigts sur le tissu comme si c’était la chose la plus envoutante au monde.

~- A moins que ça soit toi qui t’en charge. Je croyais que ça te posait pas de problème…c’est une sorte de piège ?

Elle redresse la tête et lui lance un coup d’œil qui enflamme à nouveau ses joues. Le cerveau aux abonnés absents, il scrute son visage comme si il allait lui donner le mode d’emploi de ce qui se passe entre elle et lui, de la conduite à adopter, de ce qui est mal ou acceptable.

Si je l’embrasse comme la dernière fois, là, maintenant, est-ce qu’elle va me repousser ?

Pour savoir, il n’y a pas un milliard de moyen et comme ses mots semblent définitivement bloqués dans le creux de sa gorge, il agit.
D’abord, ses mains viennent se refermer délicatement sur ses bras – il n’ose pas les poser ailleurs. Puis doucement…tout doucement, son visage s’incline vers le sien, les yeux grands ouverts pour ne pas manquer le moindre geste de recul, dégoût ou autre.
Il n’oublie pas qu’elle est partie précipitamment la première fois juste après l’avoir embrassé.

Finalement sa bouche vient frôler la sienne avec la délicatesse d’une aile de papillon.
Une fois, deux fois avant qu’il ne presse plus fermement ses lèvres contre les siennes.
Alors seulement, il ferme les yeux.

~- Je sais pas… J’ai pas l’habitude de suivre les lois des Humains de toute façon…et puis pour être puni, il faudrait déjà qu’on m’attrape....A moins que ça soit toi qui t’en charge.

Salomée s'empare d'un autre pan de t-shirt avec sa main libre.

- Attrapé! lance-t-elle avec un sourire guilleret
~- Je croyais que ça te posait pas de problème
- La loi, c'est loi, messire Marcus des Bois.... susurre-t-elle
~-…C’est une sorte de piège ?
- Il se pourrait... J'ai peut-être l'air d'une princesse mais je suis avant tout une dragonne.

L'humour est une forme de dérivatif à l'angoisse qui lui tord les boyaux, à l'excitation qui trépigne dans ses reins, à ce trop plein d'émotions et de sensations ingérables. Marcus et Salomée se dévisagent longuement. Leurs lèvres se rapprochent dangereusement. La collision parait inévitable. Bien qu'inquiète, la jeune femme affronte bravement le contact avec cette bouche. Elle confronte ses désirs comme le soldat qu'elle est. Si Marcus la repousse, elle fera comme sur le champ de bataille, elle se relèvera pour avancer, peu importe la blessure.

Il n'y aura pas de mort au combat.

Le sorcier tient fermement ses bras, moins pour la retenir que par peur lui même de perdre pieds. Leurs lèvres se frôlent, se cherchent, se trouvent maladroitement à plusieurs reprises. L'instinct prend le relais. Les doigts de la jeune femme grimpent le t-shirt jusqu'à son col comme deux alpinistes chevronnés. Ses mains encadrent les pommettes saillantes de caresses de plus en plus désordonnées une fois qu'elles investissent sa tignasse.  
Salomée découvre qu'elle peut être capable d'initiative en matière de volupté, malhabiles mais tendres. En témoigne cette langue, qui veut se faire pionnière de ces papilles inconnues. Leurs baisers brouillons ne s'achèvent que quand le souffle vient à manquer. La Dragonne reprend sa respiration, haletante et fébrile. Elle s'ébroue d'un petit rire émerveillé.

- Je n'aurais jamais pu deviner que c'était comme ça....Aussi... Elle manque de qualificatifs pour décrire ô combien cette deuxième expérience de rapprochement labiale a été satisfaisante .... Aussi...

Elle a très envie de réitérer et regrette de l'avoir fait se rhabiller.

Elle ne le repousse pas.
Et il en est tout étonné lui-même.

La sensation de ses mains sur son visage et dans ses cheveux lui arrache un soupir de satisfaction. La caresse de cette langue provoque un frisson terrible qui dévale sa colonne vertébrale et vient mourir au creux de ses reins. Il se rapproche inconsciemment d’elle. Sans savoir ce qu’il fait, il imite, rend, explore, tâtonne dans ce domaine jusqu’alors complètement inconnu.
C’est chaud, humide, doux, maladroit et terriblement addictif.
Ses paumes quittent les bras de Salomée pour encadrer ses hanches dont il découvre les courbes subtiles, promontoires idéals pour ses mains. Le tissu de son tee-shirt l’agace profondément, affamé qu’il est de contact vrai alors il passe en-dessous et plaque ses paumes contre le bas de son dos, écartant les doigts pour prendre possession de toute cette peau nue.

Finalement ils se détachent l’un de l’autre et Salomée rit, les yeux pétillants.
Il la trouve à cet instant plus belle qu’elle ne l’a jamais été à ses yeux.

- Je n'aurais jamais pu deviner que c'était comme ça....Aussi... Aussi...

Marcus reste silencieux, incapable de toute façon de trouver un juste qualificatif pour ce qu’il vient de vivre. Il caresse cette merveilleuse bouche du pouce, le regard encore brûlant.
- Encore…
Il se penche à nouveau mais cette fois, il ne fait qu’embrasser la commissure de ses lèvres avant de dévier sur sa joue, y déposant des baisers légers qui finissent leur course dans son cou.
- Sais pas ce que je fais…juste…goûter ta peau...
La pression de sa bouche se fait plus forte alors qu’il s’autorise à darder sa langue contre son derme pour en saisir toutes les saveurs et les subtilités.

Il recule soudain, effrayé par lui-même, par ses réactions incontrôlables, par la massive érection comprimée par son pantalon et par le maelstrom de ce qu’il ressent. Il retire doucement les mains du corps de Salomée, à regret, l’expression à la fois perdue et avide.

~- Désolé…je…

Mais les mots se dérobent à nouveau alors qu’il tente de reprendre le contrôle de toutes ces pulsions qui lui dictent des choses qu’il soupçonne inconvenantes.

- Encore…Sais pas ce que je fais…juste…goûter ta peau...

Oui...
Encore !

Son timbre rauque et son regard fiévreux est grisant. Ils poussent Salomée au delà de sa réserve habituelle. Elle pousse un gémissement aussi léger qu'un bruissement de plumes quand il bécote le tendre de son cou et en lèche le velouté. Il ne peut pas l'entendre, il peut simplement sentir la grêle qu'il produit, le puissant frisson de plaisir, la tension de son corps en soif de contact. La jeune femme a cessé de penser, retrouvant la bulle d'intimité qui se créer immanquablement autour d'eux. Elle s'y sent tellement bien qu'elle peut se permettre d'oublier.

Unseelie.
La Guerre.
Son uniforme.
Edgard.

Il n'y a juste que Marcus et ses caresses gauches mais sincères. Pourtant, il vient tout briser, reculant, effrayé et confus. La sorcière hébétée, tremble de cette chaleur qu'on lui arrache.

~- Désolé…je…

Il ne comprend pas.
Il a peur...

Elle a plus de clés que lui pour saisir tout ce qui ce joue dans cette petite cabane douillette. Elle a pris le temps de s'acclimater à ses premiers désirs. De les accepter, peut-être.
Mais lui ?

Avec beaucoup de douceur elle s'approche du charmeur de bête et pose un index sur sa bouche.

-Sshhhh......

Ses doigts effleurent sa lèvre inférieure et l'arc de son menton. Elle vient posément chercher ses mains et les ramène contre sa poitrine. Elle caresse et embrasse chacune de ces phalanges. Ces mains sont chaudes, abîmées, rassurantes. Elle vient frotter ses joues contre chaque paume, honorant tour à tour ces mains dont elle désire le contact de baisers soyeux.
La jeune femme plonge ses yeux limpides dans ceux de son compagnon.

- Tu as dis : "Tu réfléchis trop", "On s'en fiche des autres et de la normalité", "Fais comme il te plait"... ça me plait à moi que tu me touches, ça me plait que tu m'embrasses et me goutes... ça me plait et j'en ai envie.

Elle guide ses doigts sous son vêtement, non sans maladresse, pour qu'il se reconnecte avec sa peau, directement avec son corps.

- Si tu en as envie, que j'en ai envie, qu'est-ce qu'on s'en fiche que ce ne soit pas correcte ? demande-t-elle sans détour. Mais... Je ne veux pas te forcer.

Elle cesse de le tenir, une expression qui lui donne l'air d'être aussi fragile que la plus précieuse des porcelaines.

- Je ne te forcerais jamais à faire quoi que ce soit contre ton gré.

Je ne suis pas Edgard.

-Sshhhh......

Elle l’empêche de dire d’autres stupidités et il suit son ordre sans se faire prier. Elle prend ses mains dans les siennes et leur offre baisers et caresses. Marcus observe cette débauche d’affection tendre d’un regard rapace, ne voulant rien manquer de ces gestes, souhaitant les conserver dans un coin de sa mémoire où il pourra replonger lorsqu’il sera seul.

- Tu as dis : "Tu réfléchis trop", "On s'en fiche des autres et de la normalité", "Fais comme il te plait"... ça me plait à moi que tu me touches, ça me plait que tu m'embrasses et me goutes... ça me plait et j'en ai envie.

Il retrouve le contact de sa peau et le bout de ses doigts, animés par une vie propre, y trace déjà des symboles imaginaires. D’un côté, elle a évidemment raison et il est le premier à ne pas se préoccuper de ce que pense les autres. Sauf que là, il s’agit de Salomée… il ne se fiche pas de ce qu’elle pense de lui, ni de ce qu’elle ressent.
Il déglutit, restant malgré tout mutique.

- Si tu en as envie, que j'en ai envie, qu'est-ce qu'on s'en fiche que ce ne soit pas correcte ? Mais... Je ne veux pas te forcer.

Ces paroles ont le don d’apaiser un peu la panique qui le gagne. Au moins, il sait qu’il ne lui a rien fait qu’elle ne voulait pas et que ces pulsions étranges qui le guide quand il la touche ne lui ont pas paru…inappropriées.

- Je ne te forcerais jamais à faire quoi que ce soit contre ton gré.

Après quelques longues secondes d’essai, il arrive enfin à s’exprimer avec des mots.
- Tu…je me force pas. Pas du tout même… C’est juste que…je sais ni ce que je fais ni… vaincu par trop d’embarras, son front chute sur l’épaule de Salomée tandis qu’il la serre contre lui… j’ai…aucune connaissance…dans ce domaine, avoue-t-il dans un souffle. Absolument aucune…

Il finit par se redresser, les mains toujours glissées sous son tee-shirt et ose enfin affronter son regard. Après tout, pourquoi ne peut-il se laisser guider par ce que réclame son corps en tout spontanéité ? Elle lui a assuré qu’elle aimait ce qu’il lui faisait… Doucement, il relève un peu le bas de son tee-shirt puis lui adresse une œillade qui ressemble plus à une demande de permission. Lentement, il le lui retire et le garde en main, le souffle coupé. Rouge comme une tomate, il ne rate pourtant pas une miette du spectacle qu’elle lui offre, découvrant cette poitrine qui pointe vers l’avant. Le vêtement tombe à leurs pieds et toujours avec beaucoup de délicatesse, sa main enrobe son cou. Son pouce trace une ligne de son menton à sa gorge puis continue sa descente, entre ses seins sur son ventre et finit par contourner son nombril. Ses yeux coulent sur corps à la place de ses paumes qu’il n’ose pas encore utiliser pleinement.

Cette fois, lorsque son corps lui demande de venir reprendre ses lèvres, il ne lutte pas et il la sert contre lui avec une ferveur maladroite.