- A mon âge, les garçons savent comment faire avec une fille. Ils ont déjà eu toutes leurs premières fois. Moi, je sais dans ma tête, mais je sais pas ni avec mon corps ni avec mon coeur. Je suis démuni...
- Chaque relation est différente tu sais. Je ne sais pas plus que toi. Tout ce que je peux faire, c’est ça. Son pouce retrouve naturellement sa peau et la caresse lentement. Et essayer d’y croire. Mais il n'y a que toi pour décider qui tu es. Qui tu veux être.
- Je fais de mon mieux...
- Je sais. A ton rythme, d’accord ? Rien… rien ne presse. Et quand tu auras décidé ça, tu pourras voir pour le reste. Pour… nous… Elle laisse échapper un long soupir. Ça a été une longue journée... Je crois... qu'on a besoin de repos tous les deux.

Lexi ferme les yeux sous la caresse de ses lèvres sur les siennes, cherche à les retrouver lorsqu’elles s’échappent déjà. Cette fois, c’est un soupir de contentement qui lui échappe et elle câline sa tête contre la sienne. Ses bras se referment possessivement sur ses épaules et ses doigts glissent dans ses épais cheveux bruns, massant doucement son cuir chevelu.
Cette étreinte a le don d’apaiser tout son être. Envolés les angoisses, le chagrin, la colère…  
Il n’y a qu’eux.

- Tout ira bien… je te le promets… souffle-t-elle avec toute la conviction dont elle est capable tout en déposant un tendre baiser sur son front. Elle pourrait rester comme ça des heures, a envie de rester comme ça avec lui.
Mais tout plié comme il l’est, la position ne doit pas être des plus confortables.
- Tu es en train de te casser le dos, chuchote-t-elle au creux de son oreille avez un petit rire. Viens, on rentre.
Le chemin du retour est silencieux, méditatif presque. Mais un silence bien moins poisseux qu’avant.
La jeep garée, elle en sort et c’est presque gênée qu’elle lui demande.
- Tu veux bien… rester avec moi ? Cette nuit ? Juste pour dormir, ajoute-t-elle rapidement pour dissiper tout malentendu. Non pas que l’envie de plus ne la démange pas. Mais sa seule présence lui suffit. Je veux juste… qu’on reste ensemble. Tous les deux.

Elle lui sourit largement lorsqu’il donne son consentement et le laisse prévenir sa famille pendant qu’elle rend les clés. Ils se retrouvent dans la cour et sans un mot, ils se dirigent vers les baraquements des officiers sans presque croiser personne.
Dans sa chambre, elle désigne quelques fruits qui trainent de la main puis retire ses chaussures et sa veste de treillis.
- Si tu as faim, sers-toi. Mets toi à ton aise…
Elle n’a pas vraiment d’appétit. Lexi vient se coller dans le dos de Lounis et passe ses bras autour de sa taille.
- Tu as dis à Angus et Bassem ou tu passerais la nuit ? demande-t-elle avec un rien de malice dans la voix.

- Tu es en train de te casser le dos...
- M'en fiche, qu'il murmure contre le chaud de sa gorge. Il faut pourtant qu'il la libère et s'en acquitte avec un soupir résigné.
- Viens, on rentre.

Le reste du trajet s'avère tout aussi muet que ses débuts, l'atmosphère n'est plus la même cependant et la paume de Lounis a retrouvé nonchalamment sa place sur la cuisse de Lexi. Mais, là encore, il doit effacer toute trace d'affection en arrivant au campement, afin de ne pas embarrasser le caporal auprès de ses collègues. C'est donc avec un certaine surprise qu'il accueille sa requête.

- Tu veux bien… rester avec moi ? Cette nuit ?

Il ouvre la bouche, un peu désemparé. Est-ce une façon de lui signifier qu'elle aimerait quelque chose de plus charnel qu'un simple baiser. Ne devait-il pas aller à son rythme ?

- Juste pour dormir !
- Oh ! Euh.. Oui, bien sûr, balbutie-t-il, bénissant le soir de tomber pour dissimuler ses joues empourprées.
- Je veux juste… qu’on reste ensemble. Tous les deux.

Le syrien lui sourit alors avec chaleur.

- D'accord.

Lui aussi désire secrètement un peu plus d'intimité que quelques baisers volés ça et là à l'abri des regards. Après un court passage pour souhaiter la bonne nuit à Angus et Bassem, il rejoint Lexi et c'est avec la même gêne que la première fois qu'il passe le seuil de son antre.

- Si tu as faim, sers-toi. Mets toi à ton aise…
- Non, merci. J'ai pas l'appétit, décline-t-il en retirant gauchement sa veste.

Une petite boule chaleur vient se coller à ses vertèbres. Sa face de statue s'adoucit d'une expression tendre, alors qu'il recouvre des siennes ces deux petites mains possessives.

- Tu as dis à Angus et Bassem où tu passerais la nuit ?
- Si j'avais fait ça, Bassem serait déjà installé dans ton lit pour une soirée pyjama. fait-il en ricanant.

Il se retourne délicatement pour mieux la voir. Ses index redessinent l'ovale de son front, à la racine de ses cheveux avant que ses phalanges fouissent dans sa blondeur éthérée.

- Je me lasse pas de te regarder, souffle-t-il en la couvant du regard. Tu vas me trouver fatiguant de toujours dire : "tu es belle"... Mais je pense ce mot, chaque fois que je te vois...

Et chaque fois un peu plus.

- Tu as dis à Angus et Bassem où tu passerais la nuit ?
- Si j'avais fait ça, Bassem serait déjà installé dans ton lit pour une soirée pyjama.
Lexi pose son front contre les trapèzes de Lounis et joint son rire au sien.
- Ca aurait pu être drôle. On aurait construit une cabane avec des draps… mais pas ce soir, ajoute-elle en frottant sa joue contre lui, inspirant son odeur.
Lounis lui fait face. Elle lui sourit et l’observe paupière mi-closes et menton légèrement levé, alanguie sous ses caresses.

- Je me lasse pas de te regarder.
- Ca tombe bien, j’aime te regarder aussi. Sa main s’envole pour épouser sa joue, tracer le dessin de ses lèvres. Tu es très pictural, souffle-t-elle. La première fois que je t’ai vu, j’ai eu envie de te prendre en photo. Je n’ai pas vraiment de talent pour ça, mais j’aime la photographie à l’ancienne, tu sais… développer dans une chambre noire, attendre que l’image apparaisse. C’est presque de la magie... Mon appareil est resté dans le brouillard, sinon j’en aurais prises plein de vous.
- Tu vas me trouver fatiguant de toujours dire : "tu es belle"...
La jeune femme pousse un long soupir théâtral.
- Oh oui… c’est si horrible de s’entendre dire qu’on est belle. Aussi belle que Psyché tu crois ? demande-t-elle, amusée.
- Mais je pense ce mot, chaque fois que je te vois...
- Alors je t’autorise à le dire. Autant de fois que tu le veux.
Elle a beau se hisser sur la pointe des pieds, elle n’atteint que sa mâchoire qu’elle bécote néanmoins en riant.
- Il va me falloir un marchepied… une sorte de petite échelle, pour t’embrasser. Viens… on va s’installer mieux que ça...

Elle recule, l’attirant avec elle vers le matelas. Lorsque l’arrière de ses mollets bute contre le lit, elle se met à défaire son pantalon, les joues légèrement rosies. Ce qui est parfaitement ridicule, elle s’est déjà montrée presque nue devant des foules d’inconnus.
Mais avec Lounis, rien n’est vraiment pareil. Elle aussi se sent parfaitement démunie face à lui.  

- C’est juste… pour dormir plus confortablement.
Une fois en débardeur et culotte, elle grimpe dans le lit et se plaque dos au mur pour lui laisser de la place, tapotant l’espace libre de sa paume en une invitation claire.
- Ca va ? s’enquit-elle, consciente qu’ils franchissent certainement un seuil d’intimité qu’il n’a jamais connu avant. Enfin pas réellement. Tu as le droit d’être franc tu sais… de me dire que tu n’es pas à l’aise et que… tu préfères retourner dans ta tente. Je te jure que je ne t’en voudrais pas.

Lounis se laisse butiner avec la même quiétude qu'il offre aux lépidoptères de passage. Les bécots de Lexi sont juste plus suaves et lui cuisent agréablement la poitrine et le teint.

- Il va me falloir un marchepied… une sorte de petite échelle, pour t’embrasser.
- C'est quoi l'expression chez vous : il faut "manger de la soupe" ou "boire du lait" ? la taquine-t-il.
- Viens… on va s’installer mieux que ça...

Il se laisse guidé, cahin-caha, sans dénouer son étreinte sur son corps gracile. Ses yeux pétillent de cet amusement gentiment puérile dont Bassem a également hérité. L'un de leurs parents leur a légué cette fougue enfantine rafraichissante qui ne s'est jamais totalement délayée malgré les épreuves traversées.
Néanmoins ce reliquat d'innocence s'évapore lors qu'il la contemple se déshabiller. Il écarte les bras pour la laisser faire, une chaleur différente l'enveloppe alors.

- C’est juste… pour dormir plus confortablement.

Il ne répond pas, ou plutôt il lui répond par un silence ouaté, les prunelles aimantées à toute cette peau offerte en spectacle. Il humecte ses lèvres et entreprend finalement de l'imiter, ôtant le marcel qui lui couvre le torse plus facilement qu'il ne déboutonne son pantalon. Il se sent bêtement pudique.
En se glissant parmi les draps, il est assailli par un souvenir de Psyché, qui, se couchant pour la première fois dans le grand lit vide de son amant, doit éteindre la chandelle pour respecter sa promesse de ne jamais poser les yeux sur lui. Il chasse images et impressions du passé d'un battement de cils et cale son immense carcasse dans un coin de matelas. Etrangement engoncé sous la couverture, il n'ose pas vraiment frôler sa compagne, alors que le contact lui a toujours paru naturel et familier jusqu'alors.

- Ca va ?
- Je sais pas trop, fait-il avec un petit rire gêné.
- Tu as le droit d’être franc tu sais… de me dire que tu n’es pas à l’aise et que… tu préfères retourner dans ta tente. Je te jure que je ne t’en voudrais pas.
- C'est pas ça...

Il se cache le visage entre les mains et s'affale sur l'oreiller avec un nouveau ricanement embarrassé.

- Je me sens bizarre et timide, alors qu'il n'y a rien de bizarre !

Il écarte quelques doigts pour laisser à un oeil la possibilité de darder sur elle son iris noisette, puis il retire lentement les paumes de son visage. Il se mordille la bouche.

- Je suis impressionné, un peu, peut-être. Je n'ai jamais fait quelque chose d'aussi... personnel. Il cherche le bon terme. Intrusif. C'est ton lit à toi.... tente-t-il d'expliquer. Mais je suis content...

- C'est pas ça...
Pourtant, il y a bien quelque chose. Il a l’air impossiblement mal à l’aise et se serre tellement contre le bord du lit qu’il risque de tomber à la moindre occasion.
- Qu’est-ce que c’est alors ? demande-t-elle gentiment en traçant des arabesques sur le dos de ses mains-paravent du bout de l’index.
- Je me sens bizarre et timide, alors qu'il n'y a rien de bizarre !
- Oui, confirme-t-elle. C’est juste toi, moi et un lit. Rien de franchement extraordinaire, si ? Tu préfèrerais qu’on monte quand même une cabane ?

Elle prend tout cela à la légère et tente de le rassurer sans savoir si cela fonctionne. Accoudée au matelas, elle le contemple. Il a soudain l’attitude d’un petit garçon qui refuse de voir mais qui jette quand même un coup d’œil par curiosité. Elle est toujours là, le sourire un peu moins certain mais là.  

- Je suis impressionné, un peu, peut-être. Je n'ai jamais fait quelque chose d'aussi... personnel. Intrusif.
- Dormir avec quelqu’un d’autre que tes frères et sœurs tu veux dire ? Je comprends.
- C'est ton lit à toi...
- Techniquement c’est celui de l’armée. Sinon je l’aurais choisi plus grand et plus confortable.

Elle se glisse sur le dos et s’applique à ne pas envahir son espace, frôlant à peine son épaule nue de la sienne.
- Moi non plus tu sais… ça ne m’est pas arrivé très souvent, lui confie-t-elle, les yeux vers le plafond. Mon premier petit ami, j’étais encore chez mes parents et il était hors de question que je dorme avec lui. On a réussi à le faire parfois… mais c’était exceptionnel. Ensuite… ensuite, il n’y a eu que des gens de passages, avec qui je n’avais aucune envie de dormir ou qui ne me voulait pas dans leur lit non plus. Tu es le premier depuis très, très, très longtemps…
- Mais je suis content...
- Tu es certain ?
Elle lui jette une brève oeillade puis s’autorise à glisser ses doigts entre les siens. Elle espère que ce geste plus familier l’aidera à se détendre.
- Tu… tu risques de tomber si tu te ne rapproches pas un peu de moi. Enfin c’est toi qui vois, s’empresse-t-elle d’ajouter. Elle lève leurs mains jointes vers sa bouche et embrasse celle de Lounis. Je veux juste que tu sois… bien. En plus de content, je veux dire. Elle lui adresse un petit sourire malicieux. Je peux faire quelque chose pour y arriver ?

Lounis n'a jamais eu de petites-amies, encore moins d'occasion de partager un lit avec une fille à part, effectivement sa mère et ses soeurs. Il se sent d'une immaturité crasse pour un jeune homme de vingt-cinq ans. Il ne sait absolument rien de cet aspect de la vie.

- Mais je suis content...
- Tu es certain ?
- Oui, affirme-t-il sans détour, la main dans la sienne. Il la couve d'une oeillade confiante et rit tout bas. Je me sens juste un peu idiot. Pas vraiment une grande personne quoi, malgré la taille.
- Tu… tu risques de tomber si tu te ne rapproches pas un peu de moi. Enfin c’est toi qui vois.

La caresse de ses lèvres sur le plat de sa main le rend tout vaporeux.

- Je veux juste que tu sois… bien.
- Je le suis...
- En plus de content, je veux dire.

Il pouffe, creusant des fossettes pétries de candeur aux coins de sa bouche et de ses yeux. Puis, il finit par rouler sur le flanc pour se rapprocher d'elle, mieux la voir. Ses iris si limpides le noient un bref instant, si bien qu'il en oublie presque de respirer.

- Je peux faire quelque chose pour y arriver ?

Une foule de pensées iconoclastes -il soupçonne quelques souvenirs sulfureux soufflés par Psyché- envahissent brutalement sa cervelle. Lounis fixe Lexi avec des yeux ronds et des pommettes rôties à point.

- Dis-moi... Montre-moi comme tu veux que je sois... souffle-t-il, le verbe maladroit, mais l'expression d'une sulfureuse intensité.

Fière et heureuse d’avoir su tirer un petit rire à Lounis, Lexi lui sourit tranquillement alors qu’ils se font enfin face, tous deux couchés sur le côté. Elle a tout le loisir de le contempler, un bras replié sous sa tête. Malgré une journée compliquée, ils sont là, tous les deux dans un même lit et ce petit miracle lui réchauffe la poitrine bien plus surement qu’une guérison qu’elle n’a finalement pas eu.

- Je peux faire quelque chose pour y arriver ?

Elle joue distraitement avec les doigts de sa main. Malgré la différence de taille et de couleur de peau, elle les trouve parfaitement assorties.
Les yeux de Lexi reviennent vers son beau visage frappé par une gêne qu’elle identifie sans mal.  
Sa bouche s’ouvre pour démentir ce qui passe certainement dans la tête du jeune homme mais il lui coupe l’air sous le pied.

- Dis-moi... Montre-moi comme tu veux que je sois...
Prise sous le feu soudain de son regard, Lexi a bien du mal à trouver une pensée cohérente qui passerait dans son esprit. Elle finit par avoir un petit rire incertain et se redresse sur un coude.
- Je ne sais pas… j’ai peur de t’effaroucher… de te faire peur, se rectifie-t-elle, de ne pas respecter tes limites. Ne te force à rien. D’accord ?
Elle dénoue ses doigts des siens et se met à caresser la peau nue du bras de Lounis du dos de ses phalanges.
- Mais je peux essayer ça…
Ses gestes sont lents et doux. Finalement, sa main remonte jusqu’à son cou où elle s’attarde un peu. Puis elle revient englober sa joue et se penche jusqu’à pouvoir déposer de tendres baisers appuyés sur son visage.
- Et ça aussi…
Elle finit par sa bouche, qu’elle embrasse de la même façon.
- Ca, ça te fait du bien ? souffle-t-elle contre ses lèvres.

- Je ne sais pas… j’ai peur de t’effaroucher…
- "Effaroucher" ? questionne-t-il, incapable de saisir le plein sens de ce mot.
- Te faire peur, de ne pas respecter tes limites. Ne te force à rien. D’accord ?
- Je me force pas, déclare-t-il d'un ton calme.

De cela, il est certain.

- Mais je peux essayer ça…

Le contact languide de ses doigts pâles sur sa peau le fait frissonner. Son derme grêle, érigeant ses poils drus. Lounis ne quitte nullement Lexi des yeux durant l'escalade de ses phalanges le long de son immense carcasse. Il déglutit et ferme le yeux lorsqu'elle bénit son visage d'un premier baiser, puis d'une pluie d'autres. Ses lèvres espèrent avoir, elles aussi, un peu de cette douce onction. Lorsque cela se produit, il tend la nuque, cherche à prolonger cette union éphémère, mais déjà, leurs bouches se quittent.

- Ca, ça te fait du bien ?
- Il y a un univers où c'est pas agréable ? demande-t-il avec une once d'amusement.

Prenant l'initiative, il aventure une main dans le creux de ses reins, sous le coton blanc de son débardeur, juste pour mieux épouser la courbe de son échine. L'autre explore cette bouche si prompt à embrasser, effleurant la pulpe charnue de sa lippe, du bout du pouce.
Avec révérence.
Il se redresse lentement, la surplombant un peu et après un instant de muette et dévorante contemplation, goute à nouveau la saveur de ses lèvres.

- Ca, ça te fait du bien ?
- Il y a un univers où c'est pas agréable ?
Lexi lui rend son sourire alors qu’une ombre passagère obscurcit le ciel de ses yeux. Elle aimerait lui affirmer que non. Mais elle sait que ça n’est pas le cas.
- Lorsqu’il y a consentement, en général, c’est effectivement toujours agréable. Je crois…

Courant déjà à un rythme bien plus rapide que d’ordinaire, son cœur se met soudain à cavaler comme un fou furieux lorsque Lounis trouve l’audace et le courage de la toucher à son tour. Rien de terriblement osé. Pourtant, elle en frissonne déjà, dans l’expectative d’un plus qui ne viendra certainement pas ce soir.
Figée, elle le laisse venir à elle, entrouvre les lèvres lorsqu’il y passe son pouce.
Jamais personne ne lui a fait autant d’effet que lui.
Jamais personne ne l’a regardée comme il le fait.

Elle accueille le contact de sa bouche sur la sienne avec un soupir voluptueux. Passant un bras autour de son cou, elle lui rend son baiser et en cueille d’autres avec une certaine langueur, plongeant ses doigts avec délice dans ses cheveux. De son propre chef, son corps se colle à celui de Lounis, cherche plus de contact encore. Son genou se redresse et elle l’arrête juste avant qu’il ne s’enroule autour de sa taille.
Il faut qu’elle se calme !
Elle décolle difficilement sa bouche de la sienne et retombe sur l’oreille, légèrement haletante. Elle pensait qu’arrêter de l’embrasser suffirait à la calmer un peu mais son regard est d’une telle intensité qu’elle s’en trouve prisonnière, toujours aussi fébrile… et passablement échauffée. Sa paume s’invite sur son torse nu et descend jusqu’à s’arrêter au niveau de son cœur, comme pour vérifier qu’il se trouve dans le même état que le sien.
- C’est… plus ou moins ce que j’avais en tête… pour que tu te sentes bien...
En vérité elle n’en attendait même pas temps.
Après seulement quelques baisers, elle se trouve déjà dans un tel état qu’il pourrait bien faire d’elle ce qu’il souhaite. Quand son coeur ouvre les voies de sa sensualité, il ne le fait jamais à moitié. Pour autant, elle a bien trop de respect et d'affection pour Lounis pour tenter quoique ce soit de plus.    

Lounis n'a pas l'impression de faire quoi que ce soit de particulier et pourtant les réactions de Lexi sont éloquentes, peut-être excessives. Cela produit chez lui des sentiments paradoxaux de fascination et d'angoisse mêlées. Il ignore si tout cela est bien habituel : il n'a pas coutume de faire gémir et soupirer une jeune femme juste en l'embrassant. Il n'a jamais embrassé qui que ce soit auparavant. Aussi délicieuse soit sa bouche, il n'a pas la sensation de se consumer comme elle le fait. Pourtant son coeur bat vite, son sang bouillonne mais avec moins d'emphase, sans doute. Et si Lexi s'en trouvait déçue comme toutes les autres jeune femmes avant elle ayant tenté de l'approcher ?
Trop calme, trop composée, trop retenu, trop fade...
Il chasse comme il peut cette question qui revient en boucle : "Est-ce normal ? Suis-je normal ?"

- C’est… plus ou moins ce que j’avais en tête… pour que tu te sentes bien...
- Moi ça va, mais toi tu es toute chaude. Tu as un peu de fièvre, peut-être ?

Elle n'a pas beaucoup dormi et les émotions vives du jour ont dû l'affecter. Il s'en inquiète en prenant la température de son front , de l'envers des phalanges.

- Tu as besoin de te reposer, plus... plus que mes baisers je crois. Il lui caresse la joue avec un sourire. Même si j'adore t'embrasser.

Il la blottit avec douceur contre lui, l'enlaçant de ses grand bras.

- Ferme les yeux, je veille sur toi, déclare-t-il en déposant un tendre baiser sur son front.

- C’est… plus ou moins ce que j’avais en tête… pour que tu te sentes bien...
- Moi ça va, mais toi tu es toute chaude. Tu as un peu de fièvre, peut-être ?

Lui semble… bien moins affecté par ce qu’ils font. Bien moins qu’elle, c’est une certitude. Lexi en conçoit soudain une honte profonde qui lui brûle les joues et elle attrape son poignet pour retirer sa main de son front. Elle n’ira certainement pas lui expliquer la raison de sa hausse de température. De toute façon, elle ne lui a pas demandé de rester pour ça.
 
- Je vais bien. Ne t’en fais, lui assure-t-elle en reprenant possession de ses moyens, fuyant son regard pour qu’il n’y lise rien de son trouble.  
- Tu as besoin de te reposer, plus... plus que mes baisers je crois.
Elle lui rend son sourire pas aussi certaine que lui de cet état de fait. Elle ne le contredit toutefois pas.
- Sans doute oui.
- Même si j'adore t'embrasser.
- Merci de le préciser, réplique-t-elle avec un petit rire.

Elle pose sa joue contre son torse et essaie d’annihiler toute pensée. Elle ne veut pas réfléchir. Là, à cet instant précis.

- Ferme les yeux, je veille sur toi.
Un sourire étire ses lèvres.
Pour une nuit, pourquoi pas.
Pourtant, elle n’arrivera pas à s’endormir tout de suite, son esprit refusant de coopérer et son corps habitué à la veille après une patrouille de nuit a du mal à s’y reposer. Elle reste un moment allongée, à écouter les différentes portes s’ouvrir et se refermer, peste intérieurement contre les bruits qui proviennent du fond du couloir puis, lorsque la respiration de Lounis se fait plus profonde, elle se redresse pour l’observer. Ses doigts frôlent son visage et une part sombre de son esprit se demande de quelle façon il lui fera du mal. Elle n’a jamais eu le droit à autre chose en amour. Elle n'est pas certaine d'avoir le droit à autre chose.
Elle finit par se relever et grignote distraitement du raisin en fumant à la fenêtre. Elle aperçoit Gi-Ja au loin en train de promener Patti et elle lui fait un signe de la main. Entre oiseaux nocturne…
C’est finalement vers le milieu de la nuit qu’elle retourne se blottir contre Lounis et trouve le repos dont elle a besoin.