- Ah ! Et cerise sur le gâteau, on aura le droit d’utiliser le jacuzzi qu’est sur la terrasse ! C’est plutôt chouette non ?
- Un jacousi ? C'est quoi au juste ?

Elle est absolument irrésistible quand elle fait la moue. Et j’la coule contre moi puisqu’apparemment elle semble pas avoir spécialement envie de quitter mes bras et se frotte à moi comme un p’tit chaton qui sort ses griffes. Pointues les griffes. Mais j’sens qu’elle est encore fatiguée de la journée d’hier et surtout de sa nuit de merde alors j’la câline pour me faire pardonner encore. Heureusement qu’elle est encore tout enrobée de sa serviette parce que revoir ses marques me ferait sentir encore plus merdeux.

- Un jacuzzi, c’est un grand bain chaud et bouillonnant. Le vrai pied ! Même si dit comme ça on dirait un peu une grosse cocotte-minute où tu bouilles à p’tit feu bah en fait c’est vachement agréable.

- Je veux pas que tu me laisses cette nuit. Je veux que tu restes avec moi...
J’lui caresse doucement la joue, la mine désolée.
- C’est pas que j’ai pas envie de dormir avec toi hein ! C’est tout le contraire même…
J’la serre plus fort pour appuyer mon propos.
- C'est pas grave si tu bouges. Tu m'avais prévenue, je le savais... S'il te plait...
- Je fais pas que bouger, Nymphette. J’te donne manifestement des coups pendant mon sommeil. T’as vu ton état encore ! Et ça, c’est pas acceptable, t’entends ? Je refuse de te faire du mal même si j’suis pas conscient. Alors pendant quelques nuits, j’irai sur le sofa. Et c’est pas négociable, ok ?

J’caresse ses cheveux et l’étourdie de mes baisers histoire d’éviter les protestations qui manqueront pas de se faire sonores. J’pense bien que j’vais pas m’en sortir à si bon compte mais j’peux toujours essayer.

- En attendant, j’te propose de manger jusqu’à s’en faire péter le bide, que je viens murmurer entre deux bécots dans son cou, tu feras ensuite une loooogne sieste et on rediscutera de…

J’m’arrête soudain, remarquant la disparition de toutes les p’tites traces de morsures qu’ornaient encore son cou ce matin. Intrigué, j’ouvre vivement la serviette et pose la main sur son ventre nu où s’épanouissait encore un bel hématome, complètement mystifié.

- T’as…t’as plus rien… t’avais des marques et des bleus partout ce matin, j’les ai pas inventé ! J’bouge doucement son cou. Plus rien non plus… Qu’est-ce qui a bien pu se passer ? La seule réponse évidente s’impose à mon esprit. C’est ta transformation qui a fait ça ?
Autant j’suis ravie de savoir que ses hématomes ont disparu, autant ça m’fait limite chier que mes marques à moi, ne se voient plus... Ouais c’est putain d’égoïste.  

- Un jacuzzi, c’est un grand bain chaud et bouillonnant. Le vrai pied ! Même si dit comme ça on dirait un peu une grosse cocotte-minute où tu bouilles à p’tit feu bah en fait c’est vachement agréable.
- Tu veux me transformer en soupe de légumes ?... Haussement de sourcil avant de reprendre, plaintive. Je veux pas que tu me laisses cette nuit. Je veux que tu restes avec moi...
- C’est pas que j’ai pas envie de dormir avec toi hein ! C’est tout le contraire même…
- C'est pas grave si tu bouges. Tu m'avais prévenue, je le savais... S'il te plait...
- Je fais pas que bouger, Nymphette. J’te donne manifestement des coups pendant mon sommeil. T’as vu ton état encore ! Et ça, c’est pas acceptable, t’entends ? Je refuse de te faire du mal même si j’suis pas conscient. Alors pendant quelques nuits, j’irai sur le sofa. Et c’est pas négociable, ok ?

Elle fronce le nez de désapprobation.

- Hé bien, je... Viendrais... Te squatter! ... Dans le sofa!... Et on on aura l'air de .. deux idiot dans un divan trop petit... alors qu'on a un grand lit ! Parvient-elle à dire entre deux baiser pour clairement la faire taire.
- En attendant, j’te propose de manger jusqu’à s’en faire péter le bide
- Hum... bougonne-t-elle avec un peu moins d'aplomb, considérablement amollie par les suçons qu'il lui administre dans le cou.
- Tu feras ensuite une loooogne sieste et on rediscutera de…
-.. De... ? répète-t-elle toute vaporeuse et bercée de baisers.

Magni lui soustraie brusquement sa serviette, la laissant toute nue entre ses cuisses. Jolhane sursaute, quelque peu surprise. Elle renverse la tête en arrière pour comprendre ce qui l'agite à ce point.

- T’as…t’as plus rien… t’avais des marques et des bleus partout ce matin, j’les ai pas inventé ! Il lui palpe le ventre et elle se contente de battre des cils, sa réactivité avoisinant le zéro absolu. C’est ta transformation qui a fait ça ?
- Ah!... Euh.... Oui. Ca m'a toujours fait ça. J'ai jamais compris comment ça marche, fait-elle sur le même ton qu'on emploie pour qualifier la pluie et le beau temps. Haussement d'épaules. Ghimbir prend ma place quand elle me sent trop diminuée et l'inverse est tout aussi vrai. Trévor m'a dit un jour que ça ressemblait à une évolution pokemon. Je t'avoue ne pas avoir compris la référence... fait-elle en baillant.

La jeune femme remarque alors l'expression ennuyée de son compagnon.

- Qu'est-ce qu'il y a...? C'est plutôt une bonne nouvelle, non ? Peu importe ce que tu me fais pendant tes nuits, je saurais m'en relever.

Une renarde avec une idée fixe est un adversaire contre lequel on ne peut pas gagner.

- T’as…t’as plus rien… t’avais des marques et des bleus partout ce matin, j’les ai pas inventé C’est ta transformation qui a fait ça ?
- Ah!... Euh.... Oui. Ça m'a toujours fait ça.
- Peu importe l’importance de la blessure ? C’est… une bonne nouvelle ! J’veux dire si Ghimbir est capable de te guérir… c’est quand même foutrement pratique.

ET un vrai soulagement j’dois dire. Non seulement pour ce que je lui ai fait mais aussi pour toute blessure qu’elle pourrait avoir pendant une chasse par exemple.  

- J'ai jamais compris comment ça marche. Ghimbir prend ma place quand elle me sent trop diminuée et l'inverse est tout aussi vrai. Trévor m'a dit un jour que ça ressemblait à une évolution pokemon. Je t'avoue ne pas avoir compris la référence...
Je ricane un peu.
- Trévor…Crois-moi, tu peux survivre sans savoir c’que c’est que des pokémons…
- Qu'est-ce qu'il y a...? C'est plutôt une bonne nouvelle, non ?
- Ouais ouais, super bonne ! Pourquoi, j’ai pas l’air d’être content ? C’est juste que… en fait j’aimais bien mon œuvre d’art dans ton cou, mais bon j’suis un artiste plein d’imagination alors j’vais bien trouver comment refaire tout ça.

D’ailleurs j’me remet un peu à l’ouvrage parce que j’aime pas les toiles vierges.

- Peu importe ce que tu me fais pendant tes nuits, je saurais m'en relever.
- Hum, hum, que je fais, perdu dans son cou. Ça m’fascine à chaque fois de voir à quel point t’es super têtue. Aussi tête de bourrique que t’es belle…t’imagine un peu…

J’relève le museau et accroche son regard en essayant de trouver les mots pour lui expliquer exactement ce que je ressens.

- Les bleus c’est une cause, Nymphette. Je sais qu’tu peux les encaisser. Le problème c’est que c’est moi qu’encaisse pas d’en être responsable. Tu comprends la différence ? J’veux que quand je te touche ça te colle des frissons de plaisir, pas des bleus de la taille de ma main…rien que de le dire ça me serre la gorge. J’te l’ai déjà dis Nymphette…j’veux pas te faire du mal… Jamais. Tu veux bien m’écouter pour une fois ?

Je pousse un profond soupir et la libère pour me tourner un peu et poser le plateau devant moi.
- Moi j’ai la dalle !
Je m’attaque à la bouffe avec enthousiasme.

- Peu importe l’importance de la blessure ?
- Je crois... je n'ai jamais été suffisamment amochée pour prouver cette théorie.
- C’est… une bonne nouvelle ! J’veux dire si Ghimbir est capable de te guérir… c’est quand même foutrement pratique.
- Je sais pas si c'est elle ou moi ou... le passage de relais sur le corps entre nos deux âmes. J'ai jamais compris comment ça marche. Ghimbir prend ma place quand elle me sent trop diminuée et l'inverse est tout aussi vrai. Trévor m'a dit un jour que ça ressemblait à une évolution pokemon. Je t'avoue ne pas avoir compris la référence...
- Trévor…Crois-moi, tu peux survivre sans savoir c’que c’est que des pokémons…
- Qu'est-ce qu'il y a...? C'est plutôt une bonne nouvelle, non ?
- Ouais ouais, super bonne ! Pourquoi, j’ai pas l’air d’être content ? C’est juste que… en fait j’aimais bien mon œuvre d’art dans ton cou.
- Oh...
- Mais bon j’suis un artiste plein d’imagination alors j’vais bien trouver comment refaire tout ça.

Jolhane lui tend naturellement la chair tendre de sa gorge, dégageant ses cheveux mouillés d'un geste gracieux. Elle esquisse un sourire en le sentant mordiller et tirailler son derme pâle. Sa nudité ne lui semble plus aussi inconfortable que lors de leur première rencontre. Au contraire, elle s'apprête même à prendre son petit déjeuner dans le plus simple appareil.

- Peu importe ce que tu me fais pendant tes nuits, je saurais m'en relever.
- Hum, hum,... Ça m’fascine à chaque fois de voir à quel point t’es super têtue. Aussi tête de bourrique que t’es belle…t’imagine un peu…

Jolhane arbore une expression malicieuse.

- Je sais juste ce que je veux.
- Les bleus c’est une cause, Nymphette. Je sais qu’tu peux les encaisser. Le problème c’est que c’est moi qu’encaisse pas d’en être responsable. Tu comprends la différence ? J’veux que quand je te touche ça te colle des frissons de plaisir, pas des bleus de la taille de ma main…

La jeune femme vient lui caresser le visage, faisant courir une pluie de doigts énamourés sur l'ossature escarpé de son visage.

- Ai-je eu l'air de ne pas apprécier chacune de nos étreintes hier...?
- J’te l’ai déjà dis Nymphette…j’veux pas te faire du mal… Jamais.
- Tu ne me fais pas mal. Tu ne m'en a jamais fait. Je peux même affirmer que tu sais parfaitement me faire "du bien".

Elle embrasse le bout de son nez.

- Tu veux bien m’écouter pour une fois ?
- Non ! claironne-t-elle avec une expression de petite fille butée.

Jolhane glousse.
Magni soupire à fendre l'âme.
Elle est effectivement tenace, pour ne pas dire teigneuse. Il se rabat sur la nourriture en attaquant le plateau copieusement garni. Sa compagne s'allonge à plat ventre sur le lit, lui offrant ainsi une parfaite vue d'ensemble de la courbure de ses reins et du galbe de ses fesses menues. Elle grignote une épaisse tranche de brioche au beurre tartinée de marmelade.

- A quelle heure appelle-t-on tes parents ? demande-t-elle sur le ton de la conversation.

Jolhane me couvre de caresses mais j’ai pas l’impression que mon explication ai fait mouche. Est-ce que je suis étonné ? Non. Est-ce que ça m’emmerde ? Oui.

- Ai-je eu l'air de ne pas apprécier chacune de nos étreintes hier...?
- J’parle pas de ça…tu le sais bien…J’te l’ai déjà dis Nymphette…j’veux pas te faire du mal… Jamais.
- Tu ne me fais pas mal. Tu ne m'en a jamais fait. Je peux même affirmer que tu sais parfaitement me faire "du bien".

Bécot sur le nez qui indique clairement à quel point elle prend pas au sérieux ma demande.
- Tu veux bien m’écouter pour une fois ?
- Non !
- Bah tiens…ça m’aurais étonné… t’es qu’une sale gosse ! Voilà c’que t’es…

Comme j’veux pas qu’on se dispute, j’vais pas plus loin mais pour une fois j’ai pas envie de céder sur ce terrain-là. Ca me rend trop mal. Pendant que j’commence le p’tit dej, Nymphette s’allonge dans une posture que je qualifierai de « putain de provoquante » et le pire c’est qu’elle s’en rend même pas compte. J’ai des images qui me traversent l’esprit et aucune n’est tout public .

- A quelle heure appelle-t-on tes parents ?
J’ai un petit moment d’arrêt pendant que j’me tartine une tranche de pain assez distraitement pour être franc.
- Après avoir le ventre plein…p’t-être. Laisse-moi d’abord savourer, tu veux…
L’œil pétillant comme à chaque fois que j’vais faire une connerie, j’me laisse lourdement tomber sur le matelas de sorte à me trouver très près de ces deux p’tits monts de chairs hyper tentants.
- Bouge pas ! J’viens de trouver une tartine très alléchante.
Joueur, j’mords une fesse.
- Ca manque de sucre ! J’attrape un pot que j’ouvre rapidement. Tu sais c’qu’on dit des ours et du miel hein…
J’trempe mon doigt dans le nectar doré et trace des arabesques sur sa chair blanche. J’commence par nettoyer mes doigts avant de m’attaquer au reste avec la langue et les dents.
- Délicieux…meilleur p’tit déj du monde !
Une fois que j’ai fini de nettoyer mes gamineries, j’viens lui voler un baiser sucré puis deux, avant de m’arrêter finalement. J’m’assoie en tailleur sur le lit, téléphone en main et j’gratouille ma tignasse, nerveux, avec l’envie soudaine d’exploser le téléphone dans ma main pour éviter ce coup de fil que j’ai pourtant besoin de passer.
- Bon…que j’lâche dans un souffle…prête à me ramasser à la p’tite cuillère si jamais ?

- Après avoir le ventre plein…p’t-être. Laisse-moi d’abord savourer, tu veux…
- Entend... Qu'est-ce que tu fais ? interroge-t-elle en le voyant se vautrer sur le lit.
- Bouge pas ! J’viens de trouver une tartine très alléchante.

Magni lui croque littéralement le charnue de la fesse et elle pousse un petit cri aigu involontaire. Elle a failli avaler de travers.

- Magni !!! s'offusque-t-elle.

Elle se contorsionne pour l'observer avec des yeux ronds. L'une de ses augustes miches porte désormais une très nette marque de dents.

- C'est ça que tu appelles être "un artiste plein d’imagination " ? le gronde-t-elle.
- Ca manque de sucre !
- C'est parce que je suis salée! Laisse mes pauvres fesses tranquilles!

Son éclat de rire dément furieusement sa remontrance.

- Tu sais c’qu’on dit des ours et du miel hein…
- Nooon! Je vais tout coller après... gémit-elle.

Cependant, elle ne fait rien pour se débattre. Elle se mâchouille la lippe quand il passe sa langue sur sa peau maculée de miel et tressaille à la moindre morsure.

- Tu es vraiment terrible! s'indigne-t-elle alors qu'il en a fini avec son séant.
- Délicieux…meilleur p’tit déj du monde !

Elle mord sa tartine avec un petit air faussement boudeur. Il lui retire de la bouche pour venir l'embrasser.

- Gros ourson gourmand... Elle lui attrape la nuque pour lui en soutirer un autre. Je me vengerais, sache le.... Petit sourire de défi.

Ils terminent leur petit déjeuner rapidement puis Magni attrape son téléphone. Il s'assoie en tailleur sur le matelas et par mimétisme, Jolhane se redresse.

- Bon…prête à me ramasser à la p’tite cuillère si jamais ?

La jeune femme vient se loger tout contre son flanc et enroule ses bras autour de son large buste. Elle vient nicher sa tête contre son épaule.

- Je suis là, Magni. Je te donne de la force et du courage... Elle se hisse jusqu'à ses lèvres et dépose un baiser léger au gout de marmelade. Souviens-toi que, quoi qu'il se dise, tu es un homme bien et que je t'aime. D'accord ? Murmure-t-elle en retirant quelques miettes sucrées de sa barbe.

- Gros ourson gourmand...Je me vengerais, sache-le ...
Oh ohhhh ce p’tit sourire là… il va m’arriver des bricoles un de ces quatre…j’ai hâte. Mais évidemment pour le jeu je fais mine de frissonner de trouille.
- Oh non ! Pas la vengeance de la renarde ! Aie pitié de moi !

Assis tous les deux sur le lit, mon portable pèse lourd dans mes mains. Mais bon y parait qu’on peut pas passer sa vie à reculer devant les épreuves.

- Bon…prête à me ramasser à la p’tite cuillère si jamais ?

Toujours nue, Nymphette vient passer ses minces bras autour de moi et se lover contre mon épaule. Sa présence, son contact me font un bien fou.

- Je suis là, Magni. Je te donne de la force et du courage...
J’ferme les yeux, savoure son goût sucré sur ma langue et j’puise égoïstement dans ce qu’elle m’offre, avec avidité. Même si j’en mérite à mon avis pas la moitié.
- Souviens-toi que, quoi qu'il se dise, tu es un homme bien et que je t'aime. D'accord ?
J’la serre fort puis dépose un baiser appuyé contre son front.
- Elskan…Ma Nymphette… qu’est-c’que je ferais sans toi hein ? Ok… quand faut y aller...
J’ouvre la page des contacts, fait défiler les quelques noms qui s’y trouvent… Mon pouce se trouve juste au-dessus du nom « Famille ». J’hésite quelques secondes puis je presse sur le bouton « Appeler », le cœur au bord des lèvres. J’mets le haut-parleur et les sonneries s’égrènent au rythme de mes pulsations cardiaques. J’ai les yeux rivés sur l’écran et plus les secondes passent plus j’ai l’impression de me changer en statue de pierre. J’suis sur le point de raccrocher quand j’entends soudain une voix familière.

- Allo ?
Áslaugur…mon grand frère. Mon petit grand frère. J’ferme les yeux quelques micro-secondes, un large sourire aux lèvres rien qu’en entendant sa voix grave à l’accent encore un peu enfantin. Une sonorité unique.  
- Qui c’est ?
Au loin une autre voix feutrée se fait entendre. Ma mère.
- Áslaugur raccroche s’il n’y a personne au bout du fil.
- Ok ! Bon bah au revoir alors.
J’me rends compte qu’il va falloir que j’réussisse à faire fonctionner ma putain de langue à un moment donné.
- Salut p’tit grand, que je souffle la voix éraillée par l’émotion.
Y’a un blanc de l’autre côté, une bruyante inspiration et ça gueule soudain.
- Magniiiiiiiii ! Maman ! Mamaannnnn ! C’est Magni ! C’est Magni qui parle dans le téléphone ! Viens ! J’savais que t’étais vivant !!! Papa a dit qui fallait qu’on t’oublie mais c’est trop dur ! Tu vas bien, t’es où ?
- Hey laisse-moi en placer une, tu veux ? que j’fais me laissant aller contre la tête de lit. Ma main cherche celle de Nymphette et j’m’y accroche. J’vais bien ouais. J’vais même très bien.
- Áslaugur, donne-moi ce combiné !
- Attends laisse-moi parler à Magni !
Ils arrivent sans doute à trouver un compromis parce que j’entends plus de bagarre feutrée mais deux respirations aussi lourdes que la mienne. J’lâche un p’tit rire.
- Salut m’man.
- Mon bébé ! Exclamation pleine de larmes que je devine sans même les voir. Là j’grimace. Autant dire que j’traduirais pas mot à mot à Nymphette… Où tu es ? Tu manges bien ?
- J’suis en Irlande et ouais t’inquiète j’mange bien. Des fesses de Nymphette. Bon ça non plus j’vais pas lui dire. ‘Pa est pas là ?
- Non, tu le connais il est occupé avec l’entrainement le matin.
- Il s’en charge toujours ?
Petit rire éclatant.
- Il n’arrêtera sans doute qu’à sa mort. Il… il nous a raconté pour ton Ours… et il a dit que…que tu étais fini…condamné.
- Bah il a… plus ou moins raison. Mais, j’croise le regard de Nymphette, j’essaie de m’battre.
Ma mère renifle et mon frère rigole.
- Evidemment que tu t’bas ! C’est toi le meilleur p’tit frère ! Tu me manques ! Je veux te revoir.
- Tu nous manques à tous, ajoute ma mère.
- Ouais…vous aussi vous me manquez. Beaucoup même.
- Comment tu vas mon fils…vraiment ? Tu…tu es seul ? Tu sais que malgré ce que dis ton père, tu lui manques aussi et il finira par admettre que ta place est parmi nous, si tu reviens.
- J’suis pas certain que cette vieille bourrique le reconnaisse un jour mais merci, m’man. J’suis pas…j’suis pas tout seul non. J’ai trouvé un endroit sympa et…vachement animé. A vrai dire…j’ai plus tellement envie de rentrer. J’suis bien là mais j’voulais… j’voulais simplement…putain de gorge serrée. Pourquoi j’vois flou comme ça ? J’frotte mes yeux plein de larmes. Putain…
- Magni !
- Pardon m’man. J’voulais juste vous dire que ça allait pour moi et que j’crois que ça ira de mieux en mieux. J’ai… j’suis avec quelqu’un. Une femme j’veux dire.
Et dix gosses, mais je laisse cette info pour plus tard. Chaque chose en son temps !
- Oh. Je sens la prudence de mère dans cette simple exclamation.
- C’est pas…elle a rien à voir avec Daphné d’accord.
- Tu veux dire que ce n’est pas une manipulatrice briseuse de cœur ?
J’ricane un peu.
- Non…non, c’est tout le contraire. C’est plus une réparatrice de cœur, tu vois.
- Bon, tant mieux alors. J’aimerais beaucoup la connaitre…
- M’man commence pas, hein !
- J’peux la voir, Magni ? Elle est jolie ?
- Un jour peut-être ouais. Evidemment qu’elle est belle, p’tit grand ! C’est même la plus belle tu vois ! que j’précise avec un large sourire. Et vous alors, comment ça se passe ?

Áslaugur se met alors à parler à toute vitesse de ce qu’il a fait pendant tout ce temps, des nouvelles de la ville, entrecoupé parfois par des précisions de ma mère. Je fais quelques commentaires de mon cru et mon grand frère se bidonne avec ce rire si innocent et vrai qui le caractérise. J’ai l’impression soudain d’être là-bas, avec eux et j’sens une douce chaleur se propager dans mon torse. Les minutes passent, j’ai toujours la main de Jolhane dans la mienne et finalement la conversation se tarie un peu. Une voix féminine appelle soudain ma mère avec urgence.

- On va devoir te laisser, mon chéri. Tu nous rappelles, d’accord ? Enfin maintenant que j’ai ton numéro ça va être plus simple. Je suis si heureuse !! Je me faisais tellement de soucis pour toi…
- Moi aussi j’suis trop content !
- J’vous rappelle, t’inquiète pas. M’man ? Tu diras pas à ‘Pa que j’ai appelé d’accord ? Pas encore…
- Comme…comme tu veux. On t’embrasse fort d’accord ! Rappelle vite.
- Motus et bouche cousue ! Bisouuuuus. Je t’aime petit frère !
Bon bah ça y est. Je chiale. C’est d’lui que me vient cette franchise sans limite. Il a toujours été comme ça et par mimétise j’ai fais pareil.  
- Moi aussi p’tit grand.
On raccroche finalement et j’viens me blottir contre ma Nymphette, lessivé, épuisé, mais léger et heureux comme jamais.

- Elskan…Ma Nymphette… qu’est-c’que je ferais sans toi hein ?

Jolhane lui offre un sourire confiant comme toute réponse. Son regard d'or pétille.

- Ok… quand faut y aller...

La jeune femme lui frotte le torse gentiment, pour le réconforter et lui donner de l'allant. Magni met la conversation en haut-parleur. La sonnerie qui résonne dans le vide semble émietter la confiance du guerrier islandais. Une voix sonore, franche et gaie finit par se faire entendre au bout du fil. Bien que complétement hermétique au sens des phrases prononcées, l'intonation honnête permet à la renarde d'en décrypter l'esprit. Magni semble incapable de prononcer le moindre mot, aussi sa compagne l'encourage d'un bécot tendre sur la joue. Il y a une voix de femme en arrière plan certainement sa mère.

Finalement la langue de son ours se délie.
Lorsqu'il cherche sa main, Jolhane natte ses phalanges aux siennes. Elle lui infuse sa pugnacité.

La voix de l'homme-enfant (c'est l'impression que cela donne à l'écoute du dialecte) est enjoué et s'anime d'une forte excitation qui fait sourire la jeune femme. Il répète plusieurs fois le nom de Magni, avec mille et une nuance de félicité. Lorsque la femme prend le relais de la conversation, son timbre s'étrangle d'émotions. Doe le savait : la mère n'a jamais cessé d'aimé le fils. On ne devient pas un être aussi affectueux quand on a jamais reçu d'amour. Son père a eu beau être dur et stricte, sa mère devait largement compenser son absence de démonstration.
Le visage de Magni se colore et se transforme au gré des sentiments qui l'étreignent : soulagement, joie, manque de l'autre, amour filial sincère... Jolhane l'observe attentivement, médusée et émue tout à la fois. Sa poitrine se gonfle d'une chaleur délicate, braises discrètes mais tenaces.
Le rire de l'homme-enfant est communicatif et Doe se mordille la lèvre pour étouffer le sien. Cet échange a l'air de faire tant de bien à son homme qu'il s'épanche enfin. Avec une attitude très animale, elle vient étancher ses larmes en lui lapant le visage et en bécotant sa peau humide. Lorsque le téléphone redevient silencieux, elle accueille Magni contre son giron et lui caresse sa tignasse brune.

- Je crois pouvoir dire que... ça c'est bien passé ? Elle colle sa joue contre son large front. Ils avaient l'air content de t'entendre. Est-ce que ça t'a fait du bien ? demande-t-elle tout doucement. Elle n'ose pas lui demander frontalement de traduire malgré ses précédentes fanfaronnade. Il y a parfois des choses qui doivent demeurer intimes.

- Je crois pouvoir dire que... ça c'est bien passé ?

J’me coule littéralement contre elle, me fonds dans la tendresse de ses câlins. J’en suis totalement accro, j’crois que ça a échappé à personne. J’nous fais basculer un peu pour qu’on soit plus confortablement installés et mon nez vient frotter contre sa peau nue. J’laisse échapper un soupire heureux entre mes lèvres.

- Ouais…ça s’est bien passé. Très bien même…Ils…ils m’en veulent pas. Ils étaient juste…contents de m’entendre. J’ai du mal à y croire Nymphette. C’est comme si on s’était jamais perdu de vue, tu vois ? Reste le problème de mon père mais bon…il est pas si terrifiant qu’ça.
- Est-ce que ça t'a fait du bien ?
- Plus que ce à quoi j’m’attendais. Réentendre leurs voix…ça a été…super fort ! Et mon frère… j’rigole un peu, il a tellement pas changé. Les années passent sur lui mais l’atteignent jamais. C’est assez dingue. Comme sur ma mère d’ailleurs… Elle voudrait que j’rentre en Islande…elle dit que mon père se fera à l’idée.

Je joue distraitement avec ses doigts avant d’y déposer de p’tits baisers aléatoires.

- Alors j’lui ai parlé de toi…et du fait que j’sois bien là où j’suis. Même si j’me dis que p’t-être que j’aurais plus de chance d’apaiser l’ours là-bas… j’en sais rien encore. Áslaugur m’a demandé si t’étais belle…c’lui là, il perd  jamais le nord ! J’relève la tête avec un sourire. Va falloir que j’arrête de chialer comme ça devant tout à tout bout d’champs. J’lui vole une multitude de baisers. Merci d’avoir été là. De m’avoir poussé à l’faire.

J’m’étire comme un gros ours, encore fourbu.

- Tu comptes rester nue toute la journée ? C’pas que je me plaigne hein… mais c’est pas comme ça que j’vais réussir à me reposer… J’crois bien que j’ai envie de rester là pour un looooong moment dans ce pieu avec toi…

J’fanfaronne mais on sait bien elle et moi qu’c’est faux. Même si je savoure chaque moment passé en-tête à tête avec Jolhane, j’sais d’avance que j’vais être content de rentrer à la maison et retrouver notre vie mouvementée avec les gosses.

- Plus que ce à quoi j’m’attendais.

Elle, n'en a jamais douté. Magni semble un tout autre homme à présent qu'il s'est reconnecté aux siens.

- Réentendre leurs voix…ça a été…super fort ! Et mon frère… il a tellement pas changé.
- J'aime beaucoup son rire. Le rire, ça révèle beaucoup sur les gens , je trouve. Le tien et celui de ton frère sont francs, sonores et communicatifs.
- Les années passent sur lui mais l’atteignent jamais. C’est assez dingue. Comme sur ma mère d’ailleurs… Elle voudrait que j’rentre en Islande…elle dit que mon père se fera à l’idée.
- Oh... Jolhane ne sait pas vraiment comment accueillir cette nouvelle. C'est une bonne chose que le bannissement soit levé, mais elle souhaite, égoïstement, ne jamais le voir partir. Tu.. Tu vas le faire ? Rentrer en Islande je veux dire.
- Alors j’lui ai parlé de toi…et du fait que j’sois bien là où j’suis.  Elle soupire inconsciemment de soulagement. Même si j’me dis que p’t-être que j’aurais plus de chance d’apaiser l’ours là-bas… j’en sais rien encore.
- On a pas vraiment commencé à chercher ici...
- Áslaugur m’a demandé si t’étais belle…c’lui là, il perd  jamais le nord !
- Et tu lui as dit quoi au juste ? Je suis curieuse....minaude-t-elle avec un sourire.
- Va falloir que j’arrête de chialer comme ça devant toi à tout bout d’champs.
- Ca soulage de pleurer, tu sais... Ne te sens jamais gêné de le faire devant moi. Tu es beau quand tu es ému tu sais ?

Elle lui retourne le moindre baiser, frottant son nez dans le poil dru de sa barbe.

- Merci d’avoir été là. De m’avoir poussé à l’faire.
- De rien. Je suis contente que ça t'ait fait du bien à l'âme....

Ils restent une poignée de secondes savoureuses, l'un contre l'autre, se suffisant à eux mêmes, comme si le monde n'existait pas autour

- Tu comptes rester nue toute la journée ?
- Hum... je sais pas.....
- C’pas que je me plaigne hein… mais c’est pas comme ça que j’vais réussir à me reposer…
- Pourquoi ? S'amuse-t-elle. Il me semblait qu'un lit servait essentiellement à dormir dedans... Fait-elle en s'étirant à son tour. Son corps de liane se tend et son buste se soulève, dardant ses petits seins fiers vers le plafond. Elle relâche sa respiration et s'enfonce dans le moelleux des coussins, toute alanguie. J'ai pas l'impression que le lit souhaite me rendre ma liberté.

Jolhane sourit à Magni avec une expression espiègle qu'elle n'affiche qu'avec lui.

- J’crois bien que j’ai envie de rester là pour un looooong moment dans ce pieu avec toi…
- Mince alors... nous voilà tous les deux prisonniers... souffle-t-elle.

On a passé la journée à trainasser au lit. J’pense autant pour elle que pour moi, c’est rarement arrivé. Jamais sans doute pour elle. Et c’était foutrement agréable. Etreintes à gogo sans se préoccuper de l’heure ou de se faire surprendre et manger de la bonne cuisine, préparée pour nous. Ca a un p’tit goût de paradis. Sauf que le lendemain, elle comme moi on a déjà la bougeotte.

Grâce à ses massages et à la super crème de Ciulin, mes muscles vont bien mieux.
La nuit a été…mouvementée. J’ai insisté pour dormir sur le sofa. Elle a boudé, puis m’y a rejoint. Moi tout seul j’avait déjà du mal à tenir dessus mais à deux c’était carrément un exercice d’équilibristes. Franchement elle est impossible. Adorablement impossible.
Tout en râlant, et pas que pour la forme cette fois, on est retourné au lit. J’ai au beau me poster le plus loin possible d’elle, ça l’a pas empêchée de venir se coller à moi. Du coup j’ai attendu qu’elle dorme pour remettre de la distance entre nous, bah j’me suis réveillé la tête contre sa gorge.

S’qu’on est stupide quand même…
M’enfin du coup j’ai dormi comme un bienheureux. Y’a que depuis que j’dors contre elle comme ça que j’passe les meilleures et les plus calmes nuits de ma vie.

Ce qui me laisse l’esprit clair pour mettre au point ma p’tite surprise, rapport à une conversation que j’ai surpris avec les gosses.
J’ai donc un peu pressée Nymphette pour qu’elle s’habille et avec la complicité de Jenna j’ai caché un panier de pique-nique dans ma bagnole. Une fois qu’elle est prête j’viens lui faire un câlin dans le dos et j’baise doucement sa tempe.

- Tu m’fais confiance hein ?

J’attends sa confirmation et j’viens doucement lui bander les yeux avec un foulard emprunté à notre hôtesse.

- T’inquiète pas, d’accord ?

J’la guide jusqu’à la voiture et on s’esclaffe comme des gosses sur le chemin. Enfin j’démarre et on prend la route. On roule pendant une petite heure ou j’me fais harceler de questions mais j’reste muet comme une tombe jusqu’à notre arrivée.

On sort et j’récupère le panier qui sent bon d’ici. Les mouettes cris dans le ciel et l’iode parvient à nos narines. C’est une p’tite plage que j’ai repérée y’a pas longtemps et dès que j’l’ai vu j’me suis dit que j’voulais la montrer à Nymphette. Je sais bien qu’elle a surement deviné où on est mais j’veux quand même faire durer le plaisir et le jeu alors j’lui laisse le foulard sur les yeux. On avance un peu jusqu’à être face à la mer et ne plus voir qu’elle. J’lui retire chaussures et chaussettes et j’la laisse mettre les pieds sur le sable. Là seulement j’lui rend la vue.

- Surprise ! que j’viens murmure dans son oreille.

Après une journée de paresse bienheureuse, Jolhane éprouve déjà les limites de sa capacité à "ne rien faire". C'est une chose dont elle n'est pas capable. Après un tel repos réparateur, son corps déborde d'énergie à dépenser. Il lui faut marcher, courir, occuper ses mains... et pas que sur l'anatomie flatteuse de Magni.
Ce dernier semble mu par le même désir de se dépenser, autre part que sur un lit. Aussi n'a-t-elle pas rechignée lorsqu'il lui a demandé de s'habiller pour mettre le nez dehors. Elle saute dans la douche et agrémente son joli petit jean moulant d'un débardeur fortement échancré qui laisse deviner la dentelle d'un soutien-gorge qu'elle n'a clairement pas l'habitude de porter. Elle se contemple dans le miroir de la sale de bain tout en relevant ses cheveux en queue de cheval. C'est tout de même très -trop- aguicheur et elle est soulagée de cacher pudiquement tout cela derrière un hoodie zippé en sweat épais d'un bleu nuit qui fait ressortir le blond vénitien de sa chevelure.

Jenna l'accueille avec un sourire qui sent bon les cachoteries. Jolhane se demande ce que Magni a pu lui dire pour la rendre aussi enjouée. En attendant devant la porte, le vent marin fouettant le capot
de Christine et sa propre parka vert kaki militaire, elle se laisse happée par la chaleur bienfaitrice d'une Magni prêt à la cajoler.

- Tu m’fais confiance hein ?
- Toujours, murmure-t-elle avec ferveur.

Il lui bande les yeux ce qui soulève un léger vent de panique dans sa carcasse prise au dépourvu par l'attaque surprise.

- Magni! Que-est-ce que tu fais ?

Elle lève les mains pour palper son visage et trouve les paluches de son compagnon.

- T’inquiète pas, d’accord ?
- .. O... ok....

Il avance en chenille, L'islandais guidant ses pas, elle manquant de se cogner ou de trébucher. En entrant dans l'habitacle de Christine, Magni lui interdit formellement de retirer le foulard.

- Mais où on va ? Tu ne veux pas me le dire  ? On roule depuis plus de 30 minutes là! Tu a décider de me perdre quelque part parce que je t'ai empêcher de dormir tout seul sur le sofa ?

Elle glousse, monnaie, tente de deviner,... mais son interlocuteur demeure inflexible sur le sujet. Le moteur se coupe soudain et lorsque Jolhane ouvre la portière, son odorat est frappé par le parfum caractéristique des embruns. La mer... Elle n'a jamais vu la mer quand bien même elle se trouve à portée. Elle n'a jamais fait  d'autre voyage que Tir Nà Nog - la forêt des Seelies. Les mouettes chantent au dessus de sa tête, éveillant la curiosité de Ghimbir.

"Quel chant disgracieux!" feule la renarde.
"Moi je le trouve amusant !" rétorque l'humaine.
"L'un n'empêche pas l'autre." remarque la goupile.

Magni guide Jolhane parmi ce qui lui semble être des rochers. Les galets sous la semelle de ses chaussures se raréfient pour n'être plus qu'une masse meuble dans lequel elle a l'impression de s'enfoncer. Sans crier gare, Magni s'attaque à ses chaussures puis ses chaussettes.

- Arrête !!! Mais enfin ?! A quoi tu joues ? Fait-elle en riant.

La silice humide s'immisce entre ses orteils, lui procurant une sensation inédite. Ghimbir, elle-même, se tient au aguets, décryptant ses nouvelles expériences sensorielles. Finalement, Magni lui retire le foulard et le spectacle de l'océan lui éclabousse la vue. Emerveillée, elle promène son regard sur cette étendue d'eau immense, bouillonnante et mystérieuse.

"Bien plus grand que le lac"
" Tellement plus..."

- Surprise !

Jolhane a un gloussement de joie enfantine.

- C'est la mer ! déclare-t-elle, comme si cette évidence avait quelque chose d'incroyable. C'est la mer, tu as vu ???!

Elle tourne vers lui un regard crépitant de bonheur. Son sourire éclatant est bien plus solaire que ce soleil d'hiver.

- J'avais jamais vu la mer !

Elle s'échappe de ses bras et court vers les vagues mousseuse. Elle stoppe à la lisière de leur empreinte dans le sable. Elle frétille entre envie et crainte puis se tourne vers Magni dans l'expectative de la marche à suivre. Une enfant en pleine découverte.

- C'est la mer ! Malgré l’évidence, elle semble complètement ahurie, enchantée. C'est la mer, tu as vu ???!

J’éclate de rire. L’embrun, l’odeur de l’onde bleue me mettent aussi la pêche.

- Je sais Nymphette ! Elle est belle hein ? Et elle est rien qu’à nous.

Elle a l’air si foutrement heureuse que j’me sens comme une sorte de super héros et j’souris d’une oreille à l’autre, assez fier de moi et hypnotisé par son joli sourire. Elle est radieuse, magnifique mais on dirait aussi une gosse à Noël. Lui rendre tout le bonheur qu’elle me donne, c’est devenu mon nouveau but. Et j’aime bien savoir que j’arrive à être un peu efficace.  

- J'avais jamais vu la mer !

Du pouce j’viens caresser sa pommette soulevée par son gigantesque sourire qui me happe totalement.
- J’ai cru comprendre ouais…et j’dois dire que j’suis assez heureux que ça soit moi qui puisse te la faire découvrir. Allez, file ! Va la voir de plus près !

Elle court et s’arrête juste devant le sable plus foncé et gorgé d’eau. Bref coup d’œil dans ma direction et elle danse d’un pied sur l’autre comme si elle savait pas trop quoi faire. Amusé, j’retire mon cuir et me débarrasse de mes propres godasses, vite suivies de mes chaussettes. Je remonte mon jeans usé sur mes mollets et j’m’approche, les mains dans les poches jusqu’à me trouver à côté d’elle. L’écume blanche est à quelques millimètres de nos orteils.

- Bon…on fait quoi ? Tu veux rester là à contempler la chose où tu veux tenter ? J’lui tends la main et quand la prochaine vague approche j’nous oblige à avancer d’un coup. L’eau froide vient lécher nos pieds et j’enfonce mes orteils dans le sable mouillé.

- Elle est putain de fraiche ! Même pour moi !

Pris d’une subite impulsion de conneries comme il m’en arrive beaucoup (trop dirons certaine mauvaise langue), j’la soulève soudain dans mes bras et j’avance dans l’eau.

- Maintenant que t’as goûté à la mer, va falloir prendre ton premier bain, Nymphette ! Prête ?

A force de faire l’andouille, j’vois pas le léger dénivelé et la vague un peu plus grosse qui vient s’écraser contre mes jambes bien plus haut que prévu. Sans trop savoir comment, j’me retrouve le cul sur le sable, de l’eau à mi-jambe, tenant toujours Nymphette dans mes bras. J’ai beau avoir le séant trempé, l’ego un brin égratigné, j’me marre comme un con.

- Bon…on fait quoi ? Tu veux rester là à contempler la chose où tu veux tenter ?
- Tenter... ? Tenter quoi ? demande-t-elle prudemment. Ghimbir couine de réticence en son fort intérieur.

Magni lui tend la main, comme un prince galant. Elle glisse sa menotte rougie de froid dans la sienne. Il l'attire d'un coup au milieu des vagues. L'écume mousse autour de ses cheville et le sable imbibé de sel lui picore les pieds. Jolhane grimace et lâche un petit hoquet surpris, son corps raidi par ce brusque contact. Ghimbir recule au plus profond de son âme de peur d'être elle même mouillée.

- Elle est putain de fraiche ! Même pour moi !
- Elle est carrément gelée tu veux dire !

La jeune femme va pour regagner le sable sec quand Magni la soulève brusquement dans les airs. Elle pousse un cri de stupeur strident prêt à concurrencer les mouettes.

- Magniiii ! Qu'est-ce que tu fais !!!???
- Maintenant que t’as goûté à la mer, va falloir prendre ton premier bain, Nymphette ! Prête ?
- NOOON !! C'est salé, ça va piquer de partout ! On va attraper la mort.

Elle se débat furieusement, entre offuscation et éclats de rire, accrochée à son cou, tentant de fuir les vagues léchant les mollets de son compagnon. Une lame plus violente que les autres ébranle l'équilibre de Magni. Les voilà tous deux, le cul trempé et cet imbécile bien heureux complétement hilare.

- T'es content toi, hein, gros idiot ! J'ai rien pris pour me changer, moi !

Le ressac les attaque à nouveau, provoquant un nouveau cri étranglé de Jolhane qui se blottit contre la poitrine du guerrier. Elle tambourine sur son torse.

- Arrête de te marrer, couillon de toi !

- T'es content toi, hein, gros idiot ! J'ai rien pris pour me changer, moi !
- C’était évidemment tout à fait prévu, que j’arrive à baragouiner entre deux étranglements de rire.

D’autres vagues nous assaillent sans merci et si j’prends leur abordage sur nos corps avec flegme, c’est pas le cas de ma Nymphette qui s’accroche à moi comme si sa vie en dépendait. Elle se mets même à frapper mon torse

- Arrête de te marrer, couillon de toi !

Malheureusement pour elle, ça arrête pas vraiment mon hilarité, au contraire ça la redouble et j’manque de m’étaler de tout mon long dans l’eau glacée.

- Désolé…désolé…que j’articule. Arrête…arrête de gigoter dans tous les sens…

Je pleurs de rire. J’devrais pas mais j’y peux rien. J’attends de me calmer un peu puis j’la serre contre moi avant de nous redresser tant bien que mal.

- Bah quoi ? T’aimes pas la mer ma Nymphette ? On est certes à l’abri de l’eau mais le vent cruel plaque nos vêtements mouillés contre nos peaux nues et nous colle de sacrés frissons.
- Allez viens…J’vais te sortir de là.
J’retourne vers nos affaires et la dépose dans le sable chauffé par le soleil. Pas beaucoup mais c’est mieux que rien. J’déplie la large serviette que Jenna a préparé et l’étale avant de me tourner vers une Jolhane toute tremblante. Lentement, j’l’entoure de mes bras pour la réchauffer et frictionne ses bras et lui embrassant le front.

- Pardon, j’suis vraiment trop con parfois… J’voulais pas te faire peur. Tiens enlève ton sweat, il est trempé en bas. Mets plutôt mon cuir à la place, ça te réchauffera plus.

Comme elle tremblote encore, j’me cherche de dégrafer moi-même son hoodies et c’que je découvre en-dessous me laisse un instant sans voix. J’ai les yeux fixés sur son décolleté, la dentelle que j’y devine et j’ai la bouche qui s’assèche. Lentement, j’lui retire et déglutit difficilement.

- C’est…c’est… nouveau ça aussi non ? J’aime bien…beaucoup même. C’est …euh…très joli…
J’ramasse ma veste et la lui passe. Bon bah c’est encore « pire ». Elle a l’air terriblement sexy comme ça. Et j’lui dis tout net.
- T’es putain de sexy, Nymphette… Un régal pour les yeux.
J’me secoue un peu parce qu’on est pas venu là pour pratiquer les mêmes activités que dans le lit de l’hôtel.
- Qu’est-ce que tu veux faire ? T’as faim ou tu veux qu’on se balade un peu ?  

Ghimbir jappe comme un l'animal aux abois qu'elle est. Sa terreur des eaux endiablées agît sur Jolhane qui ne tient pas en place entre les bras de Magni. Néanmoins, elle résiste mal à l'hilarité de son compagnon. Son rire est puissant et communicatif. Il donne envie de s'esclaffer à son tour à gorge déployée. C'est donc partagée entre deux sentiments contradictoire que la jeune femme s'empêtre dans l'eau salée.

- Désolé…désolé… Arrête…arrête de gigoter dans tous les sens… Il consent enfin à les sortir de ce traquenard. Bah quoi ? T’aimes pas la mer ma Nymphette ?
- C'est pas ma faute, c'est Ghimbir ! Toute cette flotte qui bouge ça lui colle la frousse... Je la ressens qui se diffuse dans toutes les fibres de mon corps...
- Allez viens…J’vais te sortir de là.

L'air froid s'infiltre sous la couche de vêtements mouillés. Magni avait raison : le jean qui colle à la peau est une abomination. Jolhane grelotte et a la sensation de porter une carapace encombrante sur les guibolles. Magni la dépose sur le sable, sous le soleil mais les bourrasques de zef la font se recroqueviller sur elle-même.

- Pardon, j’suis vraiment trop con parfois… J’voulais pas te faire peur.
- C'est pas moi, c'est Ghimbir, je te dis, boude-t-elle.
- Tiens enlève ton sweat, il est trempé en bas. Mets plutôt mon cuir à la place, ça te réchauffera plus.
- Tu as un jean et une culotte de rechange ? claque-t-elle des dents.

Elle a les membres si engourdis que Magni vient à son secours pour lui retirer son sweater. Elle avait oublié son choix explicite de vêtements jusqu'à croiser le regard de son "ami". Elle qui avait froid, se sent brusquement bruler de l'intérieur.

- C’est…c’est… nouveau ça aussi non ?
- O.. oui... balbutie-t-elle, soudain inexplicablement gênée, plus que lorsqu'elle se trouve nue devant lui.
- J’aime bien…beaucoup même. C’est …euh…très joli…
- Vraiment... ?

Il lui coule son cuir sur les épaules et elle se glisse dedans avec une sensation de bien être évidente. La veste conserve une empreinte de sa chaleur corporelle et de son odeur musquée entêtante.

- T’es putain de sexy, Nymphette… Un régal pour les yeux.
- J'avais.. j'avais peur que ce soit un peu trop... "trop", tu vois ? J'ai pas trop l'habitude...
- Qu’est-ce que tu veux faire ? T’as faim ou tu veux qu’on se balade un peu ?
- Si on veut sécher, vaut mieux marcher un peu...

Elle remets ses chaussures et se lève, flottant dans cette veste trop large pour ses fines épaules. Elle le regarde, le rose toujours vivace aux joues.

- On parie que t'arrive pas à me rattraper ? fanfaronne-t-elle, le sourire éclatant.

Elle s'élance en riant dans une course effrénée à travers la crique. Le meilleur moyen pour sécher et se réchauffer, c'est de se dépenser.

- T’es putain de sexy, Nymphette… Un régal pour les yeux.
- J'avais.. j'avais peur que ce soit un peu trop... "trop", tu vois ? J'ai pas trop l'habitude...
- Non, non… c’est parfait…tant que mes yeux restent dans leurs orbites c’est que c’est pas trop pour moi. Après ça reste à toi de voir hein…te force pas si ça te met mal à l’aise. Qu’est-ce que tu veux faire ? T’as faim ou tu veux qu’on se balade un peu ?
- Si on veut sécher, vaut mieux marcher un peu...

J’remets lentement mes chaussettes et mes pompes.
- On parie que t'arrive pas à me rattraper ?
- Quoi ? Mais…

J’ai pas le temps d’en savoir plus qu’elle a déjà filé, aussi rapide et vive que l’vent qui me fouette encore la gueule. J’secoue lentement la tête…Quelle gosse parfois ! Mais bon un défi est un défi. Et je refuse jamais une bonne chasse. Surtout une bonne chasse à la Nymphette ! J’me mets en route comme un vieux diesel mais une fois lancé, on m’arrête plus et mes foulées puissantes projette des gerbes de sable.

Nymphette est rapide, insaisissable. Faut que j’use de patience et d’instinct avant d’arrivé à la choper finalement par la taille. Elle a beau crier et se débattre, j’suis plus costaud qu’elle. Sauf que j’ai oublié qu’elle est plus maligne que moi et elle arrive à se faufiler hors de mon étreinte. J’arrive à la rattraper de justesse mais dans mon élan, on bascule tous les deux dans le sable.

- Cette fois, j’te tiens !

Comme elle s’avoue pas encore vaincue, j’suis obligé de la punir sévèrement et j’la chatouille sans merci jusqu’à ce qu’elle demande grâce.
Victorieux et un large sourire aux lèvres, j’finis par la bloquer.

- Alors c’est qui le meilleur, hum ? Tu m'dois un gage ou quelque chose comme ça, non ?

Le vent frais lui fouette les sangs. Jolhane rit au éclat comme une gamine exaltée par le grand air. Ses pieds s'impriment à peine dans le sol sablonneux. Elle donne l'impression de voltiger. Magni est bien plus lent, mais une fois lancé son sprint est effrayant de puissance. Il a tôt fait de la rattraper mais pas de l'attraper. Elle zigzague comme une anguille, se défile au moment où il croit pouvoir la saisir et même lorsque c'est le cas, elle parvient par une contorsion à lui échapper. Finalement, il la choppe par la taille. Une vraie prise d'ours sauvage ! Cependant, en renarde maligne, Jolhane parvient à se faufiler hors de ses bras en coulant littéralement vers le sol et en se glissant entre ses jambes, abandonnant dans l'opération, la veste en cuir. Magni se retrouve avec une mue de Jolhane comme tout trophée et repart en chasse.
Cette fois, il a bien plus de chance et son reflexe vif, lui permet de l'empêcher de s'éloigner. Ils culbutent dans le sables comme deux crétins hilares. Jolhane est à peine essoufflée mais s'époumone de rire contre lui. Sa queue de cheval s'est défaite et sa chevelure rousse se perd en étoile de mer dans la silice.

- Cette fois, j’te tiens !
- Jamais !

Magni se venge à coup de chatouilles ce qui manque de faire mourir de rire la pauvre victime.

- C'est bon ! C'est bon t'as gagné ! abdique-t-elle en s'étouffant presque, sa jolie gorge se soulevant à intervalles régulières, sa poitrine gonflée d'un trop plein de joie et d'oxygène.
- Alors c’est qui le meilleur, hum ?
- Je reconnais ma défaite... passagère. Tu as juste eu un coup de chance, voilà tout.
- Tu m'dois un gage ou quelque chose comme ça, non ?

Jolhane lui sourit de cet air rusé qui rappelle que Ghimbir n'est jamais bien loin. Sa langue taquine inconsciemment l'arrière de ses dents.

- Très bien... Je t'écoute : que désires-tu ô grand vainqueur de cette chasse au renard... Elle enroule ses bras autour de son cou, câline.

Brusquement, un mugissement s'élève des rochers environnants, comme sorti du coeur de la falaise. Jolhane se crispe, les sens aux aguets, mais le vent ne lui apporte qu'une odeur de sel et d'algues faisandées. Alors qu'elle se dit qu'il ne s'agit probablement que d'un effet de réverbération des embruns contre le granit, le bruit retentit une nouvelle fois, tel l'appel d'une corne de brume.

- C'était quoi ça ? s'inquiète-t-elle.

- Tu m'dois un gage ou quelque chose comme ça, non ?

On est couvert de sable qui coule à nos vêtements pas encore tout à fait secs et on a dû en bouffer un paquet. Mais ça valait entièrement le coup de jouer les gosses intenables. Après tout c’qui s’est passé – l’attitude de Ryan, la cérémonie, la rencontre avec les Vulpe qui doit l’inquiéter autant que moi – on a le droit à un peu de légèreté. De p’tits moments simples, heureux…

- Très bien... Je t'écoute : que désires-tu ô grand vainqueur de cette chasse au renard...

J’lui souris et j’me gorge de sa beauté en plein soleil. Ma barbe vient gratouiller sa gorge nue et j’me colle plus encore à elle.

- Tu vas encore cailler comme ça… Mmm, j’vais réfléchir à la question. C’est pas si souvent que j’gagne, faut pas que j’me gourre sur mon vœu, tu vois…Qu’est-ce que tu dirais de rester coller à moi pour un looooonng très looooong moment…

P’t-être même pour toujours qui sait hein ? J’ai le droit de rêver. Mais j’sais bien que « toujours » c’est un mot qu’existe pas vraiment. J’me penche pour l’embrasser mais j’me fige soudain en entendant un drôle de bruit. Comme un grondement animal. Sauf qu’avec l’eau et les rochers, impossible de deviner sa provenance exacte. Nymphette et moi on se crispe, comme deux animaux aux aguets.
Instinctivement j’cherche une odeur qu’aurait pas sa place ici mais tout parait normal ça sent juste la mer et son vient relent de pourriture, comme tout cimetière ancestral.
Le deuxième beuglement retentit à peine que j’suis déjà sur mes jambes.

- C'était quoi ça ?

Elle semble aussi perplexe que moi. J’tends une main pour l’aider à se remettre debout et écoute attentivement.

- J’sais pas. J’crois que ça vient de là, derrière cette avancée rocheuse. On va voir ?

J’suis mi-inquiet, mi-curieux. Mon instinct me dit que c’est pas un truc naturel et que j’ferais mieux de laisser le « truc » qui produit se bruit tranquille. Seulement j’sais pas trop pourquoi mais j’suis déjà en marche et j’tiens toujours sa main dans la mienne.
On contourne les rochers pour tomber nez à nez avec un trou profond, une grotte naturelle, taillée dans le granit. J’me poste devant et allume la lampe de poche de mon portable. La lumière révèle à peine la profondeur du truc.
Nouveau mugissement assourdissant. Ouep y’a pas de doute ça vient de l’intérieur de la grotte. J’échange un coup d’œil avec Nymphette et chuchote.

- Qu’est-ce qu’on fait ? On dirait presque…le chant d’une baleine ou un truc comme ça non ?

Après tout on est pas armé et y’a aucune raison qu’on aille faire chier le truc qui vit là-dedans… La seule raison qui pourrait nous y pousser c’est la curiosité…

- J’sais pas. J’crois que ça vient de là, derrière cette avancée rocheuse.
- C'est curieux...
- On va voir ?

Jolhane hoche la tête intriguée mais prudente. Elle n'a pas survécu dans le brouillard en suivant ses élans de curiosité. Néanmoins, son instinct lui souffle qu'elle doit y aller. Ghimbir semble d'accord avec elle. Elle se tient à l'affût, les rouages de son intelligence animale tournant à plein régime.
Main dans la main, le couple part en exploration. Les rochers de granit mousseux sont glissants et ils progressent précautionneusement. La bouche noire d'une grotte se dévoile à eux, à même creusée dans la falaise.

Un nouveau brame mélancolique se fait entendre. Il y a quelque chose d'étrangement familier dans cette complainte.

- Qu’est-ce qu’on fait ? chuchote Magni. On dirait presque…le chant d’une baleine ou un truc comme ça non ?
- Oui... répond Jolhane , baissant la voix également. Elle... Elle a l'air de souffrir. Je ne saurais pas l'expliquer, mais... mais je crois qu'elle appelle à l'aide.

Car, la chose qui mugit est femelle, c'est une certitude qui s'ancre en elle. Une évidence. Cette entité est malheureuse ou mal en point. Les pupilles de Jolhane s'animent de paillettes d'or.

- C'est comme moi... je crois... un peu. Pas tout à fait. Elle se tourne vers son compagnon avec une drôle d'expression. Si je te dis qu'elle n'est pas dangereuse, tu me crois. Je le sens.. Je.. Je sens que ça ne nous fera pas de mal. Ghimbir aussi....Elle se mordille la lèvre. Il faut qu'on aille voir...

Elle lui lâche la main et pénètre dans la caverne. Elle avance à pas mesurés. Il y a un filet d'eau qui indique qu'à marée haute, la grotte doit être immergée au moins de moitié, si ce n'est plus. Elle n'est pas très profonde mais large et haute de plafond. Après avoir marché une bonne cinquantaine de mètres dans une obscurité à peine éclairée par la lampe torche du téléphone, ils découvrent au fond de la cavité un spectacle à couper le souffle.

Une forme gigantesque, humide et flasque, roulée en boule. La queue visible et les appendices, laissent à penser qu'ils sont en présence d'une baleine de taille moyenne, sauf que la pigmentation de la peau se décolore, passant du bleu-nuit au pêche et qu'une quantité importante de poils bleues sombres sont visibles au sommet du monticule de chair. Des bernacles et autres balanes sont incrustés en nombres dans l'épiderme, formant des cratères d'étoiles ça et là. L'odeur de sang séché est tout à fait notable à présent. La créature semble néanmoins en vie. Un souffle rauque et difficile se fait entendre à rythme régulier.
Soudain, la masse se met en mouvement avec une lenteur pachydermique. Jolhane retient un cri de surprise. Une tête de femme de taille magistrale pose son regard outremer sur eux. Cette chose est une merrow, une sirène qui emprunte sa forme à celle des roquals. Son buste de femme aux formes généreuses est encrouté d'hémoglobine et ce qui ressemble à un mat ou une proue de voilier en bois est fiché dans l'un de ses flancs sous l'une de ses énormes mamelles.

- Tu... Tu es venue... Dit-elle d'une voix incroyablement douce et fluette malgré le gabarit. J'ai.. j'ai senti ta présence.... Fille-fée... Je t'ai appelée ....

Malgré son sourire délicat et joufflue, elle semble souffrir le martyr.

- Qu’est-ce qu’on fait ? On dirait presque…le chant d’une baleine ou un truc comme ça non ?
- Oui... Elle... Elle a l'air de souffrir. Je ne saurais pas l'expliquer, mais... mais je crois qu'elle appelle à l'aide.
- Tu crois ? Et comme tu sais que c’est une « elle » d’abord ?

- C'est comme moi... je crois... un peu. Pas tout à fait.
- Comment ça comme toi ? Ca veut dire quoi exactement ?
Là j’suis inquiet. Non pas à cause de la chose qui crie mais plutôt du comportement étrange de Nymphette.
- Si je te dis qu'elle n'est pas dangereuse, tu me crois. Je le sens.. Je.. Je sens que ça ne nous fera pas de mal. Ghimbir aussi...
- Ouais bah moi, mon nez d’ours sent le sang.
J’l’observe, les yeux plissé. Elle semble…j’sais pas attiré par c’qui se passe au fond et ses yeux brillent d’façon étrange.
- Il faut qu'on aille voir...

Bon de toute façon c’est pas comme si j’pouvais lui faire changer d’avis hein… quoi que je dise ou j’fasse, elle ira. Elle me lâche la main et s’engage dans l’obscurité. J’pousse un soupir à fendre l’âme…voilà ! Qu’est-ce que je disais ! Finalement, j’la suis, après tout c’est moi qu’ai la lumière.  

Finalement, la grotte est pas si profonde mais la marée monte vite et on risque de se faire piéger comme des cons si on reste trop longtemps. Finalement au bout d’un p’tit quart d’heure, on trouve le fond. Et j’lâche une bordée de jurons à peine souffler quand j’avise c’qui nous y attend.

Une créature, mi-baleine, mi humaine ! … C’est fascinant…et assez dégueulasse en fait. Ouais j’ai un soucis avec les demi-transformations…les sirènes ça m’a jamais fait kiffer.

L’odeur d’hémoglobine est plus forte ici. Normal, vu le trou qui performe le flanc de créature. Merrow j’crois que ça s’appelle. J’ai dû en chasser une fois ou deux…pas une partie de plaisir j’vous le dis tout de suite…Celle-ci a beau être blessée, j’me méfie quand même. Par réflexe j’contracte mes muscles, prêt à l’action au moindre mouvement louche.

- Tu... Tu es venue... J'ai.. j'ai senti ta présence.... Fille-fée... Je t'ai appelée ....

Son sourire se transforme en grimace. Bon ok ça a pas l’air d’être de la comédie. Elle souffre vraiment. Instinctivement, j’me poste légèrement devant Nymphette avant qu’elle ait l’idée de s’approcher.

- Holà c’est quoi ce délire ? Appelée pour quoi ? Qu’est-ce que tu lui veux ? Merde mais comment t’as fait ton compte pour te planter un truc pareil dans le corps ?

Lui retirer risque d’aggraver les choses. Et surtout c’est quoi cette putain d’histoire de fille-fée ?

Jolhane contemple la femme-poisson sans la moindre peur, au contraire, elle éprouve une compassion puissante et sans borne pour cette dernière. Magni est bien plus méfiant et s'interpose physiquement entre elle et la merrow.

- Magni!
- Holà c’est quoi ce délire ?
- Calme-toi...
- Appelée pour quoi ? Qu’est-ce que tu lui veux ?
- Je... Je suis coincée ici, sans pouvoir retrouver une forme humaine, à.. à cause de ça....La géante désigne le morceau de bois planté dans ses chairs. Je ... n'arrive pas à l'enlever.
- Merde mais comment t’as fait ton compte pour te planter un truc pareil dans le corps ?
- Je nageais tranquillement... En haute-mer...Chez moi... Alors que je remontais à la surface pour recracher mon eau, j'ai... j'ai fait irruption en pleine course-poursuite entre deux bateaux. J'ai.. percuté le plus petit... et..... je me suis empalée sur sa proue.
- C'est horrible, souffle Jolhane horrifiée.
- Ils... Ils m'ont pris en chasse... J'ai trouvé refuge ici.... J'ai peur, fait-elle avec sa voix de fillette grandie trop vite. J'ai peur de mourir ici.
- Nous allons te sortir de là ! s'exclame Jolhane sans consulter son compagnon. Cette idée semble la percuter en même temps qu'elle énonce sa phrase. N'est-ce pas ?

La jeune femme se mordille la lèvre inférieure en tentant de décrypter l'expression de Magni..

- Je... Je me nomme Flot, fait la sirène avec un sourire fatigué mais sincère. Et je te remercie.
- Mon nom est Jolhane.
- Et.. Et celui de ton âme soeur ?
- ....  Tu veux parler de Magni ? Elle désigne l'islandais.
- Non... Ton .. Ton âme de fée....
-...... Ghimbir ? fait Jolhane en fronçant les sourcils, étonnée que la merrow en sache autant.
- Les Demi-fées sont rares, mais tu n'es pas la première que je rencontre...

Flot grimace, parcourue d'un nouvelle élan de douleur.

- S'il vous plait.... aidez-moi..... supplie-t-elle.

- Merde mais comment t’as fait ton compte pour te planter un truc pareil dans le corps ?
- Je nageais tranquillement... En haute-mer...Chez moi... Alors que je remontais à la surface pour recracher mon eau, j'ai... j'ai fait irruption en pleine course-poursuite entre deux bateaux. J'ai.. percuté le plus petit... et..... je me suis empalée sur sa proue.
- C'est horrible.

J’me frotte les yeux, déjà fatigué. Je sens la profonde compassion de Nymphette pour la Merrow et j’sais d’avance qu’on va pas pouvoir retourner tranquillement sur la plage à nos jeux innocents et la laisser là. J’sais pas si j’en aurais le cœur non plus de toute façon…

- Ils... Ils m'ont pris en chasse... J'ai trouvé refuge ici.... J'ai peur, J'ai peur de mourir ici.
J’peux pas lui en vouloir. Crever seule dans cette grotte humide et obscure, y’a franchement de quoi flipper.
- Nous allons te sortir de là ! N'est-ce pas ?

J’ai les yeux gros comme des soucoupes. J’suis costaud mais j’suis pas certain de pouvoir soulever Dame Baleine comme ça.

- J’sais pas si c’est bien prudent de la bouger Nymphette…J’me gratte la tête et cherche la meilleure solution pour tout le monde. L’Ours pourrait la porter sans problème…ou la bouffer au choix… Bon du coup on oublie cette option.

- Je... Je me nomme Flot. Et je te remercie.
Elle me fend le cœur tellement elle a l’air à bout. J’crois que j’peux franchement relâcher un peu ma méfiance. Un peu hein, j’ai pas survécu si longtemps pour me laisser berner par un sourire. Mais j’fais aussi relativement confiance à mon instinct.
- Mon nom est Jolhane.
- Et.. Et celui de ton âme soeur ?
- ....  Tu veux parler de Magni ?
J’hausse un sourcil attendri.
- J’pense pas que ça soit de moi qu’elle cause, Nymphette…
- Non... Ton .. Ton âme de fée....
Ghimbir serait…une fée ? Une fée renarde ? Depuis quand c’est possible ça… ?
-...... Ghimbir ?
- Les Demi-fées sont rares, mais tu n'es pas la première que je rencontre...

Ma Nymphette…serait une demi-fée…
PUTAIN DE BORDEL DE MERDE !
Tu parles d’une nouvelle toi ! J’la regarde un peu hébété, surement l’air débile. C’est donc pas une Nymphe mais pas loin… Ma jolie fée…Inconsciemment j’viens chercher son contact et mes doigts viennent caresser sa joue.

- S'il vous plait.... aidez-moi...
J’me secoue. Faut qu’on s’bouge si on veut l’aider.
- Ok, ok, on va trouver…
J’prends Nymphette par la main et j’nous décale pour pouvoir parler tranquillement.

- Ca va ? que j’m’assure en premier lieu avec un petit sourire. J’veux savoir comme elle encaisse cette histoire de fée et une partie de moi, égoïste sans doute, veut sauver Flot pour qu’elle puisse lui poser des questions si elle le souhaite. Y’a pas trente six moyen de l’aider. Soit on lui retire ce truc en espérant qu’elle puisse guérir comme toi quand tu te transformes complètement…soit on essaye de la faire sortir de là, p’t-être en nous aidant de la marée et j’vais chercher de l’aide…
J'passe une main lasse sur mon visage, un peu désemparé par la situation.
- Si t’as une idée brillante, j’suis pas contre là…

- Les Demi-fées sont rares, mais tu n'es pas la première que je rencontre...

Jolhane marque un temps d'arrêt, le temps que la phrase imprime pleinement sa cervelle. Après avoir rencontré Magni, elle avait quelque peu abandonné l'idée de savoir à quelle race elle pouvait bien appartenir. Etre une sorte de bizarrerie lui convenait tant que ceux qu'elle aimait l'acceptaient comme telle. Ses transformations, Ghimbir, tout cela a si facilement été accepté par les enfants et l'homme pour lequel elle éprouve des sentiments, que la question du "que suis-je ?" a été reléguée au second plan.
A présent, cette bribe d'explication, éclaire les deux ans qu'elle a vécus sous un jour neuf.

- S'il vous plait.... aidez-moi...
- Ok, ok, on va trouver…

Magni la tire de son hébétement en la trainant un peu à part.

- Ca va ? lui chuchote-t-il
- Oui...Je crois que oui.... lui répond-elle un peu chose. Elle s'anime petit à petit... Ca explique tellement de choses ! La lumière de mes transformations, le fait que je parle le langage des animaux et que je comprenne ce que disent les fées. Tu as bien vu que Ghimbir les attire ! Et.. Et peut-être est-ce aussi pour cela que les papillons m'ont épargnée.... C'est.. C'est incroyable !

Elle déglutit à la fois excitée et fébrile. Son attention se reporte sur Flot et l'énorme épine fichée dans son flanc.

- Comment allons-nous faire pour elle ?
- Y’a pas trente six moyen de l’aider. Soit on lui retire ce truc en espérant qu’elle puisse guérir comme toi quand tu te transformes complètement…soit on essaye de la faire sortir de là, p’t-être en nous aidant de la marée et j’vais chercher de l’aide…Si t’as une idée brillante, j’suis pas contre là…
- J'en ai pas, je pense que le seul truc à faire, c'est de lui enlever. A deux et avec un peu d'huile de coude on devrait pouvoir gérer. On avisera sur la suite après sa métamorphose.

Jolhane s'avance vers la merrow-baleine pour lui expliquer la marche à suivre.

- Flot ? Pouvez-vous vous coucher de manière à ce que Magni et moi puissions atteindre le morceau de bois ?
- O.. Oui... Souffle-t-elle.

Elle se laisse glisser contre la paroi rocheuse avec un gémissement plaintif qui résonne douloureusement dans la grotte. La voilà à présent allongée sur le dos, retenant le sein qui cache la plaie d'une de ses immenses mains potelées. Sa chevelure bleue sombre aux reflets changeant, forme une sorte de tapis broussailleux d'algues qu'il faut traverser. Jolhane se tient au plus prêt de la perforation sanglante et agrippe la colonne de bois. Magni de l'autre côté, se charge de la partie la plus large de l'éclat de bois monstrueux.

- T'es prêt ? A la une, à la deux, à la trois....

- Ca va ?
- Oui...Je crois que oui...

Mouais elle a quand même l'air tourneboulée et ça se comprend. Et puis soudain son visage s'éclaire comme un p'tit soleil.

- Ca explique tellement de choses ! La lumière de mes transformations, le fait que je parle le langage des animaux et que je comprenne ce que disent les fées. Tu as bien vu que Ghimbir les attire ! Et.. Et peut-être est-ce aussi pour cela que les papillons m'ont épargnée.... C'est.. C'est incroyable !
- Ouais...ouais j'ai vu...et pour être incroyable ça l'est. Même si...enfin ça change pas grand chose pour nous hein… (j'parle en mon nom et en celui des gosses). J'veux dire t'aurais pu être moitié alien que t'aurait quand même l'affection des mômes et puis mon … j'dérape un peu là non ? J'sais même pas bien comment je voulais finir c'te putain de phrase !...enfin tu vois quoi...

On discute ensuite de la marche à suivre pour aider Flot. A priori pas de solution miracle...
- J'en ai pas, je pense que le seul truc à faire, c'est de lui enlever. A deux et avec un peu d'huile de coude on devrait pouvoir gérer. On avisera sur la suite après sa métamorphose.
- Ok...j'matte la plaie avec une grimace. Ça va lui faire un mal de chien. Parle-lui du plan jvais retourner vers la bagnole. J'ai ma trousse de soin au cas où. Ça peut toujours servir.

J'me dépêche de faire l'allée retour, la boîte à pharmacie dans une main, un mince bâton dans l'autre et un vieux tee shirt à moi pour faire pression sur la plaie si jamais. Sans doute pas hyper hygiénique mais j'ai qu'ça !
Quand je reviens la Dame-Baleine s'est tournée de façon à nous faciliter la tâche…bon tant mieux.
J'approche doucement de la donzelle en détresse.

- Nymphette t'a sans doute expliqué c'qu'on va faire et tu te doutes que ça va être putain de douloureux. Désolé hein...j'suis sans doute pas hyper rassurant mais vaut mieux que tu sois préparée. J'lui tend le morceau de bâton. Tiens mets ça en bouche. Ça évitera que tu te mordes la langue. J'lui lance quand même un sourire rassurant. T'inquiète ca va bien se passer. L'avantage c'est que ça a certainement pas touché d'organe vitale.

Sinon elle serait morte… J'ouvre ma trousse et sort déjà c'qui pourra nous être utile. Jolhane est déjà en position du côté le plus fin du bout de bois et j'me poste de l'autre côté.

- Ok. Tu pousses et j'tire.
- T'es prêt ? A la une, à la deux, à la trois...

J'tire comme un bœuf. Dans ces cas là la délicatesse sert à que dalle à part faire souffrir la pov' Flot inutilement. Ce que devait être abîmé l'a déjà été quand elle s'est fait empaler. Malgré tout j'me fais surprendre par la résistance du bousin et j'crispe les muscles au max pour tirer le morceau de bois derrière moi. Finalement au prix d'un effort considérable j'me retrouve à cogner du dos le fond de la grotte, le morceau de bois sanglant entre les mains.

- Putain de merde ? Flot t'es toujours avec nous ? Nymphette comment est la blessure ?

J'lâche le bout de bois et le bruit de da chute résonne dans la grotte.