Une soirée plus dingue que celle-ci ? Peut-être à son niveau mais pour elle c’est déjà énorme. Mais Lexi n’est certes pas un démon avec pas mal d’année au compteur. Elle n’a pas encore décidé si ça la rendait plus méfiante que fortement curieuse.
Elle se reconcentre sur la danse et se retrouve bientôt face à Baphomet, toute souriante.

- Un jour, on fera une chorégraphie débile juste connue de toi et moi ?
Elle éclate de rire.
- Carrément ! Je vois un mélange improbable de Bollywood – elle exécute un petit mouvement des bras – de Kpop et trucs aléatoires. Mmm pourquoi pas la Macarena avec… Ça sera… définitivement audacieux, ébouriffant même ! Ca c’est certain. On va tellement faire un malheur ! Va falloir que je revienne te voir plus souvent pour la mettre au point du coup.

Et elle se rend compte que ça ne lui déplairait pas, même si c’est juste une idée loufoque lancée en l’air. En dehors de ses « charmants » collègues, elle ne fréquente que peu de monde, si on exclue Ciulin. En quelque sorte, Baphomet est une sorte de bouffée d’air frais.

Subitement, il l’invite à ployer et c’est ce qu’elle fait, avec une grâce évidente et une souplesse presque surnaturelle. Sans savoir exactement pourquoi, elle continue d’entrainer son corps à la discipline de la danse classique.
Lorsqu’elle se redresse, elle arque un sourcil, amusé.

- Echec et mat. Ce move-là, c’est pour « achever » la pauvre « victime ». Crois-moi !

Il n’y a rien de plus sexy qu’un homme capable de vous accompagner dans ce genre de mouvement qui demande une certaine maitrise de son corps mais aussi de prendre soin de sa partenaire pour ne pas lui faire mal. Enfin à son avis.
Elle se laisse volontiers entrainer par les improvisations de Baphomet mais bute malencontreusement contre ses ailes. Le duveteux des plumes caresse sa peau nue et elle en frissonne comme si on la chatouillait avec.

- Oups ! Désolée… fait-elle la mine contrite. Ça ne t’a pas fait mal ? Faut que je m’habitue, tu es mon premier partenaire ailé.
- Tu dragues facilement avec un tel déhanché, non ? C'en est presque de la triche, à ce stade.
- Tu trouves ? J’étais payée pour ça. J’ai fait du strip-tease pendant quelques temps. Aguicher les clients… j’étais assez douée, sans fausse modestie. Mais si je sors en boîte, c’est pour danser. Les personnes qu’on pêche dans ce genre de soirée valent pas le coup, à mes yeux. Y’a rien de pire que de te réveiller à côté de quelqu’un sans plus savoir pourquoi il est là et qui il est. Elle le fait tourner sur lui-même et évite habilement ses ailes cette fois, les frôlant à peine. Mais encore une fois c’est parce que je suis une vieille romantique.

La musique change à nouveau et passe sur une balade bien plus lente et douce.
- Je suppose que tu maitrises le slow ? Elle passe une main dans ses cheveux. J’ai du mal à me rappeler pourquoi je suis venue à la base, lâche-t-elle avec un petit rire avant de lui sourire, les yeux encore pétillants de ce qu’elle vient de partager avec lui. Merci. Pour la danse. Ce moment j’ai pas envie de l’oublier non plus.

Les voilà en train de danser, alors que minuit est passé depuis longtemps, serrés l’un contre l’autre dans une étreinte que Lexi pourrait qualifier de réconfortante. Une étreinte qui veut dire, « tu n’es pas seul-e ». Une drôle de sensation si l’on considère qu’ils ne se connaissent pas. Enfin elle ne le connait. Lui en sait déjà plus sur elle qui quiconque en ce monde.  

- Tu es venue pour m'engueuler, à la base...
- Ah oui ? demande-t-elle d’une voix un peu ailleurs, les yeux fermés. Tu devais l’avoir mérité. Heureusement tu es un bon danseur, ça rattrape. C’est plutôt agréable non ?

Mais c’est bien connu, toutes les bonnes choses ont une fin. Toujours. Alors qu’ils se regardent dans les yeux, quelque chose passe entre eux. Du moins c’est l’impression qu’elle a. Lexi lui a déjà confié sa mémoire, elle vient de lui donner autre chose. Elle ne sait pas encore quoi mais son instinct lui dicte que c’est quelqu’un de bien et qu’il en prendra également soin.  

- Merci. Pour la danse. Ce moment, j’ai pas envie de l’oublier non plus.
- Je ne vais pas te laisser l'oublier, tu peux me croire.
- Je sais… déclare-t-elle sans une hésitation, avec le sourire en se rasseyant sur le lit.
- Tu voudrais qu'on sorte un soir, pour s'entraîner sur le terrain ?

Surprise, Lexi le regarde avec des pétillements amusés dans le regard. Elle a bien du mal à voir pourquoi un être tel que lui cherche sa compagnie. Elle n’a rien de spécial, n’est rien d’extraordinaire. Mais elle se dit que peut-être… peut-être que c’est cela qui cherche. Quelqu’un d’ordinaire, qui aurait toujours un peu de mal à voir autre chose qu’un simple homme.  
- En tout bien tout honneur et une fois qu'on aura fini ce qu'on était en train de faire, bien entendu !
Elle se rend compte qu’elle a mis énormément de temps à répondre. Elle lâche un petit rire.
- En tout bien tout honneur, évidemment ! Tu sais quoi ? Ca me ferait énormément plaisir, répond-elle finalement, le sourire plus grand que jamais. Ça fait longtemps que je ne suis pas vraiment sortie. Je veux dire… en dehors du chaperonnage de ces messieurs mes collègues.

Elle lui tend résolument la main.

- Finissons-en alors. On pourra s’amuser après. En tout bien tout honneur, répète-t-elle.
Lorsque sa main finit dans la sienne, elle la serre brièvement en la regardant fixement.
- Quoi que tu puisses voir dans ma tête, je veux tout garder. Mais ne te sens pas obliger de dire quoique ce soit sur mon passé. Et promets-moi que… elle lève son regard vers le sien, ne me regarde pas différemment après. S’il te plait.

- Je sauvegarde tout, et crois que je trouve, je ne te regarderai pas différemment après.

Le soulagement de Lexi est perceptible. Elle pousse un petit soupir discret tout en l’observant avec attention. Elle n’a peut-être aucun super pouvoir mais elle se flatte de savoir déceler les mensonges. Or elle n’en note aucun dans la voix de Baphomet.

- Merci, souffle-t-elle avec sincérité.
- Jamais j'oserai.
La jeune femme hausse un sourcil amusé, saisissant le changement subtil de ton, plus léger soudain.  
- Ah oui ? Pourquoi donc ?
- T'es ma prof de danse après tout.
- C’est vrai. Du coup j’ai le droit à une certaine respectabilité c’est ça ?
- Ton regard à toi n'a absolument pas changé envers moi. Je ne peux qu'être admiratif de cela.
Elle lui sourit tranquillement en s’allongeant, le regard perdu vers le plafond.
- En fait… je ne vois pas tellement de différences entre toi et moi. Bon… si on omet deux, trois trucs… mais dans le fond, on reste des êtres sensibles avec des forces et des faiblesses, de bonnes et de mauvaises actions… non ?

- Bon, Le voyage de Lexi, partie deux.
- C’est souvent la partie la plus ratée la seconde non ?
- Es-tu prête, ma grande ?
Longue inspiration. Elle tourne la tête, admirant la blancheur des ailes qu’il a gardé déployées.  
- Je crois. Elle ferme les paupières, un léger sourire aux lèvres. Tu seras comme une sorte d’ange gardien alors ? Tu as déjà les ailes après tout...

Elle essaie de se détendre mais définitivement, le sommeil ne viendra pas pour le moment. Son corps s’alanguit sur le matelas, alors qu’elle confie à nouveau les tréfonds de sa mémoire aux mains de Baphomet.

Il remonte petit à petit dans ses souvenirs, revivant le nombre de missions à l’étranger et ce qu’elles ont apporté d’horreurs et de joies simples, de sentiments de triomphe et d’utilité. Puis il revit avec elle son profond chagrin d’amour. Un amour qui n’est même pas eu le temps de s’épanouir puisqu’il a été rejeté et piétiné avec violence. Et des larmes irrépressibles commencent à couler le long des joues de la jeune femme sans qu’elle ne bouge.
Les danses, la musique des clubs, assourdissantes, la perte dans un autre type de danse, sa pudeur qui souffre devant des yeux assoiffés qui ne voient qu’une pièce de viande.

Plus loin encore, le visage de sa mère lorsque les résultats de ses examens tombent, ce gouffre qui s’est ouvert à ses pieds et sa chute lente lorsqu’elle s’y est laissée tomber. La danse sur scène, les applaudissements qui lui donnent envie de vomir, le regard réprobateur et écœuré de son petit ami lorsqu’elle lui a confié ce qui s’est passé cette nuit-là avec leur metteur en scène…

Cette nuit-là, l’odeur de son after-shave, son haleine de bonbon à la menthe, la douleur alors qu’elle se débat un peu, puis la vue de ce meuble vers lequel elle a tourné la tête pour ne plus le voir et cet engourdissement total du corps, plus poupée de chiffon qu’humain. Un corps avec lequel elle s’est déconnecté.

Les entrainements, encore et encore. La douleur dans ses jambes, ses pieds, le regard réprobateurs de sa mère, toujours, lorsqu’elle demande à prendre une pause, les enchainements, encore et encore et encore… pour atteindre une perfection qu’elle n’obtiendra jamais.

Evidemment il y a aussi des moments plus heureux mais le cerveau est un organe vicieux qui a tendance à garder le pire pour oublier le meilleur. Pourtant il y en a, plus profondément certes mais ces moments tentent de compenser comme ils peuvent les mauvais.

Sa joie de danser, toujours présente même ternie, son sentiment d’avoir eu une place quelque part dans l’armée, cette nouvelle camaraderie qu’elle découvre avec son unité, son envie profonde de survivre, envers et contre tout, son émerveillement face à la beauté qu’offre encore ce monde, cette sensation d’avoir vécu tout cela pour grandir et pour trouver qui elle est au fond d’elle, d’aller chercher dans ses derniers retranchements et constater combien elle est bien plus forte qu’elle ne le pense. Tout cela aussi, elle le garde en elle et ne veut pas l’oublier.

Le temps s’écoule sans qu’elle ne sache exactement à quelle vitesse. Combien de temps durent ses réminiscences qu’elle voit passer comme un film dont elle serait l’héroïne principale ?
Lorsque tout s’arrête, elle est toujours en pleurs et laisse même échapper quelques sanglots. Pourtant, il est lui est impossible de savoir si elle pleure de tristesse ou d’autres choses.
Ses émotions sont tellement emmêlées qu’elle n’arrive plus à faire la distinction. Elle a toujours été beaucoup trop sensible et empathique. Elle ouvre les yeux pour constater qu’elle a trempé l’oreiller.

- Désolée… je… un hoquet fait dérailler sa voix. Son regard balaie la pièce, tente de s’accrocher à une bouée quelconque et c’est finalement sur Baphomet qu’il se fixe.
- Ça… ça a marché ? Tu as réussi ?  

Force et faiblesses, bonnes et mauvaises actions…

« Moi ? J’ai jamais rien fait de mal ! Suis toujours resté pur et innocent ! »

Ironie ? Exagération ? Rho, si peu. D’autant qu’elle me traite d’ange-gardien…

« Je t’en prie, ne m’insulte pas non plus… » je dis en ayant un petit rire presque moqueur envers moi-même

J’ose pas lui dire que le second voyage sera pas mauvais, mais plus intense. Elle me fait confiance, et cela changera tout, absolument tout. Je sais qu’elle a des choses avec lesquelles elle n’est pas à l’aise dans son passé. Je suis à la fois curieux, et pressé d’en finir, que nous puissions passer à autre chose, enfin.

Je vis avec elle, à travers elle, l’horreur de ‘cette nuit-là’…

Je ne suis pas dans le rôle du violeur qu’on me prête si souvent trop volontiers. Et je suis en train de vivre la parfaite séance du pourquoi je ne peux pas blairer qu’on puisse penser que j’abuse de qui que ce soit. Ces yeux sur moi, sur nous, qui se font plus possessifs que quoi que ce soit d’autre. Son plaisir qu’il prend au détriment de Lexi… Ce n’est pas cela, le vrai plaisir. Non, il faut que j’arrête. Si je continue, je vais implanter mes pensées en elle, et ce n’est pas ce qu’elle souhaite. Je retourne à mon état de spectateur, me contentant de subir, sans penser, sans réfléchir.

…J’ai… un truc… avec le viol, et pas un truc positif.

Ce type, où qu’il soit, s’il est encore en vie, ne risque de ne pas l’être pour très longtemps. Il ne résistera pas aux images que je vais lui envoyer, encore et toujours, jusqu’à ce qu’il craque. S’il est déjà mort, alors je le trouverai et lui ferai subir tous les tourments que mes pires fantasmes peuvent m’inspirer. Tu vois, Lexi ? J’ai pas grand-chose d’un ange gardien. Ma main se crispe sur mon drap et quelque chose me mouille l’avant-bras.

OK, pause !

Je laisse Lexi inconsciente sur mon lit, et m’allume une cigarette magique. J’ai besoin d’oublier un peu, un peu pour ne pas m’impliquer trop. C’est déjà trop tard, je le sais. Je tire un peu trop violemment dessus ce qui fait qu’elle est rapidement consommée. Voilà. Nous pouvons reprendre. Les souvenirs plus joyeux s’enchaînent. L’aventure, la volonté, l’armée. Ses bons et ses moins bons côté… Enfin tout se termine. Elle s’éveille et reprend conscience doucement.

« Bonjour et bienvenue. Veuillez rester assis jusqu’à l’arrêt complet du véhicule. Nous avons bien atterri et nous espérons que vous avez fait bon voyage sur Air Baphomet. Il est 2h heure locale. Nous espérons vous revoir rapidement sur nos lignes. »

Je saute dans le lit, à ses côtés.

« Comment tu te sens ? »

Je montre la bouteille du souvenir, remplie de volutes argentés.

« Bien sûr que ça a marché !

Les joues noyées de larmes, Lexi se redresse lentement et les essuie de ses paumes. Mais le flot ne semble pas vouloir se tarir. Sans hoquet, en silence cette fois.

- Je suis désolée… ça coule tout seul.
Comme si elle libérait le cumul de nombreuses années de larmes ou d’émotions enfuies.
- Bonjour et bienvenue. Veuillez rester assis jusqu’à l’arrêt complet du véhicule. Nous avons bien atterri et nous espérons que vous avez fait bon voyage sur Air Baphomet. Il est 2h heure locale. Nous espérons vous revoir rapidement sur nos lignes.
Elle éclate d’un rire mouillé.
- Je crois qu’il y a eu quelques turbulences. J’espère que le duty-free vaut le coup à l’arrivée… j’ai une grosse envie de chocolat… et d’herbes. Ça sent l’herbe non ? C’était si terrible que ça que tu aies dû en consommer pendant le vol ?
- Comment tu te sens ?

Bonne question. Elle a du mal à mettre des mots sur son ressenti… comme si elle ressentait trop de choses à la fois. Une pelote d’émotions si serrées qu’il lui est impossible d’en identifier une sans que l’ensemble ne vienne avec.
Elle frotte doucement ses tempes avant de tourner la tête vers lui.

- C’est difficile à dire… Bien… et en même temps, j’ai l’impression qu’un trente-trois tonnes vient de rouler dans ma tête. Deux fois. Un peu… groggy, je crois. C’est un peu comme si ma vie venait de défiler devant mes yeux. Est-ce qu’il faut que je m’attende à mourir d’un moment à l’autre tu crois ? plaisante-t-elle maladroitement.

Elle s’enquiert enfin de la réussite de leur entreprise. Fascinée, elle observe la danse de la sorte de fumée prisonnière de sa bouteille.
- C’est…
- Bien sûr que ça a marché !
- Hallucinant. Je suis en train de regarder mes souvenirs ! Qu’est-ce qui se passerait si on ouvrait cette bouteille ? Il se disperseraient aux quatre vents ?
C’est presque naturellement qu’elle vient glisser sa tête contre l’épaule de Baphomet avec un soupir, faisant attention à ne pas écraser ses plumes au passage.
- Et toi ? Comment tu te sens après tout ça ? Ça doit être épuisant de … d’être spectateur de toute une vie. Même si la mienne est courte. Je suppose… que tu as… tout vu ?

Bah voyons, ça coule tout seul. On ne me l'avait jamais faite, celle-là. On m'avait déjà dit "je transpire des yeux", ou encore "ça pleut dans mon regard". Enfin...

"C'est normal, t'inquiètes. T'as eu une vie chargée en émotion."

Elle veut du chocolat et de l'herbe ? Je lui montre mon index, l'air de dire "n'en dis pas plus !" et je vais dans ma cuisine chercher des... cookies magiques. Tadaaa !

"Votre tutti frutti est avancé, mademoiselle."

Si terrible que ça ? Naaah, je m'autorise un p'tit bédo à chaque fois !

"C'est juste que t'as vécu un de mes pires trigger."

OH PUTAIN ! J'ai pensé ce que j'ai dit, et j'ai dit ce que j'aurais dû penser ! Je secoue la tête, hausse une épaule, pour minimiser au maximum l'impact de cette révélation.

"Mais bon, m'en suis remis sans souci."

J'éclate de rire à sa blague. Déjà, elle blague, donc c'est bon signe.

"Noooon, pas déjà. Et puis ce serait con de mourir maintenant !"

Je la laisse prendre la bouteille. Elle semble fascinée. C'est vrai que c'est beau, ces machins. On a très vite tendance à oublier quand on est dans ma position. Je la laisse découvrir son bien le plus précieux. Après tout, ce qui nous appartient en pur, en dur, et de droit, tout ce qui nous appartient, se trouve dans les quelques centimètres cubes dans nos crânes.

"Si tu l'ouvres toi, il faudra juste recommencer. Si tu l'ouvres plus tard si tu as perdu tes souvenirs, ils reviendront en toi de manière peut-être un peu brutale, chaotique en tout cas. 'Paraît que s'il y a des gens qui dorment autour de toi pendant que tu ouvres, ils rêvent de tes souvenirs, mais j'ai jamais pu vraiment le vérifier."

... C'pas comme si beaucoup de gens acceptaient de dormir avec moi...

Je trouve adorable que Lexi s'en fasse pour moi. Je lui fais un sourire reconnaissant. J'aimerais lui dire que tout va bien, que j'ai l'habitude, que plus rien ne m'atteint. Ce serait lui mentir les yeux dans les yeux. Cependant, j'ai tenu parole : elle n'a pas changé, pour moi.

"J'me sens un peu fatigué, comme si j'avais dû trier tout un dossier, une fatigue mentale, tu vois ? Par contre, c'est pas parce qu'une vie est courte qu'elle en est moins intense. C'est souvent le contraire d'ailleurs."

Comment lui répondre, pour la fin ? Mentir serait si simple. Seul mon visage s'autorise un sourire.

"Tout vu, tout vécu, tout ressenti, à tes côtés, miss."

Je lui tends trois cookies.

"Celui avec les pépites de chocolat blanc et framboise est le plus léger de tous. Celui avec le chocolat au lait est moyen, et celui avec le chocolat noir est assez fort. Si t'as pas l'habitude, je te conseille de ne pas commencer par celui-là."

- Si tu l'ouvres toi, il faudra juste recommencer. Si tu l'ouvres plus tard si tu as perdu tes souvenirs, ils reviendront en toi de manière peut-être un peu brutale, chaotique en tout cas.
- C’est aussi simple que ça alors.
- 'Paraît que s'il y a des gens qui dorment autour de toi pendant que tu ouvres, ils rêvent de tes souvenirs, mais j'ai jamais pu vraiment le vérifier.
- Quelle horreur… j’infligerai ça à personne. Elle grimace en se rendant compte de ce qu’elle vient de dire. Enfin à toi je te l’ai bien infligé et j’en suis désolée.

Et c’est cette culpabilité qui la pousse à s’enquérir de son état. Après tout, ils étaient deux dans cette opération. Une équipe.

- J'me sens un peu fatigué, comme si j'avais dû trier tout un dossier, une fatigue mentale, tu vois ? Elle hoche vaguement la tête. Par contre, c'est pas parce qu'une vie est courte qu'elle en est moins intense. C'est souvent le contraire d'ailleurs.
- Disons que j’ai réussi à cumuler pas mal de chose en moins de trente ans. Trop de chance hein ? Je suppose… que tu as… tout vu ?

- Tout vu, tout vécu, tout ressenti, à tes côtés, miss.
- Je vois… déclare-t-elle sobrement la gorge serrée. Merci d’avoir été à mes côtés pour cette fois alors.

Elle se hisse sur un coude pour admirer les cookies et écoute attentivement leurs descriptions. Elle lui glisse une œillade amusée.
- J’ai l’habitude. Enfin j’ai eu. Mais je vais prendre le lait. Parce que le chocolat blanc c’est pas du vrai chocolat. J’imagine que tu n’as que de la qualité…
Elle le dépieute le biscuit dans l’assiette pour éviter de mettre des miettes partout et en prend quelques bouchées.
- Y chont achement bons ! déclare-t-elle la bouche pleine.

Après en avoir fini un, elle s’alonge à nouveau et observe le profil de Baphomet. Elle ne sait pas si c’est déjà son space cookie qui agit ou si c’est un ensemble, mais elle se sent déjà plus légère. Une impression soudaine d’être hors du temps et de l’espace.
Elle se tourne sur le ventre et se perche presque au-dessus de lui, ayant visiblement oublié les limites de l’espace personnel. Oubli confirmé lorsqu’elle touche la cicatrice qui lui barre une lèvre.
- Comment tu t’es fait ça ?

La joue en appuie sur son poing, elle hésite avant de demander dans un souffle, comme s’il le dire doucement suffisait à en atténuer la portée.

- T’as dit que le… enfin ce qui m’est arrivé, aujourd’hui encore, elle a du mal à se dire qu’il s’agissait bel et bien d’un viol, c’était un de tes gros triggers… est-ce que ça veut dire que … toi aussi tu … enfin… t’as aussi subi ça ?
Sa demande finit dans un murmure. Elle sait pourtant ce qu’il est et voit mal comment quiconque aurait pu le forcer mais elle ne veut présumer de rien.

Wow
Je l’accompagne dans sa dégustation de cookie. Ouais, ils sont bons. Normalement, ils sont pas aussi bons… Elle fait un excellent choix en tout cas, de toute première qualité.

Elle est super proche à nouveau, là, non ? Enfin, elle s’est rapprochée et je me demande un instant pourquoi, si c’est mon aura qui jarte les inhibitions ou si c’est autre chose. M’enfin elle est super proche, et elle caresse ma lèvre avec ses yeux. J’ai rarement été aussi nerveux, putain. Est-ce que je me sens intimidé ? Tout à fait. Mais non, on se rassure, elle est juste curieuse. Tout va bien. D’ordinaire, je balance toujours une histoire de fou en mode héroïque. Cette fois, je lui aurais bien balancé un truc de pirate, ou une scarification volontaire…

« Un combat avec un autre comme moi. Avec mon frère. »

C’est la stricte vérité qui sort. Ce n’était pas tant un combat qu’une mutilation, ceci dit, mais moi, je luttais. Juste après, par une petite manipulation de ma part, il a oublié le pourquoi du comment. Bien fait !

…et elle me pose la question…

Bon, c’est partit pour le mode NSFW ! A plus tard tous les fragiles, vous allez me manquer.

« La contrainte est une chose que je ne peux pas blairer, qu’elle soit physique ou morale. D’ailleurs, pardonne-moi d’avance si, à force de me côtoyer, tu finis par développer des pensées subversives. Oh oui, Lexi, ça va arriver, mais ce sont des pensées que tu avais déjà en toi, j’espère pour ton supérieur qu’il n’a pas de comportement abusif. »

Est-ce que j’essaie de gagner du temps ? Noooon, je ne ferai jamais ça !

« Enfin bref. Pour te répondre, ce corps n’a jamais subit ce genre de choses… Cependant, je l’ai vécu, parfois. Dans un sens ou l’autre, à travers les souvenirs de victimes, ou pour m’assurer que j’avais bien retrouvé un prédateur. Le vivre avec tes yeux, ton ressenti, ton essence, je gère. Mais le vivre à travers l’autre… ressentir sa jouissance… »

Sans m’en rendre compte, mon visage s’est un peu fermé, et mes traits se sont tendus.

« Le pire de tout, c’est quand on me traite, moi, de violeur. A cause d’une parole déplacée, de mon métier, ou quand on se rend compte que j’ai le pouvoir de virer les inhibitions… Je deviens dingue, vraiment. J’veux dire, j’ai beaucoup de fantasmes, certains sont même basés sur l’idée de priver l’autre de liberté, mais toujours dans le consentement. C’est une différence qui fait sans doute subtilité pour la plupart de tout le monde, mais elle sépare le rêve du cauchemar, chez moi. »

Bon, on va peut-être pas rester là-dessus…

« Et toi, c’est quoi ton fantasme le plus inavouable ? »

Il faudrait sans doute que je la ramène, à un moment donné… sans oublier de prendre rendez-vous pour aller danser ! Enfin si elle veut toujours me revoir après ça, une fois que les désinhibiteurs se seront dissipés.

Cette histoire de frère interpelle beaucoup Lexi. Un autre démon quelque part ? … ou le terme de frère n’implique peut-être pas de lien du sang. Elle ne pose aucune question cependant. Comme si elle pressentait que le sujet était délicat. Elle lui offre une caresse de réconfort sur la joue.
Les effets de la drogue sont déjà présents dans son corps, la libérant petit à petit de ses angoisses et du reste de des souvenirs désagréables qui s’attardent dans sa mémoire.
Sans doute est-ce pour cette raison qu’elle se permet une question aussi terriblement intime.

- La contrainte est une chose que je ne peux pas blairer, qu’elle soit physique ou morale. D’ailleurs, pardonne-moi d’avance si, à force de me côtoyer, tu finis par développer des pensées subversives.
- Subversives ? J’ai l’air subversive ? déclare-t-elle avec un sourire amusé.
- Oh oui, Lexi, ça va arriver, mais ce sont des pensées que tu avais déjà en toi, j’espère pour ton supérieur qu’il n’a pas de comportement abusif.

Elle fronce les sourcils, sans trop comprendre de quoi il parle exactement.
- Tu as déjà rencontré un haut-gradé dans l’armée ? Evidemment qu’ils ont tous plus ou moins un comportement abusif. Elle fait un mouvement vers le haut. Enfin plus tu montes la pyramide et pire c’est. Elle a soudain une petite grimace drolatique comme si elle venait de se rendre compte de quelque chose. Tu gagnes du temps ou tu ne veux pas répondre ?
- Enfin bref. Pour te répondre, ce corps n’a jamais subit ce genre de choses…
Elle respire un peu mieux en entendant sa réponse sauf qu’il y a toujours un mais… Ce qu’il avoue ensuite l’horrifie au plus haut point.
- A travers les yeux… des violeurs ?
La tête qu’il fait suffit à lui répondre. Elle cherche ensuite sa main et la sert avec force. Elle n’a aucune idée de ce qu’il a vaincu et subi exactement mais il semble tous les deux avoir un passif compliqué avec le consentement.

- Je pense comme toi, tu sais. Cette différence, elle est primordiale. C’est pour ça que les simples coups d’un soir, je n’y arrive plus. Impossible de savoir sur qui tu es tombé, si c’est une personne de confiance ou non.
Un silence songeur les enrobe jusqu’à ce qu’il le brise par une question inattendue, bien plus légère que les siennes.
- Et toi, c’est quoi ton fantasme le plus inavouable ?
Elle en glousse, le sourire retrouvé et amusé.
- Tu risques d’être déçu ! Trèèèèès déçu. C’est rien de très fantasque.

Elle pince les lèvres, hésite malgré tout à poursuivre et rougit légèrement. Mais la drogue aidant, elle répond néanmoins.

- J’aime les jeux sensuels… pas menottes et chaines, tu vois mais plutôt mmm… liens de soie et bandeau sur les yeux… des choses… douces. Juste de quoi attiser et éveiller les sens… elle glousse à nouveau. Machinalement, elle trace des petits cercles sur le torse de Baphomet. Je suppose que tu vois exactement de quoi je parle. C’est étrange non ? Malgré tout… je cherche juste quelqu’un à qui offrir cette confiance absolue, cette certitude que tu peux te laisser aller et qu’il ne t’arrivera rien. Ca...ça je trouve ça super sexy ! Elle croise son regard, l’air un peu triste. Je ne rencontrerai sans doute jamais cette personne. Et je ne suis pas certaine de le vouloir. Pas alors que ma maladie est… bref. Elle se reprend et lui sourit vaillamment. Et toi, monsieur Baphomet ? C’est quoi tes fantasmes interdits. Sois franc hein… je ne suis pas en sucre.  

Ah bordel, elle a lu en moi !

Ouais, je gagne du temps, cocotte, je gagne du temps. Je soupire, et souffle presque ma réponse en relâchant la pression de mes poumons. Et elle pige tout, sans que je sois obligé de le lui dire deux fois. Elle pige tout et elle comprend à quel point cela peut être juste très horrible. Je ne suis pas un prédateur, je ne l'ai jamais été, et je ne le serais jamais.

Ah tiens, elle fait pas de coups d'un soir ? Carrément, elle n'y arrive plus ? Je vois. Cela doit être compliqué pour une femme dans sa position et son vécu. Je hoche la tête. Puis, je serre mon poing pour frapper le sien.

"J'te feel, sis' !"

Je pose LA question, et je ne peux pas m'empêcher de sourire quand elle me dit que je serai déçu. Déçu par un fantasme ? Jaaamaaaiiiis !

Et... je ne suis pas déçu, absolument pas. Je me pose même la tête dans la paume en l'écoutant. La confiance de l'autre, absolue, l'abandon total. J'ai un frisson qui me parcourt toute l'échine alors qu'elle prononce ces mots. Oh, ouais !

"Oui, je te comprends parfaitement. Je vois très exactement de quoi tu parles."

Qu'est ce que je donnerai pour connaître ça, moi aussi ! Cette idée d'abandon est très plaisante, la confiance absolue et illimitée. J'imagine la caresse d'une main sur mon épaule, puis le contact des lèvres sur les miennes, alors que je suis totalement entravé.

Ouais, il fait chaud !

Et puis la mélancolie s'invite chez elle. Elle doute pouvoir le rencontrer un jour ? Mais... Pourquoi ?

"Je suis persuadé que tu le rencontreras. Au pire, je gagnerai ta confiance, et je te ferai vivre ça. Pas tout de suite, bien sûr, mais je suis certain que je peux y parvenir."

Oh putain, ça y est, elle m'a séduit ! Je connais ce sentiment, il ne va pas me lâcher tout de suite.

"Moi ?"

Non... Non... On va pas lui raconter...

"Alors j'ai le fantasme avec la none, celui avec l'extra-terrestre, celui avec la prison, celui..."

Je compte sur mes doigts comme si la liste était longue. Cependant, je m'arrête bien vite.

"Tous ces fantasmes sont parfaitement avouables..." Je me mords la lèvre. Est-ce que je peux lui révéler ça ? "Mon fantasme le plus inavouable que je dirai que tu as menti si jamais tu en parles, et je te laverai la mémoire à coup de savon noir, et le fait d..." PUTAIN ! "... C'est que quelqu'un me désire au-delà de toute vraisemblance, de toute logique, et de toute inhibition." Enfin bon, dans mon cas, je sais que ça n'arrivera réellement jamais, ne serait-ce que par ma simple aura. "Bref, que l'autre personne se mette à être réellement entreprenante et que quoi qu'il arrive, elle cherchera aller jusqu'au bout. Être... sa proie, en quelque sorte, son obsession... Putain, ce que c'est présomptueux..."

...Ouais, voilà, maintenant, elle va me trouver zarbi !

"Comment tu peux être certaine que ça ne t'arrivera jamais ? Le coup de foudre, ça arrive, et la confiance, ça se mérite."

- Je suis persuadé que tu le rencontreras. Au pire, je gagnerai ta confiance, et je te ferai vivre ça. Pas tout de suite, bien sûr, mais je suis certain que je peux y parvenir.

Lexi lui dédie un sourire tranquille. Tout lui semble tranquille…
Alors qu’elle est couchée dans le lit d’un presque inconnu, à côté de lui, à lui confier à peu près tout ce qu’elle est.
Un effet des cookies à la saveur particulière, certainement, mais autre chose aussi. Quelque chose lié à Baphomet, à son caractère qui la met déjà bien assez en confiance pour rester là, sans qu’une crainte ou angoisse en vienne parasiter sa cervelle.
- Tu sais quoi ? Elle a un petit rire involontaire et se penche pour déposer un baiser sur la joue de Baphomet. Si tu le voulais, tu aurais toutes tes chances. Et toi, monsieur Baphomet ? C’est quoi tes fantasmes interdits. Sois franc hein… je ne suis pas en sucre.  
- Moi ?

Elle hoche la tête et plante son regard dans le sien, dans l’attente d’une réponse.

- Alors j'ai le fantasme avec la none, celui avec l'extra-terrestre, celui avec la prison, celui...
- … de l’infirmière ? Allez… dis-moi qu’il y a l’infirmière ! Pense à ce métier difficile ! Elle éclate de rire. Attends… attends… t’as dit extraterrestre ? Je… quel type exactement ? Genre Superman ? Mars Attack ? Twi’lek de Star Wars ?  
- Tous ces fantasmes sont parfaitement avouables...
Elle note son hésitation.
- Ce qui veut dire qu’il y en a d’autres… allez avoue tout !
- Mon fantasme le plus inavouable que je dirai que tu as menti si jamais tu en parles, et je te laverai la mémoire à coup de savon noir, et le fait d...
- Wow… tu tiens ton suspense toi. C’eeeeeest ? Promis, je ne dirai rien. Pour faire bonne mesure, elle mime une fermeture éclair qu’elle verrouille sur ses lèvres.
- … C'est que quelqu'un me désire au-delà de toute vraisemblance, de toute logique, et de toute inhibition. Bref, que l'autre personne se mette à être réellement entreprenante et que quoi qu'il arrive, elle cherchera aller jusqu'au bout. Être... sa proie, en quelque sorte, son obsession... Putain, ce que c'est présomptueux...
- Tu déconnes ? C’est vachement sexy. Et puis c’est un fantasme, ça n’a pas besoin d’être rationnel ou humble.

Seuls les faibles bruits nocturnes et lointains viennent troubler le silence.

- Comment tu peux être certaine que ça ne t'arrivera jamais ?
- Quoi ?
- Le coup de foudre, ça arrive, et la confiance, ça se mérite.
Lexi tourne la tête pour le regarder.
- T’y crois toi ? Au coup de foudre ? Moi j’ai du mal… enfin je n’ai jamais rencontré quelqu’un qui en ait été victime. On peut dire victime au moins ? Bref… Oui elle aussi essaie de noyer le poisson. Ça n’arrivera pas parce que je ne laisserai pas la chose arriver. Elle soupire et se cale sur un coude, le corps tourné vers son hôte. Je te donne un exemple, ok ? Imagine une seconde : on tombe amoureux, l’amour fou comme dans les films. Presque trop merveilleux pour être vrai. Et là, tu apprends que non seulement je suis malade mais qu’en plus tu vas devoir m’accompagner pendant ma leeeente très leeente dégénérescence. Elle déglutit et essaie de faire descendre la boule d'émotions qui vient se loger dans sa gorge. Que chaque jour qui passe tu te demanderas si aujourd’hui j’aurais oublié quelque chose, si je vais avoir une crise… Tu vois ? C’est horrible. Parfaitement horrible. Je peux pas laisser quelqu’un gâcher sa vie avec moi. Parce qu’il n’y aura pas de happy end. Pas d’enfants, pas de vie de famille, peu à peu plus de vie de couple… Laisser quelqu’un s’attacher à moi, c’est le mettre en prison. Elle baisse les yeux et secoue légèrement la tête. Tu comprends ? Je peux pas laisser faire ça…

Elle m’a embrassé ! Bon, pas pour de vrai, mais ça m’electrise, cependant, c’est loin de ce qu’elle me provoque quand elle me dit que j’ai toutes mes chances avec elle. Baphomet ? ON SE CALME ! C’est sans doute juuuuuste ton aura et le cookie, rien de plus. Non, on arrête d’avoir ce genre de pensées. STOP ! Refoule-moi tout ça, voilà, on est sage ! Si ça doit arriver, ce ne sera pas ce soir, ce sera quand tu seras certain d’avoir toute sa confiance, pas alors qu’elle est vulnérable, dans ton lit, et droguée.

Putain, achevez moi…

Bon, allez, je lui déballe tous mes délires chelous. Bon, peut-être pas tous tous parce qu’on y est encore demain. A moins qu’on ne soit déjà demain ? Je ne sais pas. Le temps passe comme il veut. J’suis pas sa mère.

"L’infirmière, ouais, mais j’suis plus psy, dans le genre fantasme. Quelqu’un qui trouverait sexy de voir à quel point je suis fucked up et qui décide de passer à un traitement différent. Le genre timide, avec des lunettes, qui cache une bête sauvage débridée."

Voilà, j’imagine Lexi en infirmière sexy du front dans une guerre quelconque. Le genre badass, couvert de boue et de sang, arrivé à un point où la folie prend le pas sur la raison et… BREF

"Nah, question extra-terrestre, je suis plutôt Mr Spock, avec son air de ne pas y toucher et sa capacité à lire dans les pensées. Je te jure que je lui ferais perdre son air sérieux avec grand plaisir !"

Nous en rions jusqu’à ce que je passe à mon vrai fantasme, celui condamné à n’être qu’une envie, une idée, obsédante, mais toujours abstraite. Etrangement, elle ne se moque pas et trouve cela même très sexy. J’admets être très surpris. Je pensais qu’une femme comme elle n’aimerait pas trop qu’on s’approche d’elle. Si je n’avais pas lu dans ses souvenirs, je penserais même que les mecs feraient la queue pour pouvoir lui réaliser ce fantasme. D’ailleurs, on prend le ticket où ?

Elle m’avoue le pourquoi du comment de son problème à tomber amoureuse, et cela fait sens, à une exception près…

"Fais attention, la prison est un de mes fantasmes aussi…"

J’en rigoles mais reprend un air sérieux.

"La vérité est que tu n’as pas à décider. Déjà, un coup de foudre, ça ne se commande pas. Et puis vous serez deux, pas toi toute seule. Vivre avec quelqu’un de condamné est terrible, mais vivre sans savoir ce que ça aurait pu être malgré tout… C’est… impossible. Nous sommes tous amenés à finir un jour, quoi que nous fassions. Donc relax et laisse le truc venir. Peut-être que ça ne t’arrivera pas, mais si ça vient quand même, que l’autre est digne de confiance… Tu n’as pas le droit de le repousser."

Non mais deviens pas sentimental en plus d’être relou !

"Ce que le démon essaie de te dire, c’est que si quelqu’un arrive à passer outre ton foutu caractère, il a le droit de tenter sa chance."

Si elle se condamne dès maintenant, alors je pense que je perdrais un bon gros paquet de points en foi en l’humanité…

"Tu sais où tu aimerais aller danser ?"

Lexi glousse bêtement lorsqu’il précise ses spécificités en termes d’infirmière et d’alien. Elle rit tant qu’elle en a mal au ventre.
Et puis le sujet redevient sérieux et tourne autour d’un avenir qu’elle ne veut pas envisager et elle lui en explique très précisément les raisons, espérant qu’il comprenne son ressenti.
- Fais attention, la prison est un de mes fantasmes aussi…
- Pff t’es con ! ricane-t-elle en se rallongeant, la tête penchée pour la presser contre son bras. Tu veux qu’on joue au méchant brigand et au shérif ? Ou une version plus moderne ?

Oui c’est stupide, mais ça fait du bien aussi de rire de choses simples. La drogue aidant certainement, son état de fatigue aussi.  

- La vérité est que tu n’as pas à décider.
- Décider quoi ? Elle a perdu un peu le fil.
- Déjà, un coup de foudre, ça ne se commande pas.
- Ah… Non, mais je pourrais fermer très fort les yeux et boucher mes oreilles ! Technique imparable.
- Et puis vous serez deux, pas toi toute seule.
Elle bouge un peu pour le regarder.
- Les coups de foudre ou les sentiments c’est pas toujours réciproque tu sais… tu as vu…
- Vivre avec quelqu’un de condamné est terrible, mais vivre sans savoir ce que ça aurait pu être malgré tout… C’est… impossible.
- Si ça l’est… il suffit de tout arrêter avant d’être trop attaché.
- Nous sommes tous amenés à finir un jour, quoi que nous fassions. Donc relax et laisse le truc venir. Peut-être que ça ne t’arrivera pas, mais si ça vient quand même, que l’autre est digne de confiance… Tu n’as pas le droit de le repousser.
- Carrément ! Je n’ai pas le droit… sinon quoi ? Elle pousse un lourd soupir et vient se pelotonner contre lui. Ca te ferait pas peur à toi ? De devoir jouer les aides malades ? D’aider l’autre à se lever, à manger, à s’habiller ? Répéter la même chose quand la mémoire déraille… enfin non, ça tu pourrais faire autrement… franchement on a vu plus sexy et épanouissante comme vie hein …

Mais à nouveau elle lève les yeux vers lui et lui offre un sourire un peu embué.

- Mais merci d’essayer de me remonter le moral. Vraiment. Je ne peux parler de ça avec personne. Du coup c’est sur toi que tombe le bureau des plaintes, désolée … Je ne donne pas la meilleure impression du monde
- Ce que le démon essaie de te dire, c’est que si quelqu’un arrive à passer outre ton foutu caractère, il a le droit de tenter sa chance.
Elle lui donne une petite tape sur l’épaule, faussement indignée.  
- Quoi ? De quel foutu caractère du parle ? Je suis parfaitement adorable ! …
- Tu sais où tu aimerais aller danser ?
- Partout ? Franchement je pense que tu es le mieux placé pour connaitre les coins sympas ! Je te fais confiance… Tout ce que je demande, c’est de la bonne musique, l’ambiance qui va avec et … un peu d’alcool pour désinhiber tout ça ! Si en plus je peux boire sans avoir peur de me faire droguer par un vicelard au passage… Elle se dandine un peu et appuie son menton contre son épaule. C’est pas des paroles en l’air hein ? Tu vas vraiment m’emmener danser ? Sa bouche est de plus en plus pâteuse et ses paupières papillonnent toutes seules. Et toi ? Y’a pas un truc que tu aurais envie de faire et où je pourrais t’accompagner ? Son visage se tort dans une drôle de mimique. Je veux dire… dans les limites de la respectabilité évidemment !

Putain

J'adore son rire.

La totalité de mes cellules de mon cerveau travaille d'arrache-pied pour que je m'en souvienne avec la limpidité la plus claire et la plus pure possible. OK, enregistrement effectué. On peut passer à la suite !

"Mon délire à moi, ce sont les deux taulards qui n'ont plus rien à perdre, ou le méchant, genre vraiment méchant..." je m'approche d'elle, bien conscient que je suis en train de jouer à un jeu dangereux. "... que la gentille représentante des forces de l'ordre essaie de mettre à table, avec des méthodes plus ou moins douces."

Nous discutons de son cas de figure et elle ne démord pas qu'elle pourrait choisir de tomber amoureuse ou pas, blablablaaa... On l'a TOUS dit, "moi, si ça m'arrive un jour, jamais je me laisserai avouaaar..."

Laissez-lui le temps de quelques RPs pour se rendre compte.

Et puis... Putain de merde... Elle arrive encore à me réduire au silence en se blottissant contre moi. Je pense que les gens du monde entier l'ont payée pour me faire fermer ma grande gueule.

"Moi ? Peur ?" Je cherche le piège de la question. N'en trouvant aucun, je me lance les deux pieds dedans. "Je ne vois pas les choses ainsi. Les gens ne me font naturellement pas confiance. Alors si un jour, tu me fais suffisamment confiance pour me confier ta vie, j'en serais plus qu'honoré." On va pas se mentir, ce rôle ne me sera sans doute pas réservé. "Et puis si ta mémoire déraille, cela veut dire que tu oublieras vite mes conneries. Cela veut aussi dire que je pourrais t'offrir un cadeau plusieurs fois dans la même semaine sans jamais que tu te lasses."

Je baisse les yeux vers elle avant de les lever au ciel.

"Tu fais de ma vie un tel enfer... t'as raison."

Et mes bras se resserrèrent autour d'elle. J'ai un ricanement quand je reçois une tape sur l'épaule.

"Ouais... adorable..."

Bon, parlons peu, mais parlons danse ! Je réfléchis rapidement à des endroits sympas et sécures. J'ai quelques idées de clubs un peu privés, des trucs plus accessibles et moins select...

"Bien sûr que je t'emmène danser ! Essaie de m'en empêcher, tu verras."

Et... elle me ré-achève. Je reste bouche bée devant sa demande on ne peut plus incongrue. Il ne faut pas me faire une telle proposition, jamais ! En fait...

"Il ne faut pas me faire ce genre de proposition... Jamais !"

Parce que ce qui est respectable pour moi ne l'est pas pour quelqu'un d'autre.

"Mais... Soit. J'aimerais aller dîner. J'aimerais aller dîner comme si nous sortions ensemble et que tu essaies de me séduire et j'essayerai de faire de même pour toi."

...et ma vie vient de prendre un nouveau tournant !

Lexi pousse un profond soupir de bien-être.
Le lit moelleux, le corps chaud de Baphomet, la sensation d’être en sécurité et l’épuisement font un cocktail auquel il est difficile de résister. Et ça tombe plutôt bien parce qu’elle n’en a aucune envie.  
- Bien sûr que je t'emmène danser ! Essaie de m'en empêcher, tu verras.
- Même pas en rêve ! ricane-t-elle. T’as donné ta parole. Sa diction est de plus en plus pâteuse. Donner c’est donner… reprendre c’est volé. Et toi ? Y’a pas un truc que tu aurais envie de faire et où je pourrais t’accompagner ? Je veux dire… dans les limites de la respectabilité évidemment !

Il garde le silence et ça la réveille suffisamment pour qu’elle lui jette un coup d’œil. Il a l’air… pensif ? Etonné ? Elle a perdu le décodeur quelque part entre ses draps qui ne sentent pas la caserne ou … pire.

- Il ne faut pas me faire ce genre de proposition... Jamais !
- Ah ? Pourquoi y’a un genre de code de la proposition ? M’en fiche. Dis-moi !
- Mais... Soit. Elle sourit, satisfaite, et se recale confortablement. J'aimerais aller dîner. J'aimerais aller dîner comme si nous sortions ensemble et que tu essaies de me séduire et j'essayerai de faire de même pour toi.
Un peu surprise par sa demande, elle réfléchit à peine quelques secondes.
- Deal. Puis elle tapote son torse. Prépare-toi au rencard du siècle !
Elle glousse encore parce qu’elle dit n’importe quoi. En tout cas, c’est dans ses cordes et si elle peut lui offrir une soirée agréable, elle s’en chargera avec plaisir.
- Je vais nous organiser ça… elle baille profondément et sa respiration se calle déjà sur un rythme plus lent. Ca t’ennuie... si je reste… dormir juste… quelques… ?

Elle ne finira jamais sa phrase, happée par Morphée et toute sa clique. Qu’il le veuille ou non, Baphomet est condamné à lui servir de doudou.

*****

Lorsqu’elle s’est réveillée le lendemain, reposé et incroyablement détendue encore, il roupillait encore du sommeil du bienheureux. Après un sourire attendri, elle s’est glissée hors du lit et lui a mis la peluche de chèvre entre les bras.
Il recevra une photo de ce moment précis avec en légende sur son portable.
« Très émouvant de voir la famille réunie. Merci de ne pas m’avoir jetée hors de ton lit et pour le reste... Toujours en tout bien tout honneur ! smiley démoniaque qui sourit . A bientôt. »

Lexi n’a rien oublié de cette soirée ni de sa promesse. Mieux encore, elle se rend compte qu’elle a vraiment envie de repasser du temps avec Baphomet. Pourquoi exactement ? Parce qu’il est drôle, intéressant, prévenant et une monumentale anomalie du monde normal. Ça lui suffit amplement à vouloir fausser compagnie à ses collèges adorés pendant toute une soirée pour passer du bon temps avec un ... ami ?  
Elle a mis quelques jours à organiser ce fameux rendez-vous et comme elle a tenu à lui faire la surprise, elle s’est arrangée avec son personnel pour lui laissez une soirée de libre sans qu’il ne le sache.
Si bien qu’un après-midi, Baphomet reçoit un nouveau sms :

« Ce soir. Toi et moi on sort ! Rien de trop chic mais sape-toi pas trop mal quand même. Bises, à ce soir !»

Comme elle n’a AUCUNE envie de subir le moindre commentaire de la caserne en sortant habillée pour un rencard, c’est au Bouc et Mystère qu’elle se change grâce à la complicité de quelques filles qui semblent trouver le projet de faire plaisir à leur patron à leur goût. C’est d’ailleurs entourée par cette nuée de « bonnes fées » qu’elle finit maquillée sobrement si ce n’est une bouche bien rouge, ses courts cheveux très blonds légèrement échevelée – « Effet coiffé, décoiffé, je sors du lit ! Grave sexy ma chérie ! », vêtue d’une robe courte en dentelle noire ajourée qui laisse entrapercevoir ce qu’elle cache en dessous et perchée sur des talons qui risquent d’avoir sa peau ce soir. Bref le paquet.
Et si elle en croit les gloussements de ravissements de ses bienfaitrices, elle est plutôt dans le thème du rencard/séduction.
Lexi lève les yeux en ciel mais a bien du mal à se reconnaitre dans le miroir. Ça fait très longtemps qu’elle ne s’est pas apprêtée de cette façon. Et pour un homme en plus.

A l’heure convenue, elle monte jusqu’à l’appartement de Baphomet – il est là lui a glissé une serveuse ! Et encore heureux ! – et toque à la porte, légèrement nerveuse. Pourtant il n’y a aucune raison. Lorsque le battant s'ouvre, elle lui sourit, charmeuse et fait tourner sa clé de voiture, louée pour l’occasion, autour de son index.
- Bonsoir, Baphomet. Prêt à monter dans mon carrosse ?

Bon, proposition dite, et proposition acceptée. C'était facile, un peu trop facile. Et cette donzelle se met à pioncer dans mes bras, ce qui me fait éclater de rire, en tout bien tout honneur et sans la réveiller. Éclat de rire qui se transforme en fou rire quand elle se met à ronfler... Très classe, mademoiselle, très classe !

Bon, rapidement, j'suis crevé moi aussi alors, je m'endors dans ses bras, le sourire aux lèvres, un sourire à la fois amusé, et de pur bien être. Allez, bonne nuitée tout l'moooonde !

Malheureusement, au petit matin, Lexi s'est transformée en peluche. Je grogne en entendant mon portable, le regarde, grognement qui se transforme en ricanement, puis en deux heures de dodo supplémentaires.

Bon, elle a sans doute zappé notre discussion, c'est pas plus mal. Je vis ma vie, elle a la sienne, et c'est très bien comme ça. Le Bouc et Mystère se remplit plus ou moins tous les soirs et je me rends compte que je commence à avoir une jolie recette à la fin de la semaine. Je me concentre dans mon travail, essaie de trouver des infos, de glaner des trucs çà et là... Jusqu'au message.

"ELLE S'EN SOUVIENS !!!"

"Quoi ?"

"Non, pardon... Je... Oui, ces sièges iront très bien."

"Boss, t'es sûr que ça va ?"

"Farpaitement !"

J'annonce qu'il faudra pas trop compter sur moi ce soir, et pour une raison cheloue, ça passe. Je rentre dans mon chez-moi, fout la moitié de mes fringues par terre, et jette mon dévolu sur une chemise noire de satin, et... bon... pantalon noir, veste de smoking noire, lunettes noires, et chaussures rose fluo... non, noires aussi, rassure-toi.

Et quand quelqu'un frappe, je pose mon coude sur le côté de la porte, adopte une posture particulièrement détendue, j'ouvre avec un air mystérieux et...

PUTAAAAIN !

... OK

... Non mais OK

"Bonsoir, Lexi. Je suis prêt à te suivre où tu voudras."

Je suis beaucoup moins calme à l'intérieur que ce que j'ai l'air d'être, qu'on soit bien d'accord ! Et puis nous étions supposés nous séduire l'un l'autre, je suis dans la merde, moi, au sens figuré.

"Je te suis."

Je la laisse me devancer pour le plaisir d'observer.... sa.... démarche.

"Où allons-nous, très chère ?"

Oui, j'ai relevé les yeux. J'aime les lunettes de soleil qui font qu'elle ne sait pas très bien où je regarde. C'est absolument parfait.

- Bonsoir, Lexi. Je suis prêt à te suivre où tu voudras.
Elle ouvre la bouche puis la referme brusquement avec un rire léger.
- J'allais te demander si tu étais prêt à aller jusqu'en enfer...
Ce qui est une question particulièrement stupide pour un démon. Oui un démon... elle va sortir avec un démon ce soir. Et ça n'a rien d'une figure de style. Malgré tout, il lui suffit de le voir pour se sentir bien. A son aise. Ou presque.

Une part d'elle n'oublie pas qu'il s'agit presque d'un vrai rencard et une petite boule d'anxiété subsiste au creux de son ventre. Une anxiété qui n'a rien de désagréable mais qui au contraire la laisse un peu fébrile et très attentive au moindre faits et gestes de son compagnon. Lexi regarde Baphomet de haut en bas, une lueur appréciatrice dans le regard.

- Heureusement que j'avais dit pas trop chic ! déclare-t-elle avec un large sourire avant d'ajouter avec le plus grand des naturels. Tu es extrêmement séduisant, ça te va comme un gant.
Et quelque part, elle se sent flattée qu'il ait prit le temps de s'apprêter pour elle. Cela faisait longtemps que ça n'est pas arrivé.

- Je te suis.
Evidemment... elle lui lance un regard entendu, sachant pertinemment que de cette façon, il aura une vue imprenable sur son dos et la très large échancrure qui descend jusqu'au creux de ses reins. C'est essentiellement pour cela que ce genre de robe est créée. Elle a les joues qui chauffent un peu en songeant à ce dont elle a l'air.
"Une femme sûre d'elle et qui veut séduire ! C'est le but non ?"
Elle essaie donc de paraitre un minimum confiante et assurée sans savoir si Baphomet est vraiment dupe. Mais l'avantage de ce faux-vrai rencard, c'est qu'elle sait par avance qu'il ne la jugera pas, ni ne se montrera méprisant.

- Où allons-nous, très chère ?
- Tu ne veux pas garder la surprise ? Après tout tu as dit "où tu voudras !"
Arrivés en bas des marches, elle glisse un bras sous celui de Baphomet et fait glisser ses lunettes de soleil sur le bout de son nez.
- Il fait déjà presque nuit tu sais. Même si je veux bien admettre que ça peaufine le look.
Elle se gratte la gorge et s'accroche un peu plus à son bras.
- Ca... ça fait très longtemps que je ne suis pas "sortie" de cette façon avec un homme. Donc... il va falloir que tu me pardonnes si je me montre nerveuse, maladroite voire un peu des deux, avoue-t-elle avec un rire piteux. Mais je suis très heureuse de passer cette soirée avec toi !

Il le sait sans doute, mais ça lui parait plus naturel de communiquer comme s'il ne connaissait pas tout d'elle ou presque. Ils débouchent dans la rue et font face à l'Aston Martin DBS V12 grise qu'elle a réussi à se dégoter pour vraiment pas cher. Les avantages de la quarantaine et de son statut de militaire...
- Oui je sais... la voiture de James Bond ! J'ai carrément craqué mais... à rencard extraordinaire, voiture extraordinaire ! Et j'en ai marre des véhicules militaires.
Elle balance les clés dans le creux de sa paume.
- Tu veux conduire ce petit bijou ?

Sinon, elle s'y attèlera avec grand plaisir. Elle n'est certes pas fana d'automobile mais pour l'avoir essayer à peine cinq minutes, elle a senti toute la puissance qui se cachait sous le capot, promesse d'adrénaline qui ne la rebute nullement.  

Bon, jusqu'en enfer it is... Mais c'est actuellement un peu le gros bordel là-bas. Naaah fillette, reste sur terre, c'est la merde, je te l'accorde, mais tant que notre étage en dessous est en destruction et que les travaux de rénovation ne sont pas finis, t'es mieux ici.

"Alors je préfère te prévenir, c'est pas du tout ce qu'on croit, et c'est très décevant."

J'aime bien son regard actuellement, et j'aime bien que le mien lui soit caché, pour le moment.

"Tu es..." Oh, allez, mieux vaut ne pas être avare en compliment "Woah... Très sexy. Je vais être fier d'être avec toi ce soir."

On me dit dans l'oreillette que le mot est faible.

"Et ouais, heureusement que t'avais dit pas trop chic. Je me sens comme un orang-outang à côté de toi."

(La rédaction tient à s'excuser envers la communauté de l'orang-outang, on est avec vous les gars !)

Je la regarde tandis qu'elle me tourne le dos. Heureusement que je ne réalise cela qu'après avoir passé la nuit avec elle, sinon je n'aurais sans doute pas dormi aussi paisiblement.

"Hm ?" je redresse le visage "Oui, où tu veux !"

Bien sûr, elle vient me chercher sur la présence de lunette de soleil en pleine nuit. Bon, déjà, cela me donne un air un peu classe, mais aussi et surtout...

"Alors ça va sans doute te paraître étrange, mais je suis assez sensible des yeux. En pleine nuit, les phares me dérangent."

Petit sourire en coin.

"On verra si tu arrives à te faire pardonner tes maladresses."

Je baisse mes lunettes pour apprécier la ligne du véhicule. Hé bien, si Lexi était un démon, elle aurait un putain de succès. Elle serait courtisée dans tous les coins. Non, mauvaise idée, j'aurais été obligé de sévir et de cramer tout le monde...

"Et devoir me concentrer sur la route plutôt que sur toi ? Hors de question. Je te laisse. Mais merci beaucoup !"

Je m'installe sur le siège à côté d'elle, m'attache avec sa ceinture et la regarde dans les yeux tout en glissant la clé dans le contact juste devant elle... Je ne peux vraiment pas m'en empêcher ! Plus fort que moi !

"Je me rends compte que je n'ai pas l'habitude de me laisser guider..." je reste un moment dubitatif avant de m'exclamer "J'adore !"

Les gens normaux s'offrent des cadeaux, pour leurs sorties, non ? Genre des fleurs, ou... Putain, je gère pas, là !

- Et devoir me concentrer sur la route plutôt que sur toi ? Hors de question.
- C'est un refus joliment tourné !
- Je te laisse. Mais merci beaucoup !
- Je t'en prie. On a dit rencard du siècle non ? J'essaie d'être à la hauteur.

Lexi passe donc du côté conducteur avec un petit sourire ravi. Elle cherche ses clés et l'observe cabotiner en gloussant.
- Subtil, balance-t-elle alors que la clé finit dans le contact.
- Je me rends compte que je n'ai pas l'habitude de me laisser guider...
- Ah ? fait-elle avec un peu d'appréhension. Est-ce qu'il fait partie de ces gens qui n'aime pas être dirigé, encore moins par une nana ? Elle ne pensait pas, mais peut-être a-t-elle mal interprété les choses.
- J'adore !
Soulagée, elle lui sourit largement.
- Ouf ! Tu m'as fait peur, j'ai cru avoir tout fait de travers. C'est mon truc ça. En faire trop sans savoir vraiment quand m'arrêter. Bon on décolle ?

Elle n'attend pas la réponse et fait ronronner le moteur. Tranquillement, elle rejoint la circulation peu nombreuse à cette heure. Le couvre-feu est proche, seuls ceux qui ont l'autorisation et les militaires vont pouvoir circuler et nombres d'habitants ont déjà rejoint les habitations.

- J'espère que tu as faim ! Après avoir enchainé deux gardes pour être disponible ce soir, je t'avoue que j'ai une dalle... des Enfers ! Oui je vais faire des jeux de mots comme ça à chaque fois que je le peux même si c'est moyennement sexy, j'en conviens.

Elle jette un coup d'oeil dans le rétroviseur et capte un véhicule militaire qui les suit à la trace puis qui lui demande de se rabattre sur le côté. Lexi fait la moue, sachant pertinemment qu'il y a de fortes chances pour qu'elle connaisse ceux qui vont l'arrêter et qu'ils ne vont pas manquer de la chambrer et de l'emmerder.

- Baphomet ? Tu m'en voudras beaucoup si je ne n'obtempère pas gentiment ? Elle tourne la tête vers lui et échange un regard complice. J'ai envie de tester ce que cette voiture a dans le ventre... Accroche-toi

Aussitôt, elle enclenche la vitesse supérieure et appuie sur l'accélérateur, mettant un vent à la lourde jeep militaire qui tente malgré tout de les suivre.
Lexi déroule les vitesses et les virages avec une précision chirurgicale mais ses collègues s'accrochent malgré tout. Un nouveau virage plus serré le fait frôler une poubelle dans un crissement de pneus alors qu'ils déboulent sur une plus large avenue qui se déroule en ligne droite. L'Aston Martin a une embardée vers l'avant, les collant au siège, et gagne encore en vitesse. La caporale éclate de rire, libérée par l'adrénaline de l'instant, dépasse une voiture plus lente pour se rabattre aussitôt, au risque d'emboutir le véhicule d'en face. Cette fois les militaires sont loin derrière et pour achever leur avance, Lexi enchaine avec deux virages et prend quelques petites ruelles avant de ralentir puis de freiner pour se garer non loin du restaurant.
Leurs poursuivants ont été largués où ont décidé de ne pas insister, finalement.
Légèrement hors d'haleine, Lexi se rencogne contre son siège, le sourire si large qu'elle a mal aux zygomatiques.

- Ok... j'ai pris beaucoup trop de plaisir à faire ça ! J'ai jamais conduit comme ça ! J'eu vraiment eu l'impression d'être un agent secret en cavale... Ca va, toi ? Aucune crise cardiaque à déplorer ? J'ai réservé ici...

Le restaurant qu'elle lui désigne du menton non loin de là a une enseigne sobre et qui indique tout de suite la couleur très italienne de la cuisine de la maison.    

C'était pas gentil de lui avoir fait peur, mais j'suis pas gentil de base, alors ça va. Je lui fais un sourire qui se veut charmeur.

"J'aime bien quand ça part de travers aussi. Et j'aime bien les gens qui savent pas s'arrêter."

Si ça peut la tranquilliser, je ne suis absolument pas du genre à me braquer pour une connerie, ni même pour quoi que ce soit d'ailleurs. Pas ce soir.

"Fais autant de jeux de mots à la con que tu veux ! Moi aussi je meurs de faim. Et n'essaie pas de me faire croire que tu peux ne pas être sexy."

... Déjà que d'ordinaire, en ronflant et en bavant, avec ses cheveux n'importe comment, je dois me retenir de ne pas essayer de trouver s'il y a pas moyen de moyenner... Mais habillée comme ça, c'est très délicat. Je pense qu'elle pourrait me balancer un "tranquillou bilou", un "ça roule Raoul", et même peut-être un "pas piqué des hannetons" si elle est d'humeur BDSM de la langue que je la trouverai encore très attirante.

"J'ai espéré que tu n'obtempères pas, cela m'aurait déçu."

Je pousse un "Ouiiiii !" tout à fait pas du tout viril et nous voilà partis pour la course du siècle. Dans mon dos, mes ailes veulent se déployer devant cette débâcle qui appelle à la liberté. Je regarde les voitures défiler, je me tends, je me détends. Je pousse des cris de peur, et des cris d'excitation. J'encourage Lexi un peu trop souvent. Quand je regarde en arrière de la voiture, je me concentre jusqu'à ce qu'un nuage noir se forme derrière nous. Rapidement, trop rapidement, notre voiture est laissée à l'abandon de la poursuite, mais cela n'arrête pas ma conductrice qui a décidé que la nuit nous appartenait.

"Pareil ! Tu as super bien conduit. J'ai bien fait de te laisser faire ! T'as été géniale ! On se refera ça quand tu veux. Tu m'apprendras à conduire ? Il faut que je t'apprenne au moins un truc en échange... Oh, je sais ! Je peux t'apprendre à ficeler n'importe qui en moins de dix secondes avec ses propres lacets de chaussures, si tu veux."

Je regarde le restaurant qu'elle me désigne. Italien ? Oh, super ! J'adore manger italien !

"Meraviglioso !"

Une fois qu'elle s'est garée et qu'elle s'amuse avec le 'twit twit' de la fermeture automatique des portes, je me lève en premier et lui ouvre la porte. Mon bras tendu vers elle, je la laisse s'arrimer à moi. Au moment où sa main touche le creux de mon coude, je ne peux pas m'empêcher de sourire comme un idiot.

"Après toi, reine de la soirée."

Nous sommes accueillis par un serveur tout à fait convenable. Je lui glisse un petit billet dans la main, pas parce que j'ai envie de flamber, ni rien, juste parce que j'ai toujours eu envie de faire ça. Je me penche sur lui pour lui demander.

"Vous nous trouverez bien une belle table discrète ?"

Quoi ? Pour une fois que je peux sortir !

"Alors, de quoi as-tu envie, ce soir ?"

A sa suggestion, elle secoue la tête amusée mais surtout ravie d'avoir partager ce moment un peu fou avec lui. Moment qui semble lui avoir plu.
- Evidemment que je t’apprendrais ! Mais pas avec cette voiture du coup… ah oui, ça peut être utile dans la vie de tous les jours !

Elle lui présente le lieu qu’elle a choisi pour la première partie de la soirée.
- Meraviglioso !
- Oh tu es bilingue ! fait-elle mine de s’étonner avec un air de gentille idiote blonde pour laquelle personne n’a jamais osé la prendre. Elle éclate de rire en défaisant sa ceinture, encore boostée par l’adrénaline.

Elle se laisse galamment sortir de la voiture et ne se fait pas prier pour glisser son bras sous celui de Baphomet, ridiculement heureuse de pouvoir parader à son bras et de cette situation on ne peut plus normale. Loin des champs de bataille et de son quotidien.

- Après toi, reine de la soirée.
- Après nous, mon roi ! réplique-t-elle en resserrant son étreinte sur son bras.

Dans l’entrée, ils sont accueillis par un serveur à la mine polie qui leur adresse un sourire. Lexi donne son nom pour la réservation et observe le manège de Baphomet en se mordant la joue pour ne pas rire à nouveau. Elle a l’impression d’être dans un film. Définitivement un James Bond. Elle espère simplement que la fusillade surviendra après le repas. Elle a faim !

Le serveur accepte le pourboire et les guide dans le restaurant à l’ambiance chic.
- Alors, de quoi as-tu envie, ce soir ?
Son estomac répond à sa place en grondant et Lexi se gratte la gorge, parfaitement gênée.
- Manger apparemment. Il est possible que j’aie sauté un ou deux repas. Pour le reste… rien de très fou. Evidemment je vais t’emmener danser. Ensuite quand on sera bien imbibé, je te proposerai certainement un bain de minuit... dans la mer ou une fontaine, je ne ferai pas ma difficile ou d’aller danser encore mais dans un cimetière… explique-t-elle sur un ton enjoué avant de lui lancer un coup d’œil amusé. Ne me laisse pas trop boire parce que je serai vraiment capable de te suggérer des trucs pareils ! Se réveiller sur une tombe, c’est moyennement cool.

Elle ne plaisante qu’à moitié, elle a déjà fait ce genre de choses, plus jeune. L’alcool a sur presque tout le monde un effet désinhibant mais sur elle c’est doublé, voire triplé !

Sur le chemin qui les mène à leur table, ils font soudain face à un miroir et Lexi s’arrête pour contempler leur reflet d’un œil critique avant de sourire largement.
- Franchement, je nous trouve très beaux, non ?
Sans doute parce qu’ils ont l’un et l’autre l’air heureux d’être là. Cela fait toute la différence.

Finalement, leur guide les invite à pénétrer sur une terrasse à l’abri des regards dans une courette adorable, surplombée par une pergola en bois qui s’est fait prendre d’assaut par de la glycine odorante. Les quelques tables qui se trouvent là sont toute vides, éclairées par de douces guirlandes lumineuses qui se balancent tranquillement dans la brise.
Interdite, Lexi s’arrête et articule un « wow » silencieux.

On les installe mais la jeune femme a bien du mal à détacher ses yeux du décor. Elle finit par se pencher vers Baphomet avec un grand sourire illuminé par une joie simple.
- Quelques euros très bien dépensés, cher cavalier. C’est magnifique ! Et très romantique, ajoute-t-elle.
Elle ouvre le menu mais continue de regarder Baphomet.
- Dis-moi… qu’est-ce que tu avais imaginé pour cette soirée toi ? Tu pensais que j’avais oublié ?  

Utile, je ne sais pas. Je peux toujours me téléporter un peu où je veux sur la terre. Et si je dois garder mon identité secrète, j'ai juste à effacer la mémoire de la personne qui m'aurait vu et reconstruire un tout nouveau souvenir... Je me demande si je ne vais pas reprendre le souvenir de cette voiture-là. Si Lexi entend parler un jour d'une histoire rapportée d'un mec chelou avec la voiture de James Bond, ça la fera rire.

... Ou une Bentley ?

Bon, on se recentre sur notre rendez-vous, je veux pas en perdre une seule miette !

"Pour toi, je peux être tout ce que tu veux."

Bilingue, trilingue, Araméen...

Nous entrons dans le restaurant presque royalement. Aucune conversations à écouter parce qu'il n'y a personne. Ce soir, ce n'est que nous, et j'ai bien conscience que cette phrase est d'une niaiserie consternante.

J'ai un rire en entendant le petit ventre de Lexi crier famine, enfin, non, je ne rigole pas pour ça, je me marre surtout pour la tête désolée qu'elle fait. Elle s'est privé de manger pour moi ? Non, j'espère que c'est pour une toute autre raison !

"Alors j'ai pas l'intention de t'empêcher de faire quoi que ce soit... Mais je vire déjà pas mal d'inhibitions rien que par ma présence. Cependant, je te protégerai de toutes les mauvaises pensées que tu pourrais avoir."

Avis à mes chers lecteurs : le terme "mauvaises pensées" peut revêtir plusieurs aspects. Nous ne parlerons pas ici d'un quelconque puritanisme Hollywoodien. On va dire qu'il s'applique plutôt à des idées sombres, tristes et déprimantes. L'auteur de ces mots ne voyant pas du tout où est le problème d'un bain de minuit, ou de se réveiller sur une pierre tombale.

Du coup, je hausse une épaule, le regard particulièrement amusé. Oui, j'ai hâte de voir la suite !

La suite réside dans une représentation de nous-même, dans un miroir. Pour une fois, je ne vois pas mes cornes ni mes ailes par transparences, je vois surtout la femme qui est à mes côtés. Elle marque un point, on pourrait très clairement être devant l'affiche d'un prochain blockbuster avec de beaux acteurs.

"...magnifiques."

... Y a juste nos noms, le titre du film, et le tit slogan qui va bien qui sont manquants.

La terrasse, je ne m'y attendais pas et je reste muet tandis que Lexi s'exprime. Ouais, "wow", j'aurais pas pu mieux dire ! Nous consultons le menu et j'hésite entre me goinfrer et faire semblant de savoir me tenir à table.

"Alors, j'espérais que tu n'avais pas oublié, ou que tu ne l'aies pas fait volontairement du moins. Et sinon, j'avais pensé que ce serait plus... moins... moins naturel. Plus forcé. Ouais, voilà ! J'étais loin d'imaginer que tu me conduirais comme ça, je ne suis pas déçu du tout ! Et je pense que je vais t'avouer tout de suite un truc : je ne sais pas manger sans me salir. J'ai jamais su si c'était une malédiction ou autre, mais c'est pour ça que je n'ai pas poussé ma chance au point de sortir une chemise blanche."

Du coup, je prends ma serviette pour la nouer autour de mon cou, comme un enfant.

"Je ne cours pas après l'exotisme à tout prix, mais il semble que quoi que tu entreprennes, cela ne se passe jamais comme prévu, n'est-ce pas ?"

Ouh, des lasagnes ! Ou de l'arabiata ? J'ai juste à lire la totalité du menu une fois, et je m'en souviens parfaitement. Je pose donc ce livre sans héro et sans histoire à côté de moi.

"Et toi, tu avais imaginé quoi ?"

Je suis tellement pas déçu, putain !

- Alors, j'espérais que tu n'avais pas oublié, ou que tu ne l'aies pas fait volontairement du moins.
Faussement attristé, elle pose une main sur son cœur.
- Tu me fais de la peine ! J’ai qu’une parole !
- Et sinon, j'avais pensé que ce serait plus... moins... moins naturel.
- Un peu forcé, tu veux dire ?
- Plus forcé. Ouais, voilà !

Lexi hoche la tête alors qu’elle jette quelques coups d’œil au menu. Elle en salive déjà et son estomac se contracte déjà de bonheur. Depuis quand n’a-t-elle pas pris le temps de savourer la nourriture ? Bien trop longtemps. Ca se compte en mois, peut-être même en année.

- J'étais loin d'imaginer que tu me conduirais comme ça, je ne suis pas déçu du tout !
Elle a un petit rire, très contente d’elle.
- Ravie d’avoir su satisfaire un démon millénaire ! Pour être franche j’ai juste fait ce que j’avais envie. Il faut croire qu’on est plus ou moins sur la même longueur d’onde, conclut-elle avec un petit clin d’œil.
- Et je pense que je vais t'avouer tout de suite un truc : je ne sais pas manger sans me salir. J'ai jamais su si c'était une malédiction ou autre, mais c'est pour ça que je n'ai pas poussé ma chance au point de sortir une chemise blanche.
- Ahhhh tout s’explique ! fait-elle doctement avant d’éclater de rire en le voyant mettre sa serviette autour du cou. Parfait ! Prêt à attaquer ! A mon tour de t’avouer un truc. Elle se penche légèrement sur la table comme si ce qu’elle allait dire était un secret national de la plus haute importance. Je vis avec des mecs pas toujours très propres et civilisés la plupart du temps donc rien de ce que tu pourras faire ne me choquera. A table du moins.
Avec un petit sourire, elle attrape un gressini et le fait tourner entre ses doigts.
- Je ne cours pas après l'exotisme à tout prix, mais il semble que quoi que tu entreprennes, cela ne se passe jamais comme prévu, n'est-ce pas ?

Cette remarque la laisse un instant songeuse.
- Avant… avant c’était comme ça, oui, déclare-t-elle alors que ses yeux balaient les plats sans s’arrêter nulle part. Depuis que je suis dans l’armée, les choses sont plus… carrés. Je suis plus carrée.

- Et toi, tu avais imaginé quoi ?
- M’en mettre plein la panse ! Elle se tapote l’estomac avec un petit rire. Enfin uniquement si c’est toi qui paie. La nourriture et moi, ça n’a pas toujours été une histoire d’amour. Quand j’étais danseuse, je surveillais chaque gramme qui entrait dans ma bouche. Prendre du poids c’était une catastrophe. Et avec l’armée, on peut pas vraiment dire que je goute à de la haute gastronomie… donc je comptais bien me faire plaisir parce que j’adore manger !

Le serveur arrive pour prendre leur commande. Lexi se décide pour une escalope milanaise.
- Lambrusco ? Elle questionne Baphomet du regard.
Elle ne serait pas contre un peu d’alcool qui pétille. Une fois le serveur parti avec leur commande, elle délaisse le menu et pose ses coudes sur la table, focalisant toute son attention sur son compagnon.

- A vrai dire… je préférai ne rien imaginer du tout. J’ai arrêté de… penser au futur. Ça permet de se concentrer plus pleinement sur le présent. Enfin… j’essaie, tu vois. Demain a quelque chose d’un peu trop effrayant parfois. Pour ne pas plomber l’ambiance, elle reprend avec un sourire. Mon dernier rendez-vous, c’était quand je me faisais encore payer pour ça. De l’escorte. Donc je devais me comporter d’une certaine façon, complimenter, minauder, être très… ouverte à la suite, si tu vois ce que je veux dire ! Mais je savais qu’avec toi, ça serait très différent. Que je pourrais être moi. Vraiment moi… Donc si je minaude, c’est que j’en ai envie et si je te complimente c’est parce que je le pense.  Elle a un petit rire. Le seul hic, c’est que tu pars avec une belle longueur d’avance sur moi ! Tu sais beaucoup… elle marque une pause, presque tout de moi, en fait ! Elle croque un morceau du gâteau apéritif, les yeux pétillants. Moi aussi je veux tout savoir ! Enfin… ce que tu as envie de me dire, ce que tu veux que je sache. Même les trucs les plus fous. Vas-y je suis parée à tout !