- Ca se voit à son attitude. Même si je l’ai rendu nerveuse, elle économise ses mouvements. Hunter enregistre l'information dans sa formidable mémoire. Il se laisse guider, sans perdre une miette du mouvement. Là…tu sens ? C’est le fœtus. Un mois pas plus je dirais.

Le loup affiche un sourire plus franc dont Malone n'a pas été spectateur depuis longtemps. La conversation qui s'ensuit fait fondre néanmoins cette félicité rare.

- Hunter…il serait temps que tu cherches à aller au-delà des apparences. Surtout en ce qui concerne Colgan. Tu l’as déjà observé ? Vraiment ?

Oui.
Souvent.
Longuement.
Et sans doute de manière plus fine que lui, car disposant d'un point de vue d'ensemble conféré par la distance...

- Depuis quand il règle quoique ce soit avec les poings au sein de la Meute ? C’est pas dans son caractère. Je crois que ça l’a jamais été.
- Ce n'est pas ce que je dis. Il faut que les choses sortent d'une manière ou d'une autre. Tant qu'il n'aura pas appris à évacuer cet enfer qui le ronge, je continuerais à le considérer comme dangereux pour la Meute.
- Super. Et donc tu penses que la meilleure façon de gérer ça c’est en te montrant constamment sur la réserve et agressif avec lui ? C’est quoi ton plan au juste ? Si tu refuses d’essayer comment tu crois que ça va finir ? Hum ?
- "Si je refuse d'essayer" ?

Mais il a essayé.
Il a été honnête, franc. Il est allé à sa rencontre, combien de fois Colgan a-t-il fait de même ? La réponse est simple : Jamais.

- Ecoute moi bien, une bonne fois pour toute. Colgan n’est PAS notre ennemi. Ni le mien, ni celui de la Meute et pas le tien non plus. Un soupçon d’agacement se fait sentir dans sa voix. Tant que tu le considéreras comme ça, c’est voué à l’échec ! C’est un homme profondément blessé qui ne sait pas comment avancer autrement qu’avec la rage au ventre. Tu veux savoir pourquoi je suis obligé de le défendre ? Parce que tu passes ton temps à l’attaquer sans même essayer de le comprendre. Si vous réussissiez à travailler ensemble pour le bien de tous nos frères et soeurs… les Abyssaux deviendraient une Meute à nulle autre pareil ! Bien plus forte qu’elle ne l’a jamais été !

Hunter pose un regard perçant sur Malone. L'ancêtre a bien changé. A une époque, il considérait cette meute comme une escale temporaire. Une passade dans le temps. Mais là n'est pas la question. Ce qui peine, le jeune prince c'est la condescendance dont il fait encore l'objet. Même aux yeux de Malone, il reste un imbécile.

- Tu continues de penser que je suis un crétin puérile, je suppose. Petit grondement, parodie de ricanement désabusé. Tu ne comprends rien Malone, poursuit-il d'une voix calme. Je n'ai jamais considéré Colgan comme mon ennemi. Il a transformé la meute en suivant des axes que j'aurais moi même voulu emprunter si j'en avais eu le courage. Il était clairement le souffle de renouveaux dont nous avions besoin. Mais sa "rage" n'est plus un moteur, c'est un maelstrom, un trou noir qui est en train de le foutre en l'air et de le dévorer de l'intérieur. Tant qu'il ne l'exorcisera pas, il restera une source de danger pour les autres et pour lui même. Nous avons TOUS une tragédie personnel. Nous sommes tous blessés. Pas un membre de cette meute n'a été épargné par la vie. Ce que j'ai appris en observant nos femelles, c'est qu'à aucun moment, elles ne s'en servent comme excuse à leurs actes. Jamais.

Un silence.

- Nous sommes à un moment charnière de mutations. Nous devons nous acclimater à de nouvelles données, un nouveau contexte, de nouveaux alliés. Il est temps que Colgan se trouve un autre moteur, sinon il nous entrainera dans la chute avec lui.

Hunter tend plusieurs des urnes qu'il vient de remplir de lait frais à Malone.

- Aide-moi à les transvaser dans la charrette, puisque t'es là. Ca part au mess pour le petit déj.

Il y en a une petite vingtaine à transporter. Se faisant, Hunter poursuit la conversation.

- Je pourrais peut-être l'aider... un jour. Comme j'aide actuellement Ibakha. Mais je veux m'assurer pour le moment que ça porte ses fruits. Elle est plus disposée que lui à m'écouter et me faire confiance.... Lui aussi, il continue de me prendre pour mon frère.

- Tu continues de penser que je suis un crétin puéril, je suppose.
Lourd soupir.
- Mais non enfin… tu pourrais arrêter de te dénigrer tout seul à chaque fois ? Ça tu vois c’est un trait qui ne change pas chez toi.
- Tu ne comprends rien Malone. Je n'ai jamais considéré Colgan comme mon ennemi.
- Tu as une drôle de façon de le montrer, avoue.
- Il a transformé la meute en suivant des axes que j'aurais moi-même voulu emprunter si j'en avais eu le courage. Il était clairement le souffle de renouveaux dont nous avions besoin. Mais sa "rage" n'est plus un moteur, c'est un maelstrom, un trou noir qui est en train de le foutre en l'air et de le dévorer de l'intérieur.
- Et tu crois qu’il ne le sait pas ? Tu crois qu’avoir failli perdre Marisol n’a pas servi d’électrochoc ? D’apprendre qu’il allait devenir papa à nouveau ?
- Tant qu'il ne l'exorcisera pas, il restera une source de danger pour les autres et pour lui-même. Nous avons TOUS une tragédie personnelle. Nous sommes tous blessés. Pas un membre de cette meute n'a été épargné par la vie. Ce que j'ai appris en observant nos femelles, c'est qu'à aucun moment, elles ne s'en servent comme excuse à leurs actes. Jamais.
- Hunter, assez ! Tu ressasses ! Le ton est ferme, sans animosité mais avec une lassitude profonde. Il est injuste de comparer les histoires personnelles de chacun de nous. Tout le monde réagit différemment ! Alors arrête de comparer. Ca c'est puéril ! Et puis j’en ai marre de faire l’avocat d’un homme avec qui tu pourrais simplement discuter pour crever ce putain d’abcès. Comme tu pourrais me dire une bonne fois pour toute ce que tu as sur le cœur me concernant plutôt que de foncer tête baissée dans un conflit larvée qui ne se résoudra pas dans cette grange.  

- Nous sommes à un moment charnière de mutations. Nous devons nous acclimater à de nouvelles données, un nouveau contexte, de nouveaux alliés. Il est temps que Colgan se trouve un autre moteur, sinon il nous entrainera dans la chute avec lui.
L’envie de se prendre la tête entre les mains est forte mais Malone garde une attitude plus mesurée.
- Est-ce que tu m’écoute au moins ? Tout le monde en est conscient, Colgan le premier. C’est dans ce but qu’il a besoin de notre aide. Nom de Dieu Hunter, depuis quand tu es devenu plus bourrique encore que ton père ?

Un silence s’installe. Si Malone regrette de s’être laissé emporter, il commence à en avoir assez de se répéter encore et encore.
- Aide-moi à les transvaser dans la charrette, puisque t'es là. Ca part au mess pour le petit déj.
Il attrape machinalement l’anse du pot à lait et ils s’attèlent à la tâche.
- Je pourrais peut-être l'aider... un jour. Comme j'aide actuellement Ibakha.
Malone lui lance un coup d’œil en coin.
- Un jour hein ?
- Mais je veux m'assurer pour le moment que ça porte ses fruits.
- Tu en doutes ?
- Elle est plus disposée que lui à m'écouter et me faire confiance.... Lui aussi, il continue de me prendre pour mon frère.
Malone lâche son cinquième pot dans la charrette et le fixe avec une sorte de compassion tendre.
- Tu crois sincèrement que s’il te croyait pareil à ton frère, tu ferais encore parti de cette Meute aujourd’hui ? Tu crois qu’il t’aurait tenu au courant de ce qu’il allait lui faire ? Je lui ai dit que tu valais mille fois mieux que Remus et il n’a jamais remis en question mon jugement. Ni hier, ni aujourd’hui. Il le croit toujours, sinon il n’aurait pas laissé Ibakha te rejoindre. Tout ce qu’on attend Hunter, c’est que tu trouves la place qu’on a toujours laissée pour toi dans cette Meute, un conseiller de valeur. Mais parce qu’on a été maladroit…lâche sans doute, tu as préféré t’enfermer dans celui d’outsider. Tu l’as dit toi-même, le temps des mutations et des changements est venu dans notre Meute. Pour la rendre meilleure. Ta position dans le Meute en fait partie. Mais il n’y a que toi qui puisse amorcer le mouvement dans le bon sens. Tu veux qu'on arrête de te prendre pour une brute et un imbécile ? Agis en conséquence. Il a un sourire un peu triste. Tu me manques, Hunter.

- Tu crois sincèrement que s’il te croyait pareil à ton frère, tu ferais encore parti de cette Meute aujourd’hui ? Tu crois qu’il t’aurait tenu au courant de ce qu’il allait lui faire ? Je lui ai dit que tu valais mille fois mieux que Remus et il n’a jamais remis en question mon jugement. Ni hier, ni aujourd’hui. Il le croit toujours, sinon il n’aurait pas laissé Ibakha te rejoindre.

"Meilleur que Remus mais pas suffisamment pour son successeur."
Etrangement, cette pensée ne l'écorche plus autant qu'avant. Colgan avait peut-être raison, quelque part, il n'a jamais voulu de la couronne qui lui était destinée. Cette idée a fait son chemin depuis, vers des contrées d'acceptation. Il est Prince de sang, mais être Roi n'est pas sa place.

- Tout ce qu’on attend Hunter, c’est que tu trouves la place qu’on a toujours laissée pour toi dans cette Meute, un conseiller de valeur.
- Pour être conseiller il faut pouvoir être écouté. Il m'avait promis que je pourrais m'exprimer à bâtons rompus. Je l'ai fait... Mal, je te l'accorde. Mais je doute qu'il m'aurait laissé réellement cette marge de toute façon.
- Mais parce qu’on a été maladroit…lâche sans doute, tu as préféré t’enfermer dans celui d’outsider.
- C'est ta façon alambiquée de me faire des excuses ?

Hunter dépose les derniers pots à lait avant de grimper dans la charrette, tiré par un Clydstale courtaud et épais. D'un mouvement de menton, Il fait signe à Malone de grimper.

- Tu l’as dit toi-même, le temps des mutations et des changements est venu dans notre Meute. Pour la rendre meilleure. Ta position dans le Meute en fait partie. Mais il n’y a que toi qui puisse amorcer le mouvement dans le bon sens.
- C'est donc toujours à moi de fournir l'effort.... bougonne-t-il en lançant le cheval au trot.
- Tu veux qu'on arrête de te prendre pour une brute et un imbécile ? Agis en conséquence..... Tu me manques, Hunter.

Une bouffée d'émotion subite étreint la gorge d'Hunter et la remplit d'oursins. Il détourne le regard et s'absorbe dans la contemplation de la route de terre qui sillonne entre les champs jusqu'à une porte hublot en fer ouverte où quelques ouvriers s'activent déjà à empiler de la nourriture sur des chariots motorisés ronronnant dans le couloir extérieur.
Avant de descendre de la cariole, Hunter glisse finalement un discret et pudique : "Toi aussi..."

- Hey salut Hunter ! Fait un des hommes d'Enyo Faraday.
- Salut Leigh. J'apporte le lait frais et les œufs du matin.
- Au fait félicitations pour la promotion !
- La quoi ?
- Ben ton job officiel... Leigh regarde Malone en se grattant la casquette. Vous lui avez pas dit dans vot' meute, que Dysderie le voulait comme contremaitre dans la gestion du Silo ?

Hunter se tourne vers Malone avec un haussement de sourcil.

- Pas vraiment, non.

- C'est donc toujours à moi de fournir l'effort....
- Toujours ? Dis, t’en ferais pas des caisses non ? On en fait tous des efforts. Fait gaffe je suis à nouveau à ça de te traiter de gosse. Tu veux qu'on arrête de te prendre pour une brute et un imbécile ? Agis en conséquence... Tu me manques, Hunter.

L’aveu est lâché avec naturel, sans arrière-pensée et exprime une vérité brute.
Hunter et lui étaient tout le temps fourrés ensemble. Ils aiment la terre, les choses simples, les silences tranquilles, les travaux manuels.
Avant…
Avant qu’il ne gâche tout par un silence trop prolongé.
La route bucolique dans cette charrette lui fait remonter tout un tas de souvenir et c’est un sourire un peu nostalgique qui flotte sur ses lèvres alors qu’ils cheminent tranquillement sur la route en terre.
- Ca m’étonne pas que tu te sentes bien ici. On pourrait presque y croire hein…
Sorti de nulle part, le "Toi aussi...", le fait sourire plus largement et un regain d’espoir gonfle son cœur redevenu à lui. Il aide à décharger leur cargaison.  

- Hey salut Hunter !
- Salut Leigh. J'apporte le lait frais et les œufs du matin.
- Au fait félicitations pour la promotion !
- La quoi ?
- Ben ton job officiel...
Le regard que lui lance le Leigh déclenche une expression étonné sur le visage de Malone.
- Vous lui avez pas dit dans vot' meute, que Dysderie le voulait comme contremaitre dans la gestion du Silo ?
- Pas vraiment, non.
Malone hausse un sourcil circonspect.
- Comment on pouvait savoir ? Elle a parlé de faire de toi notre relai entre le Silo et les membres de la Meute qui viendront aider aux travaux à effectuer mais elle nous en a pas dit plus pour le reste. Et puis ça n'aurait pas été à nous de te le dire. Cette promotion tu l'as gagné sans que la Meute est quoique ce soit à voir là dedans. Il se tourne vers Hunter. On a pas encore eu le temps d’aborder le sujet vu que t’étais trop occupé à râler sur une certaine personne. On lui a précisé que la décision d’accepter ou non te revenait. Même si je suis certain que ça faciliterait les choses.
Il claque une main amicale dans son dos.
- Cela dit c’est une bonne nouvelle ! Tu vas pouvoir employer tes journées de façon constructive et mettre toute ton énergie débordante là-dedans, plutôt que de rester enfermé dans la Grange toute la journée à « paresser » avec Ibakha. Si tu as besoin d’aide avec le bétail, t’hésiteras pas. Enfin t’en feras qu’à ta tête comme d’habitude mais je suis là si jamais, chef !

- Comment on pouvait savoir ? Elle a parlé de faire de toi notre relai entre le Silo et les membres de la Meute qui viendront aider aux travaux à effectuer mais elle nous en a pas dit plus pour le reste.
- Dys' a p'têt pas encore eu l'temps d'le faire. La donzelle est débordée, ça inquiète Bob, d'ailleurs. Désolé d'avoir gâché la surprise du coup, grimace Leigh avec sa nonchalance tranquille. Nathan nous a balancé l'info en revenant aux aurores. Apparemment il a passé la nuit à vérifier des calculs pour elle... un taff urgent de scintifique... Tu vois l'genre... Bref !
- Et puis ça n'aurait pas été à nous de te le dire. Cette promotion tu l'as gagné sans que la Meute est quoique ce soit à voir là dedans.
- Vous allez venir bosser ici....

Hunter écarquille les yeux, pas certain d'apprécier qu'on vienne envahir sa tranquillité.

- On a pas encore eu le temps d’aborder le sujet vu que t’étais trop occupé à râler sur une certaine personne. On lui a précisé que la décision d’accepter ou non te revenait. Même si je suis certain que ça faciliterait les choses.
- ... Tous... ici ?

Hunter a une expression un peu dépassée.

- Cela dit c’est une bonne nouvelle ! Tu vas pouvoir employer tes journées de façon constructive et mettre toute ton énergie débordante là-dedans, plutôt que de rester enfermé dans la Grange toute la journée à « paresser » avec Ibakha.
- Mais j'te permets pas enfoiré ! C'est la seule journée que j'ai pris depuis que je suis là ! s'offusque-t-il avant de lever les yeux au ciel. ... Tu vas me le ressortir toute ma vie c'est ça ?
- Si tu as besoin d’aide avec le bétail, t’hésiteras pas. Enfin t’en feras qu’à ta tête comme d’habitude mais je suis là si jamais, chef !
- C'est ça, change de sujet, vieille carne...
- Ibakha c'est celle qui joue à chat avec Sizreïs ? C'est ta nana... ? Deux ou trois ouvriers s'échangent des billets -bien que l'argent ait perdu toute valeur ici. J'en étais sûr ! Dommage pour Norm, ahah! Bon ben on a tout ce qui nous faut. A plus les gars !

Leigh fait signer une fiche de livraison sur sa tablette à Hunter et les quitte là.
"Contremaitre, je vais devenir contremaitre..."
L'idée est plaisante, d'autant qu'ici il se sent bien et à l'abris de toute crise de claustrophobie. Néanmoins son anxiété le rattrape vite.

- Colgan est au courant ? Je suppose que non... Il serait d'accord avec ça ?

- ... Tous... ici ?
- Non. Ceux dont tu jugeras la présence nécessaire pour le maintien de l’exploitation du Silo. Si tu pouvais occuper Shane… il me rend marteau. Cela dit c’est une bonne nouvelle ! Tu vas pouvoir employer tes journées de façon constructive et mettre toute ton énergie débordante là-dedans, plutôt que de rester enfermé dans la Grange toute la journée à « paresser » avec Ibakha.
- Mais j'te permets pas enfoiré ! C'est la seule journée que j'ai pris depuis que je suis là !
Malone éclate de rire.
- Tu pars si vite au quart de tour ! C’est presque trop facile de te titiller. Ca n'a pas changé, ça non plus.
- Tu vas me le ressortir toute ma vie c'est ça ?
- Privilège de l’âge mon grand ! fait-il en lui tapotant l’épaule d’un air grave et vénérable. Si tu as besoin d’aide avec le bétail, t’hésiteras pas. Enfin t’en feras qu’à ta tête comme d’habitude mais je suis là si jamais, chef !
- C'est ça, change de sujet, vieille carne...
- Ibakha c'est celle qui joue à chat avec Sizreïs ? C'est ta nana... ?
- Bonne question ça ! fait Malone en observant Hunter, ses iris bleus pétillantes de malice. C’est ta nana Hunter ?

Ils sont alors laissé seuls à nouveau et Malone chipe un gros tas d’herbes hautes qu’il va donner au cheval massif qui accepte son offrande sans broncher. Le loup flatte son encolure en souriant et en prenant une pleine bouffée d’odeur chevaline.
- Colgan est au courant ? Je suppose que non...
Le papy loup lui lance un long regard entendu avant de regrimper dans la charrette.
- Nooooon il est au courant de rien bien sûr ! s’exclame-t-il avec un soupçon d’ironie. On compte tous lui mentir effrontément et trouver une bonne excuse pour venir au Silo tous les jours sans qu’il n’en sache jamais la raison. Ça te parait comment comme plan ? Mais oui abruti ! Evidemment qu’il est au courant. On fait pas grand-chose sans se consulter les uns les autres tu sais…à fortiori notre Alpha.

Mais Hunter insiste et Malone comprend la profondeur de son besoin d’être accepté, y compris par Colgan, et son manque total de confiance en lui.

- Il serait d'accord avec ça ?
Il retire alors tout trace d’amusement dans sa voix et lui sourit.
- Il y a consenti sans problème, Hunt… Il est pas si buté que tu le penses et il sait qu’on a besoin de l’aide de Dysdérie. Son seul but pour le moment, c’est de faire en sorte que la pleine lune se passe sans accroc pour éviter qu’on se fasse encore plus remarquer. D’ailleurs… ça serait bien que tu lui trouves un truc à faire. Il est doué de ses mains avec le bois. Il avait arrêté après la mort de ses gosses mais il avait repris depuis quelques semaines. Ca lui ferait du bien je pense… d’arrêter de penser aux problèmes et de faire quelques chose de constructif de ses doigts. Ca t’a réussi à toi. Enfin je dis tout ça mais je sais pas encore si tu acceptes ou non le poste. Ils arrivent à nouveau en vue des enclos à bestiaux. Si jamais tu es invité à la réunion de ce soir pour mettre au courant tout le monde.

- Bonne question ça ! C’est ta nana Hunter ?

Hunter lève ostensiblement les yeux au ciel.

- Colgan est au courant ? Je suppose que non...
- Nooooon il est au courant de rien bien sûr ! On compte tous lui mentir effrontément et trouver une bonne excuse pour venir au Silo tous les jours sans qu’il n’en sache jamais la raison. Ça te parait comment comme plan ? Mais oui abruti ! Evidemment qu’il est au courant. On fait pas grand-chose sans se consulter les uns les autres tu sais…à fortiori notre Alpha.

Hunter saute dans la charrette et relance leur cheval de trait au petit trot.

- Joue pas les trous du cul, tu sais très bien de quoi je parle... Sérieusement, Shareen déteint sur toi et ce qui est charmant chez elle, l'est vachement moins chez toi. Un silence habité par le cahin-caha de la cariole. Il serait d'accord avec ça ?
- Il y a consenti sans problème, Hunt…
- Ecoute, dans la mesure où il m'a banni pour la pleine lune, c'était pas déconnant de penser que de me voir contremaitre le ferait grincer des dents.
- Il est pas si buté que tu le penses et il sait qu’on a besoin de l’aide de Dysdérie. Son seul but pour le moment, c’est de faire en sorte que la pleine lune se passe sans accroc pour éviter qu’on se fasse encore plus remarquer. D’ailleurs… ça serait bien que tu lui trouves un truc à faire.
- A qui ...? Colgan ?
- Il est doué de ses mains avec le bois. Hunter avait presque oublié ce fait. Il avait arrêté après la mort de ses gosses mais il avait repris depuis quelques semaines. Ca lui ferait du bien je pense… d’arrêter de penser aux problèmes et de faire quelques chose de constructif de ses doigts. Ca t’a réussi à toi.
- C'est vrai.
- Enfin je dis tout ça mais je sais pas encore si tu acceptes ou non le poste.
- Dans la mesure où c'est déjà le boulot que je fais tous les jours...
- Si jamais tu es invité à la réunion de ce soir pour mettre au courant tout le monde.
- Hum... Il pousse un long soupir qui se conclut sur un drôle de petit ricanement. On passe de terroristes à fermiers, je cherche encore la logique...

Le ricanement se meut en rire véritable. La perspective de voir une poignée de prostitués et d'anciens  Hurlants cultiver des champs, traire des vaches et cueillir des fruits a quelque chose d'incongru.

- Madame et son projet de réinsertion grandeur nature... ceci dit, en fournissant ce qui les nourrit, les gens nous apprécieront peut-être davantage.

La Montespan est finaude, il se demande si ça n'était pas son plan depuis le départ.

Malone finit par prendre congé aux premières lueurs du jour.
Hunter retourne à la grange, la tige d'une tulipe tournoyant entre ses doigts. Il songe à toutes les nouvelles informations qu'il a en mains. Ibakha ne semble pas encore réveillée quand il passe la porte, aussi vient-il se faufiler dans les draps, encore suant de son gros œuvre matinal. Il caresse le dos nu de sa compagne avec les pétales orangés de la fleur coupée puis la dépose sur l'oreiller à côté d'elle. Il vient frotter son nez contre sa nuque, redessinant les reliefs de la morsure qu'il lui a faite la veille, et dépose une pluie de  baisers doux  jusque dans le creux de ses omoplates. Elle sent divinement bon. Il pourrait se passer sa vie à la respirer et s'enivrer du parfum de sa peau.
Malheureusement, bientôt, ils ne seront plus aussi seuls et leur rythme tranquille sera perturbé par une vingtaine de loups curieux et furetant partout.

- Hey... fait-il en guise de bonjour. Bien dormi ?

Ibakha a mis une éternité à s’endormir, blottie contre Hunter qui lui non plus ne semble pas avoir fermer l’œil. Ce n’est qu’au milieu de la nuit que le sommeil la fauche finalement sans préavis et pour une fois, elle ne parvient pas à se réveiller aussi tôt que d’habitude.

C’est pourquoi elle frémit à peine lorsqu’elle sent vaguement quelque chose frôler son dos. Elle ronchonne un peu, bouge légèrement et enfouit un peu plus sa tête contre l’oreiller.
Mais on insiste encore et elle s’éveille suffisamment pour sentir l’odeur d’Hunter, renforcée sans doute par ses travaux matinaux. Au seuil de sa demi-conscience, elle sent ses lèvres sur sa peau nue et consent enfin à ouvrir un œil.

- Hummmmmm…
- Hey...
Elle pivote la tête, dégage ses cheveux et lui offre un de ses rares sourires lumineux. Se réveiller à ses côtés est un plaisir neuf qu’elle savoure.
- Bien dormi ?

D’un mouvement relativement fluide, elle le bascule sur le dos et vient se percher sur lui, d’abord à cheval, lui offrant le spectacle de sa nudité baigné par les premiers rayons du soleil.
- Mmmm, pas tellement.
Elle se penche pour cueillir un baiser, puis un deuxième avant de s’affaler sur lui. Elle se trémousse pour trouver une position confortable et referme les yeux.

- Toi non plus d’ailleurs. Je sais même pas si tu as dormi…marmonne-t-elle. Tu as déjà travaillé ce matin ?

Petit à petit les évènements de la veille lui reviennent en mémoire, accompagnés de son lot d’angoisses qui la rendent aussitôt bien plus alerte. Elle a peur…pas seulement pour la Pleine Lune, mais peur qu’un jour, les choses aillent trop loin entre Colgan et Hunter, que ce dernier se fasse chasser de la Meute. Elle se retrouverait alors dans la position délicate de devoir choisir entre lui et le reste des loups qu’elle considère comme ce qu’elle a de plus proche d’une famille.
Hunter en souffrira et elle aussi…peu importe ce qu’elle choisira.

Elle essaie toutefois de ne rien en montrer et respire machinalement sa peau pour se rassurer. Elle y trouve toutefois une odeur parfaitement incongrue qui lui fait redresser la tête.

- Malone est venu ?

Ibakha le renverse dos au matelas pour mieux le surplomber, manquant d'écraser la tulipe fraichement coupée. Hunter gronde de satisfaction en empoignant amoureusement le haut de ses cuisses. Un sourire étire ses lèvres fines. Elle est magnifique et c'est à lui qu'elle offre cette vision rare et intime. Le sentiment de privilège fait pétiller son regard bleu.

- Mmmm, pas tellement.

La louve l'embrasse à pleine bouche, ce qui compense -avouons le- le déplaisir de l'insomnie, puis vient se pelotonner contre lui. Il s'amuse de ses comportements de chaton. Ses doigts dévalent délicatement la courbure de son échine jusque dans le creux des reins, avant de rebrousser chemin de la même façon.

- Toi non plus d’ailleurs. Je sais même pas si tu as dormi…
- Pas des masses, non...
- Tu as déjà travaillé ce matin ?
- Hum... Hum... fait-il happé par la langueur du moment. Un peu...

Il pourrait aisément se rendormir, là, maintenant, tout de suite. La chaleur d'Ibakha pesant sur son corps fatigué a les mêmes effets lénifiants qu'un baume. Il glisse tout doucement vers la somnolence quand elle tressaille soudain, le forçant à ouvrir les yeux.

- Malone est venu ?

Gros soupir.

- ....Ouais. Il s'inquiétait, apparemment, des effets de la sanction sur mon moral. Il la trouve disproportionnée et va essayer de raisonner Colgan. Il voulait aussi nous transmettre ce qu'il est ressorti de leur entrevue avec Dysderie.

Un silence.

- J'ai pas tous les détails. Mais apparemment Dysderie m'a nommé contremaitre pour diriger la meute en tant que force de travail agricole. Visiblement, ils vont tous bosser ici en échange de l'aide qu'elle nous apportera.

Il contemple un moment sa compagne, jouant avec les mèches de ses cheveux dorés.

- Il y a une réunion de la Meute ce soir pour développer les détails. Si j'accepte le job, je vais me présenter là bas pour donner des directives à suivre et organiser les tâches...

Nouveau soupir.

- Malone m'assure que Colgan est en accord avec ça, mais tant que je ne l'aurais pas entendu de sa bouche, je n'en serais pas sûr. Une latence. Je ne sais pas trop quoi penser de tout ça... Toi, tu en dis quoi ?

A part sa mère et Malone, il n'a jamais pris conseil auprès de qui que ce soit. C'est le privilège qu'il offre à Ibakha.

- Malone est venu ?

Le soupire qu’il lâche est à lui seul une réponse. Le regard d’Ibakha tombe sur la fleur, laissée comme une offrande sur son oreiller et elle sourit en l’attrapant entre ses doigts. Elle qui aurait trouvé ridicule ces touches de romantisme chez n’importe qui d’autres se surprend à les juger parfaitement adorable lorsqu’elles viennent d’Hunter. Cet homme est totalement en train de lui retourner la tête…et le cœur avec.

- ....Ouais. Il s'inquiétait, apparemment, des effets de la sanction sur mon moral.

Elle pique la fleur dans le nid d’oiseau qu’est sa chevelure, juste derrière son oreille et occupe ses doigts à tracer des formes au hasard sur son torse.

- Il la trouve disproportionnée et va essayer de raisonner Colgan.
Une forme d’espoir mince de voir les évènements de la veille s’effacer comme un mauvais rêve fait pomper son cœur plus vite.
- Il voulait aussi nous transmettre ce qu'il est ressorti de leur entrevue avec Dysderie.

Elle relève la tête pour croiser son regard, lui signifiant qu’il a toute son attention et l’invitant silencieusement à poursuivre.
- J'ai pas tous les détails. Mais apparemment Dysderie m'a nommé contremaitre pour diriger la meute en tant que force de travail agricole.
Elle marque un instant une certaine surprise avant de sourire, heureuse et confuse à la fois.
- Ce n’est qu’une officialisation de ce que tu fais déjà. Mais… comment ça diriger la meute pour des travaux ?
- Visiblement, ils vont tous bosser ici en échange de l'aide qu'elle nous apportera.
Cette fois, elle se redresse un peu plus, alarmée.
- Quoi ?
Petit à petit son visage se plisse dans une expression de déplaisir mêlée d’une certaine panique.
- Ils vont…tous venir ici ?
Elle a une brève vision des louves et loups envahissants la grange, leur grange, leur refuge, laissant leurs odeurs partout, babillant ici et là dans leur kitchenette, découvrant la salle de bain, lui posant tout un tas de questions auxquelles elle n'a aucune envie de répondre...en bref une véritable vision de l’enfer.
Elle se laisse retomber sur le côté et pousse un long soupir, une main sur son front.
- Merveilleux, marmonne-t-elle en essayant de contrôler sa colère et ses angoisses.

En un rien de temps ils transformeront leur espace en lieu commun et cette seule idée la répugne au plus haut point. Comme si tout ce qui se passait en ce moment n’était pas déjà suffisant. Sachant Hunter bien trop habile à décrypter les expressions de son visage, Ibakha détourne la tête le temps de reprendre la maitrise de ses émotions.

- Il y a une réunion de la Meute ce soir pour développer les détails. Si j'accepte le job, je vais me présenter là bas pour donner des directives à suivre et organiser les tâches...

Une fois certaine qu’elle affiche une expression plus neutre, elle pivote la tête vers lui. Elle est ridicule. Tout le monde se fiche de son petit confort, mieux, il n’a aucune importance si cela permet à Hunter de trouver une place de choix au sein de la Meute.

- Malone m'assure que Colgan est en accord avec ça, mais tant que je ne l'aurais pas entendu de sa bouche, je n'en serais pas sûr.
- Il l’est sans doute. Malone ne te mentirait pas sur quelque chose d'aussi important. Tu en sauras plus ce soir j’imagine.  
- Je ne sais pas trop quoi penser de tout ça... Toi, tu en dis quoi ?
Ibakha pince les lèvres, tourne sur son flanc pour lui faire face et cale une main contre sur la joue d’Hunter.
- Je crois…qu’il faudrait que tu acceptes. Non seulement parce que tu es la personne la plus indiquée pour ça et pour t’assurer qu’ils ne fassent pas n’importe quoi, lance-t-elle avec à l’appui un coup d’œil entendu, mais…elle marque un silence, son pouce caressant délicatement le tracé de sa pommette… c’est aussi la suite logique de ce que tu as entrepris ces derniers temps ; devenir un membre à part entière de la Meute, ne plus être en marge. Elle lui sourit à nouveau, confiante au moins sur ce point. Montre-leur qui tu es vraiment et en un rien de temps ils t’apprécieront et t’aimerons tous comme…

… elle s’arrête soudain, consciente qu’elle vient presque de se confesser stupidement. Elle détourne les yeux et laisse sa phrase en suspend dans l’air de la grange qui se réchauffe lentement.  
- Peut-être même que Colgan reviendra sur sa décision…

Et c’est bien ça le plus important, ses propres angoisses ne comptent pas.

Hunter savait que la nouvelle lui serait déplaisante. Ibakha a beau tenter de le masquer, il commence à saisir ses mécanismes de défense. Lorsqu'elle se tourne de nouveau vers lui, il vient caresser son beau visage de ses doigts rustres, comme pour lui rendre son expression naturelle.

- Ibakha...Tu n'es pas obligé de composer avec moi, tu le sais. Il soupire. Je ne sais pas trop quoi penser de tout ça... Toi, tu en dis quoi ?
- Je crois…qu’il faudrait que tu acceptes. Non seulement parce que tu es la personne la plus indiquée pour ça et pour t’assurer qu’ils ne fassent pas n’importe quoi.
- Je vais voir avec Dysderie si il est possible de sanctuariser cette grange. C'est notre... endroit. Toi et moi on en a besoin pour notre bien être mentale.
- Mais…
- Mais ? souffle-t-il en écho.
- C’est aussi la suite logique de ce que tu as entrepris ces derniers temps ; devenir un membre à part entière de la Meute, ne plus être en marge. Montre-leur qui tu es vraiment et en un rien de temps ils t’apprécieront et t’aimerons tous comme…

Hunter la dévisage avec cette fixité terrible, qui perfore jusqu'à l'os. Son rythme cardiaque c'est accéléré d'un seul coup, sans prévenir.

- Peut-être même que Colgan reviendra sur sa décision…

Le loup vient chercher la bouche d'Ibakha avec une voracité à peine contenue. Une réponse muette à une confession implicite.
"Moi aussi, je t'aime..."

- Et tu es d'accord avec tout ça ? finit-il par proférer, une fois repu de ses lèvres. Tu.. Tu es ma compagne, maintenant. Ton avis compte, mais ton ressenti et tes sentiments aussi. Je n'entreprendrais rien qui puisse mettre à mal la promesse que je t'ai faite de veiller sur toi.

- Je vais voir avec Dysderie s’il est possible de sanctuariser cette grange.
- Sanctuariser ? Tu sais bien que certains ne se priveront pas de piétiner notre intimité sans même se rendre compte de ce qu’ils font… Elle pousse un profond soupir avant d’ajouter avec une lueur malicieuse dans le regard. Qu’est-ce que tu proposes ? Tu vas uriner aux quatre coins de la grange pour marquer ton territoire ?
Cette idée la fait rire malgré elle.
- C'est notre... endroit. Toi et moi on en a besoin pour notre bien être mentale.
- Oui… tu crois vraiment que c’est possible ? De faire en sorte que cette partie de nos vies ne s’intitule pas « Le vengeance du patchouli » ? A l’idée qu’ils viennent ici tous les jours, elle en a de véritables bouffées d’angoisse. Elle a peau les apprécier tous plus ou moins, elle n’a jamais envisagé de les côtoyer aussi souvent et de façon aussi proche. Mais…
- Mais ?
- C’est aussi la suite logique de ce que tu as entrepris ces derniers temps ; devenir un membre à part entière de la Meute, ne plus être en marge. Montre-leur qui tu es vraiment et en un rien de temps ils t’apprécieront et t’aimerons tous comme…

La confession est avortée, le regard intense qu’il lui lance, indéchiffrable.  Quand bien même les choses sont très claires pour elle, Ibakha ne sait pas vraiment comment il prendra l’aveu de ses véritables sentiments. Tant que les verrous dont il lui a parlé n’ont pas sauté, elle ne risquera pas de le mettre mal à l’aise avec des mots qu’il n’est peut-être pas encore prêt à entendre.

- Peut-être même que Colgan reviendra sur sa décision…

Il plaque sa bouche contre la sienne. Pour la faire taire ? Sans doute. Les baisers qu’il lui donne la font frémir de la tête au pied et elle referme des bras possessifs autour de son cou en les lui rendant au centuple, exprimant ainsi son affection pour lui.

- Et tu es d'accord avec tout ça ? Tu… Tu es ma compagne, maintenant. Ton avis compte, mais ton ressenti et tes sentiments aussi.
Une expression profondément attendrie et tout à fait inhabituelle transparait sur le visage d’Ibakha alors qu’elle se hisse vers lui pour l’embrasser encore.  
- Ta compagne… répète-t-elle sur un ton ronronnant. Elle aime l’entendre dire, tout comme lorsqu’il l’appelle « sa femme ». Quoique que toi ou moi disions, la Meute viendra au Silo. J’aime autant savoir que tu seras là pour les « canaliser » un peu. Et puis…j’ai hâte de te voir aboyer des ordres. Elle sourit, toujours accrochée à son cou et se glisse sur les draps pour venir se coller tout contre lui. Plus sérieusement, ils apprendront à t’écouter et à prendre en considération ton avis et tes conseils. C’est sans doute la meilleure chose qui puisse t’arriver au final… je suis heureuse pour toi.
- Je n'entreprendrais rien qui puisse mettre à mal la promesse que je t'ai faite de veiller sur toi.

Elle plante son regard dans le sien, allant d’un iris à l’autre.  

- C’est une opportunité que tu ne peux pas laisser passer. Peu importe le reste, déclare-t-elle avec fermeté. Ne t’en fais pas pour moi, je suis bien plus solide que tu ne le penses. On s’occupera…du reste plus tard. Quelques jours de plus à cohabiter avec ses démons intérieurs ne vont pas la tuer. Qu’est-ce que huit petits jours d’invasion lupine à côté de l’occasion pour toi de trouver ta place ? Elle vient donner un petit coup de nez contre le sien. Je te réclamerai plus d’attention une fois qu’ils seront partis…à condition qu’il te reste un peu d’énergie pour moi.
Elle baise délicatement sa mâchoire carrée.
- Va à la réunion ce soir… et dis oui. Voilà ce que ta compagne te conseille.  

- Qu’est-ce que tu proposes ? Tu vas uriner aux quatre coins de la grange pour marquer ton territoire ?
- Je pensais plus simplement à mettre des verrous... Ricane-t-il. C'est notre... endroit. Toi et moi on en a besoin pour notre bien être mentale.
- Oui… tu crois vraiment que c’est possible ? De faire en sorte que cette partie de nos vies ne s’intitule pas « Le vengeance du patchouli ».

Hunter rit de plus belle.

- Tu crois Nina capable de coller de l'encens sous nos fenêtres pour "purifier" l'endroit ?

Ibakha insiste, prétend que tout ira pour le mieux et qu'il faut accepter la proposition de Dysderie. Elle est prête à se mettre de côté pour son bien et cela ne le rassure guère. Plus que lui, c'est elle qu'il faut considérer, dont il faut mesurer la capacité d'un trop plein de sociabilisation. Elle est encore fragile.

- Et tu es d'accord avec tout ça ? Tu… Tu es ma compagne, maintenant. Ton avis compte, mais ton ressenti et tes sentiments aussi.
- Ta compagne…
- Ma compagne, oui... appuie-t-il tout sourire.
- Quoique que toi ou moi disions, la Meute viendra au Silo.
- Je le crains. soupire-t-il.
- J’aime autant savoir que tu seras là pour les « canaliser » un peu. Et puis…j’ai hâte de te voir aboyer des ordres.

Hunter pousse un petit grognement amusé.

- Pourquoi... ? Tu trouves ça séduisant ?
- Plus sérieusement, ils apprendront à t’écouter et à prendre en considération ton avis et tes conseils. C’est sans doute la meilleure chose qui puisse t’arriver au final… je suis heureuse pour toi.
- Je n'entreprendrais rien qui puisse mettre à mal la promesse que je t'ai faite de veiller sur toi.
- C’est une opportunité que tu ne peux pas laisser passer. Peu importe le reste. Ne t’en fais pas pour moi, je suis bien plus solide que tu ne le penses. On s’occupera…du reste plus tard.
- Non, Ibakha, non... Il faut absolument que l'on poursuive ensemble tes efforts et recommencer le rite.
- Qu’est-ce que huit petits jours d’invasion lupine à côté de l’occasion pour toi de trouver ta place ? Je te réclamerai plus d’attention une fois qu’ils seront partis…à condition qu’il te reste un peu d’énergie pour moi.
- Tu seras ma priorité, quoi qu'il arrive. Toujours...
- Va à la réunion ce soir… et dis oui. Voilà ce que ta compagne te conseille.

Ils échange une série de baisers tendres.

- Est-ce que ma compagne viendra avec moi.. ?

Se faisant, il bascule doucement sur elle avec l'intention très claire de recouvrir la moindre parcelle de sa peau de pêche avec sa bouche.

- C’est une opportunité que tu ne peux pas laisser passer. Peu importe le reste. Ne t’en fais pas pour moi, je suis bien plus solide que tu ne le penses. On s’occupera…du reste plus tard.
- Non, Ibakha, non... Il faut absolument que l'on poursuive ensemble tes efforts et recommencer le rite.
Elle a un petit sourire plein d'insécurités.
- Tu as peur de ce que je pourrais faire, si j'ai une autre...crise... ? Je n’ai pas dit qu’on laisserait tomber, on y consacrera du temps et de l’énergie quand on aura retrouvé notre tranquillité, en espérant qu’on la retrouve un jour.

Elle a beau en plaisanter, elle espère de tout cœur que la vie reprendrait son cours normal après la pleine lune.

- Et puis, avec l’influence de plus en plus forte de la lune, je ne suis pas certaine que ça soit une bonne idée de faire ça maintenant, si ? Enfin c’est toi le spécialiste de la question. Mais… Qu’est-ce que huit petits jours d’invasion lupine à côté de l’occasion pour toi de trouver ta place ? Je te réclamerai plus d’attention une fois qu’ils seront partis…à condition qu’il te reste un peu d’énergie pour moi.
- Tu seras ma priorité, quoi qu'il arrive.

Que ces mots sont doux à ses oreilles. Elle n’a jamais été la priorité de personne, n’a jamais pu que compter que sur elle-même. Elle caresse du pouce ces lèvres qui profèrent toutes ces choses qui la font littéralement fondre de l’intérieur.

- Et tu es la mienne.
C’est bien pour cela qu’elle accepte aussi facilement de se mettre de côté pour lui. Sans doute pour la première fois de sa vie, elle pense à quelqu’un d’autres avant elle-même.
- Toujours...
- Toujours…répète-t-elle pensivement. C’est un bien long mot pour des êtres comme nous, non ? Va à la réunion ce soir… et dis oui. Voilà ce que ta compagne te conseille.

Ils s’abreuvent de tendresse qui vient se déposer sur les plaies laissées à vif hier. L’avenir ne lui parait soudain pas aussi noir. Tant qu’il restera à ses côtés…
Elle sait maintenant qu’elle l’aurait suivi…
Comme s’il lisait dans ses pensées il lui demande alors :

- Est-ce que ma compagne viendra avec moi… ?

Ibakha met quelques secondes à recontextualiser sa question et se demande un bref instant si Colgan lui en veut pour s’être dressée entre lui et Hunter la veille. Elle se laisse rallonger et bécoter la peau avec des soupirs langoureux. Ses cuisses se ferment sur la taille d’Hunter et ses mains se faufilent sous son tee-shirt pour griffer son dos avec une exquise délicatesse.

- Je ne sais pas… Je n’ai pas été officiellement conviée… mais si tu as besoin de moi, je serai là.
Les mains en coupe sur son visage, elle l’attire vers sa bouche et l’embrasse jusqu’à ne plus avoir de souffle, ondulant son corps contre le sien sans équivoque.
- Promets-moi… promets-moi simplement que tu feras ce qu’il faut pour que les choses s’améliorent… tu veux bien ?

- Je ne sais pas…

Hunter retire son T-shirt entre deux baisers fiévreux.

- Je n’ai pas été officiellement conviée…
- C'est une réunion.. Il grogne en la sentant se presser contre son érection magistrale... générale.
-...Mais si tu as besoin de moi, je serai là.
- J'ai toujours besoin de toi... Ibakha...

Le loup aime prononcer son nom, il sonne comme une formule magique renfermant d'incroyables pouvoirs. Un charme mystérieux qui ne marche que sur lui. Pendant qu'elle lui vole son souffle avec son total consentement, il déboutonne son jean à la hâte.

- Promets-moi… promets-moi simplement que tu feras ce qu’il faut pour que les choses s’améliorent… tu veux bien ? ânonne-t-elle alors qu'il s'immisce entre ses cuisses.
Il gronde de contentement en retrouvant la chaleur de ce ventre accueillant.
- Pro.. Mis.. articule-t-il avant de lui mordre la gorge.

Après avoir fait l'amour -plusieurs fois, blâmons la lune montante- et rattrapé un peu de sommeil, Hunter se met en quête de Dysderie. Sur le chemin, il croise Marwa Gueyamel avec ses deux élèves Omar et Imany, ardhis comme elle, en train d'agrandir le Silo pour y placer artificiellement le terrain propice à une forêt. Fasciné par le spectacle de ses trois êtres élémentaires aux tatouages chatoyants sur leur peau, il observe leur maniement de la terre comme un sculpteur pétrit savamment la glaise de sa future oeuvre à une échelle gigantique.
Il trouve Dysderie en compagnie de Nathan, le petit maritin à qui la Meute doit le fait que Marisol soit encore en vie. Le jeune homme n'a pas l'air d'avoir beaucoup dormi et se concentre sur un agglomérat de chiffres et de formules qui n'inspire que du charabia au lycanthrope. Néanmoins, le djinn salue le nouveau contremaitre avec un large sourire et le félicite en apprenant qu'il accepte le travail.
La mandragore donne ses directives et la liste des tâches que Hunter devra assumer ou redistribuer. Il obtient de sa nouvelle patronne que la grange devienne son logement de fonction officiel et lui donne des verrous à poser sur les portes, chose qu'elle lui concède dans la seconde en lui confiant des serrures à fixer lui-même. Il pourra même lui faire une doléance de fournitures pour meubler l'espace à sa convenance.

Le soir venu, lorsqu'Ibakha et lui se présente de la porte de la salle commune réservée à leur meute, Hunter marque un temp d'arrêt avant de frapper. Il vient discrètement serrer la main d'Ibakha et en caresser le plat du pouce.

- Tu es prête ? souffle-t-il en la regardant dans les yeux.

Elle n'a pas affronté autant de monde depuis longtemps.

Après avoir paressé une bonne partie de la matinée dans les bras d’Hunter, Ibakha passe le reste de la journée à essayer de se faire à l’idée que son quotidien allait changer du tout au tout dans peu de temps. Elle a beau s’occuper les mains avec du désherbage basique dans le potager, son esprit refuse de se mettre en pause une seconde.
Les verrous obtenus par Hunter ne la rassurent qu’à moitié. Elle sait bien que la curiosité de certaines sera plus forte que ça et qu’elles demanderont à visiter son lieu de vie tôt ou tard. Difficile de refuser sans passer pour une garce… déjà qu’elle n’a pas la côte…  

C’est logiquement ensemble qu’ils se rendent à la réunion et ils s’arrêtent d’un commun accord devant la porte fermée de leur « salle commune ». Ibakha sent la main d’Hunter se refermer délicatement sur la sienne et ses doigts cherchent les siens. Elle pivote la tête pour croiser le bleu incroyable de ses yeux.  
- Tu es prête ?
Tête haute, elle affiche une assurance qu’elle feint à merveille. En-dehors d’Hunter, sa fragilité n’a jamais exposé à qui que ce soit. Elle y a toujours veillé.
- Evidemment. Tout se passera bien.
Petite caresse du pouce sur ses phalanges alors qu’elle lui lâche la main.
- Je passe devant... colocataire, elle a une très légère grimace en s’appelant ici puis ouvre la porte. Son visage arbore toujours cette tranquillité effacée et froide que tous lui connaissent alors qu’elle tremble intérieurement. Elle remarque les nombreux coups d’œil curieux qu’on leur jette mais note qu’ils s’adressent aussi bien à elle qu’à Hunter. Colgan a-t-il déjà annoncé à tous la mise au ban d’Hunter pour la prochaine pleine lune ? Difficile à deviner. Elle se force à ne pas chercher le regard de son compagnon et se dirige vers le groupe qui gravite autour de Shareen. Matilda et Sasha l’accueillent avec effusion et lui posent des questions neutres sur sa vie au Silo auxquelles elle répond avec autant de naturel que possible.
Déjà elle étouffe.

Colgan, Lewis et Malone discutent un peu à l'écart et tous braquent leurs yeux sur Hunter lorsqu’il entre à son tour. Colgan ne laisse transparaitre ni animosité, ni aucune autre émotion distincte. Pourtant il adresse un frémissement de lèvres à Arthur qui lui présent un plateau d’amuse-bouche qu’il a préparé lui-même. Sa colère brûlante de la veille semble s'être envolée ou du moins est-elle bien ravalée. Malone lui sourit plus franchement, soulagé de le voir.
- Content de te voir ! De vous voir tous les deux, corrige-t-il. J’en déduis que tu acceptes le job ?
A nouveau, les yeux des trois loups le scrutent avec attention.
- Désolé de ne pas pouvoir te laisser faire durer le suspense mais c’est important pour la réunion.  

Hunter commence à saisir quand Ibakha fait sa bravache. Il hoche simplement la tête en silence avant de la suivre. Une fois passé le seuil, il la couve du regard un moment pendant qu'elle évolue parmi d'autres femelles.
Il peut compter sur Shareen, Matilda et Sasha pour lui être agréable mais demeure inquiet sur cette abondance d'interactions dont il sait sa compagne peu friande. Une fois certain qu'il n'y aura pas de dérapage, il s'approche de Colgan, Lewis et Malone, laissant les regards curieux glisser sur lui comme de la bruine légère. Leur Alpha apparait bien disposé, mais il connait également sa propension au camouflage. Hunter reste sur ses gardes, donc, sans pour autant dégager d'animosité.

- Bonsoir, fait-il avec sa sobriété sempiternelle.
- Content de te voir ! De vous voir tous les deux. Ses yeux ne peuvent s'empêcher de glisser vers Ibakha. Leur regard se croisent. "Je suis là. Tout va bien." pense-t-il à son adresse. J’en déduis que tu acceptes le job ?

Hunter pivote lentement la tête pour affronter le tribunal inquisitoire.

- Désolé de ne pas pouvoir te laisser faire durer le suspense mais c’est important pour la réunion.
- En effet. Il faudra que je puisse prendre la parole pour vous expliquer ce qu'on attend de nous. J'ai également besoin de recenser les aptitudes spécifiques de chacun pour pouvoir vous repartir intelligemment sur les postes de travail.

Un silence.
Hunter prend profondément sur lui avant de poursuivre avec le même ton posé.

- Colgan, il faut que je te parle en privé, après la réunion, si c'est possible. Il contemple la petite salle assaillie de monde. Marisol ne sera pas des nôtres ?

Ibakha tente de prêter attention aux discussions des louves mais y reste finalement bien extérieure. Elle s’imagine déjà de retour dans le Silo… Elle observe à la dérobée Hunter et Colgan, tendue comme si il allait se passer une catastrophe à tout instant.
« Il a promis. »
Tout se passera bien.
Elle croise brièvement son regard et pendant une fraction de seconde son visage s’adoucit. Elle se dérobe rapidement avant d’être prise en flagrant délit.

- Désolé de ne pas pouvoir te laisser faire durer le suspense mais c’est important pour la réunion.
- En effet. Il faudra que je puisse prendre la parole pour vous expliquer ce qu'on attend de nous.
- C’était prévu, annonce Malone
- J'ai également besoin de recenser les aptitudes spécifiques de chacun pour pouvoir vous repartir intelligemment sur les postes de travail.
Avec son efficacité coutumière, Lewis lui tend déjà un dossier avant la fin de sa demande.
- On s’en est déjà chargé, explique Colgan. Si ça te convient, on commencera demain matin pour donner le plus de temps possible à Dysdérie.

Si le silence qui suit semble mettre Malone un peu mal à l’aise, ça n’est pas le cas de Colgan qui reste imperturbable.

- Colgan, il faut que je te parle en privé, après la réunion, si c'est possible.
L’Alpha garde un instant le silence comme s’il pesait les pour et les contre puis hoche la tête.
- Entendu.
- Marisol ne sera pas des nôtres ?
La mâchoire de Colgan se crispe faisant jouer ses muscles.
- Elle se repose. La sortie d’hier a été éprouvante. Bien si tout le monde est là, commençons.
Après avoir attiré l’attention de tous, l’Alpha prend la parole à haute voix.
- Comme vous le savez, la Pleine Lune approche. Elle sera là dans sept jours maintenant et elle marquera le début d’une série particulière, vous vous en doutez. Sans la forêt sous nos pattes et avec une Meute…incomplète. Il grimace comme si ce fait provoquait une douleur physique chez lui. Comme il est hors de question de sortir et beaucoup trop dangereux de nous transformer dans les Bunkers, nous allons mettre en place une alternative aidée principalement par Malsheem. Jusqu’à ce que nous puissions retrouver la liberté et les nôtres, nous passerons les pleines lunes prochaines dans le Silo.
Il se lance alors dans une brève description de ce qu’est le Silo et des changements qui vont y être opérés pour eux puis reprend. Si tout va bien…nous aurons également une proie à chasser pour calmer nos instincts cette nuit-là.
- Marisol nous accompagnera ? s’enquiert Sacha.
- Même si je ne conçois pas une pleine lune sans notre étoile, cela dépendra de son état. Il laisse planer un silence. Pour en revenir au Silo, en échange de l’aide considérable qui va nous être donnée, nous avons acceptés de mettre à contribution la Meute pour mettre la main à la patte en ce qui concerne les travaux sur place.
Un flot de murmures et de discussions plus ou moins enjouées accueillent cette annonce et Colgan lève la main pour retrouver le silence et poursuit.
- Nous commencerons le plus tôt possible selon les directives d’Hunter. C’est lui qui se chargera de la distribution de nos tâches là-bas. Il a été nommé contremaitre du Silo, donc considérez que lorsqu’il s’agit de quelque chose qui tourne autour de ce lieu, sa parole fait loi.

Sans plus prononcer un mot, il se tourne vers Hunter pour l’inviter à intervenir.    

- Elle se repose. La sortie d’hier a été éprouvante.

"Merde..."
Il en est surement le responsable.

- Bien si tout le monde est là, commençons.

La réunion débute et Hunter sent monter en lui une nervosité qu'il n'a encore jamais connue. Il n'est pas coutumier des prises de parole en public. La plupart du temps on le connait pour ses éclats de voix ou ses remarques acerbes. L'éloquence ne fait pas partie des atout qu'il possède dans son escarcelle. Jambes écartées, bien campées sur le sol, dossier glissé sous le bras, il sert son poing devant lui comme un condamné avançant à l'échafaud. Hunter expérimente le trac pour la première fois de sa vie.

- Nous commencerons le plus tôt possible selon les directives d’Hunter. C’est lui qui se chargera de la distribution de nos tâches là-bas. Il a été nommé contremaitre du Silo, donc considérez que lorsqu’il s’agit de quelque chose qui tourne autour de ce lieu, sa parole fait loi.

Bien que préparé à ce genre d'entrée en matière, entendre distinctement de la bouche de leur alpha qu'il est figure d'autorité arrive à le surprendre. Il tourne la tête vers Colgan, comme pour vérifier qu'il est bien celui qu'il vient de désigner. Instinctivement il cherche l'appui d'Ibakha dans la vingtaine de visages qui le scrutent avec insistance, puis s'avance.

- Bien... Le Silo fonctionne comme ferme agricole biologique autosuffisante, sans apport technologique en dehors des conteners de céréales et des baromètres de températures et de pluviométrie : pas de tracteurs, pas d'engin mécanique, tout se fait à l'ancienne et le plus "naturellement" possible avec un rendement contrôlé strictement pour ne prélever que ce dont nous avons besoin au jour le jour. Etant donné que le Silo pourvoit à l'équivalent d'une petite ville souterraine, les journées sont intenses et rythmées par les trois livraisons effectuées matin, midi et soir pour le Mess. Il y a plusieurs pôles de travaux : s'occuper du bétail, pécher des poissons selon la demande, s'occuper de la production agricole, entretenir les infrastructures qui sont construite avec des matériaux renouvelables, majoritairement du bois, et quand les ardhis auront terminé d'aménager le terrain pour notre forêt, planter les arbres qui la constitueront et les asperger d'un engrais "boosté". Ne me demandez pas à quoi, tout ce que je peux vous dire c'est que ça réduit à quelques jours ce qui mettrait des années à pousser. Les journées commencent à 5h30 et termine à 17h30/18h, heure de la dernière collecte. On m'a remis vos... comment on appelle ça..."bilan de compétences" ? Je vais les étudier pour vous répartir au mieux. Vous saurez où demain matin.

Gros silence.
Au point qu'il se demande s'il n'a pas dit une bêtise.
Pourtant, Hunter ne s'en est pas forcément rendu compte, mais durant son exposé il a fait montre d'un calme limpide, posé, dégageant un charisme qui force à l'écoute, semblable à leur Alpha. Peut-être est-ce cela qui surprend tout un chacun.

- Hum...... Des questions ? demande-t-il en fronçant les sourcils, un peu décontenancé par leurs réactions.

Ibakha observe attentivement Hunter pendant son élocution et affiche un mince sourire en coin en voyant combien il arrive sans difficulté à se faire écouter. Rare se sont qui ont déjà contempler cet Hunter là. Posé, confiant nanti d’une aura qui impose le respect. Elle en a déjà eu le privilège et un sentiment de fierté incongru lui gonfle le cœur. Il se révèle totalement sous cette mise en lumière.
Elle appartient clairement à l’obscurité, n’ayant ni la flamboyance de Marisol, ni d’aura particulière.
Elle n’est qu’elle, la froide Ibakha et peut-être ne s’affichera-t-il jamais clairement comme « son compagnon » ailleurs que dans le secret de leur grange.
Peu importe après tout. Elle se contentera de tout ce qu’il voudra bien lui donner.

A la fin de son court exposé, le silence laisse brutalement la place à un certain nombre de questions, que ça soit pour lui ou pour Colgan. Manifestement, l’arrivée de la Pleine Lune tracassaient beaucoup de membres de la Meute.
Finalement les interventions se tarissent et Colgan rappelle qu’ils sont tous attendu demain à 5h30 au Silo, ce qui déclenche des soupirs lasses de quelques adeptes de la grasse matinée.
Il ne fait aucune mention de la punition d'Hunter et Ibakha se demande nerveusement ce que cela veut dire exactement.
Pour elle les choses commencent à prendre une tournure bien réelle et elle prend sur elle pour ne pas se précipiter au Silo pour profiter des derniers instants de quiétude. Elle espère simplement qu’il ne viendra à l’idée d’aucun loup de venir s’installer là-bas pour bénéficier de la douceur de vivre de l’endroit.

Elle souhaite une bonne nuit à ceux qui l’entourent et arrive à intercepter Hunter seul à seul.
Elle lui sourit brièvement et tente de refouler son envie de se serrer contre lui ou au moins de le toucher.

- Tu t’en es très bien sorti, monsieur le contremaitre, tu n’avais absolument pas besoin de moi. On voit que tu es fait pour ça.
Quelque chose lui dit qu’il a pris la meilleure décision possible et que ces quelques jours au Silo avec la Meute seront extrêmement bénéfiques pour lui.
- Je suppose que tu dois encore discuter de certaines choses avec les autres. Je vais rentrer, d’accord ?
La plupart des membres de la Meute se sont dispersés déjà, surement pour se coucher tôt et Colgan s’avance vers eux.
- Tu voulais me parler Hunter.
- Je vais vous laisser. Bonne nuit Colgan. J’espère que Marisol retrouvera rapidement la forme.
- Ca va aller pour elle, le Doc et moi on veille.
Après un dernier coup d’œil à Hunter, Ibakha quitte la salle et les laisse tous les deux, une pointe d'inquiétude nichée dans le ventre.

Hunter se détend quelque peu quand les questions affluent. Ils ont donc écouté. Il répond autant que faire se peut à chacun mais n'est pas mécontent que la séance se termine. Il lui faut conserver un minimum d'énergie pour la conversation qui va suivre.
Avant cela, une interlude -même de quelques secondes- avec Ibakha lui apparait nécessaire. Il a besoin de respirer un grand bol de sa présence avant de se jeter à l'eau. Et comme si sa compagne le comprenait d'instinct, elle vient à son encontre.

- Tu t’en es très bien sorti, monsieur le contremaitre, tu n’avais absolument pas besoin de moi. On voit que tu es fait pour ça.

Il meurt d'envie de la toucher, de l'étreindre contre lui, de l'embrasser publiquement pour faire valoir à tous qu'elle est sienne. Malheureusement, il doute qu'elle apprécie une démonstration aussi ostentatoire d'appartenance. Il ne veut pas briser son image ou son indépendance alors il se contente de se pencher à son oreille et de souffler un discret et quasi inaudible pour les autres : "J'ai toujours besoin de toi..."

- Je suppose que tu dois encore discuter de certaines choses avec les autres. Je vais rentrer, d’accord ?
- Seulement avec Colgan. Je ne devrais pas en avoir pour longtemps. Tu veux bien m'attendre dans le couloir... s'il te plait ?
- Tu voulais me parler Hunter.
- ... Oui.
- Je vais vous laisser. Bonne nuit Colgan. J’espère que Marisol retrouvera rapidement la forme.
- Ca va aller pour elle, le Doc et moi on veille.

La pièce se vide. La porte se referme. Il ne reste que les deux mâles : L'Alpha qui est et celui qui aurait pu. Hunter prend un moment pour trouver le moyen de formuler ce qu'il a à dire. Il regarde la liasse du dossier qu'il doit compulser et sa langue claque à plusieurs reprises sur son palais comme s'il cherchait à la tourner sept fois dans sa bouche.

-... Je note que tu n'as pas annoncé officiellement ma punition. Dois-je en déduire qu'elle est levée ? demande-t-il finalement. Puis après un nouveau silence, il ajoute : Je vous dois des excuses à toi et Marisol. J'ai été insultant envers la mémoire de vos enfants. Mes mots ont dépassé ma pensée de très loin. Je viens simplement solliciter ton pardon et le sien.

Il ne se cherche pas d'excuse cette fois. Certes, il a voulu défendre Dysderie -qui n'avait rien sollicité- et certes, il pense toujours que l'attitude de Colgan n'était pas la bonne. Néanmoins, il a regretté aussitôt les paroles proférées.
Hunter espère que cette amorce permettra un dialogue plus apaisé par la suite.

Colgan attend patiemment que tous partent, plutôt content du déroulé de la réunion et du soulagement qu’il lit sur le visage de chacun. Depuis qu’il sait que la Pleine Lune ne serait plus vraiment un problème pour la Meute, il sent nettement un poids en moins sur ses épaules.

Du coin de l’œil, il observe Hunter tandis qu’ils ne sont plus que tous les deux.
Il a clairement saisi l’inquiétude d’Ibakha et s’il ne percevait pas la nervosité d’Hunter, sûrement serait-il bien plus sur ses gardes.
Il meurt d’envie de rejoindre Marisol, mais il reste là, à attendre qu’il veille bien lui parler. Il espère sincèrement qu’il ne s’agit pas de reproche, d’insultes ou de défiance. Il n’a pas la force aujourd’hui pour gérer un Hunter plein de ressentiment.

-... Je note que tu n'as pas annoncé officiellement ma punition. Dois-je en déduire qu'elle est levée ?
C’est donc ça. Les fesses calées sur le dossier du canapé, il croise les bras et pousse un soupir.
- Je ne sais pas encore. Il laisse filer un silence. Je ne voulais pas diminuer ton autorité à peine acquise en signalant que tu étais mis au ban pour la prochaine lune. Ça aurait été contre-productif. Il hausse négligemment les épaules. Disons qu’elle est en suspens pour l’instant.    
Un nouveau silence pèse sur la pièce comme une masse lourde et palpable.
- Si c’est tout ce que tu voulais …
- Je vous dois des excuses à toi et Marisol.
Colgan le dévisage avec intensité et une réelle surprise, ayant du mal à assimiler les paroles – les excuses – d’Hunter.
- J'ai été insultant envers la mémoire de vos enfants. Mes mots ont dépassé ma pensée de très loin. Je viens simplement solliciter ton pardon et le sien.

« Cafard ».

Le mot résonne encore à ses oreilles. Il déglutit une première fois, regarde à présent le sol avant de relever la tête.
- Nos enfants ne méritaient effectivement pas ça. Nouveau silence avant qu'il ne reprenne. Si tu as dépassé les bornes, reste que tu as raison. Je ne peux pas laisser mes sentiments personnels et … la perte de mes enfants guider mes décisions d’Alpha. Il est simplement … dur de faire son deuil quand la douleur est aussi forte. Mais on doit penser à l’avenir, à retrouver nos membres perdus et à protéger et accueillir au mieux un nouvel enfant qui n’a pas à subir les mauvaises décisions de son père.
Notant qu’il vient d’en dire plus qu’il n’en avait l’intention il se redresse et ajoute.
- Merci. Pour ces excuses. Tu iras voir Marisol, je crois qu’elle a besoin de les entendre de ta bouche plus que de la mienne. Tu voulais ajouter quelque chose d'autre ? Dans ce cas, bonne nuit. Je serai évidemment là aussi demain matin.
En passant devant lui, il pivote simplement la tête et conclut.
- Tu t'en es bien sorti, ce soir. Tu vas gérer.
Il lui glisse un sourire qui pourrait presque se traduire par un "Pas si évident que ça les responsabilités hein ?" avant de s'éclipser.

- Nos enfants ne méritaient effectivement pas ça. Hunter n'a pas le temps d'expliquer ce malheureux emploi de mots, Colgan rembraye déjà. Si tu as dépassé les bornes, reste que tu as raison.

Son ainé le regarde avec des yeux ronds. Il ne s'attendait pas à une acceptation aussi radicale et surtout rapide.

-Je ne peux pas laisser mes sentiments personnels et … la perte de mes enfants guider mes décisions d’Alpha. Il est simplement … dur de faire son deuil quand la douleur est aussi forte. Mais on doit penser à l’avenir, à retrouver nos membres perdus et à protéger et accueillir au mieux un nouvel enfant qui n’a pas à subir les mauvaises décisions de son père.

C'est la première fois qu'il entend Colgan s'exprimer aussi intimement. Hunter déglutit, réfléchit à la manière de réagir. Il ne se sent pas légitime à lui poser une main sur l'épaule et à lui distribuer des banalités que l'on débite par automatisme pour réconforter les autres. Le deuil de cet homme et ses efforts méritent mieux.

- Merci. Pour ces excuses. Tu iras voir Marisol, je crois qu’elle a besoin de les entendre de ta bouche plus que de la mienne.
- ...Entendu.
- Tu voulais ajouter quelque chose d'autre ?

Hunter ouvre la bouche mais comme pour confesser son affection sincère à Ibakha, il peine à prononcer cette simple petite phrase : "Je peux t'aider à aller mieux." Il finit par secouer la tête à la négative.

- Dans ce cas, bonne nuit. Je serai évidemment là aussi demain matin.
- Ok.

Colgan prend le chemin de la porte et en passant devant lui glisse avec un subtile sourire :

- Tu t'en es bien sorti, ce soir. Tu vas gérer.

Hunter le fixe comme si ses oreilles lui avaient joué des tours et en oublie de le remercier. Un sentiment très étrange s'est emparé de son palpitant usé. La trille d'une corde oublié. La note qu'elle produit le bouleverse plus qu'il ne le voudrait. Le vieux loup reste là, un moment, en suspend devant ce qu'il attendait depuis des années.

Un peu de reconnaissance.

Ibakha patiente, immobile comme un rocher ancré au sol. Elle triture du bout des doigts un fil trop long de la manche de son pull large, seul signe qui montre un tant soit peu sa nervosité.
En se tenant assez près de la porte, elle aurait sans doute pu percevoir des bribes de la conversation qui se jouait dans la pièce mais elle a préféré s’éloigner suffisamment pour ne pas être tentée.
Elle se contentera de ce qu’Hunter lui dira de cette discussion.

Elle finit par se dire que les choses ne se passent pas si mal puisque quelques minutes après les avoir laissés tous les deux, elle ne perçoit aucun éclat de voix ou de dispute.
Ce qui en soi est un soulagement.
La tête en appui contre le mur, elle espère sincèrement que Colgan reviendra sur sa punition pour laisser Hunter courir avec le reste de la Meute.
En entendant des pas approcher, Ibakha se redresse. Colgan sort en premier, presque… détendu.  
Il lui lance une sorte de sourire en coin.
- Je crois que tu as une bonne influence sur lui. Bonne nuit Ibakha.
- Que…quoi ?

A court de mot, Ibakha le regarde partir puis se précipite dans la pièce.
Hunter a l’air sonné. Mais entier.
Elle s’approche et pose la main sur la joue d’Hunter.

- Tout s’est bien passé ? Tu n’as pas l’air bien…
Elle cherche son regard, inquiète. Manifestement, Colgan ne lui a rien fait physiquement donc…
- Hunter ? Qu’est-ce qu’il t’a dit ? demande-t-elle doucement.

Hunter est complétement décontenancé. L'émotion l'a pris au dépourvu et il se trouve comme fauché parce qu'il vient de voir et d'entendre.

- Tout s’est bien passé ? Tu n’as pas l’air bien…

La douceur de doigts graciles humant bon les pétales de lys le ramène doucement à l'instant présent et il tombe nez à nez avec deux amandes bleues vibrantes d'inquiétude.

- Hunter ? Qu’est-ce qu’il t’a dit ?
- Que.. euh.. Il déglutit soudain conscient qu'il est profondément bouleversé par tout ce que Colgan lui a confié. Qu'il acceptait mes excuses... son timbre se fendille... Que je j'avais raison malgré tout, sur le fond et qu'il.. qu'il allait y travailler et....

Il a du mal à formuler la suite.

- Il m'a félicité...

Hunter observe Ibakha toujours choqué mais avec clairement une joie sincèrement juvénile qui le transfigure. Personne ne l'a jamais félicité de sa vie.