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 Ce que la Nature enseigne... {Ibakha&Hunter}

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Hunter O'rourke
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Le soleil artificiel est haut. La voute azur du Silo est sans nuage. Hunter observe ce prodige, main en coupe sur les yeux. Il est fou de parvenir à ressentir la chaleur des rayons du soleil sur sa peau alors même que celui-ci n'existe pas. Il attrape une gourde, en boit une longue gorgée et reprend son ouvrage. La sueur ruissèle sur son torse nu alors qu'il enfonce les pieux dans la terre pour agrandir l'enclos du bétail. Après, il devra effectuer quelques travaux de réparation sur l'une de serres et empaqueter les ballots de pailles.

Son séjour au Silo n'avait d'abord, pas été remarqué.
Un rapide tour des lieux lui avait permis de repérer qu'à part les animaux il n'y avait pas âme qui vive. Les champs, les serres, les bocages et les arbres fruitiers semblaient s'épanouir seuls dans cet écrin de verdure.
Et puis il l'avait remarqué "elle".
Une étrange femme brune, borgne, en robes printanières, d'une beauté surannée. Elle occupait un laboratoire dans les hauteurs d'un arbre centrale parcouru d'escaliers qu'il n'avait pas remarqué tant il était imbriqué dans la végétation. Elle n'exhalait aucun parfum connu, si ce n'est celui entêtant d'un bouquet de roses trémières.
Parfois, il apercevait une enfant avec elle. Une fillette de cinq ou peut-être six ans, turbulente et simiesque. Fait surprenant, l'une et l'autre étaient tatouées : des motifs floraux s'enroulant amoureusement autour de leurs bras.

Savaient-elles seulement qu'elles avaient un colocataire ?

Hunter maquillait habilement sa présence et ses traces. Cependant, il fût un jour cueilli au réveil par l'enfant qui, il s'en aperçut vite, avait les dents aussi effilées et pointues qu'un requin. D'ailleurs, la petite sauvageonne ne prononçait qu'un seul mot : "Poisson". Tout était "Poisson". Lui compris. Il avait dû lui expliquer que ça n'était pas le cas quand elle avait tenté de lui boulotter le bras.
En la ramenant à sa mère, Hunter apprit que les deux créatures étaient des être démoniaques nommés Mandragores, imaginés par l'instigateur des lieux : ni plus ni moins que le Jardinier des enfers. L'adulte se nommait Dysderie Rose Grass, et la plus jeune Sizreïs Dionée Grass. Contrairement à bien des habitant des bunkers, ni l'une ni l'autre ne craignaient les Abyssaux. Il fût convenu qu'il puisse rester à condition qu'il prête main forte à la bonne tenue des lieux.
Ainsi Hunter O'rourke, Prince déchu, Roi de rien et de nulle part étaient devenu homme à tout faire. Ses journées étaient pleines, éprouvantes mais terriblement satisfaisantes aussi.
Pas une fois, il n'avait essuyé de crise de claustrophobie.
Pas une fois, il n'avait croisé l'un des membres de sa meute non plus.

"Ibakha a peut-être souhaité oublier ma part de marché..."
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Ibakha Amal
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Après le départ d’Hunter, laissée seule, Ibakha s’était recroquevillée sur elle-même sans crainte d’être surprise. Comme toujours, c’est seule qu’elle faisait face aux réminiscences d’un passé douloureux qu’elle n’arrive pas à tuer aussi bien que ceux qui en étaient la cause. Elle avait mis de longues minutes avant de retrouver son attitude composée et lisse.
Assurée d’être à nouveau « normale », elle était sortie et avait repris le cours d’une existence sans plus de saveurs, sans rien qu’une longue attente. Autant dire une longue agonie.
L’inaction la rend folle, elle ne trouve pas sa place dans ce bordel ambiant qui a bien du mal à se calmer. Elle ne fait pas dans le social, ne saurait pas faire.
Alors elle passe son temps dans la sorte de salle de sport qui a été mise en place pour ne pas rendre les gens complètement dingues.
Elle frappe, sue, s’use les muscles et les tendons pour oublier le temps qui file à la lenteur d’un escargot asthmatique, pour oublier qu’elle a beaucoup trop de temps pour penser.
Le pire à gérer reste cette proximité. Plus de coin à elle, plus de refuge. Elle sait qu’Hunter a établi ses quartiers au Silo et n’y est pas retourné pour vérifier. D’ailleurs elle essaie de ne plus penser du tout à lui et à leurs dernières « interactions ».

Il n’a pas nié.
C’est un violeur.
Comme tous les autres.


Peut-elle pourtant se fier à son silence ? Elle commence à saisir qu’il le chérit bien plus que la vérité ou la confrontation.

Pas mon problème.

Reste qu’elle n’a plus rien à elle. Plus aucune échappatoire à leur nouvelle situation. Alors comme un animal en cage, elle tourne et tourne et tourne encore. Son esprit s’effrite sur des murs et des murs. Elle essaie de passer du temps avec les autres membres de la Meute mais toutes ses interactions sociales finissent par la mettre à cran. Elle n’a même pas de chambre à elle. Son visage ne laisse voir aucun de ses tourments, elle ne le permet pas. Elle tiendra, coûte que coûte, domestiquera la louve avide de liberté et de sang derrière l’humaine, cachera les vices de l’humaine derrière d’autres barrières.

Et puis, elle n’en peut plus.
Cinq minutes, juste cinq minutes seule.
C’est tout ce qu’elle demande.
Le Silo est vaste. Avec un peu de chance, elle ne croisera personne.
Comme à son habitude.
Alors elle ne réfléchit plus et s’y faufile.
Le ciel, les oiseaux, du vert, partout du vert. Et aucun son humain, aucun brouhaha de voix, personne pour la frôler, personne à qui devoir parler.
Ibakha se remplit les poumons d’air magique, les oreilles de ce merveilleux silence. Elle ne tarde pas à trouver un arbre contre lequel elle s’assoit, enfonçant ses doigts dans la terre en fermant les yeux. Vaguement, elle entend un son de frappe sourd. L’odeur d’Hunter est prégnante et flotte dans l’air comme s’il avait fait du Silo son royaume. Peu importe.
Enfin elle s’apaise.  

Ici elle peut réfléchir plus clairement. Elle se trouve ridicule de se laisser chasser d’un endroit essentiel à son équilibre mental à cause d’un homme. Homme qui lui doit toujours une faveur d’ailleurs. L’a-t-il oublié ? A-t-il autant d’honneur que de lâcheté ? C’est donc à elle de lui rappeler que la parole donnée n’est pas à prendre à la légère. Pas avec elle.
Le trouver est facile, il lui suffit de suivre son odorat. Le spectacle qu’il offre la laisse un instant perplexe – voir admirative de ses muscles en action – avant qu’elle ne s’approche dans son dos. Sans doute l’a-t-il déjà repérée, elle ne cherche pas à être discrète. Elle hisse son corps de liane sur la barrière.

- Un Vieux Loup qui joue au Charles Ingalls… original…

Elle attend qu’il se tourne vers elle pour planter son regard sans émotion – en apparence. Elle ne devrait pas se réjouir de le revoir, ne sait même pas pourquoi elle éprouve cela – dans le sien.
- Tu ne pensais pas t'en sortir à si bon compte ? Si tu as oublié notre marché, ça n'est pas mon cas. Je suis venue réclamer ma part.
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Hunter O'rourke
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A l'instant où l'image de l'Indomptée l'effleure, il perçoit son parfum particulier. Il continue de travailler, masquant le léger sourire. Si Ibakha est venue à lui, c'est qu'elle ne le déteste plus. Pas autant du moins.

- Un Vieux Loup qui joue au Charles Ingalls… original…
- Je n'ai jamais beaucoup aimé cette série...


Il se retourne lentement, peut-être à dessein. Les remarques sur sa plastique ne lui ont pas échappé. Peut-être apprécie-t-elle la vue autant que ses soeurs, qui sait ? Il la toise avec très léger haussement de sourcil. Toujours aussi gracieuse les pommette aussi pointues que fières, elle darde sur lui un regard moins polaire qu'il n'y parait. A moins qu'il ne l'espère un peu trop.

- Tu ne pensais pas t'en sortir à si bon compte ? Si tu as oublié notre marché, ça n'est pas mon cas. Je suis venue réclamer ma part.
- Je n'ai rien oublié, Ibakha. Ma parole est d'or. J'ai juste pensé qu'il te fallait de l'espace et du temps au vu de ce qu'il s'est passé la dernière fois. J'attendais simplement que tu sois prête.


Bien qu'il ne soit coupable de rien de concret, il a malgré tout fait ressurgir chez la jeune femme un épisode traumatique de son existence. Peut-être -surement- l'associe-t-elle au souvenir douloureux de son viol. Hunter la contemple en silence, ses prunelles bleues plongées dans les siennes comme pour y harponner son âme.

- Je suis content que tu sois là, déclare-t-il enfin de son timbre grave qui charrie une véritable sincérité sous la rocaille.

Il s'essuie son visage en sueur dans le creux de son épaule.

- J'ai quelques obligations à honorer, mais on peut en discuter pendant que je trava....
- POISSON !!!!


Une créature minuscule et agile saute brusquement sur la barrière en hurlant son étrange cri de guerre. A contre jour, il est difficile pour Ibakha de discerner la nature de la chose. D'ailleurs, elle ne l'a pas sentie arrivée : son odeur n'a rien d'humaine. Elle est herbacée. Végétale. Quoi qu'il en soit, elle l'a prise pour cible et la louve sent une petite mâchoire hérissée de crocs pointus se refermer sur son épaule.

- SIZREÏS, NON ! Rugit Hunter en direction de la petite tête brune et échevelée.

L'assaillante d'Ibakha n'est ni plus ni moins qu'une gamine, haute comme trois pommes, la chevelure hirsute et le regard vert immense. Sursautant, face à la remontrance du loup, elle dessert lentement la mâchoire, laissant une auréole de bave sanguinolente sur sa proie.

- Poisson ?
- Non, ce n'est pas du poisson. C'est une louve, comme moi.
- Poisson ?
répète la petite mais sur une tonalité interrogative légèrement différente.
- On ne la mange pas, non.
- Poissoooon...
fait la gamine avec un air déçu.

Hunter l'attrape par la peau du cou et la tient à bout de bras à bonne distance d'Ibakha. La fillette est nue comme un verre, tatouée sur le haut du buste et les bras. Elle a tout d'une enfant sauvage.

- Qu'est-ce que tu as encore foutu de tes fringues, petite ogresse ?
- POISSON !!!
Fait-elle en éclatant de rire tout en gesticulant ensuite pour se libérer de sa poigne.
- Si tu les as encore bouffé, ta mère va te passer un savon.
- SIZREÏS DIONEE GRASS!
Tonne une voix féminine. Une puissante odeur de rose envahit les narines de deux lycans alors qu'une femme pulpeuse et distinguée, s'avance vers eux.
- Poissooooon... gémit la gamine en tâchant de se se cacher derrière la carrure massive de Hunter.
- Il n'y a pas de poisson qui tienne! Viens ici tout de suite !

Les tatouages de roses rouges et de ronces sortent de sous la peau de la femme et s'en vont chercher la petite qui se retrouve ligotée et ramenée manu-militari auprès de sa génitrice.

- Je suis terriblement désolée! Elle ne vous a pas mordu au moins ?
- PoiiiiiiSSOOOON !
glousse la gamine.
- Comme j'apprécierais que tu élargisses ton vocabulaire.... soupire sa mère.
- Ibakha, je te présente Dysdérie, c'est elle qui s'occupe de la gestion du Silo.
- Enchantée Mademoiselle Ibakha.
La demoiselle effectue une révérence charmante alors même que sa progéniture et toujours pendue tête en bas à ses ronces.
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Ibakha Amal
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- Tu ne pensais pas t'en sortir à si bon compte ? Si tu as oublié notre marché, ça n'est pas mon cas. Je suis venue réclamer ma part.
- Je n'ai rien oublié, Ibakha. Ma parole est d'or. J'ai juste pensé qu'il te fallait de l'espace et du temps au vu de ce qu'il s'est passé la dernière fois. J'attendais simplement que tu sois prête.
Elle sert les mâchoires, le regard plus dur.
- Prête à quoi exactement ?
Comme si l’espace et le temps pouvait faire quoique ce soit. Elle aurait aimé que lui soit prêt à lui dire ce qu'il n'a pas dit ce jour là. Peut-être que ça la libèrerait d'un poids qu'elle perçoit lorsqu'elle repense à leur dernière face à face.
- Je suis content que tu sois là.

Encore il arrive à la surprendre. Imperceptiblement son visage se détend et un soupçon de sourire tire le coin de sa bouche.

- Vraiment ? C’est que ton exil personnel commence à te peser si tu en viens à penser un truc pareil.
- J'ai quelques obligations à honorer, mais on peut en discuter pendant que je trava....
- POISSON !!!!

Une vive douleur la prend dans l’épaule et instinctivement sa main cherche à attraper son assaillant et se referme sur une étrange tignasse.

- SIZREÏS, NON !

Sans égard pour sa chair prise entre des petites dents pointues, Ibakha extirpe la tête de sa chair comme elle le ferait d’une tique agaçante, en tirant sur les cheveux. Elle s’arrache au passage un bout de peau quand bien même la chose relâchait son emprise au même moment. La tenant toujours par les cheveux, Ibakha la garde à bonne distance de son corps.

- C’est quoi ça ? gronde-t-elle, l’attitude clairement méfiante.

L’aspect de cette chose qui ressemble à une fillette humaine mais n’en ai pas une la révulse intérieurement. Elle sent confusément qu’elle n’a rien de « naturelle ». Elle a l’odeur des plantes et ses tatouages puent la magie. Qui s’amuse à faire des expériences sur des enfants ?  
Un dialogue surréaliste s’engage entre la fillette-plante et Hunter qui lui retire la chose des mains jusqu’à ce que la « mère » débarque tout en courbes et en rose. L’odeur est si forte qu’Ibakha en est écœurée et fronce le nez d’inconfort. Hunter semble parfaitement à son aise dans cette petite scène bucolique.  

- SIZREÏS DIONEE GRASS!
- Poissooooon...
- Il n'y a pas de poisson qui tienne! Viens ici tout de suite ! Je suis terriblement désolée ! Elle ne vous a pas mordu au moins ?

Ibakha garde le silence alors que son sang goutte sur son épaule nue, se contentant de fusiller la chose de son regard glacial tout en mémorisant son odeur. Elle ne la prendra plus par surprise.  

- PoiiiiiiSSOOOON !
- Comme j'apprécierais que tu élargisses ton vocabulaire...
- Ibakha, je te présente Dysdérie, c'est elle qui s'occupe de la gestion du Silo.
Parfait. Plus de mondanités et d’effort de civilité à faire.
- Enchantée Mademoiselle Ibakha.
- Charmée, réplique-t-elle sur un ton qui indique tout le contraire. Ibakha tout court.

Et voilà, elle en a déjà assez. Il est donc officiel que même ici, elle ne pourra plus y trouver un refuge salutaire. Elle saute souplement de son perchoir et lance un regard tout à fait neutre à Hunter.

- Je repassera plus tard. C’est sans doute faux. Tu as l’air très occupé en effet...
... A jouer au bonheur dans le pré. C'est donc ça qu'il fait de ses journées ? Oublier le monde et la Meute dans son petit paradis personnel en compagnie de ces deux ... êtres ? Et pourquoi cela l’agace-t-il à ce point ? Elle espère que la bave de ce truc n’est pas infectée.
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Hunter O'rourke
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- Enchantée Mademoiselle Ibakha.
- Charmée. Ibakha tout court.


Hunter entend presque les icebergs s'entrechoquer et se fendre. La louve est plus glaciale que les deux pôles réunis. La femme-plante ne semble pas saisir l'hostilité dont elle fait l'objet. Son regard cyclope passe d'un loup à l'autre avec une curiosité tranquille.

- Je repassera plus tard. Tu as l’air très occupé en effet...
- Attends !


Spontanément, il lui a attrapé le poignet pour la retenir. Mais passé le sursaut de l'instant, il manque clairement d'arguments pour justifier son geste.

- Tu..... Tu viens à peine d'arriver.
"Super convainquant, mon vieux. Ton éloquence crève le plafond"
- Monsieur O'rourke, prenez votre journée si vous le désirez. Vous remplissez plus que votre part de "loyer". D'ailleurs, Ibakah, si vous cherchez du travail, je peux vous en trouver volontiers. Nous n'en manquons pas ici.
- Poisson ! Poisson ! Poisson !
- Non, tu ne vas pas jouer avec la joli dame. Elle est là pour rendre visite à Monsieur O'rourke.
Dysdérie prend sa fille dans ses bras et lui embrasse le front avec un sourire attendri. Je vous libère de nos présences inopportunes afin que vous profitiez pleinement de la quiétude du Silo. Je suis dans le Grand Arbre au centre, si vous avez besoin de mes lumières. Et comme s'il elle lisait dans les pensées de la louve elle ajoute. Sizreïs n'est pas venimeuse, simplement carnivore.

La Mandragore s'éloigne avec une démarche de femme d'intérieur des années cinquante dans sa cuisine proprette. Une vache meugle non loin. Hunter remarque alors qu'il tient toujours le poignet d'Ibakha entre ses doigts. Il la lâche maladroitement.

- Bon.... Tu comptes toujours partir, du coup ? demande-t-il en tapotant des poings sur ses cuisses. Il cherche son T-shirt du regard en se demandant bien ce qu'il a pu en faire.
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Ibakha Amal
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- Je repassera plus tard. Tu as l’air très occupé en effet...
- Attends !

Surprise, le regard d’Ibakha passe de la puissante main d’Hunter autour de son poignet à son visage avant de refaire l’inverse.

- Tu..... Tu viens à peine d'arriver.
- Et je dérange, manifestement.
- Monsieur O'rourke, prenez votre journée si vous le désirez. Vous remplissez plus que votre part de "loyer". D'ailleurs, Ibakah, si vous cherchez du travail, je peux vous en trouver volontiers. Nous n'en manquons pas ici.

Elle ne dit rien et si l’idée est séduisante, elle est aussi dangereuse. Elle ne tienne pas à se « ramollir » en jouant les fermières avec Hunter. Elle peut presque entendre d’ici les remontrances de son oncle qui lui dirait que rien n’est plus important que la terre sous ses pieds et le bétail. Sauf qu’ici tout est faux ou presque.

- Poisson ! Poisson ! Poisson !
- Non, tu ne vas pas jouer avec la jolie dame. Elle est là pour rendre visite à Monsieur O'rourke.
Elle ne peut pas s’empêcher cette fois de lever les yeux au ciel. « Rendre visite à Monsieur O’Rourke… ». Cette Dysdérie a tout de la parfaite petite femme sophistiquée et pulpeuse. Une vraie icone. Son opposé total.
- Je vous libère de nos présences inopportunes afin que vous profitiez pleinement de la quiétude du Silo. Je suis dans le Grand Arbre au centre, si vous avez besoin de mes lumières.
Elle ne dit toujours rien et regarde Hunter en coin. Est-ce là qu’il vit lui aussi ? Elle hausse mentalement des épaules.
- Sizreïs n'est pas venimeuse, simplement carnivore.
Le fait que cette « femme » puisse lire dans ses pensées ne la rend que plus nerveuse. Heureusement, elle et l’enfant infernal s’éloignent et ses épaules se relâchent imperceptiblement. Hunter la relâche soudain et elle n’avait même pas noté qu’il la tenait toujours.

- Bon.... Tu comptes toujours partir, du coup ?
Il a l’air nerveux et ça la fait sourire plus visiblement. Pour toute réponse, elle se hisse à nouveau sur la barrière et tâte sa blessure du bout des doigts. Ca cicatrise plus lentement que d’ordinaire mais au moins ça ne saigne plus.
- Je ne voulais pas perturber ton emploi du temps de fermier très chargé.
Elle vrille son regard perçant dans le sien.
- Cette petite retraite te fait du bien Vieux Loup ? Tu comptes passer tes vieux jours ici ou dans « Le Grand Arbre au Centre » ? demande-t-elle sur un ton égal. Drôle de "famille" ... en entendant, les autres s’inquiètent pour toi. Ils pensent que tu vas finir par quitter la Meute.
Elle sait bien que la chose est moins que probable mais ça ne l’empêche pas de se dire qu’il reste là pour fuir quelque chose.
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Hunter O'rourke
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- Je ne voulais pas perturber ton emploi du temps de fermier très chargé.

Il émet un de ses grognements caractéristiques, à mi-chemin entre le ricanement et la ronchonnerie caractérisée.

- Cette petite retraite te fait du bien Vieux Loup ?
- Effectivement. C'est paisible et j'apprécie m'occuper les mains.
- Tu comptes passer tes vieux jours ici...


Hunter toujours en quête de son vêtement pour couvrir sa nudité a soudain une épiphanie. "Merde, la gosse me l'aurait pas becté en douce tout de même ?"

-...ou dans « Le Grand Arbre au Centre » ?

Le lycan relève la tête et observe la louve de ses yeux perçants. Ne serait-ce pas un soupçon de jalousie qu'il entend là ? Il sent darder une forme de reproche sous le masque bien pratique de l'indifférence. Il vient appuyer une main sur la barrière, proche d'Ibakha.

- Drôle de "famille"...

Hunter pose son autre main de manière à entourer la fine silhouette de la louve tout en lui faisant face. Son tarin est si proche qu'elle pourrait le croquer.

- Une famille parfaitement monoparentale, souffle-t-il. Ce sont des plantes, Ibakha. Des pantes avec des jambes. Il penche la tête sur le côté, sans la quitter des yeux. Un fin sourire d'amusement corne le coin de ses lèvres. Qu'étais-tu en train de t'imaginer, hein... ?
- En entendant, les autres s’inquiètent pour toi. Ils pensent que tu vas finir par quitter la Meute.
- C'est ce que raconte Colgan ?


Il s'écarte pour s'accouder dos à la barrière.

- Typique de ses petites manipulations.... On a eu une petite discussion lui et moi. Il a effectivement essayé de me pousser dehors. Je lui ai dit que je ne partirais pas et que je ne m'effacerais plus. Ne te fie pas aux apparences. Ici c'est le seul endroit où je suis certain de ne pas faire de crise de panique à cause de ma claustrophobie. Cela ne signifie pas pour autant que je me mets au banc. Je participerais aux prochaines réunions et vous êtes libres de venir me voir.
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Elle l’observe alors qu’il s’approche, sourcils légèrement froncés.

- Drôle de "famille"...

Il l’entoure de ses bras, si proche qu’elle se prend une pleine bouffée de son odeur. Sueur, cuir, bois et quelque chose de définitivement lui. Bien moins déplaisante que l’odeur de rose, bien plus…sauvage. Aime-t-il le parfum de rose ? Elle ne sent certainement pas les fleurs.    

- Une famille parfaitement monoparentale.
- En quoi cette information me concerne ? réplique-t-elle du tac au tac.  
Imperceptiblement elle s’est penchée vers lui, yeux plissés et encore plus étroits toujours plantés dans les siens.
- Ce sont des plantes, Ibakha. Des pantes avec des jambes.
- Grand bien leur fasse…
Elle prend conscience qu’elle aime son prénom prononcé par cette voix rocailleuse.
- Qu'étais-tu en train de t'imaginer, hein... ?
- Rien du tout. Tu fais bien ce que tu veux de ta vie, Hunter. Son regard s’égare sur ses lèvres étirées et elle lui attrape soudain le menton. Elle termine son geste brusque par une légère caresse de son pouce sur son menton, frôlant sa lèvre inférieure au passage. Retire ce sourire de ta face Vieux Loup. En entendant, les autres s’inquiètent pour toi. Ils pensent que tu vas finir par quitter la Meute.
- C'est ce que raconte Colgan ?

Ibakha soupire et le relâche.
- Pourquoi est-ce que tu sautes aussitôt sur ce genre de conclusions ?

Il s’écarte et se poste à côté d’elle. Ne peut-il pas se rhabiller ? Il devient difficile de ne pas laisser courir ses yeux.
Ridicule. Elle est ridicule !
Et puis quoi ? Dans quelques secondes elle soupirera d'envie comme Nina le fait sur le passage d’Hunter sans que cet idiot ne s’en rende compte ? Non merci !

- Typique de ses petites manipulations...
- Tu es incroyable ! Tu m’écoutes au moins ? Colgan dément ses rumeurs et refuse qu’elles circulent, figure-toi. Mais j’imagine que c’est une sorte de contre-manipulation pour se faire passer pour le gentil ou le pacifiste, lâche-t-elle sur un ton plein d’ironie grinçante. Elle pichenette soudain sa tête. Tu si têtu et rancunier que ça en devient pathologique, Vieux Loup.
- On a eu une petite discussion lui et moi.
Elle lui coule un long regard en coin.
- Vraiment ? Il était temps. Qu’est-ce qu’il en est ressorti ?
- Il a effectivement essayé de me pousser dehors. Je lui ai dit que je ne partirais pas et que je ne m'effacerais plus.
- Pourquoi j’ai l’impression de n’avoir eu que des informations très parcellaires et dirigées ?
- Ne te fie pas aux apparences.
Cette fois c’est elle qui descend dans un mouvement gracieux et vient se poster devant lui.
- A qui ou à quoi je peux me fier alors ? Hum ? Tu ne penses pas que les choses sont assez compliquées comme ça ?

Pour la première fois, un soupçon de la détresse qu’elle abrite bien profondément laisse filtrer à travers des micros-fissures sur son masque. Elle détourne les yeux et pince les lèvres.

- Ici c'est le seul endroit où je suis certain de ne pas faire de crise de panique à cause de ma claustrophobie.
- Je sais, souffle-t-elle sans lui dire qu’elle a conservé son secret précieusement.
- Cela ne signifie pas pour autant que je me mets au banc. Je participerais aux prochaines réunions et vous êtes libres de venir me voir.

Elle pivote à nouveau son regard vers lui et le dévisage un long moment, étonnement soulagée. Elle n’a pas vraiment prêté foi à ces racontars mais préfère largement qu’ils soient démentis par sa bouche.

- Bien. Je le ferai savoir aux autres.
Elle revient s’accouder à ses côtés et lève la tête vers le ciel, se gorgeant de ce soleil factice.
- Au fait…les coins de sa bouche se redressent. Tu n’as pas planté tes pieux assez profondément dans la terre. Elle rebascule le menton vers l’avant. Qu’est-ce que tu attends ?... ma leçon…précise-t-elle avant qu’il ne se remette à frapper sur les poteaux….quoique…le spectacle n’aurait pas été complètement déplaisant.
Elle se gifle mentalement.
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Hunter O'rourke
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La pulpe de son pouce sur sa peau a l'effet inverse qu'escompté. Le sourire d'Hunter s'élargit.

- Retire ce sourire de ta face Vieux Loup...

Il s'ébroue d'un petit grondement bref qui s'apparente à un ricanement, avant de s'écarter pour poursuivre la discussion. Que Colgan prenne sa défense le laisse dubitatif, mais il n'est pas non plus fermé à cette idée. C'est que leur conversation a porté ses fruits. Il la résume (très) sommairement à Ibakha qui se frustre de le voir ainsi conclure ce précieux échange.

- Ne te fie pas aux apparences.
- A qui ou à quoi je peux me fier alors ? Hum ?
Elle saute lestement de son promontoire. Hunter, observateur, descelle la fissure et l'anxiété qui en suppure. Tu ne penses pas que les choses sont assez compliquées comme ça ?

Le vieux loup attrape le menton de la jeune femme entre ses doigts rugueux pour faire pivoter son visage vers lui. Le geste, étrangement naturel, lui est venu sans réfléchir. A son tour, il s'attarde sur les angles de sa mâchoire. Caresse pudique qui se veut rassurante.

- Ici c'est le seul endroit où je suis certain de ne pas faire de crise de panique à cause de ma claustrophobie.
- Je sais.
- Cela ne signifie pas pour autant que je me mets au banc. Je participerais aux prochaines réunions et vous êtes libres de venir me voir.


Ibakha croise à nouveau son regard. Hunter y lit ce qu'il interprète comme un soulagement discret, habilement maquillé. Il lui rend l'usage de son menton avec un fin sourire.

- Bien. Je le ferai savoir aux autres.
- Merci.
- Au fait…
- Hum.. ?
- Tu n’as pas planté tes pieux assez profondément dans la terre.

Il vient s'accouder dans le même sens qu'elle.
- Tu veux les fixer à ma place ou c'est pour le simple plaisir de me voir suer au soleil ? s'amuse-t-il avec un petit sourire en coin. Elle adopte un port de tête royal, au dessus de ces basses considérations.
- Qu’est-ce que tu attends ?... Ma leçon…
- Ca n'est pas "Indomptée" que tu aurais du t'appeler, mais "Impatiente."
souffle-t-il avec un un rictus taquin qui accentue son charme sans qu'il en prenne vraiment conscience. Il se redresse, s'écarte de la barrière et lui offre la vision de son dos athlétique. Faut que j'aille me chercher un T-shirt. La gosse a du boulotter le mien. Elle raffole du coton... Son régime alimentaire est un putain de mystère !

Il regarde Ibakha par dessus son épaule.

- Et puis.. il faudrait que tu puisse rester concentrée sur ce que j'ai à t'apprendre. Il s'éloigne vers un bâtiment qui ressemble à une grange avec un petit rire grave.
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- Tu n’as pas planté tes pieux assez profondément dans la terre.
- Tu veux les fixer à ma place ou c'est pour le simple plaisir de me voir suer au soleil ?
Elle lui glisse un coup d’œil amusé.
- Qui sait… Elle laisse filer sa phrase dans un court silence. Qu’est-ce que tu attends ?... Ma leçon…
- Ca n'est pas "Indomptée" que tu aurais du t'appeler, mais "Impatiente."
Elle renifle de dédain. Elle s’accroche simplement à cette leçon pour justifier sa présence ici. Avec lui.
- J’ai été très patiente, Vieux Loup. Je le suis tout le temps d’ailleurs. Mais je t’ai laissé te ressourcer suffisamment longtemps je crois.

Il se redresse soudain et s’éloigne en lui tournant le dos avec un sourire indéchiffrable pour la jeune femme. Son front se plisse légèrement alors qu’elle contemple le jeu de ses muscles dorsaux. Il n’y a après tout rien de mal à regarder. Surtout s’il ne peut pas la surprendre.
- Faut que j'aille me chercher un T-shirt.
- Hum hum…fait-elle distraitement.
- La gosse a dû boulotter le mien. Elle raffole du coton... Son régime alimentaire est un putain de mystère !
Il pivote la tête et elle remonte aussitôt les yeux.
- Ca t’apprendra à laisser trainer tes affaires.
- Et puis… il faudrait que tu puisse rester concentrée sur ce que j'ai à t'apprendre.
N’ayant rien d’autre à faire, Ibakha le suit et lève les yeux au ciel.
- Tu es d’une suffisance ! Elle arbore même une légère moue amusée. Tu penses qu’un peu de peau nue m’empêche de me concentrer, Vieux Loup ? J’ai été pute, tu te souviens ? J’ai vu tellement de chair que j’en ai fais une overdose.

L’intérieur de la grange ressemble…à n’importe quelle grange. Ibakha en est presque déçue.

- Rustique. Tu dors entre deux bottes de foin ?

Elle entend déjà Nina couiner qu’elle n’a encore jamais roulé dans le foin avec un homme et que la vie est faite pour expérimenter tout un tas de choses. Ibakha retient un gloussement très peu digne en l’imaginant fomenter tout un plan pour réaliser son fantasme PUIS lui passer la corde au cou en le faisant désespérément tomber amoureux d'elle. Nina est le genre de coeur d'artichaut qui tombe amoureux toutes les semaines. Mais sa fixette sur Hunter dure depuis bien plus longtemps. Ibakha s’étonnera toujours que sa sœur puisse être aussi fleur bleue après tout ce qu’elle a vécu.
Curieuse et sans même lui demander son avis, elle grimpe lestement l’échelle qui mène vers une mezzanine. Cette fois, en remarquant sa paillasse rudimentaire, elle éclate de rire.

- Wow, on ne pourra pas dire que tu ne prends pas ton rôle de fermier très à cœur… tu as déjà fait ami-ami avec les souris avec qui tu dors ? … elle contemple son lieu de vie avec curiosité et un brin d’envie…cela dit, c’est pas si mal. Pas de mur, pas de colocataire bavard, pas de bruit qui se répercute partout… un peu de solitude. Je suis presque jalouse, finit-elle par déclarer en lui dédiant un mince sourire.  
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- Tu es d’une suffisance ! Tu penses qu’un peu de peau nue m’empêche de me concentrer, Vieux Loup ?
- Hum...hum...
Fait-il tout en continuant de la lorgner avec un sourire amusé.
- J’ai été pute, tu te souviens ? J’ai vu tellement de chair que j’en ai fais une overdose.
- Tu m'en diras tant
, déclare-t-il toujours un brin goguenard.

Son pied à terre au Silo essuie également le dédain affiché d'Ibakha.

- Rustique. Tu dors entre deux bottes de foin ?
- Et c'est moi qui suis suffisant... ?
remarque-t-il avec un haussement de sourcil.

Les manières supérieures de la louve sont divertissantes. Qui croit-elle leurrer en jouant les Princesses ? Elle a connu les steppes de Mongolie, la vie agricole à dos de cheval, et la liberté sauvage d'être louve.
Elle investit la mezzanine sans lui demander la permission, en gamine éhontée qu'elle est. Ses prunelles inquisitrices scrutent le moindre détail. Il l'observe faire tout en fouillant dans son paquetage sommaire pour en extirper un nouveau T-Shirt.

- Wow, on ne pourra pas dire que tu ne prends pas ton rôle de fermier très à cœur… tu as déjà fait ami-ami avec les souris avec qui tu dors ?
- Evidemment. Gus, Marcus et leur gang me cousent de nouveaux T-shirt en échange de fromage.
Silence. ... Quoi ? J'ai vu Cendrillon. Ca t'étonne ? Je l'ai même découvert à sa sortie au cinéma.
- …Cela dit, c’est pas si mal. Pas de mur, pas de colocataire bavard, pas de bruit qui se répercute partout… un peu de solitude. Je suis presque jalouse.
- Si tu as besoin de t'isoler, je t'offre asile quand tu veux.


Il relève le battant d'une poignée dissimulée dans le bois et une pièce escamotée s'offre au regard d'Ibakha. Une salle de bain tout ce qu'il y a de plus moderne. Visiblement, l'aspect "grange rurale" est également un décorum illusoire. Il se rafraichit par quelques rapides ablutions sur le visage et le torse avant d'enfiler son vêtement frais.

- Parle-moi de tes tentatives pour atteindre ta deuxième forme... fait-il en fouillant à nouveau dans son grand sac pour en sortir quelques éléments curieux : de la sauge séchée enroulée dans de la peau tannée, une aumônière en cuir contenant des os d'oiseaux, des pierres marquées de runes...


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- Wow, on ne pourra pas dire que tu ne prends pas ton rôle de fermier très à cœur… tu as déjà fait ami-ami avec les souris avec qui tu dors ?
- Evidemment. Gus, Marcus et leur gang me cousent de nouveaux T-shirt en échange de fromage...
Ibakha le toise de son point de vue en hauteur avec un pétillement amusé dans le regard.
- Quoi ? J'ai vu Cendrillon. Ca t'étonne ?
- Complètement. Je ne te savais pas si romantique non plus. J’en connais une que ça ravira ! Navré de te décevoir mais la vie est loin d’être aussi parfaite que celle d’un conte de fée. Ou ma marraine la bonne fée à pris sa retraite avant ma naissance.  
- Je l'ai même découvert à sa sortie au cinéma.
Elle s’assoit au bord de la mezzanine en laissant pendre ses jambes dans le vide. Dominer l’espace est aussi agréable que le reste.
- Vieux Loup, commente-t-elle avec un soupçon de quelque chose qui pourrait s'apparenter à de l'affection dans la voix. Cela dit, c’est pas si mal. Pas de mur, pas de colocataire bavard, pas de bruit qui se répercute partout… un peu de solitude. Je suis presque jalouse.
- Si tu as besoin de t'isoler, je t'offre asile quand tu veux.

Elle le contemple et cette fois elle lui offre l’un de ses sourires sincères.

- Tu risques de le regretter. Tu vas déjà avoir de la visite prochainement. Adieu ta petite retraite tranquille.

Il ouvre alors une porte qu’elle n’avait même pas remarqué et Ibakha penche la tête pour observer ce qui se trouve. Il s’avère que la grange, à sa grande surprise, bénéfice toute de même d’une salle de bain des plus modernes. Son étonnement se lit très clairement sur son visage et elle se laisse tomber au sol en se réceptionnant gracieusement avant de venir passer la tête par la porte. Ses yeux pétillent soudain en voyant la baignoire qui y trône majestueusement.

- Tu as une salle de bain pour toi tout seul ? Avec une baignoire ? Pas étonnant que tu préfères rester ici...
Elle entre cette fois pour jauger de la taille de ladite baignoire et en caresse la faïence. Bain parfumé, verre de vin et un bon polar. Son petit rituel du dimanche soir qui lui manque presque autant que le reste.

Elle se tourne vers le loup, les yeux plissés.
- Il a bon dos le fermier champêtre ! C’est presque du grand luxe à ce niveau.
Elle constate qu’il s’est rhabillé… Tant mieux ! Avec un soupir, elle sort de ce petit paradis thermal en se promettant de revenir.
- Parle-moi de tes tentatives pour atteindre ta deuxième forme...
- Infructueuses, commence-t-elle sobrement avec un petit sourire malin très rarement visible sur son facies. Par la méditation. J’essaie de visualiser cette forme… la transformation qui va avec. J’ai tenté différentes approches. Mais la Louve finit toujours par s’imposer dans mon esprit. Depuis quand tu la maitrises toi ?

Elle l’observe alors qu’il sort de nombreuses babioles qui n’auraient pas dépareillées dans la yourte d’un chaman.
- Tu comptes m’envoûtée ? Demande-t-elle en arquant un sourcil.

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Hunter O'rourke
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- Complètement. Je ne te savais pas si romantique non plus.
- Je l'ai même découvert à sa sortie au cinéma. J'avais onze ans... Je ne connaissais même pas la signification de ce mot. A l'époque chaque nouveau Walt Disney était une révolution.
- J’en connais une que ça ravira !
- Ah... Mes fameuses "groupies" imaginaires.


Il n'y croit pas une seule seconde. Il n'exhale ni charme, ni sympathie. Les femmes le considèrent comme un rustre et ne cherchent guère à aller au delà de cette image.

- Navré de te décevoir mais la vie est loin d’être aussi parfaite que celle d’un conte de fée. Ou ma marraine la bonne fée à pris sa retraite avant ma naissance.
- Pas de citrouilles-carrosses dans ta vie ?
Il secoue la tête avec un air faussement peiné. Triste...

Une fois rhabillé il a tout loisir de contempler l'expression estomaquée d'Ikabha et s'en délecte.

- Tu as une salle de bain pour toi tout seul ?
- Techniquement ça n'est pas la mienne.
- Avec une baignoire ?
- Elle est prévue pour les ouvriers agricoles. Il y a des douches communes dans un autre bâtiment, celle-ci est individuelle. Je crois qu'elle est réservée aux femmes.
- Pas étonnant que tu préfères rester ici... Il a bon dos le fermier champêtre ! C’est presque du grand luxe à ce niveau.
- Tu peux venir l'utiliser, à condition de ne pas l'ébruiter. Je ne me sers que de la douche.


Il n'a guère envie de retrouver toute une horde de femelles dans son petit coin de solitude. Une c'est tolérable, pas dix. Ibakha sera donc cette "une".

- Parle-moi de tes tentatives pour atteindre ta deuxième forme...
- Infructueuses...Par la méditation. J’essaie de visualiser cette forme… la transformation qui va avec. J’ai tenté différentes approches. Mais la Louve finit toujours par s’imposer dans mon esprit.
- Je vois, ceci étant la méditation est une bonne approche.
- Depuis quand tu la maitrises toi ?
- Relativement peu de temps compte-tenu de ma longévité. Ce fut souvent sujet de moquerie de la part de ma fratrie, et de déception de la part de mon père. C'est parce que j'ai cherché longtemps que je sais désormais ce qui peut faire obstacle.
- Tu comptes m’envoûter ?


Hunter se secoue d'un petit rire grave et tranquille.

- Tu ne l'es pas déjà ?

Il ignore pourquoi il prend plaisir à la taquiner de la sorte. Sans doute parce qu'il sait le terrain infertile. Elle lui a dit dès le premier jour : Il ne l'intéressera jamais. Le jeu est innocent tant qu'agréable. Il reprend sur un ton plus sérieux.

- Le chamanisme m'a permis d'atteindre enfin ma forme mêlée. Si elle est plus difficile à obtenir, c'est parce qu'elle exige une communion stable entre la part animale et la part humaine. La balance ne doit pencher ni d'un côté, ni de l'autre. Il faut accepter ce que l'ont est de part et d'autre, accepter leur coexistence mutuelle. Pour cela nous allons devoir les faire dialoguer entre elles par la transe.

Hunter l'observe en biais.

- Toujours partante ?

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- Je vois, ceci étant la méditation est une bonne approche.
- Pour stagner, j’imagine. Depuis quand tu la maitrises toi ?
- Relativement peu de temps compte-tenu de ma longévité. Ce fut souvent sujet de moquerie de la part de ma fratrie, et de déception de la part de mon père.
Ibakha ne dit rien mais enregistre. Il est extrêmement rare qu’il parle de lui et chaque détail est un nouveau fragment pour l’aider à comprendre son frère-loup. Faut-il qu’elle s’ennuie pour s’adonner au puzzle ? Surtout celui-là…elle n’en récupérera jamais tous les morceaux.
- C'est parce que j'ai cherché longtemps que je sais désormais ce qui peut faire obstacle.
- Intéressant CV monsieur le professeur. Tu comptes m’envoûter ?

Son rire lui parait toujours aussi étonnant. Après tout il y a encore quelques temps, elle ne l’en croyait même pas capable. Le ronchonnement semblait être sa langue maternelle.

- Tu ne l'es pas déjà ?
Elle lui dédie un sourire féroce accompagné d’une œillade indéchiffrable.  
- Tu aimerais ? Avant de se reprendre. Par la salle de bain ? Totalement.

Il n’y a que pour cela qu’elle est là. Ca et la deuxième forme de sa Louve.
Evidemment.
La compagnie d’Hunter est certes agréable, voire pas tout à fait déplaisante pour les yeux. Mais elle n’oublie pas non plus qu’il a sans doute commis des actes qui ont mérité la mort de son propre bourreau.

Tu n’en sais rien…
Il n’a pas nié…


Statu quo de ce débat intérieur qui revient régulièrement dans son esprit bien trop inoccupé.
Instinctivement, elle se referme un peu, se morigénant intérieurement de s’être laissée aller à tant de familiarité et de détente en sa présence.

- Le chamanisme m'a permis d'atteindre enfin ma forme mêlée.
- Toi chaman ? s’étonne-t-elle d’une voix redevenue tout à fait neutre.
- Si elle est plus difficile à obtenir, c'est parce qu'elle exige une communion stable entre la part animale et la part humaine. La balance ne doit pencher ni d'un côté, ni de l'autre. Il faut accepter ce que l'ont est de part et d'autre, accepter leur coexistence mutuelle.
Elle grimace instinctivement. Elle se sent bien plus en phase avec sa part Louve que sa part humaine.
- Comment ?
- Pour cela nous allons devoir les faire dialoguer entre elles par la transe.

Elle le regarde avec un scepticisme évident puis se rend compte qu’il est tout à fait sérieux et c’est maintenant une peur certaine qui l’a prend.

- Tu vas me faire entrer en transe ? Un état où je ne contrôlerai pas grand-chose ?
- Toujours partante ?
- Non, déclare-t-elle aussitôt. Non c’est impossible – trop dangereux. Sauf qu’ils seront seuls et qu’Hunter est loin d’être sans défense.
- Je veux dire…et si ça dérape, d’une façon ou d’une autre ?
La vérité c’est qu’elle ne se fait aucunement confiance, surtout si sa conscience doit être atténuée au profit de ses instincts.
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- Tu vas me faire entrer en transe ?
- Oui. Toujours partante ?
- Un état où je ne contrôlerai pas grand-chose ? Non. Non c’est impossible!


Hunter plisse les yeux. Ibakha a l'air catastrophé. Ce n'est pas la même terreur que l'autre fois mais ça s'en approche beaucoup. A-t-elle peur de ce qu'elle va découvrir sur elle-même où... De ce que lui pourrait faire alors qu'elle entreprend ce voyage spirituel ?

- Pourquoi ? demande-t-il calmement.
- Je veux dire…et si ça dérape, d’une façon ou d’une autre ?
- De quel façon crains-tu que cela ne dérape ?


Le vieux loup s'approche et lui prend doucement la main, comme on le ferait avec une enfant en proie à des terreurs nocturnes.

- La transe est une traversée spirituelle intérieure. Tu vas simplement être plongée dans un état de méditation avancée proche de l'assoupissement. La rencontre avec ta louve se fera dans ta tête. Son pouce effectue des allers-retours sur le sommet de ses métacarpes. Par ailleurs, si... Si c'est moi que tu crains, je te jure, une fois encore, que jamais je ne porterais atteinte à ton corps pendant cette expérience. Je ne suis et ne serais jamais comme mon frère...

Il soupire.

- Je sais que la dernière fois... Tu... Tu es partie sur l'idée que j'avais les même pratiques que les autres mâles de ma famille. C'est une méprise...Je ne suis pas un violeur. Il baisse le regard, qui se voile à nouveau de culpabilité. Il lui rend sa main par crainte qu'elle ne la retire elle-même. Mais je n'ai rien fait pour les arrêter...
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- Pourquoi ?
- Je veux dire…et si ça dérape, d’une façon ou d’une autre ?
- De quel façon crains-tu que cela ne dérape ?
- Je suis…cassée, Hunter.

Elle fixe un instant sa large main qui a très délicatement fait prisonnière la sienne. Elle pourrait s’y perdre…
Lentement, elle remonte vers le visage d’Hunter.

- La transe est une traversée spirituelle intérieure. Tu vas simplement être plongée dans un état de méditation avancée proche de l'assoupissement. La rencontre avec ta louve se fera dans ta tête.
- C’est bien ça qui …me fait peur.
L’aveu est douloureusement arraché mais récompensé par de lentes caresses de son pouce sur sa peau.
- Par ailleurs, si... Si c'est moi que tu crains, je te jure, une fois encore, que jamais je ne porterais atteinte à ton corps pendant cette expérience. Je ne suis et ne serais jamais comme mon frère...
Ibakha déglutit, attendant de savoir s’il allait, une bonne fois pour tout dissiper tous les doutes qui rongent encore son esprit.
- Je sais que la dernière fois... Tu... Tu es partie sur l'idée que j'avais les mêmes pratiques que les autres mâles de ma famille. C'est une méprise...Je ne suis pas un violeur.

Il se dérobe à son regard, à son toucher et par un reflexe qu’elle tentera d’expliquer plus tard, elle rattrape sa main, s’y accroche tandis que son autre paume se pose sur sa joue mal rasée pour lui faire relever la tête.

- Je sais. Je te crois. Alors de quoi tu te sens si coupable ?  
- Mais je n'ai rien fait pour les arrêter...
Ibakha l’observe un moment en silence.
- Je vois… Je crois qu’il existe beaucoup de formes de cages différentes. Toi aussi, ils t’avaient enfermé…
Elle approche son visage de sien suffisamment près pour qu’ils sont pratiquement front à front pourtant elle ne dépassera pas limite.
- J’ai confiance en toi, Hunter O’Rourke, déclare avec toute la conviction dont elle est capable, les yeux dans les siens. Lentement, elle s’éloigne de lui.
- C’est de moi dont je me méfie, avoue-t-elle à voix basse. Quelque part… à l’intérieur de ma tête, j’ai une autre Bête en moi. Colérique, orgueilleuse, violente et meurtrière. Elle aime le sang bien plus que la Louve, elle aime faire souffrir...

Elle a beau parlé de cette Bête à la troisième personne, elle sait pertinemment que c’est elle. Elle préfèrerait se voiler la face en se disant qu’elle n’a aucune souvenir de ce qu’elle fait lorsque ses pulsions se manifestent mais c’est faux. Elle a aimé ça. La satisfaction suprême d’enfoncer son couteau de cuisine dans le ventre de ce porc et de sa truie… rien ne lui a jamais donné autant de plaisir. Ils ont créé la Bête, ils ont péri par la Bête.

- Je peux pas l’a laissé sortir Hunter.  
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- C’est bien ça qui …me fait peur.

Hunter fronce les sourcils. Tout ce contrôle permanent, cette retenu du verbe, cette maitrise du geste, cette culture de la neutralité... "C'est par crainte de ce qu'elle est." Il faut qu'il la rassure sur d'autres points avant de s'attaquer au fond du problème.

- Je ne suis pas un violeur.

Il lâche sa main, mais elle la reprend, comme on s'agrippe à une bouée pour ne pas se noyer. Il ne s'y dérobe pas. Il sera cette bouée. La paume sur sa joue le surprend. Il n'est pas habitué à une démonstration d'affection aussi franche de sa part. Il ne se souvient pas qu'on l'ait touché ainsi depuis longtemps, à dire vrai. Une femme de surcroit.

- Je sais. Je te crois. Alors de quoi tu te sens si coupable ?  
- ...Mais je n'ai rien fait pour les arrêter...
- Je vois… Je crois qu’il existe beaucoup de formes de cages différentes. Toi aussi, ils t’avaient enfermé…

"A quoi ressemble la tienne, Ibakha ?"

Leur proximité est déroutante. Hunter n'ose plus bouger d'un poil. D'aussi près, il discerne davantage les subtilités de son métissage. Sa beauté s'affranchit des codes et des normes pour mieux hypnotiser. Les deux loups se frôlent presque sans jamais engendrer de collision. Pudique distance de sécurité. De respect, peut-être.
Hunter retient sa respiration, ses prunelles bleues suspendue aux siennes.

- J’ai confiance en toi, Hunter O’Rourke.

Ibakha reflue. Hunter retrouve ses poumons. Pour l'un comme pour l'autre cette débauche de contacts et de confessions ne peut être supporter trop longtemps.

-C’est de moi dont je me méfie,  Quelque part… à l’intérieur de ma tête, j’ai une autre Bête en moi. Colérique, orgueilleuse, violente et meurtrière. Elle aime le sang bien plus que la Louve, elle aime faire souffrir. Je peux pas la laisser sortir Hunter.  
- Ibakha
, amorce Hunter de son timbre rocailleux et grave. Cette Bête qui te terrifie fait partie de toi, il faut accepter son existence sans la craindre. Pendant longtemps j'ai craint le sang qui coulait dans mes veines. Naitre loup, c'est naitre sauvage, constamment affamé et asservi par ses instincts. Je pensais ne pas avoir assez d'humanité en moi pour être quelqu'un de bien...

Sa paume enserre l'épaule menue et noueuse de la jeune louve.

- La femme, la Bête, la louve... forme un tout qui se nomme Ibakha. Tu es une survivante. Il n'y a aucune honte à  vouloir survivre , quelqu'en soient les moyens. Il est temps de faire la paix avec ça... Laisse-moi t'y aider.
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Ibakha Amal
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- Je peux pas la laisser sortir, Hunter.  
- Ibakha. Cette Bête qui te terrifie fait partie de toi, il faut accepter son existence sans la craindre.
La louve se contient pour ne pas se recroqueviller et montre un visage plus composé qu’angoissé. Le port de tête haut, comme si rien ne pouvait l’atteindre Ibakha émet un rire bref.  
- Je sais… Ca ne rend pas les choses plus simples.
Mais elle ne peut pas l’accepter comme ça. S’il savait le nombre de fois où elle s’est arrêtée juste à temps…
- Pendant longtemps j'ai craint le sang qui coulait dans mes veines. Naitre loup, c'est naitre sauvage, constamment affamé et asservi par ses instincts.
Elle le fixe un long moment. Est-il vraiment capable de la comprendre ? Elle a un faible sourire.
- Compliqué, hein ? souffle-t-elle. Il n’y a qu’en louve que je me sente bien.
Moins de bruit de sa conscience, une férocité tournée vers des proies plus « acceptables »
- Je pensais ne pas avoir assez d'humanité en moi pour être quelqu'un de bien...
- Je crois… que tu l’es. Bien plus qu’un paquet d’humains que j’ai rencontré.

Une main chaude se ferme sur son épaule nue sans qu’elle ne cherche à se dérober. Depuis quand sont-ils aussi tactiles l’un avec l’autre. Non, question plus pertinente : depuis quand cela ne la dérange plus qu’il la touche de cette façon ?

- La femme, la Bête, la louve... forme un tout qui se nomme Ibakha. Tu es une survivante. Il n'y a aucune honte à vouloir survivre, quelqu'en soient les moyens. Il est temps de faire la paix avec ça... Laisse-moi t'y aider.

Il dégage à cet instant quelque chose qu’elle n’a senti que chez Colgan : une sorte d’assurance et de force inébranlable et rassurante, quelque chose de l’ordre du magnétique. Elle éprouve à nouveau le besoin de le toucher mais s’en abstient.

- Tu as tout pour être un bon Alpha si tu le voulais, tu sais ?  Elle s’approche, presque menaçante et referme les doigts sur le devant de son tee-shirt. C’est là que tu te trompes.
Dans le fond de ses yeux luit une inquiétante férocité sans que la Louve en elle y soit pour quoique ce soit.
- Je n’ai pas tué pour survivre. Je l’ai fait parce que l’idée me plaisait. Et quand j’ai plongé mon couteau dans le ventre de ce monstrueux porc, quand il a couiné et saigné… son expression se fait soudain douloureuse extatique alors qu’elle avoue dans un souffle. Si tu savais le pied que j’ai pris ce jour-là. Mais juste lui ça ne m’a pas suffi, alors j’ai fait la même chose à sa femme qui hurlait à côté de nous sans comprendre ce qui leur arrivait. Elle recule et prend une profonde inspiration comme si le fait d’en reparler lui redonnait envie. Ca…c’est ce que je suis…si… si tu penses qu’on peut faire quelque chose, je vais essayer. Juste une fois… mais je vais avoir besoin qu’on me surveille après. Au cas où.  
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Hunter O'rourke
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- Tu as tout pour être un bon Alpha si tu le voulais, tu sais ?

Peut-être.
Ce n'est pas la voie qu'il a emprunté. A présent il le sait. Sa place est autre, à définir encore.
Peut-être...
"Que je suis là pour aider des êtres tourmentés, comme toi."

Il enrobe ce poing fermé, tremblant d'inquiétude, de sa paume large et abimée par les travaux manuels. Il écoute sans ciller la terrible confession d'Ibakha. Cette vérité qu'elle tente de dissimuler par tous les moyens ne l'effraie pas. Le simple fait qu'elle soit consciente de cette part d'elle-même assoiffée de violence et qu'elle en ressente de la honte et de la crainte prouve en soi qu'elle n'est pas comme son frère. Sa cruauté n'est pas décomplexée et sans remords.

- Ca…c’est ce que je suis…
- Oui. C'est ce que tu es. Mais cela n'altère en rien ce que je pense et dis.
- Si… si tu penses qu’on peut faire quelque chose, je vais essayer. Juste une fois… mais je vais avoir besoin qu’on me surveille après. Au cas où.

Mu par une impulsion, ses doigts remontent sur l'avant-bras de la louve et son pouce trace les marques laissées par ses propres dents. Il déplie son bras le long du sien. Les deux morsures se côtoient, jumelles et dissemblables à la fois.

- Nous sommes liés par le sang, Ibakha... Déclare-t-il avec une solennité tranquille. Nous sommes des gardiens l'un pour l'autre.

"Je veillerais sur toi et te conduirais là où tu dois aller. Tes pas serons les miens durant ce voyage."


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Ibakha Amal
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- Ca…c’est ce que je suis…
- Oui. C'est ce que tu es. Mais cela n'altère en rien ce que je pense et dis.
Ibakha émet un bref ricanement.
- Alors c’est que tu es sans doute plus idiot que je le pensais. Si… si tu penses qu’on peut faire quelque chose, je vais essayer. Juste une fois… mais je vais avoir besoin qu’on me surveille après. Au cas où.

Elle observe ses doigts courir sur sa peau et tracer la cicatrice blanchie de la morsure d’Hunter. Son autre bras arbore celle, bien plus visibles de sa première morsure. Celle qui a fait d’elle une louve.
Marqué d’un côté par son Alpha et de l’autre… qu’est Hunter au juste ? Elle a depuis longtemps cessé de le voir comme une grenade dégoupillée prête à exploser à tout moment. Un frère-loup ? Un guide ? Un ami ? Elle a bien du mal à définir ce qui les unie.
Il aligne son bras, marqué de la même façon, avec le sien et la pulpe de ses doigts vient frôler l’empreinte de ses dents.

- Nous sommes liés par le sang, Ibakha...
La louve redresse la tête pour croiser son regard.
- Tu ne m’as rien promis ce jour-là.
- Nous sommes des gardiens l'un pour l'autre.

Gardien.
C’est donc ça le rôle qu’il aura dorénavant dans sa vie.
Imperceptiblement ses minces épaules se relâchent d’une partie de la tension qui l’habite, s’allègent d’un poids très lourd à porter.
Depuis son oncle, personne n’a plus jamais veillé sur elle. Elle était la geôlière de ses propres démons, s’épuisant à la tâche parce qu’elle ne faisait confiance à personne pour assumer cette responsabilité.

Mais lui c’est différent.
Différent de la confiance qu’elle accorde à Colgan ou Marisol.
Différent des autres Membres de la Meute.
A eux, elle leur confierait sa vie sans sourciller.
Hunter… elle accepte de lui confier un bout de son âme noircie.  

- Gardien…répète-t-elle en savourant les syllabes comme si la consonnance lui plaisait. Bien. C’est mieux que nounou j’imagine.
Elle prend une profonde inspiration.
- Par quoi on commence…pour ta transe ?
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Hunter O'rourke
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- Viens. Lui dit-il simplement en récupérant son matériel et en sortant de la grange.

Ils cheminent un moment sous le soleil factice dont la chaleur de plomb simule un printemps radieux. Le paysage donnent réellement l'impression qu'ils se promènent au dehors et que le Brouillard n'a jamais existé. Hunter se glisse parmi les troncs d'un minuscule bosquet d'arbres fruitiers dont les frondaisons épaisses ne laissent filtrer que quelques cerceaux de lumière.  Il fait halte sous un noisetier dont les branches éclatées émergent de terre en tentacules folles et épanouies.

Il pose une paume révérencieuse sur l'écorce de l'arbre et lève le nez vers les cimes.

- Le noisetier est un des sept arbres sacrés du bosquet des Druides. Il a de grandes vertus spirituelles. L'on raconte que s'assoupir sous un noisetier permettrait de faire des rêves clairvoyants. Je pense que c'est l'endroit idéal pour ce que nous allons faire.

Le vieux loup lui désigne un espace dans le tronc, là où naissent les nombreuses ramifications tendues vers le ciel.

- Installe-toi ici... Il lui tend galamment la main pour l'y aider. Un reflexe non calculé.

Ensuite, il trace un cercle plus large à même le sol, autour de l'arbre et de ses racines. Il y dépose à intervalles réguliers des pierres runiques en murmurant des bribes graves. S'il y a une logique à ses gestes, ses paroles demeurent opaques et incompréhensibles. Il vient prendre place dans le creux du tronc avec elle. L'espace est exigüe et leurs genoux en tailleur se touchent presque. Dans un petit pilon, Hunter écrase les feuilles de sauge à un liquide odorant qui hume fort l'alcool et le miel. Il plonge son pouce dans la pâte verdâtre obtenue.

- Laisse-toi faire, intime-t-il de son timbre profond et ronronnant.

Avec beaucoup de délicatesse, il effleure son front pour y laisser une première trace. La seconde a pour point de départ le creux de ses clavicules et dévale son plexus solaire jusqu'à la naissance de ses seins.

- Ouvre la bouche s'il-te-plait.

Son pouce s'écrase lentement sur sa langue, et termine sur la pulpe de ses lèvres, y laissant un sillon au gout amer, vaguement camphré, de la sauge, contrebalancé par la rondeur de l'hydromel. Il prend ensuite ses mains dans ses paluches immenses, paumes tournées vers le ciel.

- Tu vas faire exactement comme pour la méditation : faire le vide en toi, inspirer par le nez, expirer par la bouche, tout en te concentrant uniquement sur le parcours de ton souffle entrant et sortant de ton corps. Ne prête pas attention à ce que je vais dire, je vais reciter une prière aux esprit en vieux gaélique et demander au noisetier de nous offrir une part de sa sagesse. Tu vas te sentir partir doucement. C'est normal, ne lutte pas...Je serais avec toi tout le temps, même si tu ne me vois pas. Si jamais tu as peur, que tu souhaites arrêter pour une quelconque raison, visualise nos mains jointes. Je te ramènerais...

Ses yeux d'un bleu océan la fixent avec un calme et une prestance mystique.

- Tu es prête ?

Son assentiment obtenu, il entonne un chant étrange, lancinant et mélancolique.
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Ibakha Amal
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Ibakha se laisse guider, suivant des instructions plutôt que d’en prodiguer pour une fois. Hunter lui donne l’impression de savoir exactement ce qu’il fait, ce qui tend à la rassénérer complètement. Installée entre les embranchements noueux du noisetier, elle écoute les recommandations de celui qui se fait chaman pour elle. Tous ses gestes revêtent une solennité et un mysticisme qui gratte quelque chose de familier en elle et elle le regarde avec une fixité animale.

- Si jamais tu as peur, que tu souhaites arrêter pour une quelconque raison, visualise nos mains jointes. Je te ramènerais...
- Entendu.
A nouveau, elle le trouve exceptionnellement magnétique.
- Tu es prête ?

Elle hoche simplement la tête et de sa voix rocailleuse, il commence un chant étrange, pénétrant. Elle ferme les yeux, se concentre sur sa respiration et se glisse entre les mots étranges qu’ils prononcent.
Elle accède à un état de transe rapidement, sans effort, sans transition.

*****

Elle ouvre les yeux sur un espace vide, sans limite, jusqu’à ce qu’à ses pieds apparaisse un chemin de terre. Ibakha le suit sans même réfléchir. Petit à petit, les contours d’arbres apparaissent autour d’elle et elle se sent bien plus calme, bien plus à sa place que ne l’était avant. Bientôt, c’est une véritable forêt qui l’entoure alors qu’une lune pleine éclaire ses pas. Elle bruisse d’une vie sauvage qui fait vibrer la jeune femme comme jamais.

Nue, Ivre de liberté, Ibakha se met à courir entre les troncs, le visage barré d’une expression épanouie jusqu’à ce qu’elle débouche sur une gigantesque clairière qui forme un monticule pentu et rocheux en son centre. Deux silhouettes l’attendent là-haut, deux êtres qui l’appellent.
Ibakha commence la difficile ascension, déterminée.
Elle sait que ce qu’elle cherche est là-haut alors elle continue de grimper avec obstination.
Les rochers pointus rentrent dans sa chair, percent son derme, et elle laisse des trainées sanglantes sur son passage. Plus elle grimpe, plus l’ascension lui parait infinie pourtant, elle finit par y arriver et une main offerte en soutient apparait soudain dans son champ de vision.

Ibakha lève les yeux pour croiser ceux de Marisol qui lui sourit. Elle l’aide à se tenir debout au sommet de ce qui apparait maintenant comme une gigantesque montagne. Colgan est là lui aussi et il la regarde avec une sorte de bienveillance tranquille.
- Va, lui souffle Marisol.
Alors Ibakha obéit, le cœur battant comme si elle vivait le moment le plus important de sa vie. Elle se poste devant Colgan qui pose simplement une main sur sa tête.
- Alpha, laisse-t-elle échapper.

Le Loup lui sourit à son tour, comme il ne l’a jamais fait dans la réalité puis se décale.
Ibakha trouve alors des yeux dorés, étirés comme les siens sur la tête d’une louve au pelage clair.
Elle. Louve.
Emue comme elle l’a rarement été, Ibakha tombe à genoux et enserre l’animal qui se laisse faire, entre ses bras.
A nouveau tout disparait sauf la Louve qui s’extirpe de son étreinte pour prendre un autre chemin, bien plus noir. Ibakha suit l’animal sans méfiance mais tombe soudain dans une sorte de trou si noir qu’on n’y distingue absolument rien.

*****

La lumière revient d’un seul coup et elle se trouve devant un homme de dos, attaché et qui la supplie de le frapper encore. Elle ressert ses doigts et remarque qu’elle a un fouet entre les mains. Tournant la tête, elle tombe nez à nez avec son reflet. Elle porte l’un de ses ensembles de domina et un étrange masque qui pourrait lui ressembler si elle était une poupée. Vide. Sans expression.
Où est la Louve ?
- Maitresse…s’il vous plait…couine son client.
- Ferme-là !

La voix d’Ibakha claque bien plus fort que celle de son fouet alors qu’elle s’approche du miroir qui a l’air sans tain. Son reflet la fascine, surtout ce masque étrange qui la colle comme une seconde peau.
Elle entend alors le hurlement de la Louve.
Tout près…alors pourquoi ne l’a voit-elle pas ?
C’est ce masque ! C’est forcément lui !!
Ses doigts palpent la matière dure qui lui recouvre le visage et elle cherche à le retirer. Mais le masque est comme ventousé à sa peau et elle panique à mesure que ses efforts se font infructueux. Elle force, tire même si c’est excessivement douloureux. Serrant les dents, elle poursuit obstinément son effort jusqu’à ce que l’ornement tombe entre ses mains.

Essoufflée, elle redresse aussitôt la tête pour évaluer les dégâts qu’il a laissé derrière lui.
Mais tout a disparu autour d’elle : le miroir, le masque, la pièce, le client, même son costume, la laissant à nouveau nue. La louve lui fait face à quelques centimètres comme si elle se tenait là depuis le début mais que le masque l’empêchait de la voir.
- J’ai cru t’avoir perdue…
Ibakha se rend compte qu’elle pleure. L’idée de perdre cet animal lui a été insupportable. La Louve s’approche et se laisse câliner par l’humaine qui se sent à nouveau redevenue elle-même.

*****

Bien vite, la Louve se dérobe et l’invite à la suivre. Plus méfiante cette fois, Ibakha fait attention où elle met les pied. Elle est si concentrée sur sa tâche qu’elle remarque à peine qu’elle vient de pénétrer dans une forêt de ronce, épaisses et pointues. Heureusement, elles ne poussent pas sur le chemin, repoussées par une force étrange… la Louve peut-être qui lui sert d’éclaireur. Ibakha frissonne, mal à l’aise dans cet endroit, elle entend des bruits qui lui déplaisent fortement : le bruit des alarmes qui rythmaient sa vie à la prison, celui du cliquetis des menottes, des rires des autres jeune filles incarcérées.
Ibakha garde les yeux obstinément sur le chemin et enfin, elle aperçoit une lueur au loin. Une odeur familière chatouille ses narines. L’odeur des cheveux, du bétail, du lait de jument…chez elle.

Ibakha accélère et elle et la Louve courent de concert vers les steppes qui l’attendent. Une petite fille monte à cheval, la chevelure insolemment clair, heureuse, libre, elle-aussi. Elle lui tend la main, l’invective à la rejoindre et au moment où elle allait frôler du pied l’herbe haute, on la fauche brutalement et en pleine course. Elle atterrit douloureusement dans les ronces qui s’enfoncent dans sa chair. Lentement, elle essaie de se redresser mais une silhouette la plaque au sol et la domine complètement accroupie au-dessus d’elle.
- Tu allais m’oublier hein ? croasse la chose. On dirait…une adolescente, crasseuse comme si elle avait été baignée dans une sorte de goudron sanglant. Elle a les membres et le visage déformés, presque simiesque. Pourtant, Ibakha reconnait ses yeux.
Se sont les siens.
- Tu pourras pas m’échapper. Jamais.
La jeune femme essaie de se débattre pour s'extraire de la poigne de la chose monstrueuse mais celle-ci ricane et un énorme couteau apparait dans sa main. Vivement, elle le plante dans le ventre d’Ibakha qui émet un hoquet douloureux. Du regard, elle implore la Louve de l’aider mais l’animal reste assise sur le chemin et attend.

Seule.
Elle est seule.


Le Monstre l'attrape violemment par les cheveux et la traine sur le sol. Ibakha hurle de douleur en sentant les ronces se planter dans sa chair comme des dizaines de lames.
- S’il te plait…laisse-moi !
Mais la créature est sourde à ses appels et inexorablement, elle la traine vers une haute maison bourgeoise, envahie elle aussi par les ronces.
Une maison qu’elle reconnaitrait n’importe où.
Le siège de tous ses cauchemars.
- Non…non… pitié non… ne me ramène pas là-bas…je t’en prie…
- Si. Tu le dois. Il t’attend… Il est temps. C'est ce que tu es.
Plus elle approche de cette maison, plus elle se recouvre, elle aussi, de cette matière visqueuse. Ses jambes, sa taille, son ventre, sa poitrine…elle doit faire quelque chose…maintenant !

Elle veut sortir ! Mais comment ?

- Si jamais tu as peur, que tu souhaites arrêter pour une quelconque raison, visualise nos mains jointes. Je te ramènerais...

Hunter…
Son Gardien…

Il a dit qu’il l’aidera à sortir.
Elle veut sortir !!!
Alors que le goudron écarlate monte sur son menton, elle repense à ses mains, chaudes, forgées par le travail manuel. Et puis la sienne qui repose dessus, nichée, en sécurité.
Trop tard, la substance vient d’atteindre sa bouche, son nez.
Elle ne respire plus…

*****

Tout se déroule ensuite en même temps.
Elle ouvre les yeux, n’arrive plus à savoir si elle fait face à la réalité ou non. Elle recule, se faufile maladroitement entre les troncs alors qu’elle essaie désespérément de s’essuyer le visage en prenant des goulées d’air comme si elle était en train de se noyer. Elle a la nausée, le corps tremblant.
Son dos percute un rocher et elle s’y recroqueville comme une boule.
Elle ne se rend pas compte qu’elle a hurlé, elle ne se rend pas compte qu’elle pleure et prononce des phrases sans suite.

- Je veux pas revoir ça…Je peux pas…pas toute seule… je vais devenir un monstre moi aussi… me laisser pas devenir un monstre…une louve…juste une louve…

Elle ne sait même pas à qui elle s’adresse.
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Hunter O'rourke
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L'immersion dans son propre esprit est un exercice éprouvant, tant pour celui qui guide que celui qui s'y confronte. Hunter est en proie à une concentration extrême qui l'épuise, attentif au moindre signe, à la moindre dysharmonie, au moindre soubresaut.
Une longue heure s'écoule sans que rien de notable ne se passe. Cheminer en soi nécessite de dépasser plusieurs strates de conception de son identité. Le voyage est long, prend du temps et se fait rarement en une seule fois.

Soudain le pouls d'Ibakha s'accélère, il le voit pulser au creux de ses poignets, ses veines se gonflant à un rythme effréné. Sa poitrine tressauter sous le tissus léger de son débardeur, agressée par les ruades d'un coeur qui pompe furieusement. S'ensuit des crispations, froissant son visage lisse et parfait. Elle tremble, et la sueur ne tarde pas à  empoisser son front.

En cet instant, Hunter sait son rôle crucial.

Certains esprits tortueux peuvent égarer et perdre celui qui s'y promène. Ibakha est faite de ce genre de labyrinthes. Il est là pour lui rappeler qu'elle peut toujours rebrousser chemin. Avec douceur ses pouces effectuent des cercles concentriques dans le creux de ses paumes, pour lui signifier sa présence, et l'orée de sa propre conscience.
La jeune louve arbore à présent des expression douloureuse, inquiétante et s'agite dans sa transe. Elle gémit et sert les mains d'Hunter au point d'écorcher sa peau avec ses ongles. Sa souffrance est un écho terrible à celle qu'il a lui même endurée, un miroir qui avive une empathie naturelle qu'il a étouffé des années durant.

- Ibakha... Reviens... Tu n'es pas perdue. Je suis là. Reviens-moi...Ne t'entête pas...

Il répète cette litanie, répète son nom, encore et encore, et ponctue, toujours, de cet injonction à le retrouver, dans cette réalité.

- Je suis ton Gardien... Reviens moi....

Brusquement la jeune femme ouvre les yeux en grand. Son hurlement de terreur déchire le silence paisible du bosquet. Elle le lâche et suffoque, comme l'enfant recevant sa première goulée brulante d'oxygène.

- Ibakah ! Tout va bien... Tout va bien.. tente-t-il de lui dire en essayant de lui attraper les épaules.

Mais elle ne l'écoute pas, le repousse en proie à une panique aveugle. Elle se traine or de l'écrin de branches du noisetier, haletante, en pleurs. Hunter s'empresse de la rejoindre et de la ramasser dans ses bras puissants. Rassurants espère-t-il. Il la sert étroitement contre lui.

- C'est fini... C'est fini... Tu es revenue...
Il la berce pour la tranquilliser.
- Je veux pas revoir ça…Je peux pas…pas toute seule…
- Tu n'iras plus toute seule. C'est promis. Je viendrais... avec toi... Je viendrais...

Il caresse sa chevelure cendrée en bataille.
- Je vais devenir un monstre moi aussi…
- Non. Jamais... tu ne seras pas un monstre... J'y veillerais...


Une émotion terrible étreint le Vieux Loup. Ses peurs sont si semblables aux siennes.

- ....Me laisser pas devenir un monstre…une louve…juste une louve…
- Ca n'arrivera pas.... Une louve... C'est ce que tu es.


Il embrasse sa tempe pour appuyer cette vérité.
"Tu ne te perdras pas, Ibakha.
Je ne te perdrais pas.
Je t'en fais le serment."
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- C'est fini... C'est fini... Tu es revenue...

Elle se trouve dans les bras de quelqu’un. On la sert contre un autre corps, chaud, masculin.
Une partie, bien faible, de son cerveau se demande comment elle se retrouve dans cette situation. L’autre, encore baignée d’une peur viscérale s’accroche à cette bouée vivante, tangible et rassurante avec force.
On la berce même, comme une enfant…l’action est si lénifiante qu’elle se calme suffisamment pour parler.

- Je veux pas revoir ça…Je peux pas…pas toute seule…
- Tu n'iras plus toute seule. C'est promis. Je viendrais... avec toi... Je viendrais...
Les mots sont apaisants, même si elle ne les croit qu’à moitié. Là d’où vient sa terreur, personne ne peux l’accompagner.
- Je vais devenir un monstre moi aussi…
- Non. Jamais... tu ne seras pas un monstre... J'y veillerais...
Comment peut-il le savoir ? Instinctivement, elle vient enfuir son visage humide contre ce cou, respirer la peau gorgée de soleil et l’odeur de Loup. A ce moment précis, elle n’a pas connu parfum plus sécurisant que celui-là.
- ....Me laisser pas devenir un monstre…une louve…juste une louve…
- Ca n'arrivera pas.... Une louve... C'est ce que tu es.
- Oui… c’est tout ce que je suis hein ?

On embrasse sa tempe et comme si l’action avait quelques pouvoirs magiques, tout son corps se détend et s’alanguie. Sa respiration et son rythme cardiaque reprennent un tempo plus normal, son étreinte se desserre très légèrement.  
Ca n’est qu’à ce moment qu’elle recouvre suffisamment de lucidité pour reconnaitre celui contre qui elle s’est lové sans aucune pudeur.

Son Gardien.
Hunter.

Lentement, elle redresse la tête pour trouver son regard et presque naturellement, sa paume se calle contre sa joue, plus franchement cette fois, tout comme les caresses de son pouce.
- J’ai pas réussi… c'était...trop, se force-t-elle à expliquer. Merci…d’avoir été là… d’avoir tenu ta promesse.

Elle devrait reculer, s’échapper de ses bras, remettre une distance physique le temps de se reconstruire une nouvelle barricade mentale…mais elle n’en a pas envie, pas la force. Elle est épuisée. Trop pudique pour demander, elle fait.
Ibakha revient se blottir contre lui, profitant honteusement du confort qu’il lui apporte. Elle calque son souffle sur le sien et sans trop savoir comment, elle s’endort dans ses bras.  
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Hunter O'rourke
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Le corps secoué de sanglots et d'angoisse d'Ibakha finit par s'apaiser. Elle se détend et coule progressivement dans les bras d'Hunter. Lorsqu'elle s'écarte, il n'est plus question de pudeur ou de crainte de la proximité. L'épreuve a été difficile et sa dureté les a tous deux rapprochés sans manières, ni explications superflus.

Ils sont là.
Juste l'un pour l'autre.
En cet instant, c'est tout ce qui importe.

- J’ai pas réussi… c'était...trop...

Hunter pose un index sur sa bouche.

- C'est un combat qui ne se mène pas en une seule fois. Tu reviendras la prochaine fois, mieux armée que la précédente.
- Merci…d’avoir été là… d’avoir tenu ta promesse.
- Je ne donne pas ma parole à la légère, tu sais... ?
déclare-t-il avec un fin sourire.

Contre toute attente, plutôt que de s'éloigner, la jeune louve vient se presser contre lui pour mieux s'abandonner au sommeil. D'abord surpris par son geste, il reste là à la contempler une poignée de seconde, dégageant son visage si particulier de quelques mèches de cheveux éparses.
Elle a l'air si fragile quand elle dort...
Lui aussi est fatigué.
Cette heure et demie passée à se concentrer l'ont littéralement drainé. Il trouve néanmoins la force de soulever Ibakha et de se trainer avec elle vers le tronc creux du noisetier. Un bras protecteur entourant les épaules de la louve calée sur son buste, l'autre en oreiller sous sa nuque, il s'endort à son tour sans résistance.

Le noisetier et sa sagesse se porte garant de leurs rêves.
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